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ciens experts, et des fonctionnaires publics de la commune où ils doivent remplir leur mission.

Sur des contestations élevées entre les sieurs Peytari et Benezech relativement à la propriété d'une pièce de terre, une expertise fut ordonnée. Le résultat n'en ayant pas été favorable aux frères Benezech, ils en demandèrent une seconde qui fut refusée, et ils furent condamnés au fond. Sur l'appel porté devant la Cour royale de Montpellier, la Cour faisant droit aux conclusions de l'appelant, ordonna qu'il serait procédé, en présence des premiers experts et des maires des communes de Cessenon et des Casouls à une nouvelle exper tise. Benezech se pourvut en cassation: 1° Pour violation de l'art. 141 C. P. C., et de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt n'était pas motivé; 2o Pour violation de l'art. 472 du même Code, et du mode de procéder par les cours d'appel, qui ne doivent prononcer que par voie de confirmation ou d'infirmation du jugement de première instance; 3° Pour violation de l'art. 473 C. P. C., parce que la Cour devait prononcer sur le fond par un seul et même arrêt; 4o Enfin pour excès de pouvoir et violation des règles de la compétence, en ce que l'expertise ordonnée devant être faite avec le concours des maires des deux communes, et des anciens experts dont la mission était expirée, elle n'était plus par le fait l'ouvrage des personnes sur lesquelles s'était fixé le choix de la cour, et qui par leur serment donneraient une garantie de leur impartialité. La cour de cassation, section civile, a rejeté le pourvoi le 4 janvier 1820, par arrêt, ainsi conçu: LA COUR, statuant sur le premier moyen; Attendu que les tribunaux n'ordonnent une enquête, une expertise ou toute autre mesure interlocutoire que parce qu'ils ne sont pas encore en état de juger le fond avec suffisante connaissance de cause; qu'ils expriment assez ces motifs en déclarant qu'ils ne prononcent qu'avant faire droit, et sauf les moyens d'exception des parties au fond; qu'ainsi, cet arrêt se trouve suffisamment motivé; d'où il suit que la cour

de Montpellier n'a pas violé les lois qui veulent que les jugemens et les arrêts soient motivés à peine de nullité; — Sur le second moyen, attendu que le défendeur a expressément demandé sur l'appel, par des conclusions subsidiaires, qu'il plût à la cour de Montpellier, avant faire droit, ordonner une nouvelle expertise et la preuve testimoniale des faits par Jui articulés; 2° que cette cour n'a prononcé qu'avant faire droit au fond, qu'elle a pu s'abstenir de toute infirmation d'un jugement de première instance, même quant à la disposition relative à la preuve testimoniale et à l'expertise, et différer, jusqu'à l'arrêt définitif, à statuer sur cette disposition; que l'appel étant suspensif de l'exécution du jugement de première instance, il ne peut y avoir une opposition réelle entre les dispositions de ce jugement, par lesquelles les demandes de l'expertise et de la preuve testimoniale ont été rejetées, et l'arrêt interlocutoire qui a ordonné la preuve et l'expertise; qu'ainsi, la cour de Montpellier n'a, sous aucun rapport, violé la loi, et surtout l'art. 472, C. P. C., qui n'a point de trait à la cause; sur le troisième moyen, attendu, 1° qu'aux termes de l'article 473, C. P. C., ce n'est que sur l'appel d'un jugement définitif pour vice de forme ou pour toute autre cause, et quand la matière est disposée à recevoir le jugement définitif, que les tribunaux et la cour d'appel peuvent statuer en même temps sur le fond, définitivement, et par un seul et même jugement;-Attendu, 2° que la cour de Montpellier n'a pas été saisie de l'appel d'un jugement interlocutoire; qu'elle n'a pas infirmé un jugement définitif pour vice de forme ou toute autre cause de nullité, , que, d'ailleurs, l'exercice du pouvoir confié aux tribunaux et aux cours d'appel, est purement facultatif, et qu'ainsi la cour de Montpellier n'a pas contrevenu à l'article précité, en se bornant à rendre, avant faire droit au fond, un arrêt interlocutoire pour éclairer sa religion; sur le quatrième et dernier moyen;

Attendu qu'il est évident que les maires des communes de Cessenon et de Casouls n'ont été appelés que comme indica

teurs, pouvant donner des renseignemens utiles pour la découverte de la vérité; que la cour de Montpellier en ordonnant cette mesure, n'a commis aucun excès de pouvoir; Rejette. »

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30. La cour ne doit pas évoquer lorsqu'en première instance, il n'a pas été pris de conclusions au fond. (Art. 473, C. P. C.) (1).

C'est ce qu'a jugé, le 4 juillet 1820, la cour de Rennes dans les termes suivaus: LA COUR, considérant que l'art. 473,

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C. P. C., n'est applicable que lorsque le jugement est infirmé pour vices de forme ou autrement, et que la matière est disposée à recevoir une décision définitive; qu'en première in sance, Bion de Kerhallet se bornait à proposer l'exception de prescription, sans prendre de conclusions au fond, ainsi que le constate le jugement dont est appel; que le tribunal en le déboutant de son exception devait, ainsi qu'il l'a fait, lui ordonner de plaider au fond; que, sur son refus de le faire, lès héritiers Philippe devaient requérir qu'il fût donné défaut contre lui, et que, pour le profit, leur demande leur fût adjugée; que ne l'ayant pas fait, les premiers juges ne pouvaient d'office donner défaut contre Bion de Kerallet, et en adjuger de suite le profit; qu'ainsi ils doivent s'imputer la faute de n'avoir pas mis le tribunal à lieu de prononcer sur le fond. » 31. La cour investie par suite d'un renvoi après cassation du droit de statuer sur un arrét interlocutoire, peut, en l'infirmant, évoquer le fond, quoique pendant l'instance en cassation, la cour, dont l'arrét interlocutoire a été cassé, ait rendu dans la cause un arrêt définitif (2). Le sieur Etienne Bruère laissa un testament olographe par lequel il instituait son frère son légataire universel. Une sœur du défunt, mariée au sieur Bernier, et avec elle plusieurs neveux et nièces en demandèrent la nullité. Une en

(1) Voy. suprà, p. 373, nos observations.

(2) Voy. J. A., t. 34, p. 238, un arrêt du 4 décembre 1827.

quête fut ordonnée par le tribunal d'Orléans, et sur l'appel, arrêt confirmatif du 25 janvier 1818.

Pourvoi en cassation de la part de Bruère; la dame Bernier et consorts firent néanmoins procéder à l'exécution de l'arrêt du 23 janvier, et les enquête et contre-enquête ayant eu lieu, le tribunal d'Orléans, statuant au fond, déclara nul le testament. Bruère avait interjeté appel de ce jugement devant la cour d'Orléans, qui n'avait pas encore statué, lorsque par son arrêt du 28 décembre 1818, la cour de cassation annula l'interlocutoire du 25 janvier précédent, et renvoya la cause devant la cour de Paris. Devant cette cour, le sieur Bruère et ses adversaires prirent des conclusions, tant sur l'interlocutoire que sur le fond; aussi, la cour, par son arrêt du 31 juillet 1819, évoquant le principal et y faisant droit, valida le testament; La dame Bernier et consorts se pourvurent en cassation pour incompétence; mais par arrêt du 7 août 1820, la section des requêtes rejeta leur pourvoi en ces termes : « LA COUR, attendu que la cour royale de Paris saisie par le renvoi que leur avait fait la cour de cassation du droit de prononcer sur l'appel d'un jugement interlocutoire, avait en même temps, en infirmant ce jugement, le droit de statuer sur le fond par un seul et même arrêt, conformément à l'art. 473, C. P. C.; qu'ainsi la cour de Paris n'a ni excédé sa compétence ni fait une fausse application du dit article. Rejette. »

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32. Indication des auteurs qui ont parlé de l'évocation.

On peut consulter MM. CARR., t. 2, p. 234-244. CARR. COMP., t. 1, p. 40, 45, 106, 575, et t. 2, p. 723; PIG., T. 1, p. 598, 617, 618, 619, 716, et t. 2, p. 11; B. S. P., t. 1'2, p. 17; t. 2, p. 432 et suiv., p. 775 et 776; PR. FR., t. 3, p. 218-229; MERLIN, rép., t. 4, p. 901-905; et Q. D., t. 3, p. 34. F. L., t. 1, p. 188-190, v° Appel, et t. 2, v Evocation; D. C. p. 533 et 334; HAUT., p. 272, 274; LEP., p. 314-318; COMM., t. 2, p. 21-23; THом. DESM., p. 195; et DELAP., t. 2, p. 34-37.

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EXCEPTIONS.

On désigne en général sous le nom d'exceptions tous les moyens employés par le défendeur, soit pour repousser l'action, soit pour en suspendre l'effet.

Exceptio dicta est, quasi quædam exclusio, quæ opponi actioni cujusque rei solet, ad excludendum id, quod in condemnationem deductum est. (L. 2, ff. de Except. præscript. et præjud.)

Ainsi, comme on le voit, c'est dans les lois romaines que nos praticiens ont puisé la définition de l'exception. C'est aussi dans ces lois qu'ils ont trouvé presque tous les principes consacrés depuis par l'ordonnance de 1667, et par nos nouveaux Codes. On peut s'en convaincre par les rapprochemens suivans:

Exceptiones quæ personæ cujusque cohærent, non transeunt ad alios... rei autem cohærentes exceptiones, etiam fidejussoritus competunt.... (L. 2, eod. tit. in princ. et Si art. 2036, C. C.) — Lorsque le serment déféré ou référé a été prêté, la partie n'est plus recevable à en prouver la fausseté. (Art. 1363, et L. 15, ib.) (1) — Julianus respondit, exceptionem rei judicatæ obstare, quoties eadem quæstio, inter easdem personas revocatur. (L. 3, de Except. rei judic.) Pour qu'une telle exception puisse avoir lieu, le Code civil exige en outre (art. 1351) que la demande soit fondée sur la même cause, et que les parties agissent en la même qualité.

C'est aussi le droit romain qui nous a fourni ces adages, devenus si familiers au palais, parce qu'ils portent l'empreinte de la sagesse qui les a dictés: Reus excipiendo fit actor. (L. 1, ff. de Except.) Cui damus actionem, eidem multò magis actionem competere quis diceret. (L. 156, § 1, de Regul. juris.) Dolo facit, quicumque id quod quâquâ excep

(1) Voy. MM. CARR., t. 1, p. 466, et B. S. P., p. 220, 3o alin., qui pensent qu'il résulte du serment une exception péremptoire.

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