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voit dernièrement qu'il agissoil ainsi, parce que ne connoissant ni les sujets, ni les localité, il ne pouvoit que s'exposer à se tromper et à faire souvent un mal irréparable. Le systême des déplacemens, lorsque le bien de l'état ne le commande pas, est désastreux: il est inoui dans l'histoire de l'église; il n'est pas dans l'esprit de nos nouvelles lois; il est encore moins dans les instructions que le premier consul a données aux évé ques. Quelle paix, quelle consolation peut espérer un évêque dans un diocèse qu'il ne connoît pas, dont il renverse tous les titres, détruit toutes les habitudes religieuses, étouffe en un moment tous les rapports de confiance et d'amitié entre les fidèles et les prètres, aigrit l'ame de ceux-ci, et en réduit un grand nombre à l'indigence? Les prétres ne sont-ils pas assez malheureux, assez agités depuis trop long-tems? Que sera-ce si l'évèque use, sans nécessité de ce pouvoir extraordinaire, en fait un arme de parti pour déplacer ceux qui n'ont pas pensé comme lui, et placer ses créatures?

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Nous n'avons aucune connoissance de la teneur d'une prétendue lettre écrite par ies non-démissionnaires, que citent les journaux politiques, et dans laquelle les. prélats déléguent leurs pouvoirs aux nouveaux évêques, et autorisent les préires et les fidèles à leur obéir. Pour nous, nous croyons cette mesure bien inutile: n'ont-i's pas été légitimement deshit és pour n'avoir pas prêté le serment de fidélité à la nation, à la loi et au roi, en 1791; et le défaut de prestation du serment de 1802 n'at-il pas completté leur destitution, aux yeux de ceux qui pouvoient encore avoir des doutes?

Nous recevon plusieurs lettres pastorales des nouveaux évêques; l'une d'elles porte cette formule: évéque de... avec l'institution du saint-siège. Elle nous paroît tenir de trop près aux discussions dernières, qu'il faut éviter elle peut avoir des conséquences sérieuses. Les évêques des douze premiers siècles n'eussent certainement pas pu l'employer. Celle-ci: dans la communion du saint-siège, nous parcit plus noble, plus vraie et d'un fon plus antique. Au reste, ces formules ont fréquemmeni changé depuis peu de siècles; on a remarqué que celle qui étoit employée avant la révolution, n'étoit ni exacte, ni conforme à nos libertés ; et avoit trop l'air de l'adulation.

LETTRE PASTORALE DE M. L'ARCHEVÊQUE DE PARIS.

JEAN-BAPTISTE DEBELLOY, par la miséricorde divine, et l'autorité du Saint-Siège Apostolique, Archevêque de Paris, au clergé et aux fidèles de son diocèse; salut et bénédiction en Jésus-Christ Notre Seigneur.

Quel plus touchant et plus magnifique spectacle, N. T. C. F., que celui des merveilles que Dieu dans sa miséricorde vient d'opérer au milieu de son peuple! Des évènemens inouis nous étonnent et nous consolent. Une tempête violente s'étoit élevée, et la terre sembloit ébranlée sur ses fondemens. Le jour des vengeances du Seigneur étoit arrivé; et le trésor de sa colère, grossi trop longtems, pesoit sur nos têtes. Un cri de guerre avoit retenti du midi au septentrion. Dieu qui, pour l'instruction des hommes, permet quelquefois que les crimes qu'il punit, soient punis par d'autres crimes; Dieu, afin d'apprendre aux enfans d'Adam que le mal produit le mal, et que du sein empoisonné de la corruption, on ne sauroit voir sortir que les excès de la corruption même, brisa le joug qui retenoit l'humeur indocile d'une multitude égarée. Tantôt, comme un géant superbe, l'impiété éleva jusqu'aux cieux sa tête audacieuse; elle fouloit aux pieds les autels du Dieu vivant, et les signes révérés de sa miséricorde et de notre rédemption: tantôt, agile et souple comme le serpent, elle distilloit ses poisons dans le mystère, empestoit les chaires de la vérité, séduisoit les simples, épouvantoit les tièdes, menaçoit de tout enlacer dans ses noeuds perfides. La profanation N.° 5. T. XV. 8. Ann.

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sacrilège, la persécution sanglante, la dissolution effrontée, l'hypocrisie et l'astuce marchoient sur ses traces. Les chefs du peuple avoient oublié que la souveraine puissance, suivant ces belles paroles de saint Grégoire à l'empereur Maurice, (1) ne leur est accordée d'en-haut, qu'afin que la vertu soit aidée, que les voies du bien soient élargies, et que l'empire de la terre serve l'empire du ciel: ils avoient oublié que les peuples, les empires et le monde entier, ne subsisteront qu'aussi longtems que la vertu sera pratiquée sur la terre.

Les troubles de l'église ne sont jamais loin de ceux de l'état on ne respecte guères le joug des lois, quand on est parvenu à secouer le joug de la religion. La guerre déchire la république: une horrible anarchie, toujours croissante, alloit tout dissoudre et tout engloutir. Cependant, les cris et les plaintes des peuples montèrent jusqu'au pied de l'autel où, devant le père céleste, se céièbre l'éternel sacrifice de l'agneau sans tache. Les gémissemens des justes furent écoutés; Dieu jetta sur la France et sur son église un regard de pitié.

Tout à-coup, un homme, la terreur de l'Orient et le vainqueur des rois de l'Occident, reparoît sur le sol de la patrie. La fin du châtiment est arrivée. Tout sembloit désespéré, et tout change dans un clin-d'œil. Dieu, qui marchoit autrefois devant Cyrus, prépare tout devant l'homme de son choix. A son aspect, les factions qui déchirent l'intérieur sont renversées, et les ligues puissantes qui men çoient notre indépendance se dissipent. (2) Dès lors le serviteur de Dieu put s'écrier avec

(1) Lib. II, epist. 62.

(2) Ego (Dominus) ante te ibo: et gloriosos terræ humiliabo. Isaï., cap. 45,

2.

Bossuet: si mon jugement ne me trompe pas, »si, rappelant la mémoire des siècles passés, j'en » fais un juste rapport à l'état présent, j'ose croire » que les jours d'aveuglement sont écoulés, et qu'il » est tems désormais que la lumière revienne. » En effet, l'autel se redresse', le temple se rebâtit, les murailles de Jérusalem sont relevées, la jalousie des peuples voisins est réprimée; l'œuvre de notre salut est une œuvre de peu de jours.

L'homme que Dieu a choisi est précédé par l'ange des conseils de Dieu. Le Seigneur a dit : Je prendrai Cyrus par la main pour lui assujettir les nations, pour mettre les rois en fuite, pour ouvrir devant lui toutes les portes, sans qu'aucune lui soit fermée (1) Ce n'est pas seulement la victoire qui marche devant son char, c'est la modération qui le conduit; et Dieu, qui tient son cœur dans sa main, l'incline vers la paix. C'est, pour ainsi dire, sur le champ de bataille de Maringo, que le héros français, touché des plaies de l'humanité, médite le rétablissement de la religion et l'œuvre de la pacification générale. Les vains triomphes des conquérans ne sont plus à ses yeux qu'une pompe lugubre; c'est un triomphe de paix, de liberté de gloire qu'il ambitionne. Et le Seigneur, qui le destine à rétablir sa maison, applanic tous les obstacles, fait taire l'orgueil des ennemis, appaise les esprits des princes et des peuples. L'Europe se calme, la France voit voler tous les cœurs vers elle, l'ange de la paix plane sur le monde entier, un repos universe! succède à la plus cruelle tour

(1) Hæc dicit Dominus Christo meo Cyro, cujus apprehendi dexteram, ut subjiciam ante faciem cjus gentes, dorsa regum vertam, et aperiam coram eo januas, et porta non claudentur. Isai., cap. 45, Y.

mente. Dieu dit dans Isaïe: J'ai fait ces grandes choses, afin que vous sachiez que je suis le Seigneur. le Dieu d'Israël, qui vous ai appelé par votre nom, cause de Jacob, qui est mon serviteur, et d'Israel, qui est mon élu. (1) C'est ainsi que le Seigneur, Dieu des armées, se manifeste aux conducteurs des nations: c'est ainsi, qu'après avoir livré la victoire au grand Constantin, il remplaça l'aigle dominatrice par la bannière triomphante de la croix : c'est ainsi que, par le gain d'une bataille, il ouvrit les yeux de Clovis, fit participer nos pères au riche héritage de ses promesses, et nous transmit par eux l'inestimable bienfait de sa foi, qu'il vient de nous confirmer par les mains d'un autre vainqueur.

Car l'histoire des empires a une liaison nécessaire avec celle de la religion. Il n'y a point de hasard dans le gouvernement des choses humaines; et les annales des nations ne sont que le développement des desseins de Dieu sur son peuple.

Venez tous, N. T. C. F., au pied des autels du Dieu des miséricordes, le remercier de tant de prodiges, le remercier de ce qu'en tes tems heureux nous pouvons nous écrier avec Baruch: Levezvous, Jérusalem, et marchez la tête levée; regardez vers l'Orient, et considérez vos enfans qui viennent tous ensemble à la parole du saint, depuis l'Orient jusqu'à l'Occident, étant pleins de joie dans les souvenirs des bienfaits de Dieu. (2) Aujourd'hui la prospérité de

(1) Ut scias quia ego Dominus, qui voco nomen tuum, Deus Israël, propter servum meum Jacob, et Israel elictum meum. Isaï., cap. 45, y. 3 et 4.

(2) Exurge, Jerusalem, et sta in excelso: et circumspice ad Orientem, et vide collectos filios tuos ab oriente. sole usque ad occidentem, in verbo sancti gaudentes Dei memoria. Baruch, cap. 5, . S.

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