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PERTE.

PREUVE DE LA VALIDITÉ.

DESTRUCTION.

Cour d'app. de Rouen. 18 juin 1877,

DATE.

Celui qui se prétend légataire, en vertu d'un testament qu'il soutient avoir été détruit par un cas de force majeure, peut être autorisé à reconstituer ce testament par la preuve testimoniale, à la condition d'établir d'une manière certaine que l'acte a péri par cas fortuit, contrairement à la volonté du testateur, et que ce dernier a ignoré cette per te.

Sans être tenu de reconstituer la teneur exacte et littérale du testament, il doit au moins justifier de son entière régularité, spécialement de sa date précise; la preuve est insuffisante, si les témoins, tout en attestant que la date était complète, ne peuvent spécifier que l'année, et non le mois ni le jour.

Le Dictionnaire du Notariat (vo Testament, n° 136, 4c édit.), enseigne, conformément à l'opinion générale, que la destruction d'un testament par un événement de force majeure, ou par la fraude de l'héritier ab intestat, peut être prouvée par témoins; et il ajoute : « Il faut, dans le premier cas, que le légataire établisse, non-seulement que le testament a existé, qu'il renfermait telle ou telle clause, mais encore qu'il était revêtu de toutes les formalités légales. Cass. 17 fév. 1807. Dans le second cas, au contraire, l'existence du testament étant établie, c'est à l'auteur de la lacération ou de la destruction à prouver qu'il n'était pas dans la forme légale. Troplong, Don. et test., no 1452; Cass., 1er déc. 1812. » V. conforme, Demolombe, Don. et test., t. 4, nos 32 et 34.

Voir aussi, sur cette matière, les arrêts de Dijon, 24 juillet 1872, et de Grenoble, 1er juillet 1875 (art. 20709 et 21331 J. N.).

Après le décès du sieur Durieu, la dame Saunier, parente de sa femme prédécédée, allégua qu'en 1866, le défunt avait fait un testament olographe par lequel elle était instituée sa légataire universelle, à la charge de payer une somme de 15,000 fr. sa cuisinière et d'exécuter certaines autres dispositions qu'elle indiquait.

Elle demanda à prouver par témoins qu'un valet de chambre du sieur Durieu s'était emparé, vers la fin de l'année 1870, du

testament précité, l'avait gardé trois mois environ et lacéré ou brûlé à l'époque des processions du Saint-Sacrement, en 1871, en haine du legs fait à la cuisinière. De plus, elle offrait de rétablir le testament dans son entier, à l'aide de la preuve testimoniale.

Sa demande fut accueillie par un premier jugement du fribunal civil d'Yvetot, du 18 juin 1875, confirmé ensuite par ar. rêt de la Cour de Rouen, en date du 29 décembre suivant.

Mais, l'enquête autorisée ayant eu lieu, le tribunal d'Yvetot, par un nouveau jugement en date du 23 décembre 1876, statuant en premier ressort, déclara, après nouvelles plaidoiries, l'enquête de la dame Saunier faillie et manquée, et débouta cette dernière de sa demande.:

Sur l'appel interjeté de ce jugement par la dame Saunier, la Cour de Rouen a rendu l'arrêt suivant :

.LA COUR; Attendu que la dame Saunier, satisfaisant à une des exigences de la tâche difficile par elle entreprise, a suffisamment établi l'existence jusqu'en 1870 d'un testament fait en sa faveur par le feu sieur Durieu;-Qu'il ressort, en effet, des déclarations des 8o, 9o, 14° et 12° témoins de l'enquête et du 6° de la contre-enquête, qui ont vu etlu ce testament, qu'il contenait au profit de la dame Saunier un legs universel, en même temps qu'un legs particulier de 15,000 fr. en faveur d'une femme Mauchon, et diverses dispositions ou recommandations pieuses; Que, bien que ces témoins n'aient pu reproduire la teneur exacte et littérale du testament, ce qui ne saurait être exigé, son contenu doit être considéré comme suffisamment rétabli par leurs dépositions concordantes ;

Mais, attendu qu'il incombe aussi à la partie qui entreprend de reconstituer, par la preuve orale, un testament prétendu détruit contrairement à la volonté du testateur, de justifier de l'entière régularité de cet acte; Que le testament dont il s'agit au procès était olographe; que la demanderesse devait donc, pour établir sa validité au point de vue de la forme, non-seulement prouver qu'il était écrit en entier et signé de la main du testateur, ce qu'elle a fait, mais encore reconstituer sa date;

Attendu que la date d'un testament se compose de l'indication du jour, du mois et de l'année de sa confection;

Attendu que quatre des témoins qui ont vu et lu le testament du sieur Durieu, s'accordent bien pour dire qu'il portait l'année 1866;que deux d'entre eux affirment même qu'il contenait aussi une date de jour et de mois, mais qu'aucun n'a pu indiquer quel mois et quel jour; - Qu'il s'ensuit que la date du testament Durieu n'a pas été reconstituée dans ses éléments essentiels; Qu'il ne peut suffire, en effet, après avoir rétabli la date, quant à l'année, d'indiquer que

cette date comprenait aussi les deux autres termes nécessaires pour la constituer, si on ne les spécifie pas en rappelant le mois et le quantième;-Que si leraisonnement de la dame Saunier sur ce point était fondé, il en résulterait que l'indication de l'année elle-même n'aurait pas été nécessaire, et qu'il aurait été suffisamment satisfait aux exigences légales, quant à la reconstitution de la date, par cela seul que les témoins auraient déclaré d'une manière vague et générale que le testament était daté des jour, mois et année; Qu'un pareil système est inadmissible, parce qu'il aurait pour résultat de mettre le défendeur dans l'impossibilité, soit de vérifier la capacité du testateur au jour de la confection du testament, soit de contrôler la date et d'en démontrer l'erreur ou la fausseté; Qu'il en résulterait aussi que le légataire ayant à rétablir un testament par la preuve orale, se trouverait à cet égard dans des conditions plus favo⚫ rables que celui qui se prévaudrait d'un testament intact et représenté ;

Attendu qu'à un autre point de vue, la dame Saunier n'a pas fait la preuve nécessaire au succès de son action; - Qu'elle devait établir d'une manière certaine que le testament de 1866 avait péri par cas fortuit, contrairement à la volonté du testateur, et que celui-ci serait mort dans l'ignorance de cette perte; mais que, loin d'arriver à ce résultat, l'enquête laisse subsister, sur chacun de ces points, les doutes les plus sérieux; Qu'en effet, le huitième témoin de l'enquête, celui-là même qui a détruit le testament, déclare qu'il l'a trouvé parmi des papiers mis au rebut par le sieur Durieu; que, sans doute, son témoignage à cet égard pourrait être considéré comme suspect, mais qu'il se trouve fortifié par une considération de la plus haute gravité; qu'en effet, quatre ans se sont écoulés entre la destruction de l'acte testamentaire de 4866 et le décès du testateur; qu'on ne s'expliquerait pas que, pendant ce long intervalle de temps, il ne fût pas venu à la pensée de celui-ci de rechercher son testament pour le relire et s'assurer de sa conservation; que, cependant, il n'apparaît d'aucun témoignage que le sieur Durieu se soit plaint de la disparition d'un acte auquel il attachait une si légitime importance; qu'enfin, ce qui achèverait de contredire l'hypothèse de la perte par cas fortuit, et de l'ignorance de cette perte par le testateur, c'est la déposition du premier témoin de l'enquête, déclarant qu'à une date qu'il indique et qui serait de six mois postérieure à la destruction du testament de 1866, le sieur Durieu lui a montré un papier plié en quatre, qu'il lui a dit être son testament ; qu'à la vérité, on conteste l'exactitude des souvenirs du témoin quant à la date du fait qu'il rapporte, mais que sa déposition se trouve confirmée par celle du quinzième témoin, également digne de foi, à qui, près de deux ans avant l'enquête, il a indiqué précisément la même date; Qu'en résumé, on doit reconnaître que de l'ensemble des faits rapportés et des considérations qui s'en déduisent, naissent des

doutes sur les points essentiels que la demanderesse avait la charge de prouver; Que c'est donc à bon droit que l'enquête par elle entreprise a été déclarée faillie et manquée; sér mju Par ces motifs, etc..

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Aux mots: Suppression de titres, no 13 et 14; Testament, no 136, du Dicr. NoT. (4 édit.); annotez: V. art. 21728 J. N..

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Lorsque, sur l'attestation fausse de deux témoins certificateurs, un notaire rédige une procuration au nom d'une personne autre que celle qui lui est présentée, cet acte, bien que constituant un faux, n'engage pas sa responsabilité.

Un notaire n'encourt pas non plus de responsabilité, en recevant un acte d'obligation consenti en vertu d'une telle procuration. Mais il a pu devenir responsable du placement si, au lieu de se renfermer dans sa qualité de notaire et de se borner à mettre les parties en présence, il s'est fait leur intermédiaire et leur agent salarič, et a disposé des fonds du préteur sans même lui faire connaître le nom de l'emprunteur. Quant aux témoins certificateurs, ils sont responsables de la nul· lité du prêt qui a été la conséquence de la procuration fausse, et le notaire condamné à indemniser le prêteur a son recours con

tre eux.

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Voir, dans le sens de ces solutions, Dict. du Not., vis Individualité, nos 57 et suiv., et Responsabilité des notaires, no 41, 311 et suiv.

L'arrêt est ainsi conçu :

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LA COUR; Attendu, sur l'appel principal de Mo C.., contre les époux Fresnays, que c'est par une saine appréciation du fait et du droit que les premiers juges ont déclaré que ce notaire s'était susbtitué auxdits époux dans le placement de leurs fonds, s'était ap proprié l'opération et devait être responsable de ses conséquences; qu'il est établi, en effet, que C... n'avait pas avisagé les époux Fresnays et Heuzé dans son étude, et que ces contractants ne s'étaient jamais trouvés devant lui en présence les uns des autres;

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qu'il avait laissé ignorer aux prêteurs à quelles mains il avait confié leur argent; qu'il s'était mis tout à la fois au lieu et place des époux Fresnays vis-à-vis d'Heuzé et d'Heuzé vis-à-vis des époux Fresnays, puisqu'il payait à ceux-ci les intérêts échus, même quand il ne les avait pas reçus de l'emprunteur; qu'en agissant ainsi,il sortait de son rôle professionnel, et, cessant d'être à l'abri de ses fonctions, il n'était plus qu'un agent quelconque des parties, leur gérant salarié, qui recueillait le bénéfice pécuniaire du concours qu'il leur prêtait; que le jugement a tiré légitimement de cette situation la conséquence qu'il devait répondre de la faute qu'il avait commise, ou de ne pas s'assurer quel était Heuzé, ou, l'ayant su, de passer outre ;

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Attendu, sur les conclusions subsidiaires de C... contre L.., que les premiers juges ont encore bien apprécié la situation juridique de ce dernier dans la cause; que Me L... ne pouvait, en effet, être rendu responsable que par un moyen de fait ou un moyen de droit, indiqués l'un et l'autre dans l'art. 44 de la loi du 25 ventôse, mais qui échappent également à ses contradicteurs; que le moyen de fait aurait consisté à établir que L... avait accepté pour témoins certificateurs les nommés Lebras et Bodo qu'il ne connaissait pas lui-même ; que cette assertion, qui serait contraire à la vérité, n'est même maintenue en preuve par aucune des parties; que le moyen de droit consisterait à soutenir que, la dame Heuzé étant qualifiée en tête de l'acte du 2 août par ses nom, prénoms et demeure, l'attestation faite à la fin dudit acte par les deux témoins qu'ils connaissaient cette dame ne satisfaisait pas aux prescriptions légales; que, pour le prétendre, il faudrait ajouter à la loi et créer de nouvelles conditions qu'elle n'exige pas; que C..., d'ailleurs, non plus que toute autre partie, ne saurait être recevable à discuter le fait même de la déclaration des témoins certificateurs consignée à l'acte, à moins de recourir, ce que personne n'a entrepris de faire, à la voie de l'inscription de faux; que cet acte, à part l'identité touchant la personnalité de la femme comparante, identité détruite par le résultat d'un procès criminel, conserve pour le reste la force probante que la loi attache à l'authenticité; qu'en l'état, il fait encore pleine foi que Le Bras et Bodo ont attesté à Me L... connaître Mme Heuzé; qu'il faudrait, pour attaquer juridiquement cette mention, recourir à la procédure extraordinaire indiquée plus haut; que tout autre moyen d'attaque serait illégal et doit être rejeté;

Attendu, en ce qui concerne les conclusions principales de Le Bras et Bodo, que, par une suite nécessaire de ce qui précède, elles doivent être repoussées; qu'étant reconnu, d'un côté, que la femme comparante n'était pas la dame Heuzé; étant établi, d'un autre côté, par l'acte du 2 août, non juridiquement contredit, que les deux témoins out certifié la connaître, il en résulte que la nullité de la procuration a été la conséquence de leur faute;

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