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ramener l'unité ont forcé les savants et les hommes de l'État à accepter premièrement la tolérance et enfin la liberté religieuse. Cependant les cléricaux réclament aujourd'hui l'indépendance la plus complète de l'Église (1).

(1) Voyez, par exemple, le raisonnement du Pape dans un de ses Discours au Collège des Cardinaux: «Maintenant, a-t-il dit, nous sommes obligés à déplorer de nouvelles et plus terribles hostilités, qui vont se préparer et déjà apparaissent en projets de lois contraires aux droits et aux théories de l'Église. Par ces projets on cherche à exclure par une nouvelle sanction tout mélange ecclésiastique des œuvres pieuses, on cherche à ruiner les biens ecclésiastiques qui restent et qui très-pauvrement pourvoient aux besoins des curés. En outre on cherche à ouvrir la porte en Italie au divorce, avec un bien grand dommage de la société civile et domestique. Et en procédant encore d'avantage, on veut blesser l'Église dans sa constitution, même en commençant à introduire les laïques dans son administration contre l'esprit de sa constitution divine. Telle est la condition des choses à Rome, telle la condition du Pontife dans son siège mème qui ne peut évidemment s'accorder ni avec sa dignité, ni avec le libre exercice du ministère apostolique, ni avec la mission divine qui a été confiée par Christ à la Papauté. Par conséquent, dans cette occasion mème qui se présente devant nous, nous avons à déclarer que nous, loin de nous résigner à ce qui a été fait à notre dommage, nous ne cesserons jamais d'en appeler et de demander cette liberté et indépendance, dont le Saint-Siège fut dépouillé par l'usurpation violente de son pouvoir civil ». (Discours de Léon XIII).

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Voyez le raisonnement des écrivains du Parti catholique: « Ces garanties (de la loi du 13 mai 1871) n'ont qu'un faux air d'immunités... Loin d'équivaloir à l'immunité, les garanties en impliquent la négation. Elles ne supposent pas l'accord entre deux pouvoirs également souverains, accord qui entrainerait des obligations réciproques. Elles sont l'acte unilatéral de la souveraineté du gouvernement italien, auquel le consentement du chef de l'Église a paru aussi inutile que le serait celui d'un sujet italien quelconque à la réglementation du système électoral ou communal. On ne reconnaît pas davantage aux gouvernements étrangers, pas même à ceux dont les sujets sont en majorité catholique le droit de participer à des arrangements rattachés à l'ordre intérieur du royaume italien. L'Italie décide seule et sans

X.

En vérité, le soi-disant Parti catholique italien qui se cache aujourd'hui sans raison sous le titre de Parti conservateur est plus pratique.

Regardant la nouvelle situation politique de la Péninsule comme un fait accompli, dont il faut accepter la légitimité et la raison de son existence, il cherche à sortir de cette situation de réserve tenue jusqu'à ce moment, il s'avance avec ses programmes, et présente ses Candidats à la politique active, et prétend mettre l'État italien à la disposition de la Papauté. Ceuxci sont les anteabstensionistes; ceci est la pensée intime du libre du Père Curci; La lutte moderne entre l'Église et l'Etat. 1878. Selon le Père Curci « Saint-Ignace conscille pour faciliter l'obéissance à celui qui doit obéir, au lieu de se révolter contre l'ordre reçu, d' en découvrir la sagesse. Le dessein de Dieu, en permettant

appel. Pro lege voluntas. Il faut se soumettre à ce qu'elle a trouvé bon et surtout utile à ses intérêts. On citerait difficilement un autre exemple d'une prétention aussi osée. Dans tous les temps, sous le dispotisme, le consentement de celui qui doit payer ou de son représentant a été nécessaire à l'établissement de l'impôt le plus exigu: « Il n'y a roi ni seigneur de terre, dit Philippe de Commines, qui ait pouvoir de mettre un denier sur ses sujets sans octroy et consentement de ceux qui le doivent payer, sinon par tyrannie et violence. Malgré ce principe, on ne prétend pas seulement taxer à merci le Pape, on dispose sans son consentement de sa personne, de ses biens; d'autorité on règle ses relations avec les fidèles dout il est le pasteur ». Émile Ollivier: Le Pape est-il libre à Rome?

la chûte d'un pouvoir temporel où tant de mal se mêlait à quelque bien, a été d'obliger l'Église à chercher dans le détachement des biens de la terre un rajeunissement où ses forces se retremperont. » Les Cléricaux ou catholiques intransigeants, en prévoyant qu' avec cette nouvelle théorie on renonce pour toujours à la possibilité d'une restauration du pouvoir temporel ont foudroyé ces nouveaux principes, qui viennent de paraître dans le monde catholique (1). Nous saluons

« Ce discours (du Père Curci) est dur à entendre, a-t-on répondu avec colère à l'ancien jésuite, oubliant peut-être un peu trop sa vertu, son courage, les services rendus à ceux qui le condamnent sans miséricorde. Philosophiquement, on pourrait s'étonner de cette béate résignation à un fait dont on ne conteste pas l'illégitimité, sous prétexte de justifier la volonté impénétrable d'un Dieu qui n'a dit son secret à personne. Les premiers chrétiens proclamaient que la persécution est comme la fournaise qui épure et prépare à la cité future, ils ne pensaient pas néanmoins à se réconcilier avec leurs bourreaux, et par leurs incessantes apologies ils protestaient contre des violences qu'ils savaient subir avec une sainte ferveur. Du côté politique les objections ne sont pas moindres. S'il n'y avait dans la réalité comme dans les écrits du Père Curci, que deux termes en présence, l'Église et l'Italie, Chiesa e Italia, que la Papauté fùt une institution purement italienne, il ne serait pas déraisonnable de prendre au sérieux son projet d'accord et de l'étudier. Mais l'Italie n'est que la moindre partie de la catholicité, peut-être la plus tiède; la Papauté, quoique fixée à Rome et le plus souvent confiée à un Italien, a un caractère universel, œcuménique. Cette incontestable considération de fait dissipe le rêve d'un rapprochement. Bien d'autres impossibilités contribuent à l'écarter. Une réconciliation ne saurait aboutir simplement à des visites de cérémonie entre le Quirinal et le Vatican, le Roi et le Pape se mouvant à côté l'un de l'autre sans avoir connaissance ni souci ne leurs mouvements réciproques. Un accord paisible dans l'égalité ne se concevrait que si, s'inspirant de la conception de Dante dans son De Monarchia, de Gioberti dans le Primato, de Napoléon I. dans sa translation de la Papauté en France, le Roi et le Pape poursuivaient en commun la suprématie universelle par l'union du glaive et du bâton

avec plaisir l'entrée du parti catholique national dans la vie politique; nous sommes tous citoyens; personne ne doit rester hors de l'urne électorale; l'intervention des catholiques ne pourraient que redresser l' opinion publique sur le prétendu martyre, que la société mo

pastoral. Mais contre un tel projet de domination, le plus insupportable dont ils auraient été encore menacés, chefs d'État et peuples se lèveraient; et sous cet effort Roi et Pape seraient emportés. D'ailleurs, une telle conception suppose une intrépidité d'audace à laquelle les petits courages de notre temps ne sauraient se hausser.

Il arriverait donc nécessairement, après quelques tiraillements polis, ou que le Roi se subordonnerait et deviendrait le chef de la maréchaussée du Pape, ou que le Pape se soumetterait et se réduirait à n'ètre que le chapelain du Roi. Le Roi devenu le commandant de la maréchaussée du Pape, l'Italie qui entend avec raison vivre d'une vie indépendante et laïque se révolterait. Bien plus violente encore serait la répulsion des catholiques si leur pasteur se réduisait à n'être que le chapelain du Roi; ils lui retireraient un dévouement dont il se serait rendu indigne, se détacheraient, rompraient l'unité par le schisme. Un Pape réconcilié avec l'Italie perdrait le reste du monde; par la faute du pontife romain la tunique du Christ serait de nouveau déchirée en lambeaux. De la part du Pape se réconcilier avec le gouvernement italien, c'est-à-dire se soumettre à une loi de garanties faites sans lui, ce ne serait pas simplement renoncer à son pouvoir temporel, revenir à la vie apostolique des premiers temps, répudier le don de Constantin que Dante a maudit, séparer le bâton pastoral de l'épée; ce serait pour un plat de lentilles vendre le pouvoir spirituel lui-même, mettre l'office apostolique à la merci d'un État et d'un parlement animés d'une hostilité profonde contre les sentiments religieux et chrétiens. Vos intentions sont droites, ô conciliateur Père Curci; Dieu me garde d'affliger votre solitude laborieuse et votre pauvreté si digne par une parole déplacée, encore moins de méconnaître la vérité de tant de vues justes repandues dans vos écrits! Toutefois, permettez à quelqu'un qui vous respecte de vous le demander: Comment n'avez-vous pas compris et surtout senti qu'une réconciliation serait, de la part de celui en qui vous vénérez le vicaire de Jésus-Christ, la plus révoltante apostasie de l'histoire ecclésiastique?» Émile Ollivier: Le Pape est il libre à Rome?

derne a infligé à ces prétendus conservateurs, elle rendrait la lutte politique une vraie lutte de partis organisés, elle ferait gagner à chacun la conscience de la force de ses principes. L'Italie a ris des prêtres avec Boccacce, a entrepris les croisades à cause d'intérêts commerciaux, a repoussé la Réforme de Luther, car elle est supérieure par caractère et par civilisation à toutes les disputes théologiques, a combattu avec les Naturalistes les dogmes de l'Église, l'Italie donc accueillera par un sourire d'indifférence une pareille propagande, qui chercherait de mettre l'État au service du Catholicisme. Le parti catholique italien restera lui aussi écrasé par son utopie rétrive.

Pas moins encore les soi-disants vieux catholiques qui en bonne foi croient à la transformation de la hiérarchie de l'Église selon le système moderne de Gouvernement pourraient résoudre le problème de la situation de la Papauté. Tout au plus ce programme regarde la réforme intérieure de l'Église; mais cela ne précise pas la situation de la Papauté dans la societé internationale.

XI.

Les Philosophes matérialistes, qui se rappellent du mot de Galilée « La Science commence avec la mort du dogme» imaginent une société entièrement composée de Savants, pour qui la recherche de la vérité est devenue une passion, pour qui le culte de la science prend le dessus, ou mieux, détruit tout sentiment religieux. Alors, disent-ils, les religions tomberont, tom

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