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est bien reconnu que généralement les propriétés immobilières des communes peuvent être grevées d'hypothèques; mais quant aux espèces dont il s'agit ici, les créanciers ne pourraient, pour se faire rembourser, avoir que l'expectative d'une vente ordonnée par une loi. si la commune n'avait aucun autre moyen de se libérer.

Sur la demande de tout créancier porteur de titres exécutoires. Il résulte de là qu'il n'est pas nécessaire d'être créancier hypothécaire pour agir en expropriation du bien d'une commune non affecté à un usage public, puisqu'il s'agit seulement d'avoir un titre authentique exécutoire.

SS III et IV. DES EMPRUNTS QUI PEUVENT ÊTRE FAITS DE LA PART DES COMMUNES ET DES ÉCHANGES A EXÉCUTER SUR LES BIENS COMMUNAUX.

906. On doit regarder ici comme une vérité de principe que l'aliénation des biens des communes, surtout de leurs immeubles, ne peut avoir lieu pour des causes purement volontaires. puisque ces biens sont comme indéfiniment substitués au profit des gé- 907. Autorisations requises pour les emprunts à faire par les nérations futures, et que telle est leur irrévocable destination.

Nous avons vu, dans le paragraphe qui précède, qu'une commune qui est créancière, et qui est nantie d'un titre authentique et exécutoire. peut, au moyen de l'expropriation judiciaire, acquérir les immeubles de son débiteur; mais il est possible qu'au lieu d'être créancière, la commune soit elle-même la débitrice, et que ses fonds ou partie de ses fonds soient hypothécairement affectés à la sûreté de sa dette, comme nous l'avons vu plus haut (no 881); et alors se présente la question inverse de la précédente, laquelle consiste à savoir quelles sont les formalités à employer par le créancier de la commune pour exproprier sa débitrice.

Il est sans contredit qu'on doit alors remplir les formalités prescrites par le code de procédure civile sur l'exécution des expropriations forcées ; mais il faut encore ajouter à cette réponse la décision contenue en l'article 46 de la loi du 18 juillet 1837, portant que << la vente des biens mobiliers et immobiliers des «< communes, autres que ceux qui servent à un usage «public, pourra, sur la demande de tout créancier << porteur de titres exécutoires, ètre autorisée par << une ordonnance du roi, qui déterminera les formes « de la vente. »

Mais reprenons les principales expressions de ce texte, pour en mieux démontrer le véritable esprit.

La vente des biens mobiliers. Ce passage, sainement entendu, ne doit être appliqué qu'à une vente collectivement faite d'une masse quelconque d'effets mòbiliers: car, à moins qu'il ne s'agisse de meubles précieux, il ne serait que ridicule de recourir à une ordonnance du roi pour pouvoir exécuter légalement la vente d'un ou de quelques meubles de peu de valeur, par la raison qu'ils appartiendraient à une commune, comme si elle devait supporter des frais qui ne tendraient qu'à sa ruine.

Autres que ceux qui servent à un usage public. Ainsi il ne serait pas permis de mettre en vente, même par ordonnance du roi, les communaux servant de pâturages aux bestiaux de la commune, ni les bois servant au chauffage des habitants ou aux réparations de leurs maisons, parce que ce sont là autant d'usages publics; et ici se représente avec toute sa force la prohibition de la loi du 2 prairial an v, citée au commencement de cette section.

Néanmoins il ne faudrait pas conclure de là que les communaux destinés à ces divers usages ne fussent point susceptibles d'être frappés d'hypothèques : car, comme nous l'avons vu plus haut sous le no 881, il

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communes, et pour les échanges.

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907. Art. 41. « Aucun emprunt ne pourra être << autorisé que par une ordonnance du roi rendue « dans les formes des règlements d'administration publique pour les communes ayant moins de cent « mille francs de revenus, et par une loi s'il s'agit d'une commune ayant un revenu supérieur. Néan<< moins, en cas d'urgence et dans l'intervalle des ses«sions, une ordonnance du roi rendue en la forme « des règlements d'administration publique, pourra autoriser les communes dont le revenu est de cent «mille francs et au-dessus, à contracter un emprunt jusqu'à concurrence du quart de leurs revenus. »

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Art. 42. « Dans les communes dont les revenus « sont inférieurs à cent mille francs, toutes les fois « qu'il s'agira de contributions extraordinaires ou « d'emprunts, les plus imposés aux rôles de la com<«mune seront applés à délibérer avec le conseil « municipal, en nombre égal à celui des membres en « exercice.

« Les plus imposés seront convoqués individuelle«ment par le maire, au moins dix jours avant celui « de la réunion.

«Lorsque les plus imposés seront absents, ils seront remplacés en nombre égal par les plus imposés << portés après eux sur le rôle. »

Les échanges en fait de biens communaux sont tout à la fois des actes d'acquisition et d'aliénation sur l'exécution desquels l'art. 46 de la loi de juillet 1837, déjà cité ci-dessus, statue de la manière sui

vante :

« Les délibérations des conseils municipaux ayant « pour objet des acquisitions, ventes ou échanges « d'immeubles, le partage des biens indivis, sont « exécutoires sur arrêté du préfet en conseil de pré«fecture quand il s'agit d'une valeur n'excédant pas « trois mille francs pour les communes dont le revenu <«<est au-dessous de cent mille francs, et vingt mille « francs pour les autres commnunes.

«S'il s'agit d'une valeur supérieure, il est statué << par une ordonnance du roi. »

On voit par là que c'est par-devant l'autorité admi

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semblables, c'est au conseil de préfecture que doivent être portés tous les débats élevés en ces diverses circonstances, parce qu'ils n'ont trait qu'au mode de partage et à la recherche de la manière la plus utile de l'opérer.

Mais en matière de partages des biens communaux, il s'élève en nombre indéfini des questions portant sur le fond des droits, et tendant à savoir si la propriété du sol appartient réellement à ceux qui en réclament une portion, et dans quelle proportion ils peuvent avoir le droit d'y prétendre.

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C'est aux questions de cette nature que s'appliquait l'art. 3 de la sect. I de la loi du 10 juin 1793 précitée, portant que « tous les procès actuellement pendants «ou qui pourront s'élever entre les communes et les propriétaires à raison des biens communaux ou pa<«<trimoniaux, soit pour droits, usages, prétentions, « demandes en rétablissement dans les propriétés << dont elles ont été dépouillées par l'effet de la puis«sance féodale, ou autres réclamations généralement « quelconques, seront vidés par la voie de l'arbitrage." A quoi il faut ajouter qu'au prescrit de la loi du 9 ventôse an iv, qui a aboli les arbitrages forcés, toutes ces mêmes contestations ont été et sont aujourd'hui renvoyées à la connaissance des tribunaux ordinaires.

908. En ce qui touche spécialement aux partages des biens communaux à exécuter entre les communes voisines, l'art. 1er, sect. v, de la loi du 10 juin 1793 porte que « les contestations qui pourront s'élever à raison du mode de partage entre les communes, << seront terminées, sur simples mémoires, par le di« rectoire de département, d'après l'avis de celui du << district» (aujourd'hui par le conseil de préfecture sur l'avis du sous-préfet); à quoi l'art. 2 ajoute que Les contestations de cette nature portant sur le fond «<le directoire de département, sur l'avis de celui du du droit des biens communaux, sont donc rentrées « district, prononcera pareillement, sur simples mé- aujourd'hui dans les attributions des tribunaux ordi<«<moires, sur toutes les réclamations qui pourront naires; et elles se présentent tellement multipliées et « s'élever à raison du mode de partage des biens com- variées dans leurs objets, qu'il faudrait un demi-vo«munaux (1). » lume employé à en présenter la série et l'éclaircisseOn voit par là que, dans cette attribution de compé-ment: pourquoi nous renvoyons aux très-amples explitence administrative, il ne s'agit que du mode de partage ou de la manière de l'opérer, et que toutes les questions portant sur le fait de savoir si, de part ou d'autre, il y a réellement droit de copropriété foncière, sont étrangères à cette disposition de la loi.

cations de détail que nous en avons données à cet égard dans notre Traité du droit d'usufruit, pour ne pas nous recopier ici. (Voy. aussi dans le Traité des droits d'usage servitudes réelles.)

SECTION V.

DES ACTIONS JUDICIAIRES CONCERNANT LES COMMUNES ET
LES SECTIONS DE COMMUNE.

Ainsi, à supposer que l'une des parties veuille exiger un trop grand morcellement dans les fonds qui sont à partager, et que l'autre s'oppose à ce système de division, qu'elle soutient être trop parcellaire; à supposer qu'il y ait contestation sur la question de savoir si les lots de partage doivent être adjugés par la voie du sort, ou si l'on ne doit pas plutôt prendre le parti de les assigner, en connaissance de cause, à la proximité et convenance des communes copartagean- 909. Les maires ou syndics représentent la commune. Divites, afin d'éviter les embarras d'une jouissance plus difficile, et des servitudes qu'il faudrait établir pour l'exercice des communications, si l'emplacement des lots était autrement combiné; à supposer, enfin, qu'il s'élève quelque difficulté sur la réserve et la fixation des chemins et passages qu'il pourrait être nécessaire ou utile d'établir sur un des lots pour la desserte ou l'exploitation de l'autre dans tous ces cas et autres

(4) DURANTON, no 216 et 317, dit ici : « Généralement les contestations relatives aux biens communaux sont de la compétence des tribunaux ; mais lorsque, en exécution de la loi du 10 juin 1793 qui, en autorisant le partage des biens communaux, a dépouillé les communes, et a eu des effets si désastreux pour les habitants pauvres, ces mêmes biens ont été partagés, les contestations élevées entre la commune et les copartageants détenteurs ou occupants, depuis cette loi, ont été du domaine des conseils de préfecture; et toutes les usurpations des biens communaux commises depuis la même loi jusqu'à celle du 9 ventôse an x11, soit qu'il y ait eu ou non un partage exécuté, doivent pareillement être jugées par ces conseils, s'il s'agit de l'intérêt de la commune vis-à-vis des usurpateurs. Mais les usurpations d'un copartageant ou d'un tiers sont du ressort des tribunaux civils,

• Au surplus, d'après le décret du 9 brumaire an x11, les com

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sion de la matière.

909. Remarquons d'abord et en préalable qu'aux termes de l'art. 69, § 5, du code de procédure, et de l'art. 10, § 8, de la loi du 18 juillet 1837, les actions judiciaires concernant les communes ne doivent être

munautés d'habitants qui n'ont point partagé leurs biens communaux en vertu de cette loi du 10 juin 1793, et qui ont au contraire continué le mode de jouissance de ces biens, ont dû continuer à en jouir de la même manière; et ce mode de jouissance ne peut être changé que par une ordonnance royale, rendue sur la demande des conseils municipaux, après que le sous-préfet et le préfet anront donné leur avis: en sorte que si un bien communal servant de pacage est resté déclos, ni le maire, ni le conseil municipal ne peuvent le faire clore, ni exiger de chaque habitant une redevance de leur seule autorité, mais ils peuvent délibérer sur cet objet, prendre l'avis du sous-préfet sur la délibération, et la transmettre au préfet, qui peut l'approuver, la modifier ou la rejeter en conseil de préfecture, sauf, de la part du conseil municipal, et même d'un ou plusieurs habitants ou ayants droit à la jouissance, le recours au conseil d'État (art. 5 dudit décret). »

discutées que contradictoirement avec leurs maires (1) | ou leurs syndics, parce qu'il suffit que la lutte soit terminée avec l'agent de la corporation, qui, collectivement prise, embrasse les intérêts de tous les associés; et que, si tous les habitants devaient personnellement figurer au procès, la valeur de son objet pourrait être bientôt dévorée en frais de procédure. Quant au fond, nous avons à examiner ici successivement six choses principales:

La nécessité et l'importance de l'autorisation requise de la part des communes pour pouvoir valablement compromettre en jugement;

Les formalités à employer par les communes pour obtenir l'autorisation de plaider;

Les formalités nécessaires pour pouvoir régulièrement traduire les communes à plaider par-devant les tribunaux;

Les moyens par l'emploi desquels les particuliers peuvent agir dans l'intérêt d'une commune, et les diverses circonstances dans lesquelles ces sortes d'actions peuvent être proposées;

Quelles sont les formalités spéciales à employer dans les actions judiciaires agitées entre les communes et les sections de commune;

Enfin, quels sont les principes et les règles des transactions qu'on peut faire avec les communes.

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ou défendre en justice.

911. Nécessité pour l'administration supérieure de délibérer

mûrement sur les autorisations de cette nature. 912. Nécessité du principe qui fait représenter la commune par son maire. Ce n'est qu'en cas d'erreur evidente

que l'autorisation doit être refusée. 913. Lorsqu'une commune a été régulièrement autorisée sur une demande principale, doit-elle encore recourir à de nouvelles autorisations sur les questions incidentes? 914. Après le jugement de première instance, la commune doit-elle recourir à une nouvelle autorisation pour plaider en cause d'appel? 915. La nullité résultant de ce que la commune a plaidé sans autorisation n'est que relative. Rappel des principes sur le contrat judiciaire.

910. Aux termes de l'article 49 de la loi du 18 juil. let 1857, « nulle commune ou section de commune « ne peut introduire une action en justice sans être « autorisée par le conseil de préfecture. »

A quoi l'art. 54 ajoute que, « en aucun cas la com«mune ne pourra defendre à l'action qu'autant qu'elle « y aura été expressément autorisée. »

Ainsi il faut tenir pour constant qu'en thèse générale les communes doivent être autorisées pour agir et défendre valablement en justice ordinaire; et la loi nouvelle ne fait en cela que consacrer les principes de Ja jurisprudence plus ancienne.

Nous disons en thèse générale, altendu que cette règle n'est pas sans exception: car, suivant l'art. 55, « le

(1) Ou, à leur défaut, avec leurs adjoints. Voy. la loi du 29 vendémiaire an v.

PROUDHON.

« maire peut toutefois, sans autorisation préalable, « intenter toute action possessoire, ou y défendre, ct « faire tous autres actes conservatoires ou interrup«tifs de déchéance,» attendu l'urgence que comportent les actions dans ces cas exceptionnels.

Ainsi, lorsqu'il s'agit d'interrompre le cours d'une prescription qui approche de son terme, celui d'une péremption d'instance, ou de saisir le moment qui reste encore pour former un appel, le maire peut seul agir de suite, mais à la charge de recourir promptement à la demande en autorisation voulue par la règle générale, pour que l'action soit valablement liée en justice ordinaire.

On doit encore mettre en dehors de la règle qui exige l'autorisation préalable, le cas où il s'agit d'actions portées en police correctionnelle, attendu qu'aucun intérêt particulier des parties engagées dans la lutte ne doit retarder ni paralyser l'action publique (2).

911. Pour se convaincre de l'importance que les lois attachent et que les organes de l'administration publique doivent attacher à l'autorisation éclairée et préalable du maire qui se porte à agir ou défendre, dans l'intérêt de sa commune, par-devant les tribunaux, il y a plusieurs choses à remarquer, et qu'il ne faut jamais perdre de vue.

Et d'abord, la loi, qui protége également tous les citoyens, veut nécessairement que les maires et autres administrateurs municipaux ne puissent abuser arbitrairement de leur position en intentant, dans l'intérêt de la commune, des actions tracassières contre des habitants qui auraient le malheur d'être les objets de leur haine.

Elle ne veut pas que des municipaux pleins d'amour pour la chicane, soient d'autant plus portés à satisfaire cette passion. qu'en intentant des procès au nom de leur commune. ils seraient convaincus d'avance que la chance de la charge des frais ne devrait pas retomber sur eux personnellement en définitive.

intentées ou soutenues par les maires, ces adminisElle ne veut pas que. par des actions témérairement trateurs, syndics de l'association municipale, aient la faculté de ruiner toute une commune par la charge des frais de procès qui, en cas de condamnation, devraient tomber sur elle.

On voit par là combien l'attention de l'administration publique, revêtue du pouvoir tutélaire sur les communes, doit être mèrement réfléchie lorsqu'il s'agit d'estimer d'avance les probabilités de perte ou de gain des procès qui sont à intenter par ou contre les communes. pour les y autoriser à tout événement.

Voilà pourquoi l'autorisation préalablement nécessaire aux communes pour plaider, doit être le sujet d'un examen très sérieux et approfondi de la part de l'autorité administrative supéricure, dont les agents doivent être incomparablement plus instruits et plus au fait des affaires que de simples administrateurs municipaux.

Voilà pourquoi encore la loi de juillet 1837, que nous tâchons d'expliquer, a voulu, par une disposition introductive d'un droit nouveau, protéger pius effica cement les habitants ut singuli, en les autorisant, dans les formes que nous allons indiquer ci-après, à intervenir dans les procès de ce genre, pour veiller à la conservation de leurs droits d'usage individuels, ou pour les revendiquer.

912. D'autre part, et pour en revenir à l'application des principes judiciaires, il faut nécessairement reconnaitre que toute question de propriété agitée vis

(2) Ce principe est consacré, en Belgique, par l'art. 148 de la loi communale du 30 mars 1836.

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à-vis d'une commune, ne doit être poursuivie ou sou- | tenue que contradictoirement avec la corporation communale agissant ou défendant ut universitas, puisqu'il n'y a que ce corps qui soit le vrai ou prétendu propriétaire de la chose litigieuse, et qu'en consé quence il n'y a que lui qui puisse la compromettre en jugement. Il faut donc, et il faut de toute nécessité, que les actions judiciaires concernant les biens communaux soient agitées en face du maire de la commune, ou d'un autre syndic légalement établi pour représenter tous les habitants: autrement on ne pourrait plaider sans porter l'agitation dans toutes les familles, sans troubler essentiellement la paix publique, et tout dévorer en frais de justice, s'il était nécessaire de citer par-devant les tribunaux tous les habitants d'une ville ou d'un village sur la question de propriété d'un fonds quelconque mis en litige entre la commune et un tiers.

Cependant il faut observer que, quelque redoutable que soit l'entreprise d'un procès, il ne suffit pas qu'on aperçoive le peril d'y succomber en définitive. pour que l'administration doive refuser à une commune l'autorisation qui lui est nécessaire à l'effet d'ester en jugement devant les tribunaux : car s'il en était ainsi, les communes ne devraient presque jamais étre a mises à compromettre en justice, tant il y a d'incerti tude sur l'issue du jugement des hommes. Et ne voit-on pas très-souvent que la cour de cassation elle-même, faisant d'honorables retours sur sa jurisprudence précédente, rend des arrêts contraires à d'autres qu elle avait antérieurement prononcés sur des questions parfaitement identiques?

Il faut considérer d'ailleurs que, quoique l'administration à laquelle on demande son autorisation ne soit pas compétente pour préjuger le fond de l'affaire sur l'entreprise de laquelle on sollicite son agrément, elle est néanmoins revêtue d'une tutelle de surveillance pour mettre obstacle à l'effet des passions de haine, de rivalité ou de cupidité qui, suivant que l'expérience l'a toujours démontré, ne sont que trop souvent le mobile des procès.

Ainsi, toutes les fois qu'une commune demande à être autorisée pour intenter une action judiciaire ou y défendre, et qu'elle fait voir, par des preuves légales, qu'elle a en sa faveur quelques apparences de bon droit, elle doit obtenir son autorisation.

Toutes les fois, au contraire, que l'administration reconnait que les maires et officiers municipaux de la commune sont évidemment dans l'erreur sur leur prétention, ou qu'ils ne se portent à plaider que par des motifs étrangers aux vrais intérets de la commune, l'autorisation doit être refusée.

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pale, doit-elle encore recourir à de nouvelles autorisations sur les quest'ons incidentes qui peuvent s'élever de part ou d'autre dans la suite du procès?

C'est une maxime générale dans tous les règnes, que l'accessoire doit suivre le sort du principal: Major enim quæstio minorem causam ad se trahil (I.. 54, ff. lib. V. tit. I). D'où il faut conclure que l'autorisation accordée sans réserve sur la question principale, s'applique également aux questions incidentes qui, en étant la suite, doivent être regardées comme parties morales et accessoires du tout, et qu'en dernière analyse la commune ne doit point être tenue de recourir à d'autres autorisations pour agir ou défendre sur les debats incidemment élevés dans la cause principale, Il en doit être de même, et à plus forte raison, à l'égard des difficultés qui peuvent s'élever sur l'exécution des jugements rendus avec une commune régulièrement autorisée, lorsqu'il s'agit de revenir en justice pour plaider sur ces difficultés incidentes.

914. SECONDE QUESTION. Après le jugement de première instance, la commune doit-elle recourir à une nouvelle autorisation pour plaider en cause d'appel? Suivant l'art. 49 de la loi du 18 juillet, « après tout « jugement intervenu, la commune ne peut se pourvoir devant un autre degré de juridiction qu'en « vertu d'une nouvelle autorisation du conseil de pré«fecture. » D'où il résulte qu'une nouvelle autorisation sur appel ou sur pourvoi en cassation n'est nécessaire qu'à la commune qui a succombé dans les débats précédents, puisque ce n'est qu'à celle commune que la loi impose l'obligation de recourir à une nouvelle autorisation pour se pourvoir devant un autre degré de juridiction. En conséquence de quoi la commune qui a gagné son procès, n'est point tenue de se faire autoriser à soutenir le bien jugé, dans le cas où sa partie adverse se porte à renouveler le procès par-devant un degré de juridiction supérieur.

On sent d'ailleurs combien il serait ridicule d'obliger une commune à se faire autoriser pour jouir de sa victoire. comme si elle devait demander la permission de profiter des effets de la première autorisation par elle obtenue (1)!

915. TROISIEME QUESTION. Lorsqu'une commune a plaidé sans autorisation, le jugement qui a terminė la contestation doit être affecté de nullité, puisqu'il a été rendu en contravention à une formalité sans laquelle le compromis judiciaire ne pouvait être valablement formé; mais celle nullité est-elle absolue? ou n'est-elle que relative? En d'autres termes, n'y a-t-il que la commune qui puisse s'en prévoloir pour se faire relever de la condamnation prononcée contre elle? ou, si sa partie adverse a été elle-même condamnée, pourraEt enfin, dans le doute, la commune doit obtenir t-elle aussi se prévaloir de la même nullité pour obtel'autorisation qu'elle demande, parce que l'administra- nir décharge de la condamnation par elle essuyée? tion étant incompétente pour prononcer sur le fond Pour bien faire saisir la solution que nous allons du procès, l'est nécessairement auss: pour en apprécier donner à celle question, nous sommes obligé de reau juste les moyens, et que d'ailleurs on n'a principa-monter jusqu'aux premiers principes qui ont toujours lement ici recours à elle que pour prévenir les abus gouverné la matière. par lesquels on pourrait d'avance paralyser l'action de la justice.

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Quand deux parties comparaissent simultanément devant le juge qui doit prononcer sur leurs débats, ou Nous terminerons ce paragraphe par l'examen de que celle qui a été citée par l'autre vient devant le quelques questions qui s'y rapportent spécialement. même juge notifier ses défenses, il se forme entre 913. PREMIERE QUESTION. Lorsqu'une commune a elles ce qu'on appelle un compromis ou quasi-contrat été régulièrement autorisée sur une demande princi-judiciaire en vertu duquel elles s'engagent récipro

(1) Op. conf. de DURANTON, Lo 215; de TOULLIER, no 54, qui Cette distinction avait été faite par la jurisprudence en Belajoute: « Mais elles n'ont pas besoin d'autorisation pour se pour-gique ; la commune intimée sur l'appel n'a pas besoin d'autorisation voir en cassation. Tout cela résulte de l'art. 43 de l'édit du mois pour y défendre. (19 juillet 1827. C. de B., J. de B., 1829, 2, 117. d'août 1764 qui est encore en vigueur, ainsi que l'ont décidé deux 8 mai 1833. Cass., J. de B., 1833, 1, 219.) Op. couf, de Toullier, arrêts de la cour de cassation des 1er floréal an ix et 4 fructidor no 54.

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quement à attendre la décision du juge pour satisfaire de la nullité purement relative aux intérêts de la comà ce qu'il aura prononcé, sauf toutefois la voie d'ap-mune qui n'avait pas été autorisée (1).

pel ou autre recours, suivant l'importance ou la nature de l'objet litigieux. Ce compromis. quoique tacite, n'en a pas moins les effets d'une véritable convention, comme s'il avait été stipulé dans la forme la plus expresse, et il se trouve être la base essentielle de la décision qui est à prononcer par le juge : Nam, sicut in stipulatione contrahitur, ita judicio contrahi; proindè non originem judicii spectandam, sed ipsam judicati velut obligationem (L. 5. §11, ff. lib. XV, tit. I). En sorte que s'il y a dans cette convention préalable quelques nullités résultant de l'incapacité de l'une des parties, elles devront paralyser les effets du jugement. Voilà pourquoi les mineurs et les femmes mariées ne peuvent valablement figurer en justice qu'autant qu'ils agissent avec l'assistance de leurs tuteurs ou maris, attendu qu'autrement ils n'auraient pas la capacité d'y compromettre valablement.

Il résulte de tout cela que la question de savoir si la nullité qui affecte un jugement rendu avec une commune non autorisée n'est que relative ou si elle est absolue, doit être résolue conformément à la règle qui s'observe dans les contrats, puisqu'elle n'a pour cause que l'irrégularité du compromis judiciaire. qui n'est autre chose qu'une convention; qu'en conséquence il n'y a là qu'une nullité relative à faire valoir dans l'intérêt de la commune seulement. et non dans l'intérêt de la partie adverse, vis-à-vis de laquelle le jugement doit être, sous ce rapport. considéré comme valable. Telle est, à cet égard, la disposition formelle de l'article 1125 du code civil, portant que « les per«sonnes capables de s'engager ne peuvent opposer l'incapacité du mineur, de l'interdit ou de la femme « mariée avec qui elles ont contracté. » Ce mème principe avait déjà été explicitement consacré à l'égard des communes par l'art. 5 d'une loi de la Convention rendue pour déterminer les cas où les jugements peuvent et doivent être annulés en matière civile. Aux termes de cet article, « il ne peut également y avoir «lieu à cassation au préjudice des mineurs, des in«terdits, des absents indefendus, des femmes marices, « des communes, ou de la république, sous prétexte «que le commissaire national n'aurait pas été en«ndu dans les affaires qui les intéressaient, et qui « ont été jugées à leur avantage. »

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Ainsi, à supposer qu'une commune n'ait pas été régulièrement autorisée à plaider, et qu'elle ait été condamnée, elle pourra se pourvoir par les voies de droit, soit en appel, soit en cassation, pour faire annuler le jugement, sans que sa partie adverse ait réciproquement la même ressource.

§ II.DES FORMALITÉS A EMPLOYER AU NOM DES COMMUNES POUR OBTENIR L'AUTORISATION DE PLAIDER EN JUSTICE ORDINAIRE.

916. Le conseil communal délibère sur la proposition du maire. Le conseil de préfecture décide.

917. Voie de recours contre la décision du conseil de préfec

ture.

916. Comme on l'a déjà dit, dans tous les temps les communes ont dû être autorisées par les organes de l'administration publique pour ester ou compro. mettre en jugement par-devant les tribunaux.

Avant la révolution, c'était des intendants de province que devait émaner cette autorisation; mais, sans qu'il soit actuellement besoin de remonter plus haut, la loi du 28 pluviose an vIII, confirmée par celle du 18 juillet 1857, a voulu que ce fut aux conseils de préfecture à accorder aux communes l'autorisation dont il s'agit, et telle est la règle qui nous gouverne aujourd'hui.

C'est le maire de la commune qui est chargé de la représenter en justice, tant en demandant qu'en défendant: c'est par conséquent sur lui que pèse l'obligation de satisfaire aux démarches nécessaires pour obtenir l'autorisation sans laquelle il ne pourrait remplir, dans les cas ordinaires, les fonctions de représentant de la commune.

Pour cela, il doit d'abord inviter le conseil municipal à délibérer et donner son avis sur l'objet du procès; et en cas que l'on ne soit pas à l'une des époques où les conseils municipaux doivent être périodiquement réunis, il doit s'adresser au préfet pour lui annoncer la position où il se trouve, et lui demander la permission de convoquer extraordinairement le conseil de sa commune pour délibérer sur ce qui fait l'objet de sa demande.

Si le conseil municipal, après avoir pris connaissance de l'affaire, est d'avis d'entreprendre le procès, sa délibération prise à ce sujet, jointe à la demande en autorisation, et accompagnée des titres et renseignements dont la commune prétend se prévaloir, doit être, par l'intermédiaire du sous préfet, adressée au préfet, qui ordonne que le tout soit communiqué à trois jurisconsultes par lui désignės, pour avoir leur avis sur le mérite de la cause; ensuite de quoi l'affaire Du reste, il est sans contredit que si la partie ad-est renvoyée au conseil de préfecture pour statuer sur verse de la commune a succombé dans ce premier la question de savoir si la commune doit être, ou non, jugement, elle pourra, pour en obtenir la réforme, se autorisée à plaider. (Voy. à ce sujet, l'art. 4 du décret pourvoir par tous les moyens de droit inhérents au fond du 17 avril 1812.) de la cause, mais sans avoir la faculte de se prevaloir

(1) DURANTON, no 215, a émis une opinion contraire : « Les communautés des villes, bourgs ou villages ne peuvent suivre aucune action en justice, soit en demandant, soit en défendant, sans y être autorisées par le conseil de préfecture. L'autorisation n'est pas seulement exigée dans l'intérêt des communes, mais aussi afin qu'elles n'inquiètent pas sans motif les particuliers.

a Elle est tellement de rigueur que si e le n'est point intervenue, les jugements, même ceux rendus en faveur des communes ou sections de commune, sont absolument nuls ; et la nullité n'est point couverte par l'autorisation obtenue ensuite par la commune pour défendre à la demande en cassation; elle peut même être opposée par l'adversaire de la commune, quoiqu'il ne l'ait fait valoir ni en première instance ni en appel.

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Dans cette position, si le conseil de préfecture rend

« Le jugement doit même faire mention de l'autorisation, sinon elle est réputée n'avoir pas été obtenue.

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Ainsi donc les particuliers ne peuvent régulièrement assigner une commune ou section de commune qu'après en avoir obtenu la permission par écrit du conseil de préfecture, à peine de nullité des jugements qui seraient rendus. Ils doivent donner copie de la permission avec l'exploit de la demande. Cette autorisation ayant pour principal objet d'empêcher les communes de soutenir un procès injuste et onéreux, l'administration peut la refuser, en ce sens qu'elle peut ordonner à la commune de passer condamnation, mais non en ce sens que le demandeur puisse être entravé dans l'exercice de son droit. »

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