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qui en est auteur, seroit en meilleur latin, diroit quelque chose de plus, et aussi quelque chose de moins si quelqu'un de nous l'avoit rédigée ; et si le ministre des affaires ecclésiastiques ne nous avoit dit que la phrase me constitutionem, ut aiunt, civilem cleri gallicani ultrò deserere, étant exigée par le légat, il falloit la mettre; qu'il le falloit pour le bien de la paix; qu'en nous y refusant, nous ne ferions pas chose agréable au gouvernement. Je m'étois obstinément refusé de l'employer: j'en avois fortement réclamé la suppression, 19. parce qu'elle est inutile, la phrase suivante déclarant notre adhésion au concordat, qui abroge la constitution civile du clergé; 2°. parce qu'elle peut être mal interprêtée par nos censeurs, qui prétendent toujours que les constitutionnels, soit évêques soit prêtres, doivent se rétracter. En consentant enfin à admettre la susdite phrase, je déclarai que je ne faisois l'abandon de la constitution civile du clergé, que parce qu'une nouvelle loi la rend impraticable; qu'ayant respecté et aimé ses dispositions, je continuerai toujours de les respecter et de les aimer; que bien loin de me blâmer d'y avoir obéi, d'y avoir été fidèle, je regardois comme les meilleurs actes de ma vie, comme les plus dignes des récompenses éternelles, tous les actes qu'elle m'a prescrits, et auxquels je me féliciterai toujours de n'être prêté.

A la suite de tout cela, mes collègues Le Coz, Saurine, Périer, Primat, Beaulieu et Belmas, écrivirent, ainsi que moi, la lettre que nous venions d'adopter, à la place de celle que nous avions rejetée, à l'unanimité, chez M. le légat. Elle ne venoit ni de Rome, ni des bureaux de son éminence; elle ne déclaroit point ce qu'inutilement on avoit voulu, une heure plutôt, nous faire dé

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clarer. M. le légat la reçut-il de bonne grace? c'est ce que nous a laissé ignorer celui qui avoit eu à en remettre nos sept exemplaires. L'évêque Bernier se contenta de nous dire, le lendemain vendredi saint, en présence du citoyen Portalis, qu'il falloit y changer quelques mots; y mettre nominatus, au Heu de electus; admittere et admissurum, profiteri ee professurum, au lieu de admissurum et professurum ; canonicam institutionem, au lieu de canonica institutitionis munus. Tel est notre amour pour la paix telle est notre condescendance pour ceux qui nous font des propositions sans conséquence: nous fimes les changemens desirés. Alors notre nombre se trouva accrû du constitutionnel Reymond, qui n'avoit pu se joindre à nous la veille; il fit, de son côté en mêine-tems que chacun de nous, la se conde lettre en question. Notre transcription étant achevée, nous en déposâmes nos huit exemplaires dans les mains de l'évêque Bernier. Il nous annonça que nous ne tarderions pas à recevoir notre bulle de confirmation: it ajouta, qu'an cas qu'elle ne fût point expédiée de-là au jour de Pâques, nous pourrious tout de même prêter, le jour de Pâques, devant le premier consul, dans l'église de NotreDame, le serment de fidélité. Nous le prêtâmes en effet sans être bullés et quand on nous appela pour le prêter, on nous appela dans l'ordre et selon l'année de notre consécration, c'est-à-dire, après les évêques de l'ancien régime, et avant ceux nouvellement nommés, institués et sacrés ; et l'on ne nous contesta point la validité de notre consécration, quoiqu'on ait tant parlé pendant plus de dix ans contre notre épiscopat.

Maintenant, vénérable prêtre et très-cher ami Binos, si quelqu'un ose vous dire que nous nous sommes rétractés, ne craignez pas de lui dire

Mentiris impudentissimè ; ma relation vous autorise à vous exprimer de la sorte. Elle est dans la plus exacte vérité; elle peut vous être certiorée nonseulement par mes collègues constitutionnels, mais encore par l'évêque Bernier et par le citoyen Por talis, qui ont vu et entendu tout ce que je vous

raconte.

On vous dira peut-être que M. le légat nous a donné l'absolution; que la preuve en est dans les registres de sa légation; qu'on y a vu, au rapport du nouvel évêque de Versailles, et de quelqu'autre, plusieurs exemplaires d'un decretum absolutionis, humblement demandé par plusieurs de nous, et à plusieurs de nous charitablement accordé. Comment repousserez-vous ces faits-là? Vous direz avec moi que M. le légat, au mépris des règles usitées dans l'administration du sacrement de pénitence, au mépris de ces paroles célèbres d'une infinité de papes, nisi verè contritis et confessis, a donné une absolution qui n'étoit ni voulue, ni demandée; que lorsque le decretum en a été remis, par l'évêque Bernier, à quelques-uns d'entre nous, ils en out fait justice, en le jetant au feu, en présence de celui de qui ils l'avoient reçu, sous les yeux dụ citoyen Portalis, qui nous a assuré en avoir use de même, lorsque M. le légat lui a transmis un semblable decretum, pour le relever et l'absoudre des censures qu'il a pu encourir, en prenant part à la révolution française. Vous direz, de plus, que le constitutionnel Lacombe n'a pas été gratifié de ce decretum. Sans doute qu'on a craint qu'il fût moins patient que les autres; qu'après avoir dém claré hautement qu'il en feroit plainte à qui de droit, il le renverroit bien et dûment conditionné à son auteur, avec une lettre bien propre à attester que s'il est plein de respect pour le saint-siège apos

tolique, il ne l'est pas également pour ceux qui, ayant sa confiance, prodiguent et risquent témé rairement ses graces. Je laisse à l'évêque Bernier et au citoyen Portalis, le soin de dire comment je me suis exprimé là-dessus en leur présence, le vendredi-saint.

J'espère, vénérable prêtre et très-cher ami Binos, que ma réponse à votre lettre du 17 mai, sera de votre goût, et qu'elle affermira mes droits à votre estime et à votre amitié. Je vous salue et vous bénis très-cordialement en notre Seigneur J.-C.

Dominique LACOMBE, évêque d'Angoulême. ·

PARIS. Nous avons ici des fanatiques qui ont rebéni des églises, lavé des tabernacles, fait des saintes espèces et des huiles saintes, je ne sais quel usage. Heureusement la mesure n'a pas été générale. Accordons-leur un instant que nous sommes schismatiques : ils ont donc oublié que la décrétale ou la bulle du pape Honoré III, défend de rebénir les habits sacerdotaux qui ont servi aux prêtres schismatiques, et de consacrer de nouveau les autels sur lesquels ils ont célébré. (cap. à nobis.) Ils ont oublié que les papes ont ratifié le traité de Westphalie, qui autorise les catholiques et les luthériens d'Alsace, à célébrer leurs offices dans les mêmes temples, sans que les premiers soient dans le cas de les rebénir, de les reconsacrer après l'office célébré par les derniers, et sans que cet usage mixte des églises ait été regardé comme une profanation. Ils ont oublié que l'un de nos pieux usages est d'inviter les évêques et les prêtres grecs, qui viennent nous visiter, à célébrer leur liturgie dans nos églises, et qu'on ne s'est jamais avisé de les rebénir, etc. Mais nos bons amis ont peut-être l'intention d'exas

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pérer les imbécilles, qu'ils appellent de nuit à ces farces, er de nous faire égorger: d'ailleurs, la rebénédiction des églises suppose la réitération des sacremens, et ils croient y gagner beaucoup. Que prouve, au reste, cette démence ? Vous vous êtes emparés de nos églises; vous pouvez y faire en notre absence, tout ce qu'il vous plaira. Hélas! nous avons bien lieu de craindre que vous n'y donniez des scandales encore plus révoltans.

Les formules ou modèles de rétractation se multiplient: c'est la têtise à l'ordre du jour. Chaque évêque renchérit sur son voisin, et devient plus exigeant, à mesure que la formule est plus absurde. Les plus accréditées de ces formules font rejetter, respuer et la constitution civile, et les bénéfices desservis en vertu de ses décrets. Celle du jour renferme encore plus de venin : on y déclare qu'on adhère aux jugemens de Pie VI, confirmés par l'église universelle, quoique les prétendues bulles de ce pape se contredisent entr'elles, ordonnent et défendent ce serment; quoiqu'elles couvrent d'anathêmes le gouvernement français qui a eu lieu.

Nous plaignons les respectables prêtres qui sont exposés à cette misérable tourmente que suscitent T'esprit de vengeance et le fanatisme contre-révolutionnaire, le plus stupide qu'on ait vu dans ces dernières années: il est triste que leur sort dépende de leurs persécuteurs. Ils ne doivent cependant pas oublier que leurs adversaires ne cherchent qu'à les humilier et à les avilir; car l'expérience a prouvé -qu'après avoir obtenu les rétractations les plus solemnelles, par toutes sortes d'artifices et de belles promesses, ils ne placent pas les nouveaux rétractés. et ne placent qu'un très-petit nombre parmi les anciens pénitens. Le serment est le péché originel; ils se croient obligés de mettre en place la multi

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