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rer de là aucune conséquence pour faire maintenir, dans la partie ci-devant autrichienne du Hainaut, des droits qui, à l'époque où a été rendu ce décret, avaient été reconnus ne plus exister dans la partie française de la même contrée; des droits qui, dès-lors, étaient depuis long-temps supprimés dans celle-ci, par le seul effet des lois du 4 août 1789; des droits enfin dont l'abolition est devenue commune à Ja partie ci-devant autrichienne du Hainaut, par la publication qui y a été faite, non seulement des lois du 4 août 1789, mais encore de celles du 15-28 mars 1790 et du 13-20 avril 1791.

» Et vainement vient-on vous dire que, par l'abolition du régime féodal, les ci-devant seigneurs du Hainaut ont bien perdu, pour l'avenir, le droit d'avoir en terre non extrayé, c'est-à-dire, le droit exclusif qu'ils avaient de consentir à l'ouverture et à l'exploitation des Mines; mais qu'ils n'ont pas perdu les fruits qui leur étaient alors acquis de l'exercice de ce droit; qu'il en doit être de leur droit d'avoir en terre non extrayé, comme de leur droit de déshérence; que, malgré la suppression de leur droit de déshérence, ils conservent les biens qui leur étaient échus à ce titre, pendant le régime féodal; qu'ils conservent de même leurs rentes non féodales ni censuelles qu'ils s'étaient réservées sur ces biens en les aliénant ; qu'ils doivent par conséquent conserver aussi les droits d'entre-cens qui leur ont été constitués pour prix de la concession qu'ils ont faite de l'exercice de leur droit d'avoir en terre non extrayé.

» Cette objection ne roule que sur une mauvaise équivoque. Oui sans doute, les seigneurs qui ont concédé, moyennant des rentes purement foncières, les biens qui leur étaient échus pendant le régime feodal, doivent encore aujourd'hui percevoir ces rentes, comme ils les percevaient avant 1789; mais pourquoi ? Parceque ces rentes sont pour eux le prix de biens dont la possession corporelle et la propriété foncière leur étaient acquises antérieurement à l'abolition de la féodalité ; parceque ces biens étaient pour eux des fruits de leur haute-justice; et qu'en supprimant leur haute-justice pour l'avenir, la loi n'a ni voulu ni pu leur ôter les fruits que cett e haute-justice avait produits avant sa suppression.

>> Mais le droit d'entre-cens, de quoi était-il le prix pour les ci-devant seigneurs? Il était pour eux le prix d'une simple permission d'ouvrir et d'exploiter des Mines qui ne leur appartenaient pas ; il était pour eux le prix de l'exercice de leur droit de police spéciale sur cette partie des richesses de leur territoire ; il était pour eux, ce qu'était pour les empe

reurs romains et pour nos rois, le dixième que les uns et les autres se réservaient sur le produit des Mines dont ils autorisaient l'ouverture; il était pour eux ce qu'est aujourd'hui pour le gouvernement, d'après, l'art. 6 de l'arrêté des consuls, du 23 germinal an 11, la contribution (remarquez bien ce terme, c'est celui de l'arrêté même), la contribution sur les charbons extraits des Mines, qui est réservée au profit de l'État, par les arrêtés particuliers portant permission de les extraire; en un mot, il était pour eux, non un droit foncier et représentatif d'une concession de fonds, mais un droit de justice, un droit qu'ils percevaient comme hauts-justiciers et non comme propriétaires.

» Mais, dit-on encore, par le seul fait de la découverte des Mines dont ils ont permis l'ouverture, les ci-devant seigneurs avaient acquis la possession réelle des matières qu'elles contenaient ; cela résulte de l'art. 2 du chap. 130 des chartes, du Hainaut, lequel déclare que, par l'avoir en terre non extrayé, compris par l'art. I au nombre des attributs de la haute-justice, sont entendues CHOSES TROUVÉES en terres, comme charbons, pierres et semblables; ainsi, le ci-devant seigneur qui a permis l'ouverture d'une Mine, a concédé une chose qui, par la découverte qu'on en avait faite, était devénue un fruit de sa haute-justice, et qui par conséquent lui appartenait foncièrement; dèslors, point de différence entre la rente foncière qu'un ex-seigneur s'est réservée sur un bienfonds qui lui était échu par déshérence avant 1789, et le droit d'entre-cens qu'il s'est réservé sur une Mine découverte avant la même époque.

» Cette objection n'est pas plus difficile à résoudre que la précédente. Il suffirait même, pour la faire entièrement disparaître, de nous rappeler que l'art. 14 du chap. 122 des chartes générales repousse invinciblement toute idée de propriété foncière des Mines, soit dans la personne du seigneur qui en a permis l'exploitation, soit dans la personne du concessionnaire qui les exploite en vertu de cette permis

sion.

» Mais s'il faut répondre directemeut à l'art. 2 du chap. 130 des mêmes lois, nous dirons que, par les mots choses trouvées en terre, cet article n'entend pas les choses simplement découvertes, mais les choses appréhendées réellement ; et c'est une vérité facile à établir.

» Il est des choses qui, par le droit commun, appartiennent à celui qui les trouve; car trouver une chose, c'est une manière de l'occuper,

et on sait que l'occupation est un des moyens d'acquérir établis par le droit naturel, comme par le droit positif. Or, pour être censé avoir trouvé une de ces choses, suffit-il de l'avoir découverte ?

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Non, il faut l'avoir appréhendée. Inventio (dit Voët, sur le digeste, titre de acquirendo rerum dominio, no 9), inventio quoque occupationis species est, ad quam non sufficit quod quis rem viderit, aut sciat quo in loco sit, sed necesse est ut loco moverit seu apprehenderit, eo quod dominium rerum à naturali possessione cœpit.

» La loi 3, §. 3, D. de acquirendá vel amittendá possessione, justifie parfaitement cette doctrine. Pour acquérir, dit-elle, la possession d'un trésor caché dans le fonds d'autrui, il ne suffit pas de savoir qu'il y existe, il faut l'appréhender de fait et le déplacer. Quidam putant Sabini sententiam veriorem esse, nec aliàs eum qui scit, possidere, nisi si loco mo· tus sit; quia non sit sub custodiá nostrá: quibus consentio ; et Godefroy, dans sa note sur ce texte, en tire la conséquence que res non dicitur inventa, nisi apprehensa sit.

» Si la simple découverte d'une Mine p'en a pas acquis la propriété au ci-devant seigneur, si le ci-devant seigneur n'a acquis, par là, que le droit d'ouvrir et d'exploiter la Mine, bien évidemment le ci-devant seigneur n'a pu devenir propriétaire des substances dont la Mine était composée, qu'au fur et à mesure de l'extraction qu'il en a faite. Et par la même raison, si, au lieu de l'ouvrir et de l'exploiter lui-même, il en a permis l'ouverture et l'exploitation à un tiers, ce n'est que par l'extraction des substances minérales, que celui-ci a pu en acquérir la propriété. La loi 6, D. de donationibus, est là-dessus très-formelle. Si vous m'avez permis gratuitement de tirer des pierres de votre fonds, ces pierres m'appartiendront dès le moment où elles auront été extraites, soit par moi, soit par mes ouvriers; parceque l'extraction que j'en aurai faite de votre consentement, équipollera de votre part à une tradition actuelle. Qui saxum mihi eximere de suo permisit donationis causa, statim cùm lapis examptus est, meus fit: neque prohibendo me evehere, efficit ut meus esse desinat; quia quodammodo traditione meus factus est. Planè si mercenarius meus exemit, mihi exemit. Mais si je vous ai vendu ou affermé le droit de tirer des pierres de mon fonds, ces pierres resteront dans ma propriété, tant que vous ne les aurez pas extraites. Sed si is qui à me emerat, sive mercede conduxerat, ut paterer eum sibi jure eximere, si antequàm eximat, me pænituerit, meus lapis durat.

» Autre objection. Par l'art. 14 du chap. 122. des chartes générales, il est dit que le droit d'entre cens est réputé héritage, c'est-à-dire, immobilier. Assurément si ce droit n'était, comme vous le prétendez, qu'un droit de justice, il eût été bien inutile que le législateur le rangeât expressément dans la classe des immeubles incorporels. On savait assez que telle devait être la nature des droits inhérens à une haute-justice. Or, on ne doit pas supposer que le législateur ait rien dit de superflu. Donc, c'est aller contre son intention, que de considérer le droit d'entre-cens comme un droit de haute-justice.

>> Deux réponses.

» 10 II importerait peu que les rédacteurs des chartes générales se fussent trompés sur le caractère du droit d'entre-cens; leur méprise, à cet égard, ne pourrait pas soustraire à l'empire des lois qui ont aboli tous les droits de justice, un droit qui serait véritablement de cette

nature.

» 2o De Quelque manière qu'on envisage le droit d'entre-cens, on trouvera toujours un pléonasme dans l'article dont il s'agit. Car,point de milieu; ou le droit d'entre-cens qu'un seigneur se réservait, en concédant l'exploitation d'une Mine, était pour lui un droit de justice; ou c'était pour lui un droit foncier qui faisait partie du gros de son fief. Or, dans l'un comme dans l'autre cas, il ne pouvait pas être douteux que ce droit ne dut être considéré comme immeuble. Donc, dans l'un et l'autre cas, l'article dont il s'agit, a résolu un doute qui n'existait point. Donc, dans l'un et l'autre cas, cet article est inutile. Donc, dans l'un et l'autre cas, point de conséquence à tirer de cet article.

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Mais, dit encore le cit. Decarondelet, vous ne pouvez au moins disconvenir qu'en ma qualité de seigneur haut-justicier de la Hestre et de Haine-Saint-Pierre, j'avais seul, en 1757, le droit de rechercher, de fouiller, d'extraire le charbon que recélaient dans leur sein les fonds situés dans l'un et l'autre territoire.

>> Ce droit, je pouvais l'appréhender et l'exer cer par moi-même ; et si je l'eusse fait, j'en jouirais encore aujourd'hui. La loi du 12-28 juillet 1791 m'y maintiendrait pour cinquante ans, comme ancien concessionnaire; car, dans cette hypothèse, je serais, comme particulier, le concessionnaire de l'ex-seigneur haut - justicier de Haine-Saint-Pierre et de la Hestre. » Or, au lieu d'entreprendre et de diriger moi-même l'exploitation des Mines qui se trou vent dans ces deux territoires, je l'ai entreprise et dirigée par les mains de la compagnie Des

chuytener; je la conserve donc aussi par les mains de cette compagnie; je dois, par conséquent, continuer de jouir de la part du produit de ces Mines, que la compagnie Deschuytener s'est engagée de me fournir en dédommagement du sacrifice que j'ai fait, en lui abandonnant l'exercice de mon droit exclusif d'exploitation.

» En un mot, ma condition ne peut pas être pire que si je n'avais pas contracté en 1757 avec la compagnie Deschuyneter; si je n'avais pas contracté avec elle, j'aurais joui par mes propres mains des Mines que j'avais seul le droit d'exploiter; je dois donc, d'après le contrat que j'ai fait avec elle, jouir encore de la prestation qui est pour moi représentative de ce droit.

» Cet argument, comme vous le voyez, porte tout entier sur la supposition que, si le cit. Decarondelet n'eût pas concédé le droit d'ouvrir et d'exploiter les Mines dont il s'agit, il les eût ouvertes et exploitées lui-même. Mais ce n'est là véritablement qu'une supposition. Le cit. Decarondelet pouvait sans doute ouvrir et exploiter par lui-même les Mines de ses deux seigneuries; mais en cette matière, comme en beaucoup d'autres, il y a loin de la possibilité au fait. L'exploitation d'une Mine de charbon exige des avances si considérables, qu'il est bien permis de croire que, dans le cas où le cit. Decarondelet n'eût pas trouvé à traiter avec une compagnie quelconque, comme il l'a fait en 1757 avec celle de Deschuytener, il n'aurait jamais eu la pensée d'exercer par ses propres mains le droit que lui attribuaient les chartes du Hainaut.

» D'ailleurs, avec des suppositions pareilles à celle que fait ici le cit. Decarondelet, on parviendrait à faire revivre presque tous les droits de fief et de justice, que les lois ont éteints de la manière la plus absolue.

>> Un seigneur qui, avant 1789, avait concédé un fonds de terre moyennant une rente féodale, peut dire aujourd'hui, pour la conservation de sa rente, tout ce que dit le cit. Decarondelet pour faire maintenir son droit d'entre-cens: si je n'avais pas contracté avec vous, je jouirais encore de mon fonds; je ne me suis exproprié de mon fonds, que sous la réserve d'une rente; cette rente est donc encore aujourd'hui subrogée à mon fonds; vous devez donc m'en continuer le paiement, puisque vous jouissez du fonds qu'elle représente.

Que répondrait-on à un ex-seigneur qui tiendrait un pareil langage? On lui montrerait le texte des lois du 17 juillet 1793, du 2 octobre suivant, du 7 ventôse an 2, et par cela seul il serait forcé au silence. Cet ex-seigneur aurait

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>> Veut-on un exemple plus rapproché de notre espèce? Figurons-nous un seigneur qui, avant 1789, et dans l'une des contrées où le droit de cours d'eau était regardé comme une attribution exclusive de la haute-justice, a permis à un particulier, moyennant une redevance annuelle, d'ériger un moulin sur une rivière non navigable. Ce seigneur peut dire aujourd'hui à son arrentataire : La rivière sur laquelle est bâti votre moulin, était, sous le régime féodal, entièrement à ma disposition. J'avais seul le droit d'y faire des prises d'eau, d'y pêcher, d'y établir des usines. Si, en vertu de ce droit, j'y avais alors érigé moi-même un moulin, il m'appartiendrait encore. Pourquoi donc ne jouirais-je plus de la rente qui a été le prix de la permission que je vous ai accordée d'y construire le vôtre ? Pouvez-vous continuer de profiter de ma concession, et m'en refuser le prix ?

» C'est ainsi, vous vous le rappelez, c'est ainsi que raisonnait le cit. Anthès, dans une affaire jugée le 12 nivôse dernier, au rapport du cit. Rousseau (1); et vous n'en avez pas moins déclaré sa rente abolie, non seulement parcequ'elle renfermait, dans sa stipulation, des clauses qui devaient la faire considérer comme féodale, mais encore parcequ'elle avait pour cause la cession d'un droit de cours d'eau qui était féodal dans la ci-devant Alsace. Comment, d'après cela, pourriez-vous aujourd'hui écouter le cit. Decarondelet, qui ne fait, en d'autres termes, que vous reproduire le système du cit. Anthès?

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Mais, si en thèse générale, et d'après son seul acte de concession du 12 janvier 1757, le cit. Decarondelet ne peut pas espérer de faire maintenir le jugement attaqué par les demandeurs, ne peut-il pas du moins le justifier par la transaction du 16 mars 1776 et par celle du 21 octobre 1787?

» Ici se présentent des questions absolument particulières à la cause du cit. Decarondelet; et la première consiste à savoir si la transaction du 16 mars 1776 ne place pas le cit. Decarondelet dans un cas d'exception, par cela seul

(1) V. l'article Moulin. §. 1.

qu'elle le présente, suivant lui, comme propriétaire foncier des terrains sous lesquels existent les mines dont il s'agit.

› Cette question est mélée de droit et de fait. » Dans le droit, la redevance connue dans le ci-devant Hainaut, sous le nom d'entre-cens, est-elle conservée au profit des ex-seigneurs qui, avant l'abolition du régime féodal, avaient concédé des mines existantes intégralement sous leurs propres fonds? Il y a, comme vous le savez, pour l'affirmative, un jugement du tribunal de cassation, du 11 nivôse an 8. La société charbonnière de Sars-Lonchamp atta

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» La seconde, c'est-à-dire, celle le cit. que Decarondelet fonde sur la transaction du 21 ocquait un jugement du tribunal civil du dépar- mière ; cependant elle peut se réduire à des tobre 1787, est plus compliquée que la pre

tement de Sambre et Meuse, qui l'avait condamnée à continuer au cit. Bruneau, ci-devant seigneur du lieu, le paiement du droit d'entrecens qu'il s'était réservé, en concédant à cette compagnie l'exploitation exclusive des veines de charbon qui se trouvaient dans ses propriétés foncières vous avez rejeté son recours; et vous en avez motivé le rejet sur le principe, que la suppression des droits féodaux prononcée par les lois de la république, ne peut profiter qu'aux propriétaires de la superficie des terres.

:

» Ce n'est pas qu'il n'y ait encore là-dessus de grandes difficultés, qui peut-être nous conduiraient, en dernière analyse, à dire qu'en cette matière, on ne doit pas ditinguer le cidevant seigneur propriétaire foncier, d'avec le ci-devant seigneur pur et simple; que, si le droit d'entre-cens est maintenu pour le premier, il doit l'être également pour le second; et que réciproquement, s'il est aboli pour second, il doit l'être également pour le premier (1).

le

>> Mais il est inutile de nous arrêter à cette discussion, parceque, dans le fait, le cit. Decarondelet convient lui-même qu'il n'est pas propriétaire foncier de la totalité des terrains où s'exploitent les Mines des produits desquel les il réclame une portion. De là, en effet, il résulte que, relativement à ceux de ces terrains qui ne lui appartiennent point, la contestation rentre absolument dans la thèse générale. Et d'ailleurs ce n'est pas sous cet aspect que la cause a été présentée au tribunal d'appel de Bruxelles. Devant ce tribunal, le cit. Decarondelet n'a point plaidé comme propriétaire foncier; sa qualité de propriétaire foncier n'y a même pas été reconnue. A la vérité, il y a produit des titres qui prouvent que, dans le dix-septième siècle, et même encore en 1776, il réunissait dans sa main la propriété d'une

(1) V. ci-après, S. 4.

termes assez simples.

» D'abord, quel argument peut-on tirer en faveur du cit. Decarondelet, de ce que, par l'acte du 21 octobre 1787, la société Deschuy tener lui a accordé le vingtième du prix des charbons qu'elle extrairait, non seulement sur les territoires de la Hestre et de Haine-Saint

Pierre, mais encore sur celui de Redemont, duquel il n'était pas seigneur?

>> Sans doute, on peut très-bien conclure de là que ce n'est point comme seigneur, que le cit. Decarondelet a joui de son droit de vingtième dans le territoire de Redemont. Mais, certes, de ec qu'il n'a pas joui comme seigneur dans le territoire de Redemont,il ne s'ensuit nullement que ce n'est pas comme seigneur qu'il a joui dans les territoires de la Hestre et de Haine-Saint-Pierre; et puisque son droit de vingtième a été pour lui un droit véritablement seigneurial dans ces deux derniers territoires, le tribunal d'appel de Bruxelles a dû au moins, quant à ces deux derniers territoires, le déclarer aboli.

>>Il y a plus. Le droit d'entre-cens étant aboli, en thèse générale, le tribunal d'appel de Bruxelles n'a même pas pu le conserver en entier au cit. Decarondelet, dans le territoire de Redemont; il n'a pu lui en conserver dans ce territoire qu'une portion très-faible; et voici pourquoi :

à

» Le cit. Decarondelet n'a acquis son droit de vingtième dans le territoire de Redemont, qu'en compensation de trois sortes de sacrifices qu'il a faits par l'acte du 21 octobre 1787, la compagnie Deschuytener : sacrifice des dommages-intérêts qu'il avait à réclamer en exécu. tion de l'arrêt du 15 mai; sacrifice de la portion qui lui revenait dans une somme de 8,000 florins, due par le gouvernement autrichien à la compagnie ; sacrifice sur son droit d'entre-cens dans les territoires de la Hestre et de HaineSaint-Pierre, en le réduisant du onzième au vingtième.

>>Or, de ces trois sacrifices, il n'y a plus que

les deux premiers qui puissent être considérés aujourd'hui, du moment qu'aujourd'hui nous devons regarder comme seigneurial, et par conséquent comme aboli, le droit d'entre-cens des territoires de Haine-Saint-Pierre et de la Hestre.

» Sous ce point de vue, en effet, la compagnie Deschuytener est censée avoir racheté du cit. Decarondelet une partie d'un droit seigneurial,moyennant la promesse de lui payer le vingtième du prix des charbons à extraire du territoire de Redemont. Or, vous savez que par la loi du 28 nivôse an 2, les ci-devant seigneurs sont, non seulement tenus de restituer les corps d'héritages qui leur ont été cédés pour prix d'affranchissement de droits féodaux, mais encore privés de toute action en paiement des sommes de deniers qui leur ont été promis pour la méme cause.

Donc, en considérant comme seigneurial le droit de onzième, que le cit. Decarondelet s'était réservé par l'acte du 12 janvier 1757, le cit.Decarondelet ne peut pas aujourd'hui exiger ce qui lui a été promis pour le rachat de la portion de ce droit correspondante à la différence du onzième au vingtième.

Donc le droit de vingtième dans le territoire de Redemont, lui ayant été promis en partie pour ce rachat, le cit. Decarondelet ne peut plus l'exiger à cette concurrence.

Donc il ne peut plus l'exiger qu'à raison de la part que formaient,dans le prix de l'acquisition de ce droit, les deux autres sacrifices dont nous venons de parler.

>> On dira sans doute que, pour déterminer cette part, il faudrait une ventilation, mais que toute ventilation est devenue impraticable, quant aux dommages-intérêts auxquels le cit. Decarondelet a renoncé par la transaction du 21 octobre 1787; que cette transaction ayant éteint le procès dont le jugement seul aurait pu fixer et liquider les dommages-intérêts prétendus par le cit. Decarondelet, il n'est plus possible de déterminer quelle est la part pour laquelle les prétentions de celui-ci sont entrées dans le prix de l'acquisition qu'il a faite d'un droit de vingtième sur le territoire de Redemont ; qu'ainsi, les choses ne sont plus entières; qu'il y a eu novation complète, et que, par conséquent, la transaction doit être exécutée comme titre nouveau et absolument indépendant du régime féodal.

» Mais d'abord, de ce que les dommagesintérêts ne peuvent plus être aujourd'hui appréciés; de ce qu'on ne peut plus connaître la quotité de la part qu'ils forment dans le prix de la cession faite au cit. Decarondelet, du vingtième des charbons à extraire de Rede

mont; de ce que, par là, toute ventilation est devenue impossible entre les dommages-intérêts et la réduction du droit de onzième des charbons à extraire de la Hestre et de HaineSaint-Pierre, quelle conséquence peut-on tirer en bonne logique ? Il n'y en a qu'une seule, et encore vous paraîtra-t-elle singulièrement forcée c'est que les dommages-intérêts doivent être censés avoir seuls formé le prix du droit de vingtième sur Redemont; c'est que le droit de vingtième sur Redemont doit être censé acquis par le cit. Decarondelet, moyennant sa seule renonciation aux dommages-intérêts qu'il avait à prétendre, et qui, quoique dérivant d'une source féodale, équipollaient pour lui à une somme échue et exigible; c'est, par une suite nécessaire, que le droit de vingtième sur Redemont, doit être considéré, dans la main du cit. Decarondelet, comme une prestation qui n'a rien de seigneurial dans son origine, et qu'il pas été aboli par nos lois nouvelles.

n'a

>> Eh bien! Admettons que tel soit en effet le résultat de la transaction; admettons par conséquent que le cit. Decarondelet doive être censé avoir,sa ns cause et par pure munificence, réduit du onzième au vingtième son droit d'entre-cens sur la Hestre et Haine-Saint-Pierre : au moins dans cette hypothèse, il restera toujours que son droit d'entre-cens sur la Hestre et Haine - Saint-Pierre n'a pas été créé par la transaction, et que la transaction l'a seulement diminué. Mais en le diminuant, l'a-t-elle dénaturé? En le diminuant,a-t-elle anéanti sa source primordiale? En le diminuant, a-t-elle effacé ce qu'il avait de féodal dans son origine? C'est demander, en d'autres termes, si, lorsque vous ayant prêté mille francs, je consens par une transaction de réduire ma créance à 500 francs, ce n'est pas toujours à titre de prêt que ces 500 francs me restent dus; si l'hypothèque que vous m'aviez donnée par le contrat de prêt, pour les mille francs, ne subsiste pas toujours depuis la transaction, pour la moitié de cette somme; si la caution qui m'avait répondu pour vous, des mille francs, ne demeure pas toujours obligée pour les 500 francs auxquels j'ai bien voulu me restreindre. Or, proposer de pareilles questions, n'est-ce pas demander s'il fait jour en plein

midi?

» On vous parle de novation! Eh! Dans quelle coutume vous en parle-t-on ? Dans une coutume qui déclare textuellement, chap. 114, art. 2, que, si quelqu'un était obligé ou autrement tenu de payer certaine dette à jour ou terme, et si avec lui y eût aucuns autres obligés ou tenus comme pleiges, et que le principal débiteur innove le contrat avec son créditeur,

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