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provisoires qu'il faut accepter sans les discuter, de dispositions amenées fortuitement par le conflit d'éléments opposés. Le droit est bien souvent absurde, fictif, artificiel dans ses résultats, tout en étant parfaitement rationnel dans ses motifs. Si donc on veut le comprendre et contribuer à son perfectionnement, il faut l'envisager dans ses facteurs, dans les intérêts et les besoins qui luttent pour leur satisfaction et qui réussissent plus ou moins à s'imposer au monde extérieur; il faut en d'autres termes le considérer du côté de la justice propre, voir dans chacune de ses modifications la victoire au moins partielle d'une tendance sur les autres. » (Henri Blocher de Fléchère: L'enfantement du Droit de la guerre dans la Revue de Droit international. Vol. 10. 1878).

Aujourd'hui, ces craintes étant passées, le besoin de mettre un terme à cet hybridisme indigne d'un peuple civil, dangereux pour un État, est vif et il impose. aux Italiens de commencer cette réforme non seulement par les progrès de la science et les lumières de la civilisation, mais par un vrai sentiment patriotique. Ici il faut que ceux qui se donnent à l'étude des sciences politiques et les hommes d'État se mettent en un accord confidentiel et procèdent ensemble avec cette tranquillité et gravité de propos, qui sont demandés par l'importance de la question et la multiplicité des intérêts, qui y sont compris. C'est un Droit Public surtout, que le fanatisme mystique et l'empirisme se soutiennent alternativement à ces procédés d'observation et d'induction honnêtes et rationnels, qui provoquent le progrès dans les autres branches de la science. Voyons donc ce que nous pouvons à l'aide de la lumière naturelle, que la science peut nous fournir et ce que

peut être accepté dans le domaine réservé de la politique pratique. Sur ce terrain il faut tenir un compte exact des préjugés et des passions. Dans le monde moral il se passe beaucoup de temps avant que la lumière qui éclaire les sommets descende dans la vallée; toute réforme est une éducation, et ce n'est pas peu de chose que d'instruire tout un peuple. Mais l'œuvre est belle; c'est l'avenir même des gouvernements libres qui est en jeu; c'est aux bons citoyens qu'il appartient de se faire les apôtres de la vérité, et de lui conquérir les esprits et les cœurs. Nous manifesterons franchement l'amour et l'adhésion à tout ce qui est vrai, le regret pour tout ce qui est faux.

C'est là sans doute le problème le plus grave, qui se présente aux Italiens, autant dans l'ordre de la politique intérieure, que dans l'adresse des rapports internationaux, et il ne faut pas nous le dissimuler en nous retirant, selon une vieille habitude, dans le silence. En effet pouvons-nous rester en silence sans renier l'essence de notre être, lorsque nous avons devant nous des problèmes moraux qui ne peuvent être compris et résolus que par cette vie réveillée dans l'âme et traduite en action? Quand un Peuple a une grande question politique à résoudre, il ne la retire pas avec la faiblesse de l'oubli, cette éloquence proverbiale du silence invoquée comme système par les prétendus hommes sérieux. Au fond du Droit Public il y a l'œuvre de la Science; c'est elle qui a réveillé dans le monde civilisé le sentiment si longtemps assoupi des droits de l'humanité. Les hommes d'État se mirent à cultiver et à développer le Droit Public. Encore aujourd'hui nous voyons agir ces deux forces, les hommes de science et les hommes d'État. Tantôt c'est la science qui marche

en avant, à mesure qu'elle développe les principes du Droit Public, tantôt elle est remorquée par les hommes d'État, lorsque ceux-ci, entraînés par le courant de l'opinion publique, se décident à appliquer des idées conformes aux besoins du temps.

Il faut lever la voix, rompre le courant des préjugés, mettre sur le tapis une discussion, préparer la conscience publique à recevoir favorablement la solution invoquée par le savant, et alors de la science on passera à la pratique, de la pensée sortira l'action. Le grand défaut de notre temps c'est l'ignorance politique. Ce n'est pas simplement un manque d'éducation, c'est une ignorance voulue, c'est le dédain systématique de toute règle et de tout principe; c'est l'indifférence; on ne croit plus à rien; on marche au jour le jour. Pensée et action; voici les mots que nous portons écrits en caractères d'or sur la bannière élevée par nous, et que nous ferons flotter altière et majestueuse sur le terrain pur de la science, armés toujours de cette confiance vive dans le progrès, qui nous donne maintenant l'énergie nécessaire pour soutenir l'impulsion irrésistible de la libre pensée et nous donnera, lorsqu'il le faudra, l'énergie de l'action, l'énergie d'une action audacieuse, continuelle et dévouée, avec laquelle on doit défendre les grandes vérités dans la lutte des préjugés et dans la coalition des intérêts. Parmi ces problèmes, le premier à résoudre est incontestablement celui de la question religieuse, car elle se trouve au fond de toutes les questions morales. Examinons donc les différentes manières, qu'on peut imaginer comme s'adressant au but de donner une résolution à ce problème, si compliqué et si plein de difficultés. Dans cette question il y a des difficultés spé

ciales, parce qu'il ne s'agit pas seulement d'appliquer, mais d'organiser un principe, il s'agit de répondre à certains esprits timorés, trop souvent disposés à traiter d'impossible, de ridicule, d'impraticable un projet quelconque de réforme. Disons-le toutefois; le but que nous nous proposons d'atteindre exige que nous exprimions en toute franchise même les simples doutes que nous pourrons éprouver. C'est la vraie manière d'envisager les questions politiques et sociales, et le vrai devoir de la Presse (1).

(1) Sur ce point nous reporterons quelques idées de M. Cecil, distingué publiciste australien, qui peuvent nous servir comme un avant-propos à ce qui va suivre:

"The very worst time to settle a question of national moment is when the passions of a people are aroused, and the feelings of public men keenly excited by the subject. The calm serenity of mind which a sharp intellectual investigation of any topic exacts, can hardly exist in the midst of turbulence and talk. It would be just as judicious-quite as much in seasonto preach the gospel of sound sanitary reform to a community suffering from same appalling epidemic, as to deliver dogmas of political truth to those who are engaged in the more exciting and engrossing work of abusing one another. While the public mind is seething in a ferment of agitation, there is little chance for so quiet a monitor as the Press to command attention or moderate controversy. It is nevertheless through the Press that truth now-a-days must be mainly delivered. The orator, with his tricks of rethoric, may dazzle and deceive the ignorant, but he cannot destroy the force of that logic which is presented to a man's eyes in intelligible language and matter-of-fact criticism. This is the great duty of the Press in our age; and every man who is not a mere windbag, and who does not love like a Melville-the Chaffanbrass of the Racecourse-to hear his own voice better than any other sound in the world, will prefer to print and publish his opinions, and the reasons on which he grounds them, rather than deliver them from a gin-case to a mob of idlers in the open air, or in the long-room of a political pot-house. The Press has, therefore, become the great modern medium for rational discussion. Through

XI.

Il y a un Parti, qui se croit formidable dans son dilemme: ou renoncer à la nouvelle Italie, ou abandonner la foi catholique. Ne pouvant renoncer à la foi catholique, parce qu' elle est une émanation de Dieu, et qu'elle est perpétuelle et immutable comme Dieu, il faut renoncer à la nouvelle Italie, qui est produite par la Révolution, et qui peut changer comme la volonté, et qui est périssable comme tout ce qui est produit par l'homme, transitoire comme le courant révolutionnaire (1). Voici le raisonnement des Cléricaux, qui ne sont

it men can fearlessly put forth disagreable truths and utter unpleasant predictions without fear of being bonneted or cudgetted. It is true that its prophecies may be received like those of Cassandra, and its sound teachings be for a time misunderstood or wilfully misrepresented; but they work amongst men silently and forcibly. Truth in the end MUST prevail Cecil Free Trade in every age. Sydney: S. Fergusen, 426 George Street, and 3 Market Buildings. 1867.

(1) Le Pape est-il libre à Rome ?

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Il ne gît pas sur la paille et les fers aux mains au fond des prisons Mamertines, il habite le plus beau palais de l'univers, le palais radieux où vivent dans leur gloire Bramante, Michel-Ange, Raphaël, Bernin. Si c'est là le tout de la liberté pontificale, il est libre.

Dans ce palais il est une petite chambre de laquelle, après avoir par la méditation et la prière invoqué par l'assistance d'en haut, il distribue l'enseignement aux croyants unis à sa communion, en tenant les yeux fixés à la fois sur le passé, sur le présent et sur l'avenir afin qu'aucune dissonance n'éclate entre ces trois termes dont il a pour mission de maintenir l'harmonieuse unité. Si c'est là le tout de la liberté pontificale, il est libre.

Autour de lui se meut une petite cour ecclésiastique silencieuse et do

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