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fition, & qui les fuivent par-tout, lors même que la Chancellerie paffe la mer pour accompagner le Roi à Hanovre. Les autres Puiffances fe fervent également de cette maniere de correfpondre très-difpendieuse, il eft vrai, mais très-fure, & très- propre à accélérer le fuccès des affaires. Il n'eft point de Cour qui, dans les occafions preffantes ou délicates, dans les affaires qui exigent le plus grand fecret, n'expédient des meffagers aux Ambaffadeurs qu'elles entretiennent auprès des différentes Puiffances. Les Ambaffadeurs font de même autorisés à envoyer de pareils meffagers à leur Cour, toutes les fois qu'ils le jugent convenable au bien des affaires. C'eft fur-tout dans les temps de crife, lorfqu'il fe traite quelque grande négociation, pendant la tenue d'un Congrès général, qu'il est à propos de multiplier les Couriers.

COURLANDE.

Voyez ci-après CURLAND E.

COURTIER, f. m. Celui qui s'entremet pour faire vendre, acheter, troquer, ou échanger les marchandifes.

C'EST d'un côté la facilité du commerce, de l'autre l'avidité du gain, qui ont donné naiffance à ces fortes d'entremetteurs.

Ils débarraffent le marchand du foin & de la peine de fe défaire par lui-même de ses marchandises. Ils fe chargent eux-mêmes de faire les courfes & les recherches néceffaires pour trouver des acheteurs, en quoi ils favorisent le commerce, qui fe fait plus promptement, & le marchand qui peut employer à fe procurer de nouvelles marchandifes le temps qu'il mettroit à les débiter.

Ils font tenus de rendre le prix, ou la marchandise, & font contraignables par corps pour cet effet.

Ils ne peuvent faire aucun trafic pour leur propre compte, ni avoir de caiffe chez eux, ni figner des lettres de change.

L'acheteur & le vendeur font au Courtier des remifes fur le prix de fes marchandifes. Ces remises font fixées par l'ufage ou par des réglemens particuliers auxquels il doit s'en tenir, fans exiger ni accepter rien de plus. Fait ce métier qui veut, comme ne prend Courtier qui ne veut. La probité, l'activité, l'exactitude font des qualités néceffaires pour un Courtier; il doit y joindre une grande connoiffance des marchandises dans lefquelles il exerce le Courtage.

COURTILZ

COURTIL Z, (Gratien de) Auteur Politique.

COURTILZ, fieur de Sandras, fut un de ces Ecrivains dont la plume féconde & inconfidérée fait gémir les preffes, prefque toujours aux dépens de la vérité & de l'honnêteté. Il naquit à Paris en 1644, fut capitaine au régiment de Champagne, quitta enfuite le fervice, & vint en Hollande vers l'an 1683, où il publia fucceffivement un très-grand nombre d'ou vrages, vrais Romans fous le titre d'Hiftoires, dans lefquels fon imagination déréglée orna trop fouvent l'impofture & la fatyre, des agrémens d'un ftyle léger & attachant. Il revint en France après un féjour de plus de vingt ans en Hollande; mais le fouvenir de fes libelles le fit enfermer à la Baftille où il refta trois ans il en fortit en 1711, & mourut à Paris le 6 Mai 1712, âgé de 68 ans. Comme il ne mit presque jamais fon nom à la tête de fes ouvrages, il n'eft pas aifé d'en donner une lifte exacte: voici ceux que l'on fait plus certainement être de lui; prefque toutes les éditions originales portant au titre Cologne, quoiqu'elles aient été faites pour la plupart à la Haye, chez le libraire Van Bulderen. 1. La conduite de la France depuis la paix de Nimegue, in-12 1683, ouvrage qui parut à fon Auteur même fi plein d'impoftures contre la France fa patrie, qu'il fe crut obligé de le combattre dans le fuivant: 2. Réponses au Livre intitulé, la conduite de la France depuis la paix de Nimegue, in-12 1683: Hiftoire des promeffes illufoires depuis la paix des Pyrenées, in-12 1684:

Mémoires contenant divers événemens remarquables arrivés fous le regne de Louis-le-Grand, l'état où étoit la France lors de la mort de Louis XIII, & celui où elle est à préfent, in-12 1684. Ce petit livre eft un panégyrique de Louis XIV, de Colbert & de Louvois en faifant le parallele de l'état de puiffance & de gloire où la France étoit alors avec l'état de défordre où elle avoit été fous le miniftere de Mazarin, on attribue ce changement à la haute fageffe du Roi, à l'habileté de celui qui étoit à la tête des Finances, & à la grande capacité du miniftre de la guerre. Peutêtre Sandras conçut-il le plan de cette brochure pour effacer les impreffions que fes premiers livres avoient faites, ou pour empêcher qu'on ne le foupçonnât d'être l'Auteur des pieces fatyriques qu'il publia dès la même_année, & dans lesquelles il diffame fi cruellement plufieurs Dames de la Cour de France, & de celle de Bruxelles, fans épargner les Souverains. 4. Conquétes amoureufes du grand Alcandre dans les Pays-Bas avec les intrigues de fa Cour, in-12 1684: 5. Les intrigues amoureufes de la Cour de France, in-12 1685: 6. Les nouveaux intérêts des Princes de l'Europe, où l'on traite des maximes qu'ils doivent obferver pour se maintenir dans leurs états, & pour empêcher qu'il ne fe forme une Monarchie univerfelle, in-12 1685. L'Auteur y montre un peu de partialité pour la France & trop de paffion Tome XIV.

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contre leurs Majeftés Impériale & Catholique du refte il parle en homme d'efprit des intérêts particuliers de chaque Couronne, & donne de l'agrément à fa narration, tant par fes réflexions que par quantité de faits peu connus & peut-être plus curieux qu'exactement vrais. Ses maximes fentent quelquefois le Machiavélifme. » C'est un abus, dit-il, de prétendre que les » grands Princes doivent fatisfaire à ce qu'ils promettent, auffi bien que » les autres. Ils ont des regles faites tout exprès pour eux, & ce que nous » appellons mauvaise foi à l'égard des autres hommes, ils appellent cela politique. "Cette politique, pour être fouvent mise en pratique, n'en eft pas moins condannable ni moins indigne des grands Princes. 7. La Conduite de Mars, néceffaire à tous ceux qui font profeffion des armes, ou qui ont deffein de s'y engager, autorisée d'exemples arrivés dans ces derniers temps; avec des Mémoires contenant divers événemens remarquables arrivés pendant la guerre d'Hollande, in-12 1685. Cet ouvrage eft un des meilleurs de Courtilz, & il a l'honnêteté de n'y pas nommer les perfonnes dont il releve les fautes contre la fcience militaire. 8. La Vie du Vicomte de Turenne, publiée fauffement fous le nom de du Buiffon, in-12 1685. Il en donna une nouvelle édition corrigée & augmentée en 1688. Cette vie eft fort inexacte à l'égard de bien des faits, & quantité de perfonnes de confidération y font injustement maltraitées. 9 Les Conquêtes du Marquis de Grana dans les Pays-Bas, in-12 1686: 10. Les Dames dans leur naturel, ou la galanterie fans façon fous le regne du grand Alcandre, in-12 1686 11. Le grand Alcandre fruftré, ou les derniers efforts de l'amour & de la vertu, Hiftoire galante, in-12 1686: 12. La Vie de l'Amiral de Coligny, in-12 1686. Il s'y traveftit en Religionnaire, quoiqu'il ait toujours profeffé la Religion Romaine, après comme avant la publication de cet ouvrage. 13. Les Mémoires de Rochefort: 14. Les Mémoires d'Artagnan: 15. Les Mémoires de Jean-Baptifte de la Fontaine : 16. Les Mémoires de Monbrum: 17. Les Mémoires du Marquis D***. Tous ces Mémoires font écrits avec beaucoup de légèreté & d'enjouement, & peu de vérité. 18. Les Annales de la Cour & de Paris pour les années 1697 & 2698. On y trouve tout au long, dit un homme d'efprit, tout ce qu'ont penfé les Rois & les Miniftres quand ils étoient feuls, & cent mille actions publiques dont on n'avoit jamais entendu parler. Les jeunes Barons Allemands, les Palatins Polonois, les Dames de Stockholm & de Copenhague lifent ces livres, & croient y apprendre ce qui s'eft paffé de plus fecret à la Cour de France. Mais les gens fenfés s'apperçoivent dès la premiere page que ces annales & anecdotes fecretes font pour la plupart des menfonges inventés à plaifir, ou puifés dans les bruits de ville. 19. Hiftoire de la Guerre de Hollande depuis 1672 jufqu'en 2678. 2 vol. in-12 1689. Il y a tant de négligence dans cette hiftoire, que l'on y contredit des faits publics les plus éclatans que l'on puiffe voir. On prétend qué cet ouvrage l'obligea de s'abfenter quelque temps de la Hollande, au moins de la Haye

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qui étoit fa demeure ordinaire. 20. Les Entretiens de Mr. Colbert avec Bouin, in-12 1701; & 21. Teftament Politique de Mr. Colbert: Entretiens & Tef tament fuppofés, comme tant d'autres livres de ce genre, où l'on débite fous un grand nom, bien des rêves & des fottifes politiques mêlées de quelques bonnes vues. 22. Les Mémoires de Vordac in-12. 1702: 23. Les Mémoires de Tirconel, compofés fur les récits de ce Duc enfermé comme lui à la Baftille 24. Hiftoire du Maréchal de la Feuillade. 25. La Vie du Chevalier de Rohan 26. Mercure-historique & politique. Cet Ouvrage périodique, qui eft un extrait des différentes gazettes de l'Europe, fe continue encore aujourd'hui à la Haye. Sandras a laiffé beaucoup de manufcrits. C'eft dommage, difoit un habile critique, que cet homme ayant un génie si fécond, & le don d'écrire avec une facilité extraordinaire, & avec beaucoup de vivacité, n'ait point pris des mesures mieux entendues pour employer fes talens. S'il fe fût attaché à fuivre les grands modeles de l'antiquité, & les loix que tant de maîtres de l'art hiftorique ont noblement expliquées, il auroit pu devenir un bon hiftorien.

COURTIN, ( Honoré & Antoine de ) deux célébres Négociateurs.

HONORÉ DE COURTIN fit fon apprentiffage dans l'intérieur du

Royaume, dans les emplois que l'on donne à ceux que l'on deftine aux premieres charges de la Robe. Il fut d'abord Maître des requêtes, puis Intendant de différentes Provinces, où fa bonne administration lui mérita l'eftime & les graces de la Cour. Après la conclufion de la paix des Pyrénées, il fut député pour régler les limites des nouvelles conquêtes du côté des Pays-Bas. En l'an 1665, il fut envoyé avec le Duc de Verneuil en Angleterre, pour tâcher d'obliger le Roi à faire ceffer les hoftilités dont les Anglois troubloient le repos des Provinces-Unies. En l'an 1667, il fut envoyé avec M. Deftrades au congrès de Breda, comme Ambaffadeur extraordinaire & plénipotentiaire, après avoir été employé en Allemagne pour l'accommodement du différend que l'Electeur Palatin avoit avec les Electeurs de Mayence, de Trêves & de Cologne &c. pour le droit de Wifdfang. En l'an 1673, il fut envoyé en la même qualité à Cologne, avec le Duc de Chaulne & M. de Barillon, & cette affemblée aiant été diffipée, à caufe, ou à l'occafion de l'enlevement du Prince Guillaume de Furftemberg, le Roi fon maître, l'a voulu employer à l'Ambassade extraordinaire d'Angleterre. Son efprit & fa conduite ont paru en cette Ambaffade, auffi-bien qu'en toutes les précédentes, avec tant d'éclat, qu'on ne peut nier, qu'il ne fût un des plus habiles Ambaffadeurs de fon temps.

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ANTOINE DE COURTIN, Envoyé extraordinaire de la France auprès de la Reine Chriftine, y remplit les devoirs de fon miniftere avec autant de fidélité que de prudence. Après cette Ambaffade, Louis XIV le nomma réfident général pour la France vers les Princes & Etats du Nord. Cet homme, qui n'avoit pas moins de talens pour les lettres que pour les affaires, & qui tiroit de fon goût pour les fciences de nouveaux fecours pour mieux remplir fes emplois, occupa fon loifir à traduire le traité de la paix & de la guerre, par Grotius. Il mourut à Paris en 1685, avec la réputation d'un négociateur auffi honnête-homme que prudent & éclairé.

COURTISAN, f. m.

N'ESPÉREZ plus de candeur, de franchise, d'équité, de bons offices,

de fervice, de bienveillance, de générofité, de fermeté dans un homme qui depuis quelque temps s'eft livré à la Cour, & qui fecretement veut fa fortune. Reconnoiffez un nouveau Courtifan à fon vifage, à fes entretiens. Il ne nomme plus chaque chofe par fon nom : il n'y a plus pour lui de fripons, de fourbes, de fots & d'impertinens. Celui dont il lui échapperoit de dire ce qu'il en penfe, eft celui-là même qui venant à le favoir, l'empêcheroit de cheminer. Penfant mal de tout le monde, il n'en dit de perfonne; ne voulant du bien qu'à lui feul, il veut perfuader qu'il en veut à tous, afin que tous lui en faffent, ou que nul du moins lui foit contraire. Non content de n'être pas fincere, il ne fouffre pas que perfonne le foit; la vérité bleffe fon oreille; il eft froid & indifférent fur les obfervations que l'on fait fur la Cour & fur le Courtifan; & parce qu'il les a entendues, il s'en croit complice & refponfable. Tyran de la Lociété & martyr de fon ambition, il à une trifte circonfpection dans fa conduite & dans fes difcours, une raillerie innocente mais froide & contrainte un ris forcé, des careffes contrefaites, une converfation interrompue, & des diftractions fréquentes: il a une profufion, le dirai-je, des torrens de louanges pour ce qu'a fait ou ce qu'a dit un homme placé & qui eft en faveur, & pour tout autre une féchereffe de pulmonique: il a des formules de complimens différens pour l'entrée & pour la fortie à l'égard de ceux qu'il vifite ou dont il eft vifité; & il n'y a perfonne de ceux qui fe paient de mines & de façons de parler, qui ne forte d'avec lui fort fatisfait. Il vife également à fe faire des patrons & des créatures : il eft médiateur, confident, entremetteur, il veut gouverner : il a une ferveur de novice pour toutes les petites pratiques de Cour: il fait où il faut fe placer pour être vu: il fait vous embraffer, prendre part à votre joie, vous faire coup fur coup des queftions empreffées fur votre fanté fur vos affaires; & pendant que vous lui répondez, il perd le fil de fa

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