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velle d'une tentative populaire préparée par le général Garibaldi sur Rome, avait publié une proclamation, dans laquelle en se déclarant défenseur de toutes les aspirations nationales, réclamait, comme un devoir, la décision de la manière et du temps d'avancer les destinées de la Patrie. Et le 7 septembre 1864 M. Lamarmora, Président du Cabinet italien, répondait à la dépêche du Ministre Français par une note, déclarant de réserver pour l'Italie cette liberté d'action que M. Druyn de Lhuys voulait réservée pour la France, dans le cas, où après les deux années fixées pour l'évacuation de l'armée française, on verrait à Rome des troubles révolutionnaires. Il disait qu'il était dans l'impossibilité de suivre le Ministre français dans la prétention de définir et préciser les aspirations nationales de l'Italie, car les aspirations d'un pays sont un fait qui appartient à la conscience nationale, et qui ne peut pas devenir, par un titre quelconque, le sujet d'une discussion entre deux gouvernements, n'importe quel soit le lien qui les unit (1)».

Après la guerre avec l'Autriche en 1866, lorsque le

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(1) "Elle n'est pas de mince importance, dit M. Bonghi, la prétention de régler par un acte intérieur de notre gouvernement le mode d'existence de la Papauté dans la capitale du royaume italien. Ou la Papauté existe, et alors son mode d'existence intéresse tous les États dans lesquels elle a de l'autorité; ou elle n'existe pas, alors qu'on n'en parle plus. En déliant la Papauté de son domaine en Italie, nous lui avons pour ainsi dire enlevé la physionomie italienne qui lui a été propre pendant tant de siècles, nous avons rendu plus frappant son aspect universel. Vouloir après cela qu'elle reste, comme elle ne l'a jamais été et comme moins que jamais elle peut l'ètre, italienne encore seulement que son mode d'existence soit soumis aux pouvoirs législatifs du royaume, c'est bien et surtout utile, mais il ne faut pas trop s'étonner que cela paraisse contradictoire aux autres. Bonghi ; Leone XIII e il Governo italiano, p. 5.

5 novembre la Commission du plébiscite vénitien déposait dans les mains du Roi à Turin le résultat de l'événement alors accompli, VICTOR EMMANUEL II répondait au discours que lui adressaient les orateurs: « Messieurs, ce jour est le plus beau de ma vie, dans ce jour disparaît à jamais de la Péninsule toute trace de domination étrangère. L'Italie a été faite, sinon accomplie. Maintenant c'est à nous, aux Italiens, de la protéger et de la rendre heureuse et grande.» Cependant, le 11 Novembre 1866, lors même que des navires espagnols, autrichiens, portugais, d'autres États et ceux des ÉtatsUnis d'Amérique même arrivaient à Civitavecchia, la France tenait son engagement et en hommage à la Convention du 15 septembre 1864 elle retirait son armée de Rome, qui restait de cette manière maîtresse d'elle-même et seulement défendue par des hordes de mercenaires ramassées à la hate. Le 15 du même mois, VICTOR EMMANUEL II à l'ouverture du Parlement disait : « La Patrie est libre enfin de toute domination étrangère, mon esprit exulte en le déclarant aux représentants de vingt-cinq milions d'Italiens ».

Désormais il était officiellement annoncé au Monde civilisé que la question de Rome était devenne une question italienne. A Mentana, le 3 novembre 1867, la Nation affirme son droit imprescriptible, inaliénable sur Rome, au moyen de la tentative populaire initiée par le Général Garibaldi. Mais le Gouvernement voit bien que la situation diplomatique d'Europe n'est pas changée; la France toujours menaçante empêche l'accomplissement de l'entreprise, et violant la première la Convention du 15 septembre elle rétablit sa garnison à Rome. L'Italie est obligée de supporter la violence de la France et le principe d'intervention accable le principe de

Nationalité. La guerre franco-prussienne éclate en 1870. La France reste victime de son arrogance et, faute de soldats, le 5 Août, elle ordonne le départ de ses régiments de Civitavecchia. L'Italie respire: le 21, le Parlement italien donne son consentement à un emprunt du Gouvernement de quarante millions de francs pour maintenir la neutralité armée. Le 8 septembre apporte les nouvelles de la Capitulation de Sédan, de l'insurrection de Paris et de la chûte de Napoléon III!

La situation diplomatique de l'Europe était changée! En effet, l'Allemagne se réjouissait de tout événement qui avilissait la France; l'Autriche affaiblie par la défaite de Sadowa pensait à tenir réunies les nationalités répugnantes de son Empire; l'Espagne, puissance de second ordre, débarrassée de la reine Isabelle, était toute occupée dans la lutte des partis à l'intérieur, l'Angleterre n'avait pas d'intérêt dans la défense de la Théocratie; la Russie enfin se préparait un terrein favorable pour la révision du Traité de Paris de 1856!

Aussi, contrairement à l'usage du moyen-âge, aucun État n'a-t-il été invité à prendre part au Concile du Vatican de 1869-70 et même la participation n'a-telle été faite par l'Église romaine à aucun État. La France se réserva de s'opposer à tout ce qui pourrait être décidé en sens contraire aux libertés françaises (1).

La destinée de Rome était donc abandonnée entièrement aux Romains, suivant l'expression très-heureuse de Lord John Russel, à l'époque des événements de Sarnico et d'Aspromonte. Le Gouvernement italien, se

(1) Circulaire du Prince de la Tour d'Auvergne du 8 septembre 1869, et dépêche du comte Daru à l'Ambassadeur de France près du Saint-Siége de janvier 1870.

sentant enfin libre de la soumission morale de la France, denonça la Convention et courut délivrer les Romains de la barbarie théocratique, au milieu de l'enthousiasme national. De cette manière l'ironie de la Convention du 15 septempre 1864 se révélait tandis que le contenu restait immuable dans toute la société ! Les Puissances catholiques supportèrent en paix bien que mécontentes le libre passage du PRINCIPE DE NATIONALITÉ.

La QUESTION D'OCCIDENT est résolue, sans aucun dommage, ou plutôt avec un considérable agrandissement de la liberté religieuse de l'humanité. Un peu d'irritation théâtrale arrive dans le Parlement de Versailles; mais elle est dominée par M. Thiers, qui envoie dans les eaux de Civitavecchia un navire prêt à accueillir le Pontife, s'il veut quitter Rome. Mais le Pontife se contente plutôt du nouvel ordre de choses établi; et préfère vivre détrônisé à Rome, que couronné à Paris ou à Avignon. Le navire français rentre en France sans l'auguste Vieillard!

Si l'Église pouvait considérer les choses d'un autre point de vue, elle reconnaîtrait qu'au fond de ce grand mouvement il y a la conscience encore confuse, il est bien vrai, mais cependant très-réelle, d' une nouvelle période historique, d'une époque nouvelle qui commence pour l'humanité et dans laquelle une plus grande partie de vérité et de justice doit pénétrer pour la vie sociale et politique!

V.

La Révolution italienne a trouvé la suprême confirmation dans la Societé Internationale par l'acte de Reconnaissance du nouveau Royaume de la part de tous. les États du monde et par des preuves fréquentes de sympathie. Peu d'exemples suffiraient à prouver combien de considération l'Italie a acquise près des Grandes Puissances. Les deux visites de VICTOR EMMANUEL II à Vienne et à Berlin suffiraient. En effet, les haines funestes, qui depuis la défaite des Légions de Varron par Hermann n'avaient jamais cessé jusqu'à nos jours, mais au contraire s'étaient toujours manifestées entre la race allemande et les Italiens, sous les Othon, les Barberousse, les Henri et plus tard sous la domination Autrichienne cédaient la place à l'expansion naturelle des sympathies sincères, au milieu desquelles l'empereur d'Autriche, l'ennemi séculaire, donnait la main amicale au Héros de Palestro, le Grand Auteur de l'Unité Allemande fraternisait avec le Premier Soldat de l'Indépendance italienne. Quel était donc la signification de cette émotion unanime des Peuples Allemands à Vienne, à Buda-Pest, à Berlin, avec des preuves d'affection et d'honneur à VICTOR EMMANUEL II, sinon le besoin irrésistible de ces populations civilisées de glorifier dans cette måle figure du Piémont l'expression la plus haute de la conscience italienne, inspirée par l'esprit des nouveaux temps, consolidée dans la conquête de sa Nationalité ? Une preuve encore plus splendide, plus solennelle de la complaisance avec laquelle les États d'Europe ont accueilli dans leur sein

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