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1805 Réponse de l'empereur au discours du doge. (Nouvelles politiques 1805. n. 49.)

M. le doge, et M. M. les députés du sénat et du peuple de Gênes, les circonstances et votre voeu m'ont plusieurs fois appellé, depuis dix ans, à intervenir dans vos affaires intérieures. 'J'y ai constamment porté la paix, et cherché à faire prospérer les idées libérales, qui seules auroient pu donner à votre gouvernement cette splendeur, qu'il avoit il y a plusieurs siècles. Mais je n'ai pas tardé moi-même à me convaincre de l'impossibilité où vous étiez, seuls, de rien faire qui fût digne de vos pères. Tout à changé. Les nouveaux principes de la législation des mers, que les Anglois ont adoptès et obligé la plus grande partie de l'Europe à reconnoitre; le droit de blocus, qu'ils peuvent étendre aux places nonbloquées, même à des côtes entières et à des rivières, et qui n'est autre chose que le droit d'anéantir à leur volonté le commerce des peuples; les ravages toujours croissans des barbaresques; toutes ces circonstances ne vous offroient qu'un isolement dans votre indépendance. La postérité me saura gré de ce que j'ai voulu rendre libres les mers, et obliger les barbaresques à ne point faire la guerre aux pavillons foibles, mais à vivre chez eux en agriculteurs et en honnétes-gens. Je n'étois guidé que par l'intérêt et la dignité de l'homme. Au traité d'Amiens, l'Angleterre s'est refusée à co-operer à ces idées liberales. Depuis, une grande puissance du continent y a montré tout autant d'éloignement. Seul pour soutenir ces légitimes principes, il eût fallu avoir recours aux armes; mais je n'ai le droit de verser le sang de mes peuples que pour des intérêts, qui leur sont propres.

Dès le moment où l'Europe ne put obtenir de, l'Angleterre, que le droit de blocus fût restreint aux places vraiment bloquées, dès le moment que le pavillon des foibles fut sans défense et livré à la piraterie des barbaresques, il n'y eut plus d'indépendance maritime; et dès-lors, les gens sages prévirent ce qui arrive aujourd'hui. Où il n'existe pas d'indépen

dance maritime pour un peuple commerçant, nait le 1805 besoin de se réunir sous un plus puissant pavillon. Je réaliserai votre voeu; je vous réunirai à mon grandpeuple. Ce sera pour moi un nouveau moyen de rendre plus efficace la protection, que j'ai toujours 'aimé à vous accorder. Mon peuple vous accueillera avec plaisir. Il sait, que, dans tontes les circonstances, vous avez assisté ses armées avec amitié, et les avez soutenues de tous vos moyens et de toutes vos forces. Il trouve d'ailleurs chez vous des ports et un accroissement de puissance maritime, qui lui est nécessaire pour ses légitimes droits contre l'oppresseur des mers.. Vous trouverez dans votre union avec mon peuple un continent; vous qui n'avez qu'une marine et des ports, vous y trouverez un pavillon,. que, quelles que soient les prétentions de mes ennemis, je maintiendrai sur les mers de l'univers, constamment libre d'insultes et de visites, affranchi du droit de blocus, que je ne reconnoitrai jamais que pour les places véritablement bloquées par terre comme par mer. Vous vous y trouverez enfin absolument à l'abri de ce honteux esclavage, dont je souffre, malgré moi, l'existence envers les puissances plus foibles, mais dont je saurai toujours garantir mes sujets. Votre peuple trouvera, dans l'estime que j'ai toujours eu pour lui, et dans ces sentimens de père que je lui porterai desormais, la garantie que tout ce qui peut contribuer à son bonheur sera fait.

"M. le doge et M. M. les députés du sénat et du peuple de Génes, retournez dans votre patrie; sous peu de tems je m'y rendrai, et là je scellerai l'union, que mon peuple et vous contracterez. Ces barriéres, qui vous séparent du continent, seront levées pour l'intérêt commun, et les choses se trouveront placés dans leur état naturel. Les signatures de tous vos citoyens, apposées au bas du voeu que vous me présentez, répondent à toutes les objections que je pourrois me faire; elles constituent le seul droit, que je reconnoisse comme légitime. En le faisant respecter, je ne ferai qu'exécuter la garantie de votre indépendance, que je vous ai promise.

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1805 Arrêté et proclamation de M. de Champagny 9. Juin. ministre de France envoyé à Génes, portant proclamation de la réunion de la Ligurie à la France; en date du 9. juin 1805.

(Nouvelles politiques 1805. n.51.)

Arrêté, Génes, le 20. prairial an 13. (9. juin 1805.)

Le ministre de l'intérieur de l'Empire françois, en vertu des pouvoirs, qui lui ont été donnés par S. M. l'empereur, dans les départemens de Génes, Montenotte et des Apennins, arrête

ART. I. La constitution ligurienne, organisée en 1802, est abolie. Le gouvernement, qu'elle l'établit, est dissous,

ART. II. Les loix, actuellement existantes, continueront à être exécutées jusqu'à leur expresse révocation. Les contributions directes et indirectes sont provisoirement maintenues, et continueront d'être acquittées.

ART. III. Les présidens des magistratures de là justice, de la guerre, de l'intérieur, des finances, des cultes, de l'instruction publique, des archives, régi-, ront séparément, chacun dans sa partie, l'administration dont ils sont chargés, et se conformeront aux ordres du ministre de l'intérieur.

ART. IV. Tous les fonctionnaires publics qui leur sont subordonnés, chargés dans les differentes jurisdictions de veiller à l'exécution des loix, continueront leurs fonctions avec la même responsabilité, ainsi que les agens de tous les genres de service public. ART. V. La justice sera rendue au nom de l'empereur françois.

ART. VI. Les troupes liguriennes seront aux ordres du général de brigade commandant les troupes françoises; elles prendront la cocarde françoise, et conserveront provisoirement leur organisation actuelle.

ART. VII. Les bâtimens de l'état seront aux 1805 ordres du commandant de la division françoise, `qui est dans ce port.

ART. VIII. Le commissaire général de police continuera ses fonctions et correspondra directement avec le ministre.

ART. IX. La vente des domaines nationaux est suspendue.

ART. X. Aucune dépense ne peut être fajte, aucun - payement ne peut avoir lieu, que d'après une autorisation du ministre.

ART. XI. Mardi. 22. prairial (11. Juin) au lever du soleil, le pavillon françois sera arboré par les forts et par les bâtimens qui sont en rade, et salué de 21 coups de canon par la place et par la frégate commandante.

ART. XII. Le présent arrêté sera imprimé, publié et affiché. Les présidens des magistratures de la justice, de la guerre, de l'intérieur, des finances, des cultes, de l'instruction publique et des archives, et les commandans des forces de terre et de mer, sont chargés de son exécution.

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Le ministre de l'intérieur de l'Empire françois aux habitans des départemens de Génes, Montenotte, et des Apennins. Génes, 20. prairial an 13. (9. juin 1805.)

"Peuple de la Ligurie! Vous avez ouvert les yeux sur les dangers de votre position. Vous avez connu, combien votre isolement anéantissoit vos forces et votre richesse, et comment, resserré entre des barrierés que vous ne pouviez franchir, vos montagnes et la mer, votre indépendance vous metroit dans la double dépendance, pour vos besoins, de vos voisins du continent; pour vos besoins et votre commerce, de cette nation orgueilleuse, qui se dit la souveraine

1805 des mers, et qui prétend faire à elle seule le commerce du Monde. C'est pour ne pas renoncer à cetle indépendance par vous si glorieusement defendue, que vous avez voulu l'associer à celle d'un grand - peuple, le plus indépendant de la terre. Vous avez apelle un protecteur, un père. Vous lui avez demandé de vous défendre au - dehors, de faire régner au-dedans la sécurité, et la liberté civile, de vous rendre votre antique prospérité; c'est pour remplir vos voeux que l'empereur des François a accepté vos offres; et cette assurance, que je vous donne en son nom, est la partie la plus douce de la mission dont il m'a honoré."

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"Vous fûtes les amis généreux de la France dans des tems difficiles; partagez aujourd'hui les glorieuses destinées. Conservez, mais réalisez cette franchise de votre port, maintenant comme anéantie par l'absurde et despotique loi d'un blocus imaginaire qui en écarte tous les neutres. Qu'une activité nouvelle en fasse sortir de nouveaux élémens de prospérité. Que vos vaisseaux volent sous le pavillon françois, partageant ses prérogatives et son indépendance, et, dès ce moment, garantis des attaques des barbaresques. Que les produits de votre industrie franchissent les Apennins et les Alpes; qu'ils pénétrent jusqu'aux extrémités de la France, sans rencontrer une seule barrière; que ces montagnes, qui vous séparent des plus riches plaines de l'Europe, applanies par une puissance accoûtumée à vaincre tous les obstacles, s'ouvrent de toutes parts, pour laisser arriver jusqu'à vous, et ces approvisionnemens qui vous manquent; et ces matières premières aliment de votre industrie, et ces productions et tous genres que votre commerce portera aux extrémités du Monde. Voilà ce qui vous est promis, ce qui vous est assuré."

"Génes se relevera avec son commerce et sa marine, et recouvrera sa gloire et son ancienne richesse. Son culte, qui est celui de l'immense majorité des François, sera respecté, protégé; le sort de ceux, qui en sont des ministres, sera assuré d'une manière conforme à l'importance de leurs fonctions. Un ordre invariable s'établira dans ses murs; ses frontières et ses campagnes ne seront plus infestées par des brigands. Son territoire est agrandi; sa domination s'étend de

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