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rigon, il ne serait pas absolument nécessaire de faire mention de ses agrès et apparaux, puisqu'ils en font partie, à moins qu'on ne voulût vendre que la coque du navire sans ses agrès.

Il n'en est pas de même relativement à l'artillerie et autres munitions de guerre, qui doivent au contraire être mentionnées dans l'inventaire ou la vente du navire, parce qu'elles ne sont pas indispensables pour faire naviguer les vaisseaux; elles n'en font point partie. Les auteurs ne sont point d'accord si la chaloupe et le canot font partie du navire. Cleirac, de la jurisdiction, art. 5, n°. 13, dit que la chaloupe et le canot ne sont pas contenus sous les termes d'apparaux, appartenances et dépendances du navire.

Valin, loco citato, observe aussi que la chaloupe et son canot doivent être nommés et désignés dans la saisie ou la vente, parce que ces objets ne font point partie des dépendances

du navire.

Emérigon, comme nous venons de le voir, s'appuyant sur la décision de Paul, est d'un avis contraire.

L'usage a adopté cette dernière opinion, et il n'y a pas de doute aujourd'hui que la chaloupe et le canot du navire ne soient compris dans les agrès du navire, parce qu'ils sont l'un et l'autre absolument nécessaires à la navigation.

Cependant, il faut faire observer que les agrès ne sont pas toujours confondus avec le navire même. Par exemple, dans le cas de la révendication, celui qui a fourni les bois dont le navire a été construit ne peut pas les réclamer, parce que les bois fournis sont devenus le navire même : Navi tabula cedit. Mais si les matériaux du navire peuvent en être détachés sans l'anéantir, tels que sont les mâts, les cordages, les voiles, les ancres, le fournisseur pourra les réclamer par l'action ad exhibendum, suivant la règle générale établie par le droit. (L. 6 et 7, ff ad exhibend.) A plus forte raison, on pourra réclamer pareils objets s'ils se trouvent hors du navire.

Il faut conclure de ce que nous venons de dire qu'en matière d'assurance, l'assureur répond de plein droit de la perte des agrès et apparaux, de la chaloupe et du canot du navire assuré, quoique la police ne fasse mention que du navire. Valin lui-même convient que dans l'usage l'assurance du navire renferme de droit la chaloupe et le canot. — (Voyez Valin sur l'art. 2, titre de la saisie des vaisseaux, et sur l'art. 26, titre des assurances; voyez aussi la sect. 4 du tit. 1 de notre Cours de droit commercial maritime ).

CHAPITRE VII.

DU CAPITAINE.

SOMMAIRE.

SECT. I. De la clause ou autre pour lui.
S 1. Avant le départ est-il permis de changer
le capitaine?

$ 2. La clause ou autre pour lui n'est pas

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sous-entendue.

SECT. II. Erreur dans le nom du capitaine. SECT. III. Après le départ, le changement de capitaine est-il permis?

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SECT. IV. Des personnes qui peuvent commander ou acquérir des vaisseaux français. SECT. V. Du grade et de l'autorité du capitaine.

S 1. Le grade de capitaine marchand est trèshonorable.

Différence entre patron et capitaine.

S 2. Est-ce au capitaine à choisir l'équipage?

L'ART. 3, titre des assurances, dit que la police contiendra le nom du capitaine. Pothier, no. 106, observe que « le nom du maître peut être absolument nécessaire, lorsqu'il se trouve plusieurs vaisseaux du même nom, afin de désigner le vaisseau assuré, en le distinguant de ceux qui ont le même nom. Hors ce cas, si le vaisseau était suffisamment connu et désigné sans le › nom du maître, cet auteur ne croit pas que l'omission du nom du maître » dût annuler le contrat; car quoique les assureurs aient quelque intérêt de > savoir quel est le maître du vaisseau, du risque duquel ils se chargent, y ayant des maîtres dans lesquels ils peuvent avoir plus ou moins de confiance,. néanmoins, rien n'empêche que des assureurs puissent convenir de se charger › des risques à courir sur un vaisseau, quel que soit le capitaine qui le com» mande. »

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Il est des cas où il n'est pas possible de savoir quel sera le capitaine qui commandera le navire. La dénomination spécifique du maître n'est donc pas de l'essence de l'acte. C'est ainsi que la question fut décidée par l'arrêt rapporté suprà, ch. 6, sect. 2. La disposition de l'Ordonnance est à cet égard descriptive, plutôt qu'impérative. Mais tout cela doit s'entendre, pourvu qu'il n'y ait ni dol, ni surprise.

CONFÉRENCE.

LVII. Pour mieux faire connaître le navire sur lequel porte l'assurance, le Code de commerce, comme l'Ordonnance, a encore exigé que le nom du capitaine fût désigné dans la police. En effet, le nouveau législateur a bien senti que l'assureur ne saurait être indifférent au choix de celui qui commande le navire, parce que les risques augmentent ou diminuent en raison du plus ou du moins d'habileté du capitaine, et que, par conséquent, l'assurance se fait en raison de la confiance qu'il inspire.

Néanmoins, si l'assureur n'exige pas qu'on lui fasse connaître le nom du capitaine dans la police, et qu'il signe cette police où le nom du capitaine n'est pas exprimé, l'assureur est censé s'en être rapporté au choix de l'assuré, et s'être soumis à courir les risques résultant du plus ou du moins d'habileté de celui qui commandera le navire. (Voyez Observations de la Cour de cassation, tom. 1, pag. 27).

Mais si l'on a désigné le nom du capitaine, et qu'ensuite on en mette un autre sans l'aveu des assureurs, ceux-ci seront déchargés de toute obligation, à moins que le changement n'ait été fait dans un cas de nécessité et en cours de voyage. C'est ici le lieu d'appliquer la disposition de l'art. 1184 du Code civil, qui porte: «La condition résolutoire est toujours » sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties » ne satisfera pas à son engagement, etc.>> (Voyez Pothier, assurances, no. 106 et 107). Nous venons de dire sans l'aveu des assureurs, mais il n'est pas nécessaire que le consentement de ces derniers soit formel. Ce consentement peut n'être que tacite, il peut être justifié par des circonstances particulières et nullement équivoques, desquelles il résulterait que les assureurs ont été instruits de ce changement, et qu'ils ne l'ont pas empêché. Tout ce que nous venons de dire s'applique au changement du capitaine fait avant le départ du navire. (Voyez ci-après la sect. 3, sur le changement après le départ du navire).

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Avant le départ,

SECTION I.

De la clause ou autre pour lui.

DANS la police, après le nom du capitaine, il est d'usage d'ajouter la clause banale, ou autre pour lui. Cette clause est très-ancienne. Elle se trouve dans la formule d'Anvers, rapportée par Cleirac, sur l'art. 2 des Assurances d'Anvers; dans celle d'Ancône, rapportée par Straccha, de assecur.; dans celle de Gênes, rapportée par Targa, ch. 51; dans celle de Londres, et dans la formule privée dont on se sert parmi nous.

En vertu de cette clause, il est permis aux armateurs, même avant le déest-il permis de part du navire, et sans l'avis ni le consentement des assureurs, de donner

changer le capi

taine?

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le commandement à tout autre capitaine que celui qui était déjà expressément désigné dans la police.

Un pareil usage est sujet à des inconvéniens. Notre chambre du commerce voulut les réprimer par une délibération qu'elle prit le 26 novembre 1692, dont voici la teneur :

Extrait des registres de la chambre du commerce de Marseille.

Dépend du bureau, tenu le 26 novembre 1692.

Il aurait été représenté ensuite des plaintes de plusieurs négocians, que. » comme c'est l'usage dans les actes d'assurance, après qu'on a déclaré le nom du capitaine ou patron, de dire ou autre pour lui, il se trouve des négocians » assez peu légaux, pour affecter de désigner dans leurs assurances des capi› taines ou patrons de la plus grande distinction, pour les faciliter et en payer » une moindre prime, quoique ce ne soit qu'un leurre pour surprendre les › assureurs, par un abus intolérable et une mauvaise application de la clause ⚫ ordinaire ou autre pour lui, en vertu de laquelle ils font ensuite commander , le bâtiment par un autre moins capable et expérimenté, et sur lequel les › assureurs, s'ils en avaient été informés, n'auraient voulu risquer de si im>portantes sommes, et à une prime moins considérable. Il arrive encore que bien souvent, les assurances étant continuées après pareils changemens, et › dans un tems que le véritable capitaine ou patron qui commande effective›ment le bâtiment, est connu et dénommé dans les nouvelles assurances, un › même assureur qui a déjà signé des assurances, sous le nom du capitaine supposé et désigné le premier, en signe de nouvelles sous le nom du véri> table capitaine désigné le dernier, dans la croyance que ce soient deux › différens bâtimens, au lieu que ce n'est que le même; et de cette manière il double et triple son risque sans le savoir, et sans en avoir le dessein : laquelle introduction étant abusive, pernicieuse, et contraire à la bonne foi › du commerce, à l'esprit et au véritable sens de la clause ou qui pour lui, laquelle ne doit être entendue que d'un changement involontaire dans la › route, et après le voyage commencé, par l'effet de quelque accident imprévu, qui réduit les choses dans un point de nécessité, que le même capitaine qui › commandait le bâtiment ne puisse plus continuer ses fonctions, soit par ⚫ mort, maladie, ou autre inconvénient de pareille qualité; la chambre aurait été requise de délibérer sur les moyens de remédier à un tel abus.

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» Sur quoi ladite chambre, d'une commune voix, aurait délibéré, sous le 24

TOM. I.

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bon plaisir de monseigneur l'intendant de justice, qu'à l'avenir ladite › clause ou autre pour lui, ne pourra aucunement servir de prétexte pour autoriser et permettre le changement volontaire du capitaine premier désigné dans les assurances, ou actes de grosse aventure; mais seulement elle » aura lieu dans le seul cas de force majeure ou accidens imprévus, et de vé>> ritable nécessité, qui surviendront pendant la route et cours du voyage, après le départ dudit bâtiment du port où il aura commencé son voyage; et ce à peine de nullité des assurances et actes qui se trouveront avoir été ainsi faits, sous le nom d'un autre capitaine que celui qui se trouvera avoir ef>fectivement commandé le bâtiment, lors de la perte ou accident qui aura › donné lieu à la demande, en tout ou en partie, des sommes assurées, sauf > aux assurés, audit cas de changement volontaire avant ledit départ, de rap› porter le consentement des assureurs, et d'en convenir avec eux avant ledit départ et faute d'en convenir, l'assureté sera pour non faite, et les assu> reurs tenus de restituer la prime suivant l'usage. Et pour l'autorisation et » exécution de la présente délibération, il aurait été donné pouvoir à MM. les ⚫ échevins et députés du commerce, de se pourvoir pardevant ledit seigneur ⚫ intendant, ainsi qu'il appartiendra.

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› Collationné par nous archivaire de la chambre du commerce de Marseille, soussigné. Signé CARFEUIL.

. Vu par nous, premier président et intendant de justice en Provence, la

› délibération ci-dessus :

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Nous avons icelle approuvée et autorisée selon sa forme et teneur. Fait à Aix, le 22 janvier 1693. Signé LEBRET.

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1o. Cette délibération ne fut ni autorisée par le prince, ni homologuée par le Parlement ;

2o. Elle gêne la volonté des contractans, et tend à détruire un pacte que le droit public ne prohibe point;

3. Les chargeurs ou quirataires particuliers forment le plus grand nombre des personnes qui se font assurer; ils n'ont l'autorité ni d'établir, ni de destituer le capitaine du navire : il serait donc odieux de leur imputer un changement qu'il n'est pas en leur pouvoir d'empêcher, et qu'ils ignorent souvent; 4°. S'il y a des abus, c'est le malheur de l'humanité de les voir sans cesse renaître.

Voilà pourquoi, malgré cette délibération de la chambre, notre amirauté n'a jamais cessé de décider que le changement de capitaine, même dans le lieu de la demeure des assureurs, sans leur aveu, et avant le départ du na

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