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faits graves, différens par leur nature, par le lieu et le temps dans lesquels ils se sont passés, et parmi lesquels plusieurs, qui tendent à constater l'adultère, ne se rapportent, dans la première requête, qu'à l'expression générale de la mauvaise conduite du mari. Certes, il est évident que ces faits postérieurs sont nouveaux, et ne se trouvent pas même énoncés sommairement dans l'acte de demande. La dame Dodon est donc non recevable à en proposer la preuve et à les invoquer pour le succès de sa demande.

Pour combattre ce système, le défenseur de la dame Dodon répondait : Lorsqu'il s'agit de divorce, la loi exige que les faits soient détaillés dans la requête; mais en matière de séparation de corps elle ne veut qu'une énonciation sommaire, Pourquoi cette différence ? C'est parce que dans le premier cas la requête forme la demande elle-même, tandis que dans le second elle n'a d'autre but que de parvenir à la réconciliation des époux par l'intermédiaire du magistrat. Qu'on ne dise donc plus que le détail des faits est nécessaire pour opérer un rapprochement. La loi ne décide-t-elle pas le contraire? et au moment où les époux comparaissent devant le président du tribunal, n'exposent-ils pas leurs griefs et leurs excuses? n'obtiennent-ils pas, ainsi que leur médiateur, tous les renseignemens qu'ils peuvent désirer? - Mais lorsque le préliminaire a été inutilement tenté, tout rentre dans l'ordre ordinaire la loi trace alors d'une manière certaine la marche que l'on doit suivre. Les demandes en séparation, dit l'article 507 du Code civil, doivent être instruites et jugées comme toute action civile, et il suffit, d'après l'article 875 du Code de procédure, d'énoncer sommairement les faits dans l'acte introductif de l'instance; mais comme l'enquête est de l'essence de pareilles demandes, puisqu'elle conduit à la preuve des faits qui leur servent de fondement, on peut, suivant la disposition de l'art. 252 du même Code, détailler par un simple acte de conclusions les faits dont la preuve est offerte; cette mesure est même nécessaire pour interroger chaque témoin

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sur le fait qu'il doit connaître et sur les circonstances qui peuvent lui donner un caractère de gravité. Si on applique ces principes à l'espèce, on voit que, dans le premier acte, la dame Dodon indique sommairement les mauvais traitemens dont elle se plaint, et que dans le second elle rapporte toutes les circonstances qui peuvent aggraver l'injure ou le sévice; dans le premier, elle allègue l'inconduite de son mari, et dans le second elle la précise par des faits détaillés avec soin : la dame Dodon a donc usé de la faculté que lui accordaient les textes précités, en se conformant d'ailleurs à leurs dispositions.

Le 28 juillet 1809, ARRÊT de la Cour d'appel de Paris, rendu en audience solennelle, MM. Lamy et Parquin avocats, par lequel :

« LA COUR, -Faisant droit sur l'appel interjeté par Dodon du jugement rendu au tribunal civil du département de la Seine, le 5 avril dernier, et adoptant les motifs des premiers juges, A MIS et MET l'appellation au néant, — Ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet, etc. »

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COUR D'APPEL DE TURIN.

-

Les règles concernant les transactions s'appliquent-elles aux jugemens d'expédient consentis entre les parties litigantes? (Rés. aff.)

Et particulièrement, le jugement d'expédient passé par le tuteur d'un mineur, avec l'autorisation du conseil de famille, est-il nul pour n'avoir pas été préalablement soumis à l'avis de trois jurisconsultes désignés à cet effet par le procureur du Roi ? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 467. La connaissance de cette nullité appartient-elle au tribunal qui a rendu le jugement ? (Rés. aff.)

LES DAMES POCCHETINI, C. LES MINEURS ROSSO.

Les dames Pocchetini étaient en procès devant le tribunal de première instance de Turin avec les mineurs Rosso. Le

4 octobre 1806, il fut mis fin à la contestation qui divisait les parties, par un jugement d'expédient rendu sur les conclusions du procureur du Roi, et consenti par la dame Rosso, comme tutrice de ses enfans, dûment autorisée par le conseil de famille. Mais lorsqu'il s'agit de le mettre à exécution, cette dernière s'y opposa, et en demanda lajnallité devant le même tribunal, sur le fondement qu'il n'avait pas été précédé de l'avis de trois jurisconsultes désignés par le procureur du Roi, aux termes de l'art. 467 du Code civil. Les dames Pocchetini soutinrent la validité de la transaction judiciaire, et prétendirent que le jugement qui l'admettait ne pouvait être attaqué que par la voie de l'appel. Néanmoins, le tribunal civil de Turin admit l'opposition, par jugement du 50 juillet 1808, et annula la transaction conte nue en celui du 4 octobre 1806, par les motifs que les jugemens d'expédient, n'étant que des jug emens conventionnels, auxquels la justice ne concourt que pour leur donner force d'exécution, participent de tous les vices des conventions auxquelles ils se réfèrent, en sorte qu'ils sont affectés des nullités qui se rencontrent dans ces conventions, et que celui dont il s'agit était évidemment nul, pour n'avoir pas été assujetti aux formalités prescrites par l'art. 467 du Code. civil; que ce jugement, quoique qualifié tel dans son espèce, n'avait cependant pas les caractères auxquels on doit reconnaître une décision judiciaire, et ne devait pas être mis au rang des actes appartenans à la juridiction contentieuse; qu'il ne contenait réellement qu'une simple approbation ayant pour unique but d'assurer les effets du consentement des parties entre lesquelles il était convenu; que dès lors il était mal à propos soutenu qu'il ne pouvait être attaqué que par la voie de l'appel, etc,

Les sœurs Pocchetini appelèrent de cette décision, et elles continuèrent à soutenir que les premiers juges n'avaient pas eu le droit d'annuler le jugement du 4 octobre 1806,

Le

29 juillet 1809, ARRÊT de la Cour d'appel de Turin, par lequel: Tome X.

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« LA COUR, -Sur les conclusions de M. Rosano, jugeauditeur, pour le procureur-général; - Adoptant, sur la nullité de l'expédient volontaire du 4 octobre 1806, et sur la compétence des premiers juges à la prononcer, les motifs développés dans le jugement dont est appel; Considérant, au surplus, qu'aux termes de l'art. 467 du Code civil, les transactions pour l'intérêt des mineurs n'étant valables qu'autant qu'elles auraient été homologuées par le tribunal de première instance, il s'ensuit qu'en l'espèce l'homologation n'aurait tenu lieu que d'une des formalités requises pour valider la transaction, toutes les fois qu'elle eût été révêtue des autres prescrites par le même Code; Que, par conséquent, l'expédient volontaire ainsi homologué n'ayant valu aux appelantes que comme titre exécutoire par-devant le tribunal de première instance, l'intimée aurait pu y former opposition, aux termes de droit, et les premiers juges statuer en premier ressort sur sa nullité, ainsi qu'ils ont fait par le jugement dont est appel; Qu'en vain les appelantes auraient, à l'appui de leur système, invoqué les articles 448 du Code civil, et 889 du Code judiciaire : - Car, dans le premier de ces articles, s'agissant de l'exclusion ou de la destitution du tuteur à être prononcée par le conseil de famille, contradictoirement avec le même tuteur, il est evident qu'en cas de réclamation de la part de celui-ci, l'homologation de la délibération devant être poursuivie pardevant le tribunal en présence des parties, elle donnerait lieu à une véritable discussion contentieuse, dont la décision, vidant le premier degré de juridiction, serait par conséquent sujette à l'appel; — Qu'à l'égard de l'art. 889 du Code judiciaire', y étant littéralement parlé des jugemens rendus sur les délibérations des conseils de famille, cette disposition doit se rapporter naturellement à toutes les délibérations de même nature que celles dont il est parlé à l'art. 448 susénoncé et aux autres précédens et suivans du même titre, et être entendue pour les cas où, par une suite des réclamations élevées de la part des intéressés, l'affaire devient con

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tentieuse,

MET l'appellation au néant; ordonne que ce dont est appel sortira sa pleine et entière exécution. »

COUR D'APPEL DE BRUXELLES.

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La disposition par laquelle le testateur, après avoir fait divers legs particuliers, déclare instituer UN TEL son unique héritier DANS LE RESTANT DE SES BIENS DROITS ET ACTIONS, peut-elle étre considérée comme un legs universel, et doit-on lui en faire produire les effets? (Rés. nég.) Cod. civ., art. 1003.

DANS CE CAS, les legs particuliers déclaré's nuls doivent-ils profiter aux héritiers naturels, et non à l'héritier testamentaire? (Rés, aff.)

LA DAME VANDERBRECKEM, C. LES HÉRITIERS JORIS.

Ces questions eussent été résolues différemment sous l'empire des lois romaines, parce que, d'après ces lois, nul n'était censé mourir partim testatus et partim intestatus ; mais il n'en était point ainsi dans le droit coutumier français, dont les dispositions à cet égard ont été adoptées par notre Code civil. C'est pourquoi, lorsqu'un testateur, après avoir disposé d'une portion de ses biens à titre particulier, institue un héritier dans l'universalité des biens qui lui restent, celui-ci ne recueille point les objets compris dans les legs devenus caducs, mais ils appartiennent à l'héritier naturel. On ne peut attribuer à une pareille institution d'héritier le caractère du legs universel tel qu'il est défini par l'art. 1003 du Code civil, ni lui en faire produire les effets. Tel était le système de défense qu'opposaient, dans l'espèce dont nous allons rendre compte, les héritiers naturels à l'héritière instituée, et qui a été adopté par la Cour d'appel de Bruxelles. Mais ce système se trouve contrarié par un arrêt de la Cour de cassation, section des

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