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loi l'en constitue débiteur; tandis que le possesseur | 583. Quand on a recours aux usages locaux. Cas de destinade bonne foi, étant exempt de faire aucun rapport de tion du père de famille. Cas de partage.

fruits, n'est obligé de souffrir aucune compensation 584. Le propriétaire de l'arbre qui avance sur le fonds voisin, semblable avec le prix des améliorations qui peut lui être dú.

En second lieu, le propriétaire ne peut pas mettre le possesseur de bonne foi dans la dure nécessité d'enlever les matériaux de ses constructions pour rétablir les lieux dans leur état primitif; tandis qu'en imposant à volonté cette loi au possesseur de mauvaise foi, le maître du fonds peut le forcer indirectement à abandonner ses constructions à vil prix.

peut y chercher les fruits tombés.

585. Mais il doit de ce chef une indemnité. Il aurait aussi le droit de se rendre chez le voisin pour les cueillir à la main. Ou pour tailler l'arbre.

586.

587.

588.

589.

Enfin, quoique le possesseur de bonne foi ait le droit de retenir la possession du fonds jusqu'à ce qu'il soit indemnisé des constructions qui lui sont dues, on ne pourrait justement accorder la même faveur au possesseur de mauvaise foi, attendu que le dol n'a jamais été considéré comme pouvant être la cause mé- 590. ritoire d'un privilége pour le fripon, et que la maxime Spoliatus ante omnia restituendus, s'oppose invinciblement à une pareille prétention.

576 2o (1). 576 3o (2).

Dispositions de la loi romaine à l'égard du propriétaire

Disposition analogue dans l'art. 682 du code civil. Įci

du fonds sur lequel tombaient des fruits du voisin.

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Au delà d'un fossé servant de limite, faut-il, comme
d'après le droit romain, une largeur de terrain égale
à celle du fossé et qui soit au delà de celui-ci.
Les frais d'entretien et de réparation d'une clôture mi-
toyenne pèsent sur les deux propriétaires. En cas
contraire, sur le propriétaire de la clôture. Preuve de
la mitoyenneté.

591. Cas spécial où la dépense d'entretien pèserait sur tous deux, encore bien que le mur ne serait pas mitoyen,

SECTION IV.

DE LA PLANTATION.

577. Le propriétaire du sol, propriétaire de l'arbre qu'il y a planté. Valeur à payer. Dommages-intérêts. Droit romain modifié. Si plantation par un tiers, article 555 appliqué.

678. La tige de l'arbre doit être dans le fonds de celui qui le revendique. Quand il est commun.

579. La plantation ne peut se faire qu'à une distance fixée de la limite de la propriété voisine. Motifs de celle règle.

380. Le droit de planter à une moindre distance peut être prescrit.

581, Peut-on prescrire dans le cas où les branches s'étendraient sur le fonds du voisin?

582. Quand il y a mur de séparation, la distance pour la plantation doit-elle être respectée? Distinction.

577. Quoique en général ce qui a été dit dans la section qui précède, s'applique à la plantation des arbres comme à la construction des ouvrages établis sur le sol, néanmoins nous avons cru qu'il ne serait pas absolument inutile d'ajouter encore ici cette petite section pour y signaler ce qu'il y a de spécial dans le droit d'implantation.

Les arbres deviennent, par implantation, les accessoires du sol, et appartiennent au propriétaire du fonds sur lequel ils sont nourris (3).

Ainsi celui qui transplante dans son héritage un arbre appartenant à un autre, en acquiert le domaine par droit d'accession, mais à la charge d'en payer la valeur, et même de supporter les dommages-intérêts qui peuvent avoir licu, comme lorsqu'il s'agit de matériaux enlevés à leur maitre pour construire un édifice (554).

La loi romaine ne refusait au propriétaire primitif de l'arbre le droit de le revendiquer, qu'autant qu'il avait déjà pris racine dans le fonds où il avait été trans.

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(1) Qu'arriverait-il si l'édifice était détruit ou renversé ? Le possesseur pourrait-il réclamer ses matériaux ? HENNEQUIN, p. 254, dit à ce sujet : « D'après une loi du Digeste, rappeJée dans les Institutes (loi 7, § 12, lib. XLI, tit. Ier, et § 30, lib. II, tit Jer), le constructeur téméraire et de mauvaise foi était censé avoir voulu enrichir, à titre de libéralité, le sol des matériaux employés dans les constructions, ainsi que de la main-d'œuvre; et même, dans l'hypothèse où l'édifice aurait été détruit par un incendie, il n'était pas admis à revendiquer les matériaux que le feu avait épargnés. La présomption protégeait le propriétaire du sol vis-à-vis du possesseur de bonne foi lui-même; seulement, dans ce cas, si l'édifice existait encore, et que le propriétaire voulût sc remettre en possession sans hourse délier, sa revendication était repoussée par l'exception de dol. Cette distinction ne se rencontre pas dans la législation française. Le possesseur, quel que soit le caractère de la possession, aurait le droit de réclamer, après un événement de force majeure, les débris échappés au désastre. Op. conf. de DEMANTE, no 559; de Rolland de VILLARGUES, vo Construction, no 17.

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Les auteurs des PANDECTES FRANÇAISES avaient dit au contraire « Observez encore que le code civil ne conserve pas, comme la loi des Douze Tables, au propriétaire des matériaux l'action en répétition lorsque le bâtiment est détruit, dans le cas où celui du fonds qui les a employés est de mauvaise foi. Tout est

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consommé par celle que le propriétaire des matériaux a exercée. Il a reçu le prix de sa chose. Il a été indemnisé du préjudice qu'il a souffert. Il n'a plus rien à demander, »

(2) Quid dans le cas où le fonds étant possédé par un tiers, c'est un autre liers qui a fait des plantations ou constructions sur ce fonds? - TAULIER, p. 274, dit à ce sujet : « Il me parait qu'alors il faut uniquement se préoccuper de la bonne ou de la mauvaise foi du tiers qui a planté ou construit.

« En effet, la possession d'un tiers s'interposant entre l'auteur des ouvrages et le propriétaire du sol ne saurait rien changer aux droits ni aux obligations de l'un et de l'autre.

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Lorsque les arbres ou les matériaux n'appartiennent pas au tiers qui a planté ou construit, cctle particularité ne change rien aux droits du propriétaire du sol. Il se mesure toujours sur la bonne ou la mauvaise foi de l'auteur des ouvrages, sauf à celui-ci de répondre aux réclamations personnelles du propriétaire des matériaux, et à lui payer, s'il y a lieu, des dommages-intérêts ouire leur valeur. » (5) Jurisprudence. La propriété d'un canal fait de main d'homme, entraîne la présomption légale de la propriété des francs bords de ce canal et des arbres qui y sont plantés. Toute possession de ces francs bords par des tiers ne peut être considérée quo comme de tolérance, et par suite ne peut faire preuve de propriété en faveur de ces tiers. (13 février 1850, Paris, Leharle._DALLOZ,

planté (L. 7, § 13, et 1. XXVI, § 2, ff. lib. XLI, tit. I). Mais d'après notre code civil, il suffit qu'il ait été planté, pour qu'il ne soit plus permis de l'enlever (534) (1).

En ce qui concerne les droits d'indemnité entre le maitre du fonds et le possesseur de bonne ou mauvaise foi qui y aurait fait quelque plantation, on doit, en tous points, suivre les règles tracées dans la section précédente sur le fait des constructions (555).

578. Quoique un arbre doive naturellement appartenir au maître du terrain d'où il tire sa substance,

P. 30, 3, 117. 30 janvier 1835, Toulouse, Depeyre, DALLOZ, P. 33, 2, 113.-10 septembre 1832, Toulouse, Beauquesne, DALLOZ, P. 33, 2, 49.)

(1) « Cependant, dit encore DELVINCOURT, t. III in-8°, p. 134, si le peu de temps écoulé depuis la plantation, était tellement modique qu'on dût présumer que l'arbre n'a pas encore pris racine... je pense que dans ce cas il pourrait être revendiqué. »

TOULLIER dit aussi, no 127 : « Cette distinction, fondée sur l'équité et sur la nature des choses, n'a rien que de conforme à l'esprit du code, et doit d'autant mieux être suivie aujourd'hui, que le goût des plantes exotiques et rares est devenu une passion, et qu'il y a des plantes qui, à raison de leur rareté, ont aux yeux du propriétaire un prix d'affection que ne peuvent partager des ex- | perts, et qu'il serait néanmoins injuste de sacrifier, lorsque la plante, n'étant point encore incorporée à la terre, peut, sans souffrir, être reprise par celui à qui elle appartient. » Op. conf. de HENNEQUIN, t. I, p. 246.

n

DURANTON, no 374, n'adopte la distinction qu'avec plus de réserve pour le cas où il s'agirait spécialement de plantes exotiques : « Il ne pourrait y avoir exception, dit-il, à ce principe que dans le cas où il s'agirait de plantes exotiques, que leur nouveauté et leur rareté rendrait précieuses: si elles n'avaient pas encore pris racine, on serait en droit de les réclamer; très-probablement les tribunaux accueilleraient la demande en revendication. On sait quel est le prix d'affection que les amateurs attachent à ces sortes de plantes. »

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CHAVOT, t. II, no 524, combat en ces termes DURANTON pour se rallier à l'opinion de TOULLIER et DELVINCOURT : « Nous ne saurions partager cette opinion. L'art. 554, il est vrai, ne fait pas | de distinction, mais il ne faut pas toujours chercher l'interprétation d'un article dans sa seule rédaction, il faut aussi chercher à expliquer ses termes par ce qui le précède et le suit, par sa position relative. Cette règle d'interprétation nous servira à reconnaître le véritable esprit de l'art. 554. En effet, il n'est pas vrai que l'acquisition de l'arbre ou de la plante soit, dans cette circonstance, la récompense des travaux et des frais de plantation; rien n'autorise à interpréter ainsi l'art. 554, ces frais et ces travaux sont de si peu de valeur, comparativement à la matière, qu'il n'est pas permis d'assimiler ce cas à celui d'une spécification. Bien loin de là, l'art. 554 est placé à la section première du chapitre II du titre de la Propriété, et dans cette section la propriété s'acquiert par accession aux choses immobilières ; la propriété de l'immeuble est le seul moyen d'acquérir; c'est par sa seule force et puissance que l'objet qui lui adhère est acquis au même maître. C'est là un point constant, et l'intérêt de la question ne consiste qu'à savoir dans quel moment l'objet adhère assez intimement à l'immeuble pour en faire partie. Nous ne pouvons croire que la plantation seule suffise, car la plantation n'est pas, comme la construction, le but, mais le moyen; elle est destinée à faciliter l'union, l'incorporation de l'arbre ou de la plante avec la terre pour qu'il en reçoive existence et accroissement. La simple jonction qui est l'effet de la plantation, ne peut produire immédiatement ce résultat; il n'y a union parfaite que lorsque l'arbre a lié son existence avec le fonds en y faisant pénétrer ses racines; car c'est alors qu'il y a communauté ou plutôt unité d'existence; c'est alors que les sucs nourriciers, en pénétrant l'arbre, en font pour ainsi dire un objet nouveau par le développement et l'accroissement qu'ils lui donnent; jusque-là, l'arbre et le fonds ont eu une existence séparée et indépendante. Le fonds ne s'approprie l'arbre

néanmoins il ne suffit pas qu'il pousse simplement des racines dans un fonds pour en être une partie accessoire: il faut que la tige soit dans l'héritage de celui qui veut le revendiquer pour le sien (672), et il ne devient commun entre les deux propriétaires de fonds adjacents, qu'autant qu'il s'élève dans la ligne mitoyenne des limites (673) (2).

579. Lorsqu'il s'agit soit d'un mur de clôture, soit d'un mur de bâtiment, nous ne lisons dans notre code aucune disposition qui défende au propriétaire du fonds de porter sa construction jusqu'au bord de son terrain : il suffit, quand c'est une maison qu'on veut

qu'en lui donnant la vie, alors on peut dire avec vérité que cetto appropriation est l'œuvre de sa force et puissance.

« L'instant de cette union se manifeste par le développement des racines, développement qui se fait sentir dans tout le corps de l'arbre par la vigueur qu'il lui donne ou qu'il lui conserve après le temps où il serait mort s'il n'avait puisé la vie dans le sol auquel il adhère. Il n'y a donc mutation de propriété que dans ce moment, el nous adoptons pleinement sur ce point la doctrine du droit romain, qui conservait la propriété de l'arbre à celui sur le sol duquel il avait été arraché, jusqu'à ce que cet arbre ou plante ait poussé des racines dans le fonds où il avait été transplanté: Le § 31, Inst. de rer. div., est ainsi conçu : Si Titius alienam plantam in solo suo posuerit, ipsius erit. Et ex diverso, si Titius suam plantam in Mævii solo posuerit, Mævii planta erit, si modo utroque casu radices egerit : antè enim quàm radices egerit, ejus permanet cujus fuerat. (Voy. TOULLIER, t. III, no 137, conf.)

« Duranton ne peut repousser cette décision sous prétexte qu'elle blesse les intérêts de l'agriculture, car il est inutile de faire remarquer que l'arbre, avant d'avoir pris racine, peut être transplanté ailleurs sans accroître les dangers de son existence. Les intérêts de l'agriculture ne sont pas d'ailleurs plus sacrés que ceux de la propriété, lorsque dans des circonstances rares ils se trouvent en opposition. Le même auteur a si peu de confiance dans sa doctrine, qu'il consent à y faire exception lorsqu'il s'agirait de plantes exotiques que leur nouveauté et leur rareté rendraient précieuses; mais pourquoi cette exception? Sur quoi la fonde-t-il ? Ce n'est pas la valeur relative des objets qui, dans cette circonstance, règle leur attribution, et la même raison qui fait transférer la propriété d'une plante commune, doit aussi faire transférer celle d'une plante rare; la loi ne peut avoir deux poids et deux mesures. Une plante rare peut devenir commune; une plante fort recherchée des amateurs peut être de peu d'importance pour ceux qui n'ont pas ce genre d'affection. Dans l'un et l'autre cas, nous ne devons pas nous écarter de l'esprit de l'art. 554, et nous croyons qu'il est tel que nous venons de l'expliquer.

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TAULIER, t. II, p. 272, n'admet pas la distinction de DURANTON; il interprète la loi littéralement : « Quant aux plantations, dit-il, le droit actuel ne rappelle pas l'exception du droit romain, qui autorisait le propriétaire des arbres à les reprendre tant qu'ils n'avaient pas poussé des racines. Cette idée était sans doute conforme à une logique rigoureuse, mais aux yeux de la saine raison elle est empreinte d'une certaine puérilité. Comment en effet s'assurer qu'un arbre n'a pas poussé de racines, si ce n'est en l'arrachant? Et comment réparer le mal si, après avoir arraché l'arbre, on reconnaît qu'il était enraciné? »

(2) & Dans le droit romain, dit CHAVOT, t. II, no 525, la position du tronc ne faisait pas toujours reconnaître le propriétaire de l'arbre, c'étaient la direction et la position que les racines avaient prises dans leur développement qui réglaient et faisaient même changer la propriété de l'arbre. On regardait comme contraire à la raison que l'arbre appartint à un autre qu'à celui dans le fonds duquel les racines allaient puiser les sucs nourriciers qui le faisaient vivre. (Inst., de rer. div., § 31.) De là il pouvait résulter que l'arbre in confinio ou seulement propè confinium pouvait appartenir, non pas seulement pour partie, mais pour la totalité au propriétaire du fonds voisin de celui où il a été planté, s'il avait poussé toutes ses racines ou la presque totalité de ses racines dans son fonds; ce qui peut arriver si la terre de son fonds est molle et

bâtir, que le constructeur s'abstienne de toute ouverture de porte ou de fenêtre ordinaire sur le fonds voisin, ainsi que d'y pratiquer aucun ouvrage avancé en saillie, tel qu'un balcon ou l'égout de son toit.

Il n'en est pas de même en fait de plantation d'arbres ici, abstraction faite de tous règlements et usages locaux qui l'établiraient autrement, la règle tracée par le code civil est que la plantation ne doit avoir lieu qu'à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux héritages pour les arbres de haute tige, et à la distance d'un demi-mètre pour les autres arbres et haies vives (671); et que le voisin peut exiger que les arbres et haies plantés à une moindre dislance soient arrachés (672).

il serait de toute impossibilité de vérifier la durée de la possession du propriétaire de l'arbre, de manière à remonter à l'époque fixe à laquelle elles ont pris naissance, ou à laquelle elles ont, par leur accroissement, commencé à déborder sur le fonds du voisin;

Qu'enfin, la prescription du droit de conserver l'arbre tel qu'il a été planté, doit comporter aussi la prescription d'avoir, dans le futur, le droit à la prolongation des branches qui peuvent en naître, et qui en sont les parties naturellement et physiquement intégrantes, en sorte qu'on ne peut toujours trouver là qu'un même tout.

Nonobstant ces raisonnements, nous estimons que la décision contraire doit être adoptée, et qu'on doit dire que la prescription acquise du droit de conserver un arbre planté dans le voisinage, à une distance moindre que celle qui est déterminée par la loi, ne comporte pas la prescription acquisitive du droit de posséder l'extension des branches de cet arbre, quand elles se prolongent sur le terrain d'autrui.

La raison de cette différence entre la construction des murs et la plantation des arbres est sensible c'est qu'en croissant, les arbres peuvent étendre leurs rameaux et branchages jusque dans l'espace aérien qui est au-dessus du fonds voisin, et qu'on n'a pas à craindre une pareille anticipation de la part des murs construits même sur les bords des héritages; et c'est pour réprimer cette anticipation, que celui sur la pro- Et d'abord, suivant la maxime In tantum præpriété duquel avancent les branches des arbres du scriptum in quantum possessum, le propriétaire de voisin peut contraindre l'autre à couper ces branches; l'arbre ne pourrait jamais prétendre à l'acquisition et encore si ce sont les racines qui avancent dans son d'un droit qui s'étendit au delà des bornes de la poshéritage, il a le droit de les y couper lui-même session : il faudrait donc, dans tous les cas, qu'il (672). prouvat sa possession de trente ans à dater de la pro580. Néanmoins, comme il s'agit ici d'une servi-longation des branches de son arbre; et cette charge tude continue et apparente, laquelle peut être acquise par prescription (690), si l'arbre de l'un qui se trouve près du terrain de l'autre, à une moindre distance que celle qui est réglée par la loi, avait été planté depuis plus de trente ans, le voisin ne pourrait plus exiger qu'il fut arraché.

581. Mais que devrait on décider à l'égard des branches qui, dans la même hypothèse, s'étendraient sur le fouds du voisin? Devrait-on dire que, le droit de conserver l'arbre dans sa position étant acquis par la prescription, le droit d'extension des branches sur l'héritage voisin devrait être considéré comme acquis par le même moyen?

Pour soutenir que la prescription, en tant qu'elle s'applique à la position de l'arbre, doit s'étendre aussi à la position et à l'extension des branches, quelles qu'elles soient, on peut dire,

Que le propriétaire de l'arbre n'exerce pas ici deux possessions différentes; qu'il n'en exerce qu'une, qui, s'appliquant généralement au corps de l'arbre et à loutes ses dépendances, embrasse nécessairement aussi les branches avec toute leur prolongation; qu'en conséquence il a également le droit acquis de conserver le tout dans l'état où il le possède;

Qu'on ne pourrait le prétendre autrement sans rencontrer de suite une difficulté insurmontable, en ce que, les branches d'arbres n'ayant ni extrait de naissance, ni titre constatant leur minorité ou majoritė,

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de preuve lui serait d'autant plus rigoureusement imposée, qu'il s'agit ici d'une servitude, c'est-à-dire d'une matière où tout est de rigueur.

Vainement objecte-t-on la difficulté de faire une pareille preuve, parce qu'ici se présente cette autre maxime de droit, Sed non facit inutilem stipulationem difficultas præstationis (1), c'est-à-dire que la difficulte qui est en fait ne déroge point au droit des parties.

Mais il y a plus, et il faut convenir que les auteurs du code ne se sont point arrêtés à toutes les argu mentations proposées ci-dessus, lorsqu'ils ont statuė généralement que celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres du voisin, peut contraindre celui-ci à couper ces branches (672): car on voit par là que, statuant sans égard à la jouissance ou à ce qui s'est pratiqué du temps passé, ils n'ont considéré la possession de la prolongation des branches sur le fonds voisin que comme un objet de pure tolėrance, qui n'acquiert pas de droit.

Telle a été leur pensée en prononçant la décision qu'on vient de rapporter, puisqu'elle est générale, qu'elle ne souffre aucune distinction, qu'elle est absolue, et sans admettre aucune restriction qui eût pour cause la possession plus ou moins longue de la prolongation des branches de l'arbre au-dessus du fonds voisin.

582. Ici se présente encore la question de savoir

humectée, tandis que celle où le tronc de l'arbre repose est dure et pierreuse. (Loi 7, de acq. dom., § ult.; Inst., loc. cit.) Si l'arbre | répartissait au contraire ses racines dans l'un et l'autre fonds, il│| devenait alors commun pro regione cujusque prædii. (Loi 8, de acq. dom.)

« Le principe d'après lequel les arbres dépendaient du terrain qui nourrissait leurs racines, n'était cependant pas universellement admis. Pomponius avait une opinion directement contraire, car il s'exprimait ainsi dans la loi 6, arb. furt. cœs. f. : Si radicibus vicini arbor aletur, tamen ejus est, in cujus fundo origo ejus fuerit.

Il est inutile de dire quelles diverses lentatives on a failes pour concilier ce texte avec les précédents, car l'opinion de Pomponius est aujourd'hui un des principes de notre code; et l'arbre

ne peut devenir commun entre deux voisins que lorsque son tronc repose sur la limite ou sur le terrain de la haie mitoyenne. (Article 673.) Mais aussi le voisin qui n'a aucun droit à la propriété de l'arbre, est autorisé à couper lui-même les racines qui pénètrent dans son fonds (art. 672) ; c'est une conséquence de cette exclusion de propriété et du droit de fouiller son sol comme il l'entend. Aussi Pomponius (d. 1. 6) permettait-il au voisin non de couper les racines lui-même, agere autem licebat, non esse jus, sicut tignum aut protectum, immissum habere. Il lui était permis, fit Brunnemann sur cette loi, d'agir actione negatoria non licere tibi radices in fundum meum emissos possidere. Si non auferantur, posse me utili interdicto de arboribus cædendis agere ne impediat, quo minus resecem. »

(1) L. a, S a, ff. de verbor. obligat., lib, 45, tit. 1.

si l'article 671 du code, qui, comme on l'a déjà vu ne permet de planter des arbres de haute tige qu'à la distance de deux mètres ou de six pieds de la ligne séparative de deux héritages, serait applicable au cas où les fonds seraient séparés par un mur de clô

ture.

Si le mur séparatif des deux héritages était assez élevé pour qu'il dut parer à l'inconvénient de l'extension des branches de l'arbre sur le fonds voisin, nous croyons que le propriétaire de cet héritage ne pour rait exiger que l'arbre fùt arraché, attendu qu'étant sans intérêt pour intenter une pareille demande, il devrait être déclaré non-recevable à la proposer.

Mais il faudrait décider qu'au contraire l'action devrait être admise si le mur séparant les deux fonds n'était pas assez élevé pour mettre obstacle à l'extension des branches de l'arbre sur l'héritage voisin, at tendu qu'alors ce serait comme si ce mur n'existait pas. 583. Nonobstant les règlements qui veulent que celui qui plante un arbre sur son terrain, s'éloigne à une certaine distance du fonds voisin, on trouve à chaque pas, dans les pays à fruits, des terrains garnis de plantations dont les arbres sont presque sur la ligne séparative des divers héritages: c'est surtout alors, que par application de l'article 671 du code, il faut recourir aux usages locaux pour statuer sur les discussions qui peuvent s'élever entre les propriétaires dans l'exercice de leurs droits touchant aux arbres possédés par les uns et les autres.

Mais il y a particulièrement en celle matière une observation à faire sur l'importance de la destination du père de famille, parce que c'est surtout ici qu'elle exerce le plus communément son empire.

Lorsqu'en remontant plus haut que l'état actuel des choses, on parvient à découvrir que deux fonds contigus ou voisins ont été anciennement possédés par le même propriétaire, et que c'est ce propriétaire qui y avait fait les plantations qu'on y trouve, alors il y a eu destination du père de famille, par l'effet de laquelle on doit, aux termes des articles 692 et 693 du code, respecter l'état dans lequel les choses avaient été mises par leur maitre; en sorte qu'il ne peut plus être question, de la part de l'un des proprietaires voisins, de faire arracher l'arbre planté à une distance quelconque sur le fonds de l'autre, ni de faire couper les branches de cet arbre, quelle que soit l'extension d'accroissement qu'elles aient prise sur son héritage.

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seul fait de leur chute sur le fonds d'autrui, ce propriétaire est nécessairement sous, la protection de la maxime suivant laquelle chacun est en droit de se saisir de son bien partout où il le trouve.

585. Il y a plus encore, et nous croyons que ce propriétaire d'arbres doit avoir'la faculté d'entrer dans le clos voisin, et d'y placer des échelles pour faire à la main la cueillette de ses fruits, plutôt que de les abattre ou de les laisser tomber, parce que ce n'est toujours là qu'un mode de se saisir d'une chose qui est la sienne.

Mais lorsqu'il s'agit d'entrer dans le fonds d'autrui pour aller y ramasser des fruits tombés depuis les branches de l'arbre du voisin, comme lorsqu'il s'agit de pénétrer dans ce même fonds avec des échelles pour cueillir les fruits à la main, le propriétaire de l'arbre, à moins qu'il n'ait un titre pour cela, doit une indemnité quelconque à celui du sol qu'il vient fouler.

586. La loi romaine voulait qu'il fut permis au maître de l'arbre d'entrer tous les trois jours, dans la saison des fruits, sur le fonds voisin pour y recueillir ceux qui pouvaient être tombés; et il était défendu au propriétaire de ce fonds de mettre obstacle à cette démarche : Ait prætor: Glandem quæ ex illius agro in tuum cadat, quominùs illi tertio quoque die legere, auferre liceat, vim fieri veto. Glandis nomine omnes fructus continentur (L. unic. lib. XLIII, tit. XXVIII); et il était défendu au maître du fonds qui recevait cette chute, de faire ou laisser sciemment manger les fruits par ses propres bestiaux. Pomponius scribit competere actionem ad exhibendum si dolo pecus immittit ut glandem comederet; nam si ylans exlaret, nec patiaris me tollere, ad exhibendum teneberis (L. 9, § 1, ff., lib. X, tit. IV).

587. Le détail de ces statuts de la loi romaine ne se trouve pas explicitement consigné dans notre code civil; mais nous y trouvons une disposition générale qui, entrainant les mêmes conséquences, nous conduit au même but. C'est celle de l'article 682, portant que le propriétaire du fonds enclavé peut réclamer son passage sur les fonds voisins pour l'exploitation de son héritage, à la charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut causer. Certainement il y a enclave à l'égard des fruits d'arbre qui vont tomber sur le fonds du voisin. Certainement encore l'action de recueillir ces fruits est bien un acte ou un On doit, et à plus forte raison, porter la meme dé- fait d'exploitation et de jouissance du fonds sur lequel cision dans le cas où les fonds appartenant aujour-l'arbre est implanté. Donc il y a, dans ce fait de réd'hui à deux ou plusieurs maitres, leur sont échus colte, lieu à l'application de l'article 682 de notre dans le partage d'une même succession: soit que les code civil. fonds aient été déjà distingués l'un de l'autre entre les mains du défunt, soit que, ne formant qu'un seul héritage dans son patrimoine, ils n'aient été séparés l'un de l'autre que par le partage exécuté entre les héritiers, la destination du père de famille conserve toujours là son empire, pour régler de mème les droits des parties intéressées à la chose.

584. Mais, abstraction faite des cas où il y a eu destination du père de famille, il faut s'en rapporter à la coutume ou aux usages locaux s'il en existe, et enfin aux dispositions du code civil, s'il n'y a rien dans la coutume ni dans les anciens usages qui leur soit contraire.

Lorsqu'un arbre est planté vers les confins du fonds de son maitre, et qu'il a des branches qui s'étendent sur l'héritage voisin, si ces branches portent des fruits qui, par une conséquence toute naturelle de ce rapprochement, tombent dans le clos voisin, il doit être permis au propriétaire de l'arbre d'entrer dans ce fonds pour les aller recueillir, attendu que, ces fruits n'ayant pu cesser de lui appartenir par le

588. Quelle que soit la nature d'une clôture, elle est bien certainement l'accessoire du fonds pour la protection duquel elle fut établie, mais elle ne doit pas toujours être fondée de la même manière.

Lorsqu'elle consiste dans un mur, elle peut être établie au bord de l'héritage mis en clos, et il en est de même de celle qui serait construite au moyen d'une haie'sèche ou de palissade; mais si c'est par une haie vive que le propriétaire d'un fonds veut le mettre en clôture, il doit, aux termes de l'article 671, se retirer sur lui-même à la distance d'un demi-mètre.

589. Quant à la cloture par le moyen d'un fossé, notre code ne porte aucune disposition prescrivant expressément au constructeur de laisser aucune portion de son terrain de l'autre côté du fossé est-ce à dire qu'il peut en opérer le creusage à partir de la ligne séparative de son héritage d'avec le voisin?

Nous ne le pensons pas, parce qu'il ne peut lui être permis de causer l'éboulement du fonds de l'autre dans son fossé : nous estimons donc qu'il doit en ce cas se conformer au prescrit de la loi romaine, qui

veut que celui qui creuse ainsi un fossé, laisse en dehors une largeur de son terrain qui ait en surface une largeur égale à la profondeur du fossé. Si sepulcrum aut scrobem foderit, quantùm profunditatis habuerint, tantùm spatii relinquito (l. 15, ff., lib. X, tit. 1). Cette décision de la loi romaine est tout à fait conforme à l'équité, attendu que l'éboulement qui doit se former dans le fossé du côté du voisin, ne s'arrêtera que quand il y aura produit un talus de quarantecinq degrés de pente, et que, parvenu à ce point, sa base sera sur le fonds de même largeur que la profondeur du fossé.

Celui qui veut mettre son fonds en clôture de cette manière pourrait aussi porter son fossé jusqu'au bord de son héritage, mais à la charge de faire construire et d'entretenir un mur de soutenement contre le bord de l'héritage voisin.

590. La clôture, généralement considérée, peut encore donner lieu à des questions d'un autre genre, consistant à savoir sur qui doit peser l'obligation de l'entretenir el de la réparer.

aussi tenu de toutes les dépenses d'entretien et de réparation de son mur de soutenement, quoique ce mor serve de clôture aux deux héritages voisins, attendu que, comme on vient de le dire à l'égard de l'autre, c'est lui seul qui aura donné lieu à la cause de la dépense.

Mais, dans l'une et l'autre de ces deux hypothèses, si l'on a voulu pousser le mur à une hauteur qui soit supérieure à la partie basse des murs de soutenement, nous croyons qu'alors on devrait appliquer à cette partie d'exhaussement supérieur les règles concernant la mitoyenneté des murs; et c'est ainsi qu'on satisferait équitablement aux intérêts de toutes les parties.

SECTION V.

DE L'ALLUVION (1).

tiellement. Conséquences. S'il y a enlèvement d'une partie considérable et reconnaissable d'un champ. 593. Ou s'il y a lit abandonné.

Et, pour remonier au principe des choses, il faut 592. Qu'entend-on par alluvion? Ce qui la constitue essenchercher à vérifier d'abord si elle esi mitoyenne entre les deux propriétaires voisins, ou si elle n'appartient qu'à un seul, attendu que dans le cas de mitoyenneté les frais d'entretien et de réparation doivent peser sur les deux propriétaires, tandis que dans l'autre ils ne peuvent être dus que par celui qui est seul ei exclusivement propriétaire de la clôture.

594.

595.

596.

597.

L'atterrissement ne peut être provoqué par aucun ouvrage. Les relais de la mer ne donnent pas lieu à l'alluvion. Elle n'existe pas pour les lacs et étangs. Quid des iles? Distinction d'après leur mode de formation. Les atterrissements appartiennent aux riverains, sous la charge du marchepied.

Les lles appartiennent aux riverains ou à l'État, selon

que les rivières sont navigables ou non. L'alluvion subit les charges qui pèsent sur le fonds. Hypothèque. Usufruit.

La preuve de la mitoyenneté peut résulter de tous faits ou acies constatani que c'est d'un commun accord qu'ils ont voulu construire en commun le fossé ou le mur, ou autre barre servant à séparer leurs héritages; mais il est rare que ce genre de preuve puisse être bien administré ; et à défaut de ce moyen, on peut consulter la disposition des lieux. S'il s'agit d'un clos adjacent à un finage de champs labourables, ou de vignes, ou d'autres terres qu'il ne soit pas dans l'usage de mettre en clôture, il ne peut y avoir lieu de présumer la mitoyenneté du mur ou du fossé rive- 599. Le ruisseau reste dans le droit privé. On peut empêcher rain, qui devront rester exclusivement à la charge seule du maitre de l'enclos.

591. Mais un mur peut éire séparatif de deux héritages en état de clôture l'un et l'autre, sans être néanmoins totalement mitoyen. Qu'on suppose, par exemple, qu'il s'agisse d'un terrain en pente; que l'un des propriétaires voisins possède la partie inférieure, tandis que l'autre retient la portion supérieure; que ce propriétaire du fonds inférieur ait voulu, pour en jouir plus utilement, y pratiquer un creusage et enlèvement de terre pour établir une planimétrie agréable, là où il n'y avait qu'un terrain en pente, et plus ou moins stérile et incommode: il ne pourra se permettre ce creusage dans son clos qu'en construisant en même temps un mur de soutenement pour mettre obstacle à l'éboulement du clos supérieur, et il sera perpétuellement soumis à la charge de l'entretien et des réparations de ce mur, attendu qu'il aura donné lieu à la cause qui nécessite ce genre de dépenses.

Si l'on se place dans l'hypothèse inverse, en admettant que ce soit le propriétaire du clos supérieur qui ait voulu y établir une planimétrie pour en faire un jardin comportant avec lui un aspect plus agréable sur le voisinage, il se trouvera de mème obligé de faire un mur de soutenement, pour servir de fondement à sa terrasse; el ce propriétaire supérieur sera

598.

Quant à l'alluvion, différence entre les rivières et les ruis

seaux. Principes du droit romain. Une rivière empêche la contiguïté. Conséquence.

qu'il modifie son cours. Le propriétaire de l'autre rive peut empêcher l'alluvion de l'autre côté. Renvoi au Traité du domaine public.

592. On entend par alluvion les atterrissements qui se forment successivement et imperceptiblement aux fonds riverains d'un fleuve ou d'une rivière, soit par le dépôt des vases que les eaux y laissent (556), soit par les relais que forme l'eau courante, lorsqu'elle se retire insensiblement d'une rive pour se porter à l'autre (557).

Sous l'un et l'autre rapport, l'alluvion est un accroissement de propriété qui profite, comme un don de la fortune, à celui dont l'héritage est agrandi.

On voit, par cette définition, que l'alluvion ne peut jamais être que le résultat d'un accroissement successif de chaque jour et imperceptible: d'où il résulte,

1o Que si un fleuve ou une rivière navigable ou non, enlève, par une force subite, une portion considérable et reconnaissable d'un champ riverain, et la porte vers un champ inférieur ou sur la rive opposée, il n'y a pas lieu au droit d'alluvion, et le propriétaire des terres enlevées peut les réclamer. Mais la loi ne lui accorde qu'un an de délai pour former sa de

(1) PROUDHON n'a traité que très-superficiellement ce qui Traité du domaine public; c'est à l'occasion de ce livre remarconcerne la matière de l'alluvion, il renvoie lui-même aux détails quable à tant de titres que nous ferons notre travail comparaétendus dans lesquels il est entré à ce sujet dans son important | tif.

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