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1789

Si une tempête, ou un besoin urgent de prompt secours en vivres ou autrement, forçait un plus grand nombre de vaisseaux de guerre d'une des puissances contractantes à se réfugier et à aborder dans les ports de l'autre puissance, le commandant en chef donnera nonseulement avis immédiat au gouvernement du motif indispensable de son arrivée avec un plus grand nombre de vaisseaux ; mais encore dès qu'il sera en état de reprendre la mer, après s'être radoubé ou pourvu du nécessaire, il devra repartir du port de refuge, ou n'y laisser que trois vaisseaux. Par l'observation du bon ordre, et par le maintien de la juste autorité des gouvernements, que les puissances contractantes ont également en vue dans la confirmation actuelle de leurs anciennes conventions amicales, S. M. le roi de Danemarck et de Norvége, etc., etc., et la sérénissime république de Gênes entendent très-spécialement l'extradition réciproque de malfaiteurs, déserteurs et transfuges qui, ou pour se soustraire à la justice, ou pour abandonner le service d'un des états contractants, auraient passé dans les territoires ou sur les vaisseaux et bâtiments, tant de guerre que de commerce, de l'autre puissance; en conséquence de quoi les deux hautes puissances contractantes ont stipulé entre elles que si quelque malfaiteur ou criminel, quelque esclave et forçat (buonalvoglia), ou quelque déserteur des troupes et milices du pays et du port des puissances contractantes où se trouverait un ou plusieurs vaisseaux de guerre de l'autre puissance, s'était réfugié à bord d'un de ces vaisseaux de guerre, il sera rendu sans difficulté ni délai, sur la réclamation du gouvernement respectif du port où le vaisseau se trouve, en faisant passer un office en forme au commandant de ces vaisseaux. Cependant le gouvernement ne pourra jamais prétendre à aucun droit de recherche, ni commettre acte quelconque de visite sur lesdits vaisseaux de guerre; et dans le cas où le transfuge réclamé ne se trouverait pas à bord du vaisseau de guerre où on l'avait soupçonné de s'être retiré, l'assurance du commandant sur sa parole d'officier et d'homme d'honneur doit suffire à détromper le gouvernement du port.

En vertu du même accord et par l'exacte réciprocité que se proposent et se promettent les deux puissances contractantes, les prisonniers, soldats, marins, ou autres individus d'un vaisseau de guerre d'une des hautes puissances contractantes, qui auraient fui à terre, et se tiendraient cachés dans les ports et territoires respectifs de l'autre puissance, seront rendus et restitués au vaisseau de guerre, sur la réquisition du commandant, avec la même promptitude; à quoi le gouvernement employera de bonne foi tous les moyens.

Si malgré la sérieuse résolution des hautes parties contractantes

à cet égard, les commandants des vaisseaux de guerre, d'une part, 4789 ou les officiers et employés de justice de l'autre, donnaient lieu à quelque remarque sur leur conduite en ce chef, les deux gouvernements en communiqueront entre eux, pour convenir des mesures propres à assurer l'exécution exacte de cet accord.

ART. IV. L'une des deux puissances contractantes venant à avoir la guerre avec une puissance tierce, elle n'en donnera pas moins de son côté des preuves de la continuation de son amitié à l'autre, sans exiger d'elle aucune prédilection qui soit préjudiciable aux intérêts propres et au repos de celle qui est restée neutre, et qui jouira, particulièrement de la part de celle qui est devenue belligérante, d'une reconnaissance pleine et entière de tous les droits que lui assure la neutralité, moyennant qu'elle en observe aussi strictement les obligations. En conséquence de quoi ont été stipulés en outre les articles suivants.

ART. V. Il sera permis aux sujets de l'une des deux parties contractantes qui sera neutre, de continuer leur commerce avec les ennemis de l'autre. Ses vaisseaux pourront naviguer librement de port à port, et sur les côtes des nations en guerre, et leur porter sans empêchements toutes sortes de marchandises, à l'exception de celles qui sont communément appelées de contrebande militaire, dont l'énumération détaillée se trouve ci-dessous à l'article VI, et à l'exception que la ville, le port, l'endroit où les sujets de la puissance contractante qui est neutre veulent introduire leurs marchandises, fût assiégé ou bloqué par l'autre puissance.

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Les vaisseaux libres et neutres rendront libres toutes les marchandises à leur bord, encore que les chargements entiers ou une partie d'iceux appartinssent à l'ennemi de la puissance contractante, devenue belligérante, à l'exception cependant des marchandises de contrebande militaire, comme il a été dit ci-dessus. De la même manière il a été convenu que cette liberté que le pavillon neutre communique aux marchandises, doit aussi s'étendre aux personnes embarquées dans un vaisseau neutre et libre, de façon qu'elles ne soient point tirées du vaisseau neutre, quoiqu'elles soient de la nation ennemie de l'une des deux parties contractantes qui est belligérante, à moins que ce ne fussent des gens de guerre actuellement au service desdits ennemis.

ART. VI. Sous la dénomination de marchandises de contrebande militaire sont comprises seulement les armes à feu et autres instruments hostiles, avec leurs assortiments, comme canons, mousquets, mortiers, pétards, bombes, grenades, cercles poissés, affûts, fourchettes, bandoulières, salpêtre, poudre, mèches, balles, piques, épées,

1789 morions, casques, cuirasses, hallebardes, lances, javelines, chevaux, selles de cheval, fourreaux de pistolets, baudriers, et en général tous autres assortiments servant à l'usage de la guerre, lesquels effets et marchandises ne seront pourtant pas réputés de contrebande militaire, si ce n'est dans le cas qu'on les porte dans quelque pays ennemi, et pas autrement. Les marchandises de contrebande militaire seront confisquées, mais le bâtiment qui les porte restera libre avec toutes autres marchandises de sa cargaison, et il ne sera permis d'exiger pour ce sujet du capitaine, ou patron du navire, aucune amende pécuniaire, ni même aucuns frais, sous prétexte de visite ou de procédures faites, ou sous quelque autre titre que ce puisse être. ART. VII. Dans ce genre de marchandises de contrebande militaire on ne comprend pas les froments, blés et autres grains de quelque espèce et qualité qu'ils soient; beaucoup moins encore les légumes, huiles, vins, sels, poissons secs et salés, viandes salées et fumées, et généralement tout ce qui concerne les aliments et la sustentation de la vie. On n'y comprendra pas non plus le goudron, ou poix-résine, les voiles et toiles d'Olonne, chanvres et cordages, ni le bois de construction et de charpente, ni le fer, l'acier, le laiton et tout ce qui peut être fabriqué de ces métaux, lesquels sont tous des marchandises permises, qui pourront toujours se vendre et transporter comme les autres marchandises, même aux lieux tenus et occupés par un ennemi d'une des deux puissances contractantes, pourvu que ces lieux ne soient pas assiégés ou bloqués.

ART. VIII. Pour lever tout équivoque et incertitude sur ce qu'on nomme un lieu assiégé et bloqué, il a été arrêté, que nul port maritime ne doit être réputé actuellement et effectivement assiégé ou bloqué, s'il n'est tellement fermé du côté de la mer par deux vaisseaux pour le moins, ou du côté de terre par une batterie de canons, que son entrée ne peut être hasardée sans s'exposer au danger évident d'une décharge de canons.

ART. IX. Pour prévenir toute sorte d'interprétations douteuses des deux côtés, il a été stipulé qu'en cas de guerre inopinée et non prévue, s'il arrivait que les sujets de l'une ou de l'autre puissance, par ignorance de la rupture, eussent embarqué leurs marchandises dans un vaisseau ennemi, elles ne seront pourtant pas sujettes à aucune confiscation, mais lesdites marchandises leur seront au contraire fidèlement restituées, sans en payer aucun impôt ni droit. Ce qui vient d'être stipulé ci-dessus doit même être entendu et s'entend des bâtiments et biens des propres sujets des deux parties contractantes, si l'une d'elle venait à faire la guerre à l'autre, aussi bien que des marchandises embarquées sur des navires d'une puissance tierce,

devenue ennemie d'une des mêmes hautes puissances contractantes. 1789 Pour encore mieux lever à cet égard tout sujet possible de dispute, on est convenu de fixer certains espaces et intervalles de temps, suivant la distance des lieux, savoir six mois après la déclaration, ou la première opération de la guerre, si la déclaration n'a pas précédé la rupture: savoir six mois pour les marchandises embarquées dans la mer Baltique et dans celle du Nord, depuis le cap de Norvége jusqu'à l'extrémité du canal d'un côté, et de l'autre part dans quelque port que ce soit de la Méditerranée. De même six mois pour les marchandises qui viennent d'en delà du détroit de Gibraltar jusqu'à la ligne équinoxiale, et le terme d'un an pour toutes celles qui ont été embarquées dans ce même espace de temps au delà de ladite ligne en quelque port du monde que ce puisse être. Le tout afin que les sujets des hautes parties contractantes aient un temps suffisant pour se précautionner contre toute sorte d'inconvénients; mais les marchandises qui après l'expiration des termes ainsi fixés seront trouvées à bord des vaisseaux ennemis, ou sur des navires d'une puissance tierce qui serait devenue ennemie d'une des hautes parties contractantes, seront censées appartenir aux sujets ennemis.

ART. X. Dans la même vue de prévenir tout désordre et tout malentendu de part et d'autre, il a été convenu et stipulé que le cas arrivant qu'une des deux parties contractantes se trouve engagée en guerre, les vaisseaux et bâtiments appartenants aux sujets de l'autre. partie seront munis nécessairement de lettres de mer, qui contiendront le nom, la propriété et la portée du vaisseau, ainsi que le nom et le lieu du domicile du capitaine ou maître du vaisseau, le tout conformément au modèle qui sera annexé au présent traité, de manière qu'il puisse conster clairement, et sans aucune équivoque, que le bâtiment appartient aux sujets de la puissance qui est restée

neutre.

Ces lettres de mer seront renouvelées chaque année dans tous les cas où le vaisseau n'employera pas plus d'une année dans les voyages entrepris, ou ne restera pas au delà dudit terme d'une année dans la même mer. En outre il a été stipulé que ces vaisseaux ou bâtiments des sujets de la puissance restée neutre porteront encore des certificats qui contiendront l'énumération des genres et espèces des marchandises qui composent les cargaisons, où sera expliqué le lieu d'où le vaisseau est parti et celui de sa destination, ainsi qu'on le trouve tracé dans le second modèle annexé à la suite du présent traité, afin de vérifier et de distinguer les marchandises prohibées d'avec celles qui ne le sont pas. Ces derniers certificats sont expédiés par les magistrats et officiers municipaux du lieu d'où

1789 le vaisseau partira en charge, conformément aux us et coutumes de chaque place.

ART. XI. Si un vaisseau de guerre ou un armateur d'une des parties contractantes qui est devenue belligérante, vient à rencontrer en mer un bâtiment marchand de l'autre puissance qui est restée neutre, les premiers n'approcheront du dernier qu'à la portée du canon, et enverront à son bord une chaloupe dans laquelle, sans compter les rameurs ou matelots qui la gouvernent, il n'y aura que trois personnes, qui pourront monter dans le susdit bâtiment neutre marchand, pour en examiner les papiers de mer, et les ayant trouvés en règle, ils le laisseront continuer sa route sans lui causer aucun délai, embarras, ni empêchement quelconque; au contraire, ils joindront aux bons offices d'amitié tous les secours dont le bâtiment neutre marchand pourrait avoir besoin, et s'ils font la même route, les vaisseaux de guerre seront obligés de protéger et de défendre le bâtiment marchand contre toute attaque et toute insulte.

Pour assurer l'observation exacte de ce qui vient d'être stipulé, les parties contractantes, dans le cas qu'elles entrassent dans quelque guerre, ordonneront expressément aux commandants de leurs vaisseaux de guerre et à tous leurs armateurs, d'en agir vis-à-vis des bâtiments marchands de l'autre nation de manière que ces derniers n'aient aucun sujet de plainte à quelque égard que ce soit; de les traiter en amis, et d'empêcher qu'ils ne soient molestés, ni forcés à faire de fausses déclarations sur la quantité ou qualité des marchandises de leur cargaison; sur le nombre et la condition de leurs équipages, après avoir légitimé le tout par les certificats convenus cidessus et les rôles des équipages.

Si malgré des ordres aussi précis, quelqu'un en usait autrement, le capitaine du vaisseau de guerre, ou l'armateur qui aura ordonné, commis ou toléré une pareille contravention, sera puni de la manière suivante :

Le vaisseau pris, sur lequel le capteur a commis quelque acte de violence, sera d'abord restitué avec toute sa cargaison, même avec les marchandises de contrebande militaire qui pourraient s'y être trouvées, et sur lesquelles le capteur perdra son droit en pareil cas.

Le capitaine du vaisseau de guerre sera privé de sa charge, et l'on ôtera sa commission à l'armateur, sans qu'il puisse espérer d'armer de nouveau pendant tout le temps que durera la guerre. En outre l'armateur, comme le capitaine du vaisseau de guerre, payeront une amende de deux mille écus, et donneront satisfaction de tout le dommage qu'ils auront causé au bâtiment neutre ; de plus les

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