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finances du 22 septembre 1807, cette dispense a été étendue même aux comptes rendus à l'amiable ou devant notaire, et que, par conséquent, elle doit s'appliquer à plus forte raison aux comptes rendus devant la juridiction consulaire et établis par un jugement émanant de cette juridiction;

Attendu que le jugement rendu par le tribunal de commerce de Dôle, le 18 novembre 1871, a mis fin à une contestation qui était née de l'impossibilité où se trouvaient les opposants de régier leur compte; qu'en effet, il s'agissait, d'une part, d'établir le métré des travaux exécutés par le sieur Perrot pour le compte de la société des Forges, et de fixer la somme qui lui était due de ce chef par cette dernière, et, d'autre part, de liquider les sommes reçues par Perrot à compte de ce qui lui était dû; que c'est donc, en définitive, un véritable compte qui, à défaut de règlement amiable, a été réglé par les juges consulaires, et que si, lors de ce règlement judiciaire, il a été produit par les parties, soit devant le tribunal, soit devant les experts, des pièces ou documents établissant l'ouvrage fourni par Perrot et les sommes touchées par lui et destinées à rendre ce règlement de compte possible, ces pièces et documents doivent être considérés, en fait, comme quittances rentrant dans la catégorie de celles que la fin de l'art. 537 du C. de proc. désigne ainsi: «<et autres de même nature », et se trouvent, par conséquent, dispensés de l'enregistrement; qu'en effet, les pièces établissant le métré exécuté par Perrot constituent des quittances de l'obligation où se trouvait ce dernier d'exécuter les travaux par lui entrepris, et celles établissant les à-compte par lui perçus constituent, quel que soit le nom sous lequel les experts ou le tribunal les ont désignées, des quittances de l'obligation où se trouvait la société des Forges de payer les travaux exécutés, au fur et à mesure de leur exécution.

La Régie a déféré ce jugement à la Cour de cassation pour : 1° Violation des art. 23 et 47 de la loi du 22 frim. an 7, par fausse application de l'art. 537 C. proc., en ce que le jugement attaqué a décidé que diverses pièces, telles que métré, bons de paye, reçus, plan, lettres, produites en justice dans une instance engagée entre un entrepreneur de travaux et une société, à l'effet de déterminer l'importance des travaux exécutés par l'entrepreneur et le montant des payements à lui faits à valoir par la société, doivent jouir de la dispense d'enregistrement accordée exceptionnellement par l'art. 537 précité, en matière de redditions de compte, aux « quittances de fournisseurs, ouvriers, maîtres de pension, et autres de même nature, produites comme pièces justificatives du compte »;

20 Violation, par fausse application, de l'art. 1153 C. civ., - en ce que le même jugement a condamné l'Administration

Tome CVIII,

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de l'enregistrement à payer les intérêts, à compter du jour de la demande, des sommes dont il ordonnait la restitution.

Ce pourvoi a été accueilli, et, le 7 février 1877, la chambre civile a rendu l'arrêt suivant :

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LA COUR; Sur les deux moyens de pourvoi : - Vu les art. 23 et 47 de la loi du 22 frim. an 7 et l'art. 1153 du C. civ. - Attendu que si l'art. 537 du C. de proc. civ., dispose que « les quittances des fournisseurs, ouvriers, maîtres de pension et autres de même nature, » produites comme pièces justificatives du compte, sont dispensées de l'enregistrement »>, cette exception au principe posé dans les dispositions susvisées de la loi du 22 frimaire an 7, a eu uniquement en vue les redditions de compte, et pour objet spécial de ne pas entraver lesdites opérations par la nécessité, imposée au rendant, de faire une avance de droits onéreux pour l'oyant qui doit les supporter en définitive;-Que l'exception écrite en vue des pièces justificatives d'un compte ne saurait, dès lors, être étendue aux actes servant de base à une action en justice; que, dans l'espèce, si la situation respective des défendeurs au pourvoi a été déterminée sous forme de règlement de compte, ce règlement n'avait aucun des caractères de la reddition de compte prévue par le C. de proc.; qu'il s'est agi seulement de statuer sur l'exécution d'une convention par laquelle Perrot s'était engagé envers la Société des Forges à faire divers travaux de déblaiement ou d'extraction de minerai, moyennant un prix convenu; qu'ainsi les pièces fournies par les parties à l'appui de leurs prétentions respectives et qui ont été visées, soit par les experts, soit par les juges qui ont statué sur l'action, ont été produites, non comme simples pièces justificatives d'un compte, dans le sens de l'art. 537 du C. de proc., mais uniquement pour justifier la demande en paiement du prix des travaux formée par Perrot, ou pour défendre à cette action; - Qu'ainsi la règle générale établie par les art. 23 et 47 de la loi du 22 frimaire an 7 était applicable; Que, dès lors, en décidant le contraire, et en ordonnant la restitution de la somme de 671 fr. 40 c. perçue comme représentant le montant, en principal et décimes, du droit auquel aurait donné lieu approximativement l'enregistrement des pièces produites, le jugement attaqué à expressément violé lesdits articles; - Et, d'un autre côté, qu'aucun impôt direct ou indirect ne pouvant être ni augmenté ni diminué qu'en vertu d'une loi expresse, ledit jugement a, en outre, commis un excès de pouvoir, faussement appliqué et par conséquent violé l'art. 1153 du C. civ., en condamnant l'Administration de l'enregistrement au paiement des intérêts, à compter du jour de la demande, de la somme dont la restitution était ordonnée ;

Par ces motifs, casse et annule.

Au mot Compte, n° 107, du DICT. NOT. (4e édit.), annotez: V. Art. 21646 J. N.

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La Régie ne peut être condamnée au payement des intérêts moratoires des sommes dont la restitution est ordonnée contre elle, pour des droits d'enregistrement indûment perçus. C. civ., art. 1153.

Cette décision, qui résulte de la dernière partie de l'arrêt rapporté sous l'article précédent, est conforme à la jurispru dence constante de la Cour de cassation. V. Dict. Not., vo In. stance en matière d'enregistrement, n° 96 (4e édit.). Les derniers arrêts rendus dans ce sens sont des 12 mai 1862, 5 mars 1867 et 22 novembre 1875; ils ont été insérés, art. 17409, 18850 et 21356 J. N.

Aux mots Instance en matière d'enregistrement, no 96; Restitution de droits d'enregistrement, n° 70, du DICT. NOT ( édit.), annotez: V. Art. 21617 J. N.

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Est nul le jugement rendu en matière d'enregistrement par trois juges, parmi lesquels ne figure pas celui qui a fait le rapport de l'affaire à une audience précédente. L. 22 frim. an 7, art. 65.

Cette décision est conforme à la jurisprudence constante de la Cour de cassation. Voir les nombreux arrêts cités au Dict. Not.,vo Instance en matière d'enregistrement, nos 61 et 69 (4⋅ édit.). Le nouvel arrêt est ainsi conçu:

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LA COUR; Vu l'art. 65, § 5, de la loi du 22 frimaire an 7, portant que les jugements en matière d'enregistrement sont rendus sur le rapport d'un juge fait en audience publique;

Attendu que s'il est constaté par le jugement attaqué que M. Mimaud, juge commis par le président du tribunal, a fait, à l'audience du 30 août 1873, le rapport de l'affaire, il résulte dudit jugement

que, lorsqu'il a été prononcé à l'audience du 25 juin 4875, M. Mimaud ne figurait pas au nombre des trois magistrats présents, sans qu'il soit d'ailleurs constaté qu'un de ceux-ci ait été désigné comme rapporteur en remplacement de M. Mimaud;

D'où il suit que l'art. 65 de la loi du 22 frimaire an 7 a été violé; Casse et annule.

Au mot Instance en matière d'enregistrement, n° 69, du DICT. NOT. (4o édit.), annotez: V. Art. 21618 J. N.

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Les tribunaux français sont compétents à l'effet de statuer sur l'action en révocation, pour cause d'ingratitude, d'une donation faite par une femme à son mari étranger, lorsque l'action est intentée par des Français, héritiers de la donatrice. C. civ., article 14.

Le sieur Denève, né en Belgique de parents belges, épousa le 7 mars 1872, à Lille, Mme veuve Karis, de nationalité française. - Par leur contrat de mariage les époux se donnèrent mutuellement, pour le cas où ils mourraient sans enfants, tous les biens qu'ils posséderaient à leur décès. ·

Le 8 septembre 1874, après une citation en conciliation demeurée infructueuse, Mme Denève introduisit contre son mari une demande en séparation de corps; mais son décès, survenu le 8 novembre 1874, l'empêcha d'y donner suite.

Le père et la sœur de la défunte, qui étaient ses successibles, se prévalurent des griefs articulés dans l'assignation à fin de séparation de corps, pour intenter devant le tribunal civil d'Arras une action en révocation de la donation pour cause d'ingratitude. Cette assignation porte la date du 14 décem bre 1874.

Avant cette dernière époque, par acte passé devant Bollet, notaire à Arras, le 9 octobre 1874, le sieur Denève avait résilié le bail de la maison qu'il habitait à Tilloy, et, le 1er novembre suivant, il avait quitté la commune de Tilloy pour venir se fixer à Paris, où il habite encore aujourd'hui. Il n'eut pas connaissance de l'instance engagée contre lui,

les actes de la procédure furent signifiés au parquet, et un jugement rendu par défaut contre lui, en date du 26 décembre, admit les héritiers de la dame Denève à rapporter la preuve des faits par eux articulés.

Le sieur Denève forma opposition à ce jugement par défaut, et le tribunal d'Arras, par jugement du 15 juin 1875, se déclara incompétent et renvoya les parties à se pourvoir devant qui de droit. Cette décision se fondait 10 sur ce que la femme française, suivant la condition de son mari, et l'association conjugale étant régie par les lois du pays auquel ce dernier appartient, c'était aux tribunaux étrangers qu'appartenait l'examen du litige; 2o sur ce que, même au point de vue de la loi française, en matière personnelle, le domicile du défendeur détermine la compétence, et M. Denève n'était plus domicilié dans l'arrondissement d'Arras.

Les héritiers de la dame Denève ont interjeté appel de ce jugement devant la Cour de Douai, qui, par arrêt du 27 sep. tembre 1875, a infirmé la décision du tribunal d'Arras, en se fondant: 1o sur ce qu'aux termes de l'art. 14 C. civ., l'étranger, même non résidant en France, peut être cité devant les tribunaux français pour l'exécution d'une obligation dont il est tenu envers un Français; 2° sur ce que si, à l'époque du décès de sa femme et des actes introductifs d'instance, 30 novembre et 14 décembre 1874, Denève n'était pas à Tilloy, il résultait néanmoins de tous les documents de la cause qu'il n'en était que momentanément absent, et qu'en fait il n'avait pas fixé son domicile dans une autre commune.

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Pourvoi en cassation par le sieur Denève.
Mais, le 2 août 1876 (ch. req.):

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LA COUR: Sur le premier moyen, tiré de la fausse application de l'art. 14 C. civ. et des règles de la compétence: Attendu que les héritiers Fouchet, après le décès de la dame Denève, donatrice, ont formé une demande en ré vocation, pour cause d'ingratitude, de la donation faite au contrat de mariage par la dame Denève à son mari; Qu'ils ont agi dans les termes de l'art. 957 C. civ.; Que ces héritiers sont français; que par cela même ils ont été dans le cas, en exerçant l'action qui leur compétait par suite de la succession, de se prévaloir du privilége de nationalité consacré par l'art. 44 C. civ., duquel il résulte que l'étranger, même non résidant en France, peut être cité devant les tribunaux français, pour l'exécution d'un engagement ou obligation dont il était tenu envers un Français; D'où il suit que l'arrêt attaqué, en reconnaisant la

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