.... vit encore au Roi, pour le prier inftamment 13.Fév. d'en punir les Auteurs. Ce font, difoit Cle 1703., ment XI. dans fon Bref à Louis XIV. des gens déterminés à troubler fans ceffe le repos de l'Eglife de l'Etat ; des efprits inquiets, qui ne mettent point de fin à leurs hoftilités. des genies turbulens, qui ne cherchent qu'à anéantir tous les foins qu'on s'eft donné pour extirper leur héréfie ; des audacieux à qui il faut impofer filence; des Sectaires, qu'il faut réprimer; & des rebelles, qu'il falloit réduire. On parla aux Docteurs dont les noms paroiffoient au bas de la décifion. Ils déclarerent prefque tous qu'ils n'auroient jamais donné leur fignature, s'ils en avoient prévû les confequences. Deux feuls perfifterent dans la foufcription qu'ils en avoient faite, & ils furent exiles; les autres au nombre de trente-huit la revoquerent. , Pour lors M. le Card. de Noailles crut ne pouvoir plus differer à faire entendre fa voix. 22.Fév. Il condauna la Décifion des quarante Docteurs comme contraire aux Décifions Apoftoliques, tendante à renouveller les questions décidées, favorifant la pratique des équivoques, des reftrictions mentales, & même des parjures; mais dans la même Ordonnance, où il cenfuroit la fcandaleufe Décifion des quarante Docteurs, il profcrivoit auffi, & flétriffoit comme calomnieux, tous les Ecrits qu'on avoit publié contr'eux au sujet de cette même Décifion. Il renouvelloit encore la défenfe qu'il avoit faite fix ou fept ans auparavant, de taxer perfonne de Janfenifme, fans en avoir des preuves bien convaincantes. Le Public eut de la peine à comprendre comment c'étoit calomnier les Auteurs du Cas de confcience, que de les dire coupables de la même témérité que M. le Cardinal de Noailles condamnoit en eux. Il paroiffoit en cela de la contradiction; mais, felon leur coûtume, les Quénelliftes ne lui fçurent aucun gré, & ne tinrent abfolument aucun compte de tous ces vains ménagemens. Au contraire ils recommencerent leurs hoftilités contre lui, & ils le firent avec la derniere violence. Le Sieur Foüilloux * ofa lui reprocher dans un Ouvrage public que le Cas de confcience lui avoit été propofé à lui-même avant que les Docteurs le fignaffent, & qu'il avoit permis à quelques-uns de le foufcrire, pourvû qu'ils ne le commiffent pas. Quelque odieufe que fût cette imputation, M. le Cardinal de Noailles la laiffa fans replique. Le P. Quênel ne garda non plns aucunes mefures. Il déclara ** qu'il n'avoit pû lire la Cenfure du Cardinal fans répandre des larmes. Il lui écrivit à lui-même, qu'en condamnant le Cas de confcience, il venoit de faire une mortelle playe à l'Eglife; & que les vrais Fidéles en gemiffoient dans toute l'amertume de leur cœur. Parlant enfuite de la retractation des Docteurs, dont M. le Card. de Noailles avoit loué la foûmiffion, le P. Quênel affûre § que c'est une foûmiffion forcée, un mensonge public & fcandaleux, un faux témoignage arraché par une crainte humaine à des Docteurs, à des Prêtres contre leur lumiere & leur confcience, un déguisement criminel, une honteuse prévarication, une lâcheté indigne de ceux qui ont promis à la face des Autels de défendre la vérité jusqu'à l'effufion de leur fang.. Toutes ces déclamations du Pere Quênel n'empêcherent pas les Univerfités de Louvain & de Douay de condamner la Décifion des 10. Mars 1703. 1. Sept. quarante Docteurs. La Sorbonne s'affembla auffi pour donner fon avis doctrinal fur la même Décifion, qui fut déclarée téméraire, fcandaleuse, injurieufe au Pape & aux Evêques de France, propre à renouveller le Janfenifme, & favorifant le menfonge & le parjure. Il fut de plus ordonné que fi quelque Membre de la Faculté venoit à dire, écrire, ou publier quelque chofe qui fût oppofé à cette Cenfure, il en feroit exclu, & que fi les deux Docteurs, qui jufqu'alors avoient perfifté dans la foufcription qu'ils avoient faite du Cas de confcience, ne revoquoient leur fignature dans l'efpace d'un mois, ils demeureroient exclus par le feul fait, & déchûs de tous les droits du Doctorat. * Par raport au P. Quênel on avoit déja pris des mefures pour reprimer la hardieffe & la violence de fes emportemens. Depuis plus d'un an M. l'Archevêque de Malines l'avoit denoncé au Saint Siége, avec priere à Sa Sainteté de proceder juridiquement contre lui. Tout récemment M. l'Evêque d'Apt § venoit de condamner fes Reflexions Morales, avec défenfe de les lire fous peine d'excommunication encourue par le feul fait. Enfin on avoit fi bien éclairé fa conduite, que fes démarches mêmes ne formerent pas un préjugé favorable à fon Livre. On fçut qu'il avoit conftamment refufé de fignerle Formulaire, & on affûroit qu'il s'étoit refugié dans le Brabant, pour éviter la peine due à fa défobéiffance. Ôn ajoûtoit qu'il y avoit toujours vêcû dans une étroite * M. Humbert Guillaume de Précipien. § Mandement de M. Forefta de Colongue, Evê que d'Apt, du 15. Octobre 1703. Caufa Quefnel. page 9. & fuiv. liaifon avec M. Arnaud, & que depuis la mort de ce Patriarche du Partí, il en étoit devenu le Chef. On le difoit travefti fous des habits feculiers, déguifé fous des noms empruntés, ne fortant de fes retraites inconnuës, que pour fe faire des Profélytes, & bouleverfant tous les Pays-Bas Catholiques par la licence de fes fatyres. Tous ces bruits que fes Défenfeurs prenoient grand foin d'affoupir, s'étoient trouvés fi certains, qu'ils avoient allarmé de nouveau M. l'Archevêque de Malines. Comme le Pere Quênel venoit faire de fréquentes courfes dans fon Diocèfe, ce Prelat étoit plus intéreffé que tout autre à prévenir les dangers de la féduction. C'étoit dans cette vûë qu'il avoit d'abord pris le parti de le dénoncer au Pape; mais depuis, ayant fait reflexion que la voye la plus courte & la plus fûre étoit de s'en faifir, M. l'Archevêque de Malines * avoit fuplié le Roi d'Espagne de vouloir bien donner fes ordres pour le faire arrêter. Sa Majefté Catholique étoit entrée dans les vûës du Prelat, & elle avoit § prefcrit à M. le Marquis de Bedmar, qui en l'abfence de M. l'Electeur de Baviere, commandoit en Flandre, de s'affûrer de la perfonne du P. Quênel. Le point capital étoit de fçavoir précisement le lieu où étoit le P. Quênel, qui changeoit fouvent de demeure. D'ailleurs ne fe montrant qu'à fes amis, il étoit auffi difficile de le connoître, que de fçavoir le lieu de fon fejour. De Rebeck, de Frefne & le P. Prieur étoient les noms empruntés, fous lefquels il avoit coûtume de déguifer le fien. Pour en deviner l'énigme, il eût fallu être initié à fes * Caufa Quefneliana, page 10. § Ibid. pag. 10. Mysteres. Cependant M. le Marquis de Bedmar envoya de tous côtés des Emiffaires pour tâcher de le découvrir, & fon zéle fut fi bien fecondé qu'en très-peu de tems il déterra le P. Quênel, & qu'il le fit enfermer. Voici comme la chofe se passa. * Les Officiers du Roi d'Efpagne eurent avis que le P. Quênel étoit actuellement dans Bruxelles. Ils fçurent qu'il logeoit dans un lieu appellé le Refuge de Forest, & qu'il y occupoit un apartement retiré. Sur ces nouvelles certaines ils s'y transporterent fur le champ. Le Sieur Brigode, Difciple fidéle qui veilloit fans ceffe à la garde de fon Maître, fut effrayé de leur nombre; le bruit qu'il fit, avertit le P. Quênel du péril où il étoit, & le refus de leur ouvrir la porte, lui donna le loifir de s'évader. Le P. Quênel étoit en liberté, s'il n'eût fait reflexion que la précipitation de fa retraite ne lui avoit pas laiffé le tems d'emporter fes Papiers. La douleur qu'il en conçut, fut fi vive, qu'il retourna § fur fes pas pour tâcher de les recouvrer. Ils contenoient en effet des myfteres fi importans à fon Parti, qu'il crut devoir hazarder fa liberté pour dérober au Public la connoiffance de fes fécrets. Son efperance fur vaine, & fon retour lui fut préjudiciable. Á la vérité il rentra dans fon apartement ; mais il ne fut pas longtems fans y être découvert. Quelques Officiers du Roi d'Espagne s'y étoient cachés tandis que les autres conduifoient le Sieur Brigode en prifon auffi bien que le P. Gerberon. Ils donnerent au P. Quênel tout le loifir de fe cacher. Mais dès qu'il eut choifi l'endroit de fon apartement qu'il * Caufa Quefneliana, page 14. |