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$ 5.

Dans le ch. 8, sect. 9, je rapporterai un arrêt rendu au sujet d'une assurance sur quatre prises, faites par un corsaire français. L'un de ces navires, appelé le Port Marchand, avait eu dans le combat le grand mât et celui d'artimon rompus. Le capitaine amarina les prises, et écrivit tout de suite pour qu'on les fit assurer. Partie des assurances furent faites à Marseille, sans qu'on y spécifiât l'état de ce navire. Il fut ensuite repris par les Anglais. Les trois autres furent repris également. Les assureurs refusaient de payer la perte; et ils insistaient en particulier sur ce que la police n'avait pas expliqué l'état délabré du navire démâté. Ils furent condamnés à payer l'entière somme assurée, attendu qu'ils devaient présumer que des vaisseaux pris après un combat, avaient été maltraités,

Le Guidon de la mer, ch. 2, art. 1, veut que la police contienne le port et Capacité du na- la capacité du navire, On le spécifie souvent, mais notre Ordonnance ne l'exige point.

vire.

Enonciation du nombre d'hommes et de canons.

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Du pavillon.

On énonce quelquefois dans les polices le nombre d'hommes et de canons dont le navire est armé. Cette énonciation n'est pas de nécessité; mais si elle est fausse, les assureurs peuvent, suivant les circonstances, être dispensés de payer la perte. On est alors au cas de la règle expressa nocent; non expressa non nocent. L. 195, ff de reg. jur.

Les assurances faites, par exemple, sur un navire génois seraient nulles, si le navire était parti sous pavillon et avec patentes du grand-duc de Toscane. Casaregis, disc. 68, n°. 1, Targa, cap. 33, not. 20, pag. 149.

CONFÉRENCE.

LIII. En matière d'assurance, il est un principe certain, c'est que tout ce qui augmente les risques, les chances heureuses ou funestes, doit être connu des assureurs. Ce principe est fondé non seulement sur les dispositions de l'art. 348 du Code de commerce, mais encore sur celles de l'art. 334 du même Code et de l'art. 7, titre des assurances, de l'Ordonnance de la marine.

Il faut écarter la doctrine que professe Valin sur ce dernier article, lorsqu'il dit «que l'as>>surance n'étant que sur le navire, il importe peu qu'il soit chargé ou vide, puisque l'as» sureur et l'assuré n'ont que le navire pour objet.» En effet, on sent qu'un navire chargé a souvent une marche plus lente, qui l'expose plus long-tems aux dangers de la mer; il a moins de facilité pour éviter l'ennemi. D'ailleurs, en cas de délaissement, le fret appartient à l'assureur, d'après l'art. 386 du Code de commerce. Sous ces deux rapports, l'assureur a un intérêt pressant de savoir s'il est vide ou chargé. C'est pourquoi l'art. 334 du même Code dispose: L'assurance peut avoir pour objet le corps et quille du vaisseau, vide ou chargé, armé ou non armé, seul ou accompagné.

Un navire arme ou non armě, seul ou accompagné, armé en course ou armé en course et

marchandises, allant sous escorte ou sans escorte, sous l'escorte d'un bâtiment de l'Etat, ou sous ses auspices, naviguant sous tel ou tel pavillon, partant avec convoi, ou sans convoi, etc. sont autant de circonstances qui véritablement influent plus ou moins sur l'étendue des risques, et sur la hausse ou la baisse de la prime, et qui doivent être déclarées par l'assuré dans la police.

Il faut encore écarter l'opinion de Valín, qui ajoute, loco citato, « qu'en cas de fausse » déclaration de la part de l'assuré, l'assurance pourrait, suivant les circonstances, être » annulée, ou du moins qu'il y aurait lieu d'assujétir l'assuré à une augmentation de prime » proportionnée aux risques qu'il aurait fait courir de plus à l'assureur. » L'art. 348 du Code de commerce n'admet point de semblables transactions, de telles subtilités. « L'assu>> rance est nulle, porte cet article, même dans le cas où la réticence, la fausse déclara» tion ou la différence, n'auraient pas influé sur le dommage ou la perte de l'objet assuré. » L'assurance ne peut jamais porter sur des marchandises prohibées, et lors de leur saisie, les assurés ne peuvent actionner les assureurs en remboursement, quand même ceuxci eussent été instruits de la nature des marchandises, à moins qu'ils ne se fussent rendus garans de la baraterie de patron; parce que ce qui est nul dans le principe ne peut produire aucun effet, ni donner lieu à aucune action.

SECTION V.

Assurance in quovis.

Si on ignore dans quel navire les effets qu'on a en pays étrangers seront chargés, on les fait assurer in quovis.

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En quel cas et comment peut-on faire assurer in quo

Pourront toutefois les chargemens qui seront faits pour l'Europe aux vis? » Echelles du Levant, aux côtes d'Afrique et autres parties du Monde, être » assurés sur quelque navire qu'ils puissent être, sans désignation du maître › ni du vaisseau, pourvu que celui à qui ils devront être consignes soit dénommé

» dans la police. » Art. 4, titre des assurances, de l'Ordonnance.

Vid. Guidon de la mer, ch. 12, art. 2. Targa, ch. 52, no. 4.

Valin, ibid., observe qu'on peut déroger à la dernière disposition de l'art. 4, lorsqu'on est incertain à l'adresse de qui les marchandises qu'on a dans l'étranger seront chargées. Dans ce dernier cas, il suffit que l'assuré prouve que les marchandises étaient pour son compte, quoique chargées à l'adresse d'autrui. Le même auteur ajoute que pour prévenir les fraudes, la police doit exprimer précisément la partie du Monde où les marchandises doivent être chargées. Il faut donc dire, par exemple, que c'est en Levant, aux Indes orien

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tales, aux Iles françaises, au Mexique, au continent anglo-américain, sans être obligé d'expliquer le lieu particulier, parce que souvent on ignore les négociations que le correspondant peut avoir faites d'un endroit en un autre, avant que de faire passer les retraits en France.

Voici l'espèce d'un cas qui mérite d'être remarqué :

Le sieur Jean Fesquet se fit assurer 13,000 liv., de sortie de Marseille jusqu'aux lles françaises de l'Amérique, sur les facultés, consistant en espèces qui se trouveront chargées dans le vaisseau l'Amphitrite, capitaine Lombardon; et de sortie desdites Iles françaises jusqu'à Marseille, ou autre port de France, sur les facultés et marchandises qui se trouvent chargées in quovis, dans un ou plusieurs bâtimens français, quels qu'ils puissent être.

L'Amphitrite arriva heureusement au Cap. Le capitaine Lombardon chargea:

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4,577 liv.

2,948

3,048

7,975

7,284

25,852 liv.

$ 2.

Clause que, dans

Les trois premiers navires arrivèrent heureusement. Les deux derniers furent pris par les Anglais. Le sieur Fesquet requit que les 13,000 liv. assurées fussent réparties sur les facultés chargées dans les cinq vaisseaux, et il demanda que les assureurs fussent condamnés à payer la perte, par règle de proportion, sur le total.

Les assureurs disaient que les trois navires heureusement arrivés avaient apporté au sieur Fesquet des retraits dont la valeur excédait la somme assurée; qu'ainsi, l'objet de l'assurance était rempli.

Le sieur Fesquet, pour qui M. Massel écrivait, répondait que les retraits chargés dans les cinq vaisseaux formaient une masse respectivement commune et aux assureurs, pour les sommes par eux souscrites, et au chargeur, pour son découvert non assuré; que, par conséquent, les assureurs devaient répondre du sinistre, par règle de proportion. Sentence du 15 mars 1757, qui condamna les assureurs au paiement de cinquante-quatre pour cent des sommes par eux assurées. Cette sentence fut acquiescée et exécutée.

Straccha, gl. 8, no. 3, parle de la clause de pouvoir, dans le cours du voyage, le cours du voyage, les charger sur d'autres navires les effets assurés. Il décide que ce pacte est bon, effets assures pourront être chargés dans pourvu que le chargement intermédiaire sur d'autres navires soit fait sans

d'autres navires.

:

intervalle de tems. Je crois que cela dépend des circonstances. Voici une hypothèse J'ai une caisse de marchandises à envoyer à la Guadeloupe; je ne trouve actuellement aucun navire qui y aille. Il s'en présente un qui part pour la Martinique. J'y charge la caisse, que j'adresse à un ami, avec ordre de la faire passer à la Guadeloupe par premier bâtiment. Je puis faire mes assurances, en expliquant que la caisse sera chargée à Marseille sur tel navire, pour être transportée à la Martinique, et de là être tranférée in quovis jusqu'à la Guadeloupe, à la consignation d'un tel.

CONFÉRENCE.

LIV. L'art. 332 du Code de commerce prescrit d'exprimer dans la police le nom du navire et celui du capitaine; mais le même Code, par son art. 337, apporte une exception à cette règle générale.

Il était, en effet, nécessaire de prévoir le cas où celui qui veut se faire assurer ignore absolument sur quel navire ses effets et marchandises pourront être chargés, et par conséquent le nom du capitaine. C'est ce qui arrive toujours quand on fait assurer des marchandises qu'on a en pays étrangers, destinées pour l'Europe. C'est pourquoi l'art. 337 dispose « Les chargemens faits aux Echelles du Levant, aux côtes d'Afrique et autres parties » du Monde, pour l'Europe, peuvent être assurés, sur quelque navire qu'ils aient lieu, sans désignation du navire et du capitaine, etc. » Ceci est de toute justice, sauf aux assureurs à augmenter la prime s'ils le jugent convenable.

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Mais comme il arrive aussi souvent qu'un propriétaire en France, attendant des marchandises en retour des pays étrangers, ne puisse pas en indiquer précisément la nature et l'espèce, le même article ajoute : « Les marchandises elles-mêmes peuvent en ce cas être » assurées sans désignation de leur nature et espèce. »

Ainsi l'assuré, ignorant quelles sont les marchandises qu'on chargera pour lui, pourra se dispenser de l'indiquer et se borner à assurer une somme de 20,000 francs, par exemple, sur les marchandises qu'on chargera pour son compte dans tel port étranger.

Valin, sur l'art. 4 de l'Ordonnance, titre des assurances, observe avec raison que pour prévenir les fraudes et les surprises, la police d'assurance doit exprimer précisément la partie du Monde où les marchandises doivent être chargées.

Ces sortes d'assurances s'appellent, dans le langage du commerce maritime, assurances

in quoris.

L'Ordonnance exigeait impérativement que dans ces cas le consignataire des marchandises fat dénommé dans la police. Mais comme le nom du consignataire pourrait aussi bien être ignoré que ceux du navire et du capitaine, l'usage avait permis de déroger à cette dernière disposition de l'art. 4 de l'Ordonnance; et le nouveau Code a reconnu cet usage, et il n'a pas voulu faire de la dénomination du consignataire dans la police une condition forcée. Mais la police, dit-il, doit indiquer celui à qui l'expédition est faite ou doit étre consignée, s'il n'y a convention contraire dans la police d'assurance. (Art. 337). Il faut décider, avec Straccha, que la clause de pouvoir, dans le cours du voyage, charger

sur d'autres navires les effets assurés, est une clause valide et conforme aux principes, pourvu
néanmoins, comme l'observe ce savant jurisconsulte, que le chargement intermédiaire sur
d'autres navires soit fait sans intervalle de tems; ce qui dépend des circonstances. —
(Voyez
Pothier, contrats d'assurances, n°. 108, et notre Cours de droit maritime, sect. 8, titre des
assurances ).

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SECTION VI.

Assurance faite sur divers Navires dénommés.

« Si l'assurance est faite divisément sur plusieurs vaisseaux désignés, et divisément sur plu- » que la charge entière soit mise sur un seul, l'assureur ne courra risque

Assurance faite

sieurs vaisseaux.

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Assurance faite sur tel ou tel autre navire.

Assurance faite conjointement sur plusieurs navires.

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Si les marchan

dises destinées pour

divers navires sont

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que de la somme qu'il aura assurée sur le bâtiment qui aura reçu le char›gement, quand même tous les vaisseaux désignés viendraient à périr, et il › rendra la prime du surplus, à la réserve du demi pour cent. » Art. 32, titre des assurances. Ibiq. Valin. Pothier, n°. 68 et suiv. Guidon de la mer, ch. 13. Straccha, gl. 40.

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Si l'assurance est faite sur tel ou tel navire, le risque sera consolidé sur le navire dans lequel les marchandises que j'ai en pays étrangers, seront chargées.

Vid. Pothier, Traité des oblig., n°. 245, où il parle des obligations alter

natives.

Si mes marchandises sont chargées dans l'un et l'autre navire, elles feront masse vis-à-vis des assureurs; l'alternative se convertira en individuelle.

Il en est de même du cas où l'assurance ayant été faite conjointement sur plusieurs vaisseaux désignés, les marchandises ont été distribuées dans chacun. Le tout forme masse, suivant la décision que j'ai rapportée dans la section précédente.

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Vid. Pothier, des oblig., no. 287, où il traite des obligations individuelles.
Le Guidon de la mer, ch. 13, art. 1, propose la question suivante :

Si un marchand voulait répartir ou diviser sa marchandise en divers naréunies dans une vires, et sur chacun d'iceux fait faire assurance; et s'il advenait qu'il eût même chaloupe, et qu'elles périssent. › chargé à Rouen toute sa marchandise en une barque ou heus, pour porter › au Havre à bord d'iceux navires, et que la barque se perdît, ou fît avaries,

› la difficulté n'est pas petite, savoir si ces mots contenus en la police, courront le risque en barques, heus ou bateaux qui porteront lesdites marchan

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