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trevenu audit article, et en a fait aussi une fausse application, en l'étendant pareillement à un cas non par lui prévu; CASSE, etc. >>

COUR D'APPEL DE TURIN.

La femme qui refuse d'habiler avec son mari peut-elle y étre contrainte par la saisie de sa personne? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 214.

LES ÉPOUX VINARDI.

La dame Vinardi avait formé contre son mari une de mande en séparation de corps, qui fut rejetée par les tribunaux. Dès lors l'époux insista pour que sa femme réintégral le domicile marital. Sur le refus de cette dernière, il eut recours à l'autorité de la justice et demanda qu'il fût enjoint à sa femme de se réunir à lui, sous peine d'y être contrainte, même par corps.

Le 23 janvier 1810, jugement du tribunal civil de Turin, qui, tout en ordonnant à la femme de se rendre dans la maison maritale, déclare qu'il n'y a pas lieu à la contrainte par corps.

Appel de la part du sieur Vinardi.

Il a soutenu que les premiers juges n'avaient rendu qu'une décision illusoire, ou plutôt qu'ils avaient commis un véritable déni de justice, en lui refusant le seul moyen efficace de vaincre la résistance criminelle de son épouse, puisqu'il ne pouvait pas même avoir recours à la saisie de ses revenus, comme moyen coërcitif, la dame Vinardi n'ayant aucune fortune personnelle.

M. Rocca, avocat-général, a conclu à la confirmation du jugement attaqué. Il s'est fondé principalement sur ce qu'il y aurait les inconvéniens les plus graves à ordonner la mesure rigoureuse réclamée par l'appelant. Il ajoutait que, ce cas, il faudrait convertir l'habitation conjugale prison domestique, ou voir renouveler chaque jour le scandale de l'arrestation de la femme.

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Du 17 juillet 1810, ARRÊT de la Cour d'appel de Turin, par lequel :

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Que

« LA COUR, -Considérant que l'un des principaux caractères d'un jugement est celui d'être exécutoire ; ce caractère est imprimé à tout jugement par la nature même de la chose, par la majesté du souverain au nom duquel il est prononcé, et par le mandement par lequel le dispositif de chaque jugement se termine; Que, parmi les moyens d'exécution que la loi autcrise, se trouvant celui de la force publique, il n'est point douteux qu'on peut requérir et employer contre la partie qui refuse d'obtempérer au prescrit d'un jugement ce moyen d'exécution, à moins que la loi elle-même n'admette une exception à la règle; - Que l'obligation que l'art. 214 du Code civil impose à la femme d'habiter avec son mari, obligation qui dérive essentiellement de la nature même de l'union conjugale, ne cesse que lorsque la femme est légalement autorisée à vivre et à demeurer séparée; — Qu'il suit de là que, lorsque, par un jugement, il est enjoint à la femme de se réunir à son époux et d'aller habiter dans la maison maritale, et lorsque tout moyen d'exécution employé pour l'astreindre à obtempérer au jugement demeure frustratoire, celui de la saisie personnelle, par la force publique, peut et doit être employé, vu qu'aucune exception ne résulte avoir été introduite par la loi à cet égard; -- Qu'en appliquant ces principes à l'espèce, il est certain qu'après que la demande en séparation de corps, formée par Catherine Data, femme Vinardi, a été rejetée, celle-ci a dû et doit se réunir à son époux, et dans la maison par lui habitée, et que, faute par elle de se conformer au prescrit du jugement en appel, par lequel une telle obligation lui a été formellement enjointe, elle peut y être obligée même par la saisie personnelle; — Qu'en vain invoque-t-elle l'axiome que ad factum nemo compelli potest, et le principe que l'obligation quæ in faciendo consistit se résout nécessairemeut et uniquement en une prestation de dommages et intérêts: car il faut distinguer les obligations

dans lesquelles le fait ou l'industrie de la personne est spécialement contemplé, et lesquelles portent, pour ainsi dire, sur l'œuvre et la chose même, d'avec celles qui concernent uniquement, comme dans l'espèce, la représentation de la personne, sans exiger de sa part aucun fait positif; et, à l'appui de cette distinction, il est aisé de sentir combien l'axiome et le principe cités sont étrangers à l'espèce; — Qu'inutilement voudrait-on aussi écarter une telle mesure, en alléguant les inconvéniens qui pourraient en dériver : car, à supposer même, ce qui n'est pas encore bien certain, que des inconvéniens puissent avoir lieu, on ne devrait jamais, sous un tel prétexte, adopter un principe destructif de l'exécution des jugemens et introduire des inconvéniens certains et plus forts encore, tel que celui d'autoriser, en dépit de la loi, une séparation entre conjoints d'un nouveau genre; Que, si l'exécution de la disposition de l'art. 214 du Code civil a été, par le législateur, abandonnée aux inœurs et aux circonstances, ainsi qu'il appert de la discussion qui eut lieu au conseil d'Etat, lors de la rédaction de cette loi, et si l'on voit que, dans quelques cas semblables, les magistrats ont estimé d'essayer auparavant quelques autres moyens d'exécution, tel que celui de la saisie des revenus de la femme, il ne peut être question de faire usage de pareils moyens dans l'espèce, dès que la femme Vinardi ne possède des revenus d'aucune sorte, ainsi qu'il a été allégué de la part de son mari à l'audience, sans qu'il ait été contesté; - MET le jugement du 25 janvier 1810 au néant; - Emendant, déclare que, faute, de la part de Catherine Data, de se rendre au domicile et dans la maison d'habitation de son époux, dans le délai de quinzaine, elle y sera contrainte par la saisie de sa personne. »

Nota. La Cour de Paris a rendu, le 29 mai 1808, une décision semblable, rapportée tom. 9 de ce recueil, p. 529. La même Cour et celle de Nismes, par arrêts des 22 prairial an 13 et 11 juin 1806, avaient précédemment adopté un

moyen coërcitif moins rigoureux, en autorisant la saisie des revenus de la femme. Voyez ces arrêts, tom. 6, p. 252, et tom. 7, p. 545, en observant toutefois que, dans l'espèce de celui de la Cour de Turin, la femme n'avait point de revenus à saisir.

COUR DE CASSATION.

La disposition d'un testament fait avant la publication du Code civil, mais dont l'auteur est mort depuis, par laquelle celui-ci appelle à sa succession ceux qui lui auraient succédé par représentation à l'infini, d'après telle coutume qu'il désigne, est-elle valable et doit-elle avoir son effet?

Résolu affirmativement entre les héritiers et légataires de la dame de Chazerat, par ARRÊT de la section des requêtes, du 19 juillet 1810, M. Henrion président, M. Aumont rapporteur, M. Bonnet avocat; voici le texte de cet arrêt :

« LA COUR, Sur les conclusions conformes de M. le procureur-général Merlin; Attendu que l'art. 1390 du Code civil est au liv. 3, tit. 5, du Contrat de mariage et des droits respectifs des époux; que c'est l'association de ces époux que cet article défend de régler d'une manière générale par l'une des coutumes, lois ou statuts locaux qui régissaient ci-devant les diverses parties du territoire français, et qui sont abrogées; que les dispositions du même Code relatives aux testamens sont au liv. 5, tit. 2, chap. 5, art. 967 et suivans; que la Cour d'appel de Riom ne peut pas avoir violé l'art. 1590 du Code civil en ne se croyant pas permis d'étendre aux testamens une disposition de ce Code faite pour les contrats de mariage; - Attendu que Marie-Gilberte Rollet n'a pas confié à un tiers le soin de choisir ses légataires et de régler la distribution de sa succession; qu'elle les a désignés elle-même et d'une manière certaine

qu'elle a déterminé de même la portion reveuante à chacun d'eux sur ses biens, en appelant à les partager ceux de ses parens, dans les trois branches de ses aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule maternelle, qui seraient en ordre de lui succéder, suivant les règles de la représentation à l'infini, telle qu'elle avait lieu dans la ci-devant coutume d'Auvergne, pour être divisés, entre les trois branches, au marc la livre de ce qui lui est parvenu de chacune desdites branches, et être subdivisés entre chacune d'elles suivant les mêmes règles de la représentation à l'infini; Qu'en confirmant un testament dont, ainsi que l'observe la Cour d'appel, les dispositions témoignent fortement que la testatrice a eu une volonté propre, éclairée et déterminée, cette Cour ne peut pas avoir violé les art. 892, 895 et 975 du Code civil; Attendu que le partage de la succession de Marie-Gilberte Rollet entre ses légataires aura lieu suivant les principes de la coutume d'Auvergne, non par la force de cette coutume, qui n'existe plus comme loi du royaume, mais par la volonté de ladite Rollet, qui, n'ayant ni ascendans ni descendans, maîtresse conséquemment de disposer à son gré de la totalité de ses biens, a pu les distribuer par testament entre ceux de ses parens qu'elle a jugé à propos de choisir; qu'ainsi l'arrêt attaqué ne fait pas revivre une coutume abrogée, et ne contrevient ni à l'art. 6 du Code civil, ni à l'art. 7 de la loi du 30 ventôse an 12; Attendu que la Cour d'appel a jugé que la clause telle qu'elle avait lieu dans la cidevant coutume d'Auvergne n'était dans le testament contentieux qu'une clause surabondante; qu'il n'y avait pas dans cet acte une seule disposition qui ne pût être exécutée indépendamment de toute coutume quelconque, et parle seul fait de la volonté certaine et connue de la testatrice; qu'on ne peut voir là autre chose qu'une interprétation du testament sur lequel cette Cour était appelée à prononcer; que, quand elle aurait mal à propos supposé à ces expressions, les règles de la représentation à l'infini, un sens clair, absolu et indépendant de la coutume d'Auvergne, cette er

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