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cassation elle-même (1); que le Code civil n'avait rien ajouté à la loi de brumaire, si ce n'est la faculté de conserver les intérêts par de nouvelles inscriptions, ce qui, à défaut d'inscription, excluait toute idée d'une collocation plus étendue que celle de deux années; que le Code de procédure n'établissait pas clairement la thèse contraire; que d'ailleurs ce Code ne pouvait avoir aucune influence sur la détermination de la Cour, parce que sa inise en activité était postérieure à l'ouverture de l'ordre.

M. le procureur-général Merlin a pensé qu'avant le Code de procédure la question pouvait paraître problématique, mais que les art. 757, 767 et 770, combinés, levaient tous les doutes à cet égard, et qu'il en résultait clairement que le créancier devait être colloqué pour tous les intérêts échus depuis l'adjudication jusqu'au paiement effectif et intégral. Ce magistrat a de plus considéré que ces dispositions n'établissaient point un droit nouveau, qu'elles n'avaient fait qu'expliquer le véritable sens de la loi du 11 brumaire et du Code civil; que dès lors la Cour d'appel aurait dû les prendre pour règle de sa décision ; et, par ces motifs, il a conclu à la cassation de l'arrêt.

Du 22 novembre 1809, arrêt de la Cour de cassation, section civile, M. Liborel président d'âge, M. Botton Castelamonte rapporteur, MM. Jousselin et Duprat avocats, par lequel :

7,

« LA COUR, Vu l'art. 19 de la loi du 11 brumaire an l'art. 2151 du Code civil, et les art. 757, 767 et 770 du Code de procédure civile; - Et attendu 1o qu'avant la publication du Code de procédure civile, il était permis de douter si, aux termes de l'art. 19 de la loi du 11 brumaire an 7 et de l'art. 2151 du Code civil, les intérêts échus depuis l'adjudication étaient dus à chaque créancier hypothécaire,

(1) Voy. l'arrêt du 4 frimaire an 14, tom. 6 de recueil, p. 523; mais il ne faut pas oublier que cet arrêt a été rendu sous l'empire de la loi du 11 brumaire an 7.

même rang que le capital; mais que tout doute à ce sujet été levé par les articles précités du Code de procédure, de combinaison desquels il résulte évidemment que le créauer a droit de venir au même rang que le capital pour les inrêts dont il s'agit; 2° que ces articles, qui avaient déjà été bliés lors du jugement d'ordre du 30 août 1806, et qui aient en pleine vigueur le 4 août 1807, jour de l'arrêt déoncé, ne sont point introductifs d'un droit nouveau, mais ulement explicatifs de l'art. 19 de la loi de brumaire an 7 de l'art. 2151 du Code civil;-D'où il suit que l'arrêt déoncé, en décidant le contraire, est contrevenu à l'art. 2151 u Code civil, inteprété par les art. 757, 767 et 770 du Code e procédure; - CASSE, etc. »

COUR DE CASSATION.

Les juges peuvent-ils ordonner INCIDEMMENT la suppression d'un mémoire injurieux répandu dans le public, sans avoir été SIGNIFIÉ A PARTIE? (Rés. aff.) C. de proc. civ., art. 1036.

Peuvent-ils condamner la partie dont il émane à des dommages et intérêts? (Rés. aff.)

HENRION-MAGNONCOURT, C. FROISSARD ET MAGNY.

Le tribunal civil de Vesoul a rendu, contre le sieur Henrion-Magnoncourt, un jugement dont celui-ci a interjeté appel devant la Cour de Besançon. En même temps, il a fait imprimer un mémoire injurieux aux sieurs Froissard et Magny, ses parties adverses, et dans lequel les juges de première instance eux-mêmes n'étaient pas épargnés.

Les intimés ont conclu au rejet de l'appel et se sont réservé de poursuivre le sieur Magnoncourt en réparation des injures contenues dans son mémoire, qu'il n'avait pas encore distribué.

Arrêt
par défaut qui adjuge aux intimés leurs conclusions.
Le sieur Magnoncourt a formé opposition à cet arrêt; il

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s'est, de plus, empressé de répandre son mémoire dans le public, en évitant toutefois de le faire signifier. Ce fait a déterminé les sieurs Froissard et Magny à changer leurs premières conclusions: ils en ont pris de nouvelles, tendantes à la suppression de ce mémoire et à la condamnation du sieur Magnoncourt en 20,000 de dommages et intérêts. Le procureur-général a requis la même suppression dans l'intérêt des juges de Vesoul.

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Le 13 juin 1807, arrêt de la Cour de Besançon qui prononce la suppression du mémoire, soit dans l'intérêt des sieurs Froissard et Maguy, soit dans celui de la partie publique; condamne le sieur Henrion-Magnoncourt à 5,000 fr. de dommages et intérêts envers les premiers, et ordonne que l'arrêt sera imprimé et affiché dans les villes de Vesoul, Dôle et Besançon, au nombre de 300 exemplaires, le tout ! aux frais de l'appelant. Au fond, la Cour infirme le jugement de première instance.

Pourvoi en cassation de la part du sieur Magnoncourt, pour excès de pouvoir et fausse application de l'art. 1036 du Code de procédure civile.

L'excès de pouvoir résultait, suivant lui, de ce que la Cour avait statué sur une demande qui n'avait pas subi le premier degré de juridiction. Il ajoutait qu'elle avait faussement appliqué l'art. 1036 du Code précité, en prononçant la suppression d'un mémoire étranger au procès, puisqu'il n'avait été ni signifié, ni même avoué dans l'instance.

Du 22 novembre 1809, ARRÊT de la Cour de cassation, seetion des requêtes, M. Qudart rapporteur, par lequel:

« LA COUR, - Sur les conclusions de M. Jourde, substitut du procureur-général; - Attendu que la Cour d'appel a reconnu que, depuis l'opposition formée par le deman deur à l'arrêt par défaut, le mémoire dont il s'agit, quoique déjà connu du public, avait été distribué; que les sieurs Froissard et Magny avaient, depuis cette opposition, demandé la suppression du mémoire; que M. le procureurgénéral près cette Cour avait aussi requis la suppression du

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mémoire, et le sieur Magny avait, de plus, conclu à une condamnation de 20,000 fr. de dommages et intérêts; Qu'en prononçant, dans ces circonstances, la suppression du mémoire, la Cour d'appel s'est conformée à l'art. 1036 du Code de procédure civile; et qu'en condamnant le demandeur à 3,000 fr. de dommages et intérêts, cette Cour a statué sur un accessoire de la cause principale, qui tenait essentiellement à la défense des sieurs Froissard et Magny, et sur un préjudice à eux causé pendant l'appel; REJETTE, etc. »

COUR D'APPEL DE RIOM.

La femme qui, quoique non marchande, approuve et signe une lettre de change souscrite par son mari, peut-elle étre réputée débitrice solidaire avec lui, et, 'comme telle", justiciable du tribunal de commerce? (Rés, aff.) Cod. de comm., art 113; Cod. civ., art. 1326.

LA DAME DESPALIME, C. LE SIEUR MORIN.

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Le 4 décembre 1808, le sieur Despalime tire de Clermont, sur le sieur Albert, banquier à Riom, une lettre de change ainsi conçue : « Au 20 juillet prochain, il vous plaira payer, à l'ordre de M. Morin, la somme de 11,988f. valeur reçue comptant, que je passerai en compte sans autre avis... Bon pour la somme de 11,988 fr. Signé Despalime. Approuvé, signé femme Despalime. »>

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La lettre n'est point acquittée à son échéance. Le sieur Morin la fait protester, et forme, devant le tribunal de commerce, une demande en paiement solidaire contre le mari et la femme.

Le 4 août 180g, jugement qui les condamne solidairement à payer la valeur de la lettre de change, et prononce la contrainte par corps contre le mari.

Appel par la dame Despalime.

L'effet du 4 décembre 1808, a-t-on dit pour l'appelante,

ne peut, à son égard, valoir ni comme lettre de change, ni comme simple promesse :

Comme lettre de change, puisque l'art. 115 du Code de commerce répute simple promesse la lettre de change revêtue de la signature d'une femme non négociante ou marchande publique, et que l'on ne prétend point que la dame Despalime ait l'une ou l'autre de ces qualités : donc, sous ce premier rapport, elle n'était point justiciable du tribuna! de commerce;

Comme simple promessse : car l'art. 1326 du Code civil veut que le billet ou la promesse soit écrit en entier de la main du souscripteur, ou du moins qu'outre la signature, il contienne un bon ou approuvé, portant en toutes lettres la somme ou la quantité de la chose. Or l'effet du 4 décembre 1808 porte bien le mot approuvé et la signature de l'appelante; mais l'approuvé n'indique point la somme en toutes lettres. Il n'y avait donc pas, sous ce second rapport, d'engagement véritable de la part de la dame Despalime, le sieur Morin ne pouvait donc exercer aucune action contre elle.

L'intimé a répondu que la compétence était réglée par la nature même de l'obligation, et que, comme la dame Despalime s'était engagée solidairement avec son mari, en vertu d'une lettre de change qui soumettait ce dernier à la juridiction des tribunaux de commerce, elle devait néces sairement suivre son sort, et être, ainsi que lui, justiciable de ces tribunaux.

Il a prétendu ensuite que l'art. 1526 du Code ne s'appliquait qu'au cas où la promesse est souscrite par une partie seulement; mais que, lorsqu'il y a deux signataires, il suffit que l'un d'eux approuve la somme en toutes lettres; qu'alors cette approbation est considérée comme l'ouvrage des deux obligés, et leur devient commune par l'apposition des deux signatures.

Au surplus, a-t-il dit, l'art. 1326 ne régit point les lettres de change; elles se gouvernent par des principes tout

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