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république du Chili qui est déjà l'État le plus avancé de l'Amérique espagnole, le détroit de Magellan perd aussi de ses terreurs. Le nouvel établissement du Port-Famine, qui s'élève en ce moment, est sous ce rapport un grand pas de fait. Quelques phares élevés, quelques remorquages établis le long du détroit, il n'y aurait plus de cap Horn.

Nous avons dit ceci, parce que nous croyons qu'il ne faut rien exagérer, même la valeur d'une grande idée. Mais qui ne comprend quelles seront encore, même réduites à leur véritable portée, les conséquences de la section des deux continents! Ces vents qu'on trouverait contraires pour descendre vers le Pérou et le Chili, ils pousseraient vers le Mexique, les Californies, l'Orégon; vers toutes ces terres enfin qui, lasses d'attendre du vieux monde le souffle de la vie nouvelle, appellent à leur conquête les intrépides envahisseurs de la race angloaméricaine. D'ici à un demi-siècle, c'est la côte occidentale du Nord-Amérique qui sera le terrain de la grande politique. Il n'y a plus que les aveugles et les systématiques qui traitent du haut de leur dédain « les perceurs d'isthmes '. » L'avenir dira

'Nous appelons percement, tout trajet, court, régulier et direct, entre la côte Est et la côte Ouest, qu'il ait lieu par un canal ou par un rail-way.

si nos imperceptibles possessions de l'archipel océanien ne valent pas ce qu'elles peuvent nous coûter d'embarras et d'argent. Eh bien, nous croyons que la prévision dans laquelle s'est effectuée cette occupation lointaine fera comprendre l'importance d'un point maritime qui, comme Samana, commande militairement et commercialement l'entrée du golfe du Mexique, tête du passage que rêvent tous les esprits préoccupés de l'avenir.

Mais, laissant de côté ce qui se rattache aux avantages militaires, nous allons examiner quel pourrait être le rôle de Samana entre les mains de la France, au point de vue de la réciprocité des avantages économiques, qui doit être la base de toute transaction entre les peuples, et sans laquelle la loi même du plus fort n'est pas toujours une garantie.

CHAPITRE IV.

Samana. Aperçu économique.

Du système des taxes intermédiaires en faveur des provenances d'entrepôt colonial. Considérations sur la neutralité conditionnelle des territoires; -sur celle de la mer. La neutralité des colonies rendue nécessaire par les besoins de la classe moyenne et son intervention dans les affaires. Opinion de M. Malouet. Le système des taxes intermédiaires est un premier pas dans cette voie. Analyse de la législation sur les entrepôts coloniaux. Leur situation. Leur vice. Ce qui est à faire. Conséquences du système des taxes intermédiaires appliqué aux provenances des entrepôts coloniaux. Ce qu'est en réalité notre mouvement commercial avec l'Union américaine. - Effets du système quant à cette situation. Le monopole colonial réduit à ses véritables proportions, quant au sucre,quant au café et autres produits secondaires. Essai Ce qu'est en réalité la surtaxe dite protectrice. d'une tarification intermédiaire. Ce qu'est en réalité la taxe intermédiaire.

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Nous prions le lecteur de croire que ce livre n'est pas un cadre banal que nous ouvrons à toutes les études que nous avons pu faire, à toutes les idées qui ont pu nous traverser l'esprit. Il n'est personne qui, nous lisant jusqu'au bout, ne soit amené à reconnaître que toutes ses parties se lient étroitement entre elles, et se rattachent impérieusement à la pensée dominante; cette pensée qui s'est toujours

formulée ainsi dans notre esprit : Satisfaction à chacun et à tous.

C'est le titre de ce chapitre qui nous conduit à écrire cette déclaration. Nous avons, en effet, été le premier à développer la combinaison des taxes intermédiaires pour les provenances d'entrepôt colonial'. Nous avons abordé ce sujet dans plusieurs écrits spéciaux 2, et nous l'avons traité sous différents points de vue. Aujourd'hui qu'elle a gagné du terrain, qu'elle a conquis les sympathies d'une partie de la presse, qu'elle a été portée à la tribune, et qu'elle est assez sérieusement mise à l'étude par l'administration pour qu'il y ait lieu d'espérer qu'elle va conquérir une solution, nous nous ferions très-certainement faute de l'aborder de nouveau, si nous n'y étions comme forcément entraîné par les exigences de notre sujet.

D'ailleurs, faut-il le dire? il y a dans tout ce qui

'Intermédiaires entre la provenance coloniale proprement dite et la provenance étrangère directe.

2 Des lois de douane aux Antilles françaises, et du nouveau bill des droits de l'Union américaine. Revue de Paris du 12 juin 1842. De la législation économique des Antilles françaises au point de vue de l'exportation métropolitaine: Lettre à M. Gauthier de Rumilly, membre de la chambre des députés. — (Bulletin de la Société maritime de Paris.)

V. les articles de la Presse, de la Démocratie pacifique et du Courrier du Havre, à l'occasion de la discussion de la dernière loi de douane. Voyez aussi les deux discours prononcés par M. Levavasseur, député de Dieppe, dans la même discussion.

se rattache aux idées de franchise et d'élargissement commercial, quelque chose qui nous provoque et nous attire; et c'est là un terrain que nous n'éviterons jamais. De plus, cette matière est de celles qui ne sauraient être trop élaborées, d'abord parce qu'elle est, en général, peu comprise; puis, parce qu'on peut dire que tout s'y tient, et que chaque pas qui s'y fait ouvre une échappée sur un horizon nouveau : étudier le présent, c'est donc conquérir à moitié l'avenir. C'est une grande cause, dans la période de civilisation que parcourt en ce moment le monde, que celle de cette neutralité conventionnelle de territoire où les nationalités s'effacent et où il est donné au commerce de réaliser pour un moment le dogme de la fraternité humaine. Qui peut dire quel édifice viendra un jour s'abouter à ces pierres d'attente que la paix scelle insensiblement dans les relations des peuples? Sans doute, on peut, sans blasphémer les mystères providentiels de l'avenir, se refuser à écrire des institutions dans la prévision généreuse de la paix partout et toujours. Mais il n'est aucun esprit chrétien qui, en s'arrêtant sur cette grande question de la paix et de la guerre, n'ait été frappé de la différence que la nature semble avoir voulu poser elle-même

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