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S 2.

L'Ordonnance a

sujet des assurances

gers du royaume. Guidon de la mer, ch. 3, art. 2. Cette liberté a été renouvelée par l'Ordonnance de la marine, art. 1, des assurances. . Permettons, » est-il dit, même aux étrangers, d'assurer et faire assurer, dans l'étendue de » notre royaume, les navires et marchandises. >

Notre Ordonnance a-t-elle force de loi au sujet des assurances faites dans t-elle force de loi au le pays étranger? Cette question a quelquefois été agitée en notre amirauté, faites dans le pays Infrà, ch. 17, sect. 11. Elle concerne le droit public, et demande d'être examinée avec quelque soin.

etranger?

1o. Pour tout ce qui concerne l'ordre judiciaire, on doit suivre l'usage du lieu où l'on plaide. L. 3, § 6, ff de testib.

Pour ce qui est de la décision du fond, on doit suivre, en règle générale, les lois du lieu où le contrat a été passé : Ex consuetudine ejus regionis, in quâ negotium gestum est. L. 6, ff de evictionib.

Cette distinction est consignée dans tous nos livres : In his quæ respiciunt litis decisionem, servanda est consuetudo loci contractûs. At in his quæ respiciunt litis ordinationem, attenditur consuetudo loci ubi causâ agitur. Ranchin, sur Guipape, quest. 162.

Dumoulin, Cout. de Paris, § 76, gl. 1, no. 36. Merlinus, de pignor., lib. 4, quest. 41, no. 40. Casaregis, disc. 179, no. 57. Louet et Brodeau, litt. C, ch. 42. Despeisses, tit. 12, de l'ordre judiciaire, sect. 1, art. 6, no. 5.

2o. Lorsqu'il s'agit de la capacité de contracter, on doit se conformer aux lois de son prince, dans quelque endroit qu'on se trouve, parce que les sujets du roi sont toujours ses sujets. Faber, def. 3, C. de legib. Brodeau sur Louet, litt. C, ch. 42, no. 2 et 4. D'Ollive, liv. 3, ch. 25, pag. 498. Cochin, tom. 1, pag. 154 et 545. Cela doit s'entendre sauf les droits du tiers.

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3. Brodeau sur Louet, litt. D, ch. 49, no. 1, dit

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que les Français ne peuvent être contraints de plaider hors du royaume, tant en matière civile que criminelle, tous les sujets du roi étant indistinctement obligés à sa justice et autorité souveraine, dont ils ne peuvent être distraits ni exempts, > soit pour leurs personnes ou pour leurs biens, en quelque lieu qu'ils soient » situés, sans licence et permission du roi. »

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Au nombre 16 on trouve des arrêts qui ont jugé que les sujets du roi » ne peuvent être distraits de leur jurisdiction naturelle, pour aller plaider » hors du royaume, encore que les contrats par lesquels ils se sont obligés soient » passés hors du royaume, avec soumission aux jurisdictions étrangères. »

M. d'Aguesseau, tom. 5, pag. 87, dit également que c'est une maxime

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inviolable, qu'un Français ne peut jamais être traduit devant un juge étranger.

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Par une suite du même principe, les jugemens rendus par des juges étrangers, ne sont en France d'aucun poids contre les Français. Il faut que la cause y soit de nouveau discutée. Ordonnance de 1629, art. 121. M. Jullien, sur le Statut de Provence, tom. 2, pag. 443. Brodeau sur Louet, litt. D, ch. 49, et sur l'art. 101 de la Coutume de Paris, n°. 12. Loiseau, Garantie des rentes, ch. 9, no. 18. Bretonier, tom. 2, pag. 758.

4°. Il en est de même des jugemens rendus dans l'étranger, contre un étranger domicilié en France. Il faut qu'on vienne également par nouvelle action. M. Jullien, ibid.

5°. Il n'y a que les jugemens intervenus dans l'étranger contre un étranger non domicilié en France, qui soient au cas d'être exécutés en France, en vertu d'un pareatis qu'on accorde sans connaissance de cause. Ce pareatis ne peut pas être accordé par les juges inférieurs; il ne peut l'être que par le Parlement. Arrêt de réglement du 4 mai 1750. M. Jullien, tom. 2, pag. 442. 6°. La règle dont je viens de parler a lieu, soit en défendant, soit en demandant. Le Français peut faire assigner pardevant les tribunaux du royaume l'étranger contre qui il veut former quelque action, même personnelle; et le jugement prononcé contre l'étranger défendeur, est exécutoire sur les biens que cet étranger possède en France. Journal des audiences, tom. 1, pag. 106. Dénisart, tom. 3, pag. 577. M. Jullien, sur le Statut de Provence, tom. 2, pag. 444. Nouvelle édition de Duperier, tom. 2, pag. 448.

Nota. Ce point était autrefois controversé (Question 149 Joannis Galli. Mornac, ad. L. ult., ff de jurisdic. La Peyrère, pag. 190), et il n'est pas exempt de doute; car la règle actor sequitur forum rei est du droit des gens. M. d'Aguesseau, tom. 5, pag. 53. Vattel, liv. 2, ch. 8, § 103.

7. Les puissances étrangères ont très-fort le droit d'établir, en faveur de leurs sujets, des maximes pareilles aux nôtres.

Cet inconvénient a été prévenu par le traité d'alliance conclu à Soleure, le 28 mai 1777, entre le Roi et le Corps helvétique. « Comme il peut arriver fréquemment, est-il dit, que les sujets de Sa Majesté et ceux du Corps

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> helvétique contractent des mariages, fassent des acquisitions, ou se lient des sociétés, obligations ou contrats quelconques, dont il peut résulter » des contestations ou des procès, il est convenu que toutes les fois que des > particuliers des deux nations auront entre eux quelque affaire litigieuse, le demandeur sera obligé de poursuivre son action pardevant les juges naturels

du défendeur; à moins que les parties plaidantes ne fussent présentes dans » le lieu même du contrat, ou ne fussent convenues des juges pardevant les

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quels elles se seraient engagées de discuter leurs difficultés.......................

Il est de plus convenu que les jugemens définitifs en matière civile, rendus par des tribunaux souverains, seront exécutés réciproquement selon leur » forme et teneur, dans les états de Sa Majesté et dans ceux du Corps helvétique, comme s'ils avaient été rendus dans le pays où se trouvera, après ledit jugement, la partie condamnée. »

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On trouve dans Brillon, tom. 6, pag. 434, un semblable traité passé en 1658, entre la France et la Suisse; et dans Rousset, tom. 6, pag. 20, le traité d'alliance entre la France et les Cantons catholiques de la Suisse, fait en 1715, qui, en l'art. 30, renferme la même décision. Voyez encore l'édit du mois de décembre 1781, qui fixe les priviléges des sujets des états du Corps helvétique dans le royaume.

Revenons à ce qui concerne les assurances, et ne perdons pas de vue qu'elles sont principalement régies par le droit des gens.

Premier cas. Les règles établies par nos ordonnances doivent sans difficulté être observées vis-à-vis de l'étranger qui, étant dans le royaume, se fait assurer, ou devient assureur.

L'étranger qui contracte dans les terres d'un État, est tenu comme sujet à tems de cet État, de se soumettre aux lois du pays : Qui in aliquo loco contrahit, tanquàm subditus temporarius legibus loci subjicitur. Grotius, de jur. bell., lib. 2, cap. 11, § 5, n°. 1; et par raison de réciprocité, il peut révendiquer les droits et les priviléges de ce même pays, au sujet du contrat qu'il y a passé. Vid. Casaregis, disc. 15, no. 10.

Second cas. Il en est de même des assurances qui sont faites en France pour compte d'un étranger; car tout ce qui concerne la décision du fond, est régi par les lois du lieu du contrat.

L'amirauté du lieu du contrat sera sans difficulté compétente pour connaître de la matière. Ordonnance de 1673, tit. 12, art. 17. Ibiq. Bornier et autres glossateurs. Valin, Ordonnance de la marine, art. 1, titre de la compé

tence.

Troisième cas. Si des étrangers ont contracté entre eux, dans les pays étrangers, des assurances payables en France, on se dirigera, pour l'ordre judiciaire, par les formalités qui sont en usage dans le lieu où les poursuites seront faites.

Le lieu où le contrat doit être exécuté rend le magistrat de ce même lieu

compétent. Tel est le véritable sens de la loi 21, ff de oblig. et act., interprétée par Cujas. Vid. Valin, d. loco.

Le paiement provisoire des sommes assurées pourra être ordonné. Roccus,

not. 100.

Mais pour la décision du fond, on se réglera par les lois du lieu du contrat. Deux Anglais plaidant en France, l'un demandait d'être admis à prouver par témoins le prêt d'une somme excédant 100 liv., l'autre excipait de l'article 54 de l'ordonnance de Moulins. Il fut jugé, par le Parlement de Paris, que l'ordonnance n'avait point lieu, d'autant qu'elle va ad litis decisionem. Brodeau sur Louet, ch. 42, no. 3.

Quatrième cas. S'il n'a pas été stipulé que l'assurance passée en pays étrangers, et entre étrangers, serait exécutée en France, les juges de France ne pourront pas en connaître. Ainsi jugé par arrêt du 26 avril 1695, présidant M. d'Oppède, au rapport de M. de Ballon, au profit de Villereal père et fils, marchands juifs, résidans à Livourne, contre Grégoire Diuscan Archiper, marchand arménien. Cet arrêt explique la disposition trop vague de l'ordonnance de 1584, art. 3, et de celle de la marine, titre de la compétence, art. 1. Cinquième cas. Si, en pays étrangers, un Français contracte des assurances avec d'autres Français, sans qu'aucun étranger y soit intéressé, on les jugera en France, suivant l'Ordonnance de la marine; car la loi de leur prince les suit partout.

Sixième cas. Si, en pays étrangers, un Français contracte des assurances avec un étranger, les juges de France connaîtront de la matière, à moins que quelque traité semblable à celui de Soleure ne s'y oppose.

Je crois que, dans ce cas, on doit suivre les lois du lieu du contrat, afin que l'étranger, qui ignore nos usages, ne soit pas trompé. Infrà, ch. 17, sect. 11. Il en serait de même du cas où un Français ferait faire pour son compte des assurances dans l'étranger.

Au reste, nous avons beau dire que les Français ne sont justiciables que des juges de France. Lorsqu'on est demandeur, et que l'étranger n'a aucun bien dans le royaume, on est forcé de le poursuivre chez lui. Il y a nécessité d'en passer par là, dit Valin, art. 1, titre de la compétence, et art. 1, titre des

assurances.

Quoique les jugemens rendus par les tribunaux étrangers n'aient aucune autorité contre les Français, cependant les enquêtes prises et autres preuves dûment authentiquées par le juge étranger, sont admises parmi nous dans les affaires civiles concernant le commerce. Ainsi jugé par arrêt du 16 décem

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Caution judicatum solvi.

bre 1745, en faveur du sieur Poivre, marchand de Marseille, contre Blanc, patron de tartane. Il s'agissait d'une enquête prise par le juge de Nice, au sujet de certaines balles de laine mouillées. Il a été rendu plusieurs autres jugemens semblables.

Parmi nous, les étrangers du royaume sont soumis à donner caution judicatum solvi, lorsqu'ils sont demandeurs. Despeisses, tom. 2, pag. 533, art. 4. Boutaric, inst., pag. 549. Bezieux, pag. 143 et 219. Ainsi jugé par arrêt du 7 juillet 1744, prononcé par M. le président de Regusse, qui condamna un officier espagnol à donner caution, ou à consigner 500 liv., avant que d'être admis à poursuivre les fins d'une requête par lui présentée.

Mais la faveur du commerce exempte les étrangers, quoique demandeurs, de donner caution judicatum solvi, attendu qu'étant invités à venir négocier en France, il est juste qu'on les traite à l'instar des Français.

Decormis, tom. 2, pag. 845, n'explique point si les préjugés qu'il rapporte sont au cas du commerce. Il y a lieu de le croire; et cette conjecture se change en certitude à l'égard de l'arrêt du 2 juin 1617, qui se trouve également rapporté par Buisson, C. de satisdat., où il fait cette remarque : « Il est » vrai, dit-il, qu'en cet arrêt, la Cour fit une grande considération en fa› veur du négoce, qui serait ruiné, si les étrangers qui négocient à Marseille » ne pouvaient pas agir contre les habitans sans donner caution..

Tel est le cas de l'arrêt du 31 janvier 1741, rapporté par M. Jullien, Statut de Provence, tom. 1, pag. 31, lors duquel je plaidai au Parlement, pour la première fois.

CONFÉRENCE.

XXXVI. La concurrence développe l'industrie, et dans le commerce maritime, tout doit être réciproque. La liberté est l'âme du négoce. Tout gouvernement sage ne doit jamais perdre de vue la maxime de Montesquieu, de n'exclure aucune nation de son commerce, sans grande raison. (Voyez Valin, sur l'art. 1 du titre des assurances de l'Ordonnance, et notre Cours de droit maritime, tom. 3, pag. 299 et suivantes; voyez aussi Pothier, contrat d'assurance, no. 95, et son savant annotateur, M. Estrangin, sur le même numéro.)

D'un autre côté, ainsi que l'observe Valin, lorsqu'un étranger assure un Français, l'assurance doit être réglée par les dispositions de notre Code de commerce; mais les Anglais n'adoptent cette maxime qu'autant que notre loi leur est plus favorable que la leur, et comme ils n'assurent jamais que la prime ne leur soit payée d'avance, et qu'ainsi n'ayant à plaider qu'en défendant, il faut se pourvoir contre eux dans leur pays et devant leurs tribunaux, où ils se prévalent de leurs lois, si ces lois leur sont plus avantageuses. — (Voyez les art. 14, 15 et 16 du Code civil).

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1o. L'art. 14 du Code civil, qui permet au Français de traduire devant les tribunaux

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