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51.

Remarquez que l'Ordonnance ne permet pas de faire assurer les personnes, C'est la liberté mais seulement elle permet de faire assurer la liberté des personnes, c'est-àdire le prix du rachat. Pothier, no. 29 et 30.

non la personne, qui est assurée.

§ 2.

Faut-il que le prix

Faut-il que, dans la police, ce prix soit déterminé? Le Guidon de la mer semble l'exiger; mais notre Ordonnance s'explique sur ce point d'une maminé par la police? nière indicative, plutôt qu'impérative. Il est donc loisible aux parties ou de fixer une somme certaine pour être employée au rachat de la personne, ou bien de stipuler en général que les assureurs lui procureront la liberté, sans déterminer aucune somme. Tel est l'avis de Pothier, n°. 174, auquel j'adhère.

Tems du risque.

$ 3.

Cas où le prix du

rachat a été déter

miné par la police.

$4.

rachat n'a pas été

déterminé.

Rien n'empêche de fixer le tems d'un parcil risque. La disposition de l'article 3, titre des assurances, est générale, et s'étend à la matière présente. Si le tems n'est pas fixé, le risque courra depuis le départ jusqu'au retour du vaisseau, suivant la décision générale de l'art. 5, titre des assurances.

Si la police fixe une somme certaine, cette somme sera définitivement due par les assureurs, dès le moment que la personne aura été faite captive: Avendo perso la liberta, è commessa la stipulazione. Targa, ch. 52, no. 19, pag. 230. Pothier, no. 171.

Si le navire pris par les Barbaresques est repris par un Chrétien, après le tems de droit, et que la personne déjà esclave recouvre par ce moyen la liberté, la somme assurée n'en sera pas moins due par les assureurs; Targa, d. loco, parce que la condition, qui ne consiste qu'en un événement ou en un fait, étant une fois accomplie, elle se trouve accomplie pour toujours : Sufficit conditionem semel extitisse.

Il en est de même, si le captif a le moyen de s'échapper. Pothier, no. 174, titre des assurances.

Il en est encore de même, si le captif meurt en captivité; la somme assurée est due à ses héritiers, Pothier, d. n°. 174.

Si la liberté a été assurée sans spécification d'aucune somme, et qu'on se Cas où le prix du trouve dans l'impossibilité de racheter le captif, soit parce qu'on ignore l'endroit où il a été conduit, soit parce que les capteurs refusent de le rendre, soit parce qu'il est mort, dans pareils cas, Pothier, n°. 174, pense que les assureurs ne sont soumis à rien payer, attendu, dit-il, que le fait de la rédemption a été l'objet de leur obligation. Ce fait est personnel à celui envers qui l'obligation a été contractée. Par conséquent, l'action qui naît de l'obligation de ce fait, n'est pas transmissible aux ayant-cause du captif.

On pourrait ajouter que, dans ce cas, il y a impossibilité d'exécuter le

contrat : Impossibilitas superveniens, non vitiat obligationem, aut contractum. Dynus, Règles du droit, reg. 6.

Pothier, d. n°. 174, dit qu'il en serait de même, si le captif avait recouvré sa liberté par l'évasion. L'assuré ne peut plus demander qu'on le rachète, puisqu'il n'est plus captif. Le fait qui faisait l'objet de l'obligation des assureurs étant devenu un fait impossible, l'obligation de ce fait est anéantie.» Mais dans les deux derniers cas dont je viens de parler, les assureurs seraient-ils obligés à rendre la prime?

Vous m'avez donné une somme pour une cause qu'un événement fortuit m'empêche de remplir. Je ne suis pas obligé de vous la rendre Pecuniam à te datam, si hæc causa quâ data est, non culpâ accipientis, sed fortuito casu non est secuta, minimè repeti posse certum est. L. 10, C. de condict. ob caus. dat. Ibiq. Peresius.

Pothier, Traité des obligations, n°. 213, pose une hypothèse relative à la question présente. Je vous ai premis une somme, à condition que dans un an vous donniez la liberté à votre nègre. Le nègre meurt avant l'année. Cet auteur dit que la somme n'est pas due, parce que le cas de la mort anticipée n'a pas été prévu dans le contrat, et que, dans le doute, l'interprétation se fait toujours contre celui envers qui l'obligation a été contractée.

Cette doctrine serait ici applicable, si la prime avait été promise à condition que la personne, au cas qu'elle fût faite esclave, serait rachetée; mais si la prime a été stipulée purement et simplement, elle doit être payée au tems convenu, malgré l'impossibilité où l'on est de racheter le captif, ou quoique le captif se soit procuré la liberté par la fuite; car les paroles du contrat d'assurance doivent être prises dans leur sens propre, sans qu'il soit permis de s'en écarter, sous prétexte d'un événement imprévu. Par la même raison, la prime payée sans condition spéciale est définitivement acquise aux assureurs, qui se trouvent dans l'impossibilité absolue de racheter l'esclave.

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Si dans la même hypothèse de la liberté assurée sans spécification de somme, on demandait une somme exorbitante pour la rançon, Pothier, n°. 175, pense que les assureurs ne seraient en ce cas obligés à donner au captif, pour sa rançon, que la somme à laquelle ils ont pu prévoir que pourrait monter au plus haut prix la rançon de l'assuré, eu égard à sa qualité.

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Je crois que cette décision est contraire à la nature du contrat d'assurance, lequel rejette sur les assureurs toute l'étendue du risque générique auquel

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ils se sont soumis, Les modifications ne serviraient qu'à ébrécher le contrat, et à rendre tout arbitraire.

Comme il n'est rien de si favorable que la liberté, les assureurs doivent au plus tôt se mettre en état de remplir leur obligation, sans attendre d'autre délai que celui qui serait nommément déterminé dans la police. Guidon de la mer, ch. 16, art. 3. Pothier, n°. 173.

Les assureurs qui sont en demeure de remplir une obligation aussi sacrée, doivent être condamnés à payer non seulement la somme concernant la rancon, mais encore les dommages et intérêts de l'assuré, que leur retard laisse dans la captivité; et il faudrait, dit Pothier, n°. 176, estimer ces dommages eu égard au genre de la captivité, et à la qualité de la personne.

Si, dans la police, on a stipulé une peine, c'est à cette peine convenue qu'il faudra s'en tenir en cas de demeure. Pothier, ibid.

Une pareille peine sera encourue ipso jure, d'abord après la demeure; car suivant la loi magnam 12, C. de contrah. et commit. stipul., l'une des cinquante décisions de Justinien, celui qui a promis de faire ou de donner une chose dans un tems préfix, et qui y manque, encourt sur-le-champ la peine stipulée. Cujas, ad d. legem, traite à fonds cette matière, et telle est notre jurisprudence.

En bonne règle, la peine stipulée ne peut pas être modérée par le juge, parce qu'elle est due in vim pacti.

Il en est autrement en pays coutumier. Pothier, Traité des oblig., no. 345. Si, lors du retour, le captif racheté était de nouveau pris par les Barbaresques, les assureurs ne seraient pas obligés à payer une seconde rançon; car la condition qui ne consiste qu'en un événement ou en un fait, étant > une fois accomplie, il n'est plus nécessaire qu'elle arrive, ou qu'elle s'accomplisse de nouveau, quoique l'accomplissement ne dure pas : Conditio semel impleta non resumitur.» Furgole, tom. 2, pag. 268.

>

Qui semel implevit, dicitur satisfecisse obligationi, licèt adimplementi non duret effectus. Casaregis, disc. 23, no. 28.

CONFERENCE.

LXV. L'Ordonnance de 1681, par son art. 9 du titre des assurances, permettait à ceux qui s'embarquent de faire assurer la liberté de leurs personnes. Cette disposition tirée de l'art. 3, chap. 16, du Guidon de la mer, a été implicitement renouvelée par les art. 268, 269 et 334 du Code de commerce. Par ce contrat, l'assureur, moyennant la prime convenue, s'oblige envers vous, dans le cas où, pendant le voyage, vous seriez pris par dés

corsaires ou par des ennemis, de payer la somme nécessaire pour servir à votre rançon et aux frais de votre retour. Ainsi, c'est à proprement parler le prix de votre rachat que vous faites assurer.

Pothier observe que dans ce cas on doit limiter par le contrat le tems que pourra durer le voyage, et le plus long tems ne peut pas excéder trois ans. Si l'accident de la personne assurée n'arrive qu'après l'expiration de ce tems, les assureurs n'en sont pas tenus, quelque excuse qu'elle allègue, que son voyage a été retardé par maladie ou par quelque autre accident. Il cite le Guidon de la mer, chap. 16, art. 4.

Nous pensons avec M. Estrangin que le Guidon de la mer ne doit pas faire règle, et que si un voyageur avait stipulé une assurance par laquelle on lui garantirait sa liberté ou son rachat pendant plus de trois ans, cette stipulation aurait son effet.

Si le tems n'est point déterminé par le contrat, le risque courra ainsi qu'il est dit par l'art. 328 du Code de commerce, c'est-à-dire depuis le jour du départ jusqu'au moment où le navire est ancré ou amarré au lieu de sa destination.

Voyez d'ailleurs Pothier, assurances, n°. 171 à 177, où il traite de l'obligation que contractent les assureurs, en assurant la liberté d'une personne, et de l'action qui en naît, notamment dans le cas où il n'y a pas de prix convenu pour le rachat de la personne dont la liberté est assurée.

Voyez aussi notre Cours de droit maritime, tom. 3, pag. 370 et suivantes.

L'art. 9 de l'Ordonnance avait parlé de la stipulation d'une peine, faute de paiement de la rançon dans le tems stipulé. Le Code de commerce, art. 332, n'en fait aucune mention; mais il n'en résulte pas moins de la nature des choses un droit à indemnité ou dommagesintérêts contre l'assureur, qui, par son fait, retarde la délivrance de celui dont la liberté est assurée. Il faut donc dire avec Valin que s'il y a une peine stipulée dans la police, elle servira de règle; mais s'il n'y a point de stipulation à ce sujet, l'assureur sera tenu des dommages et intérêts résultant de la détention prolongée du captif. (Voyez Valin, sur l'art. 9, assurances, de l'Ordonnance ).

SECTION III.

Rachat des Captifs.

Je viens de parler du cas où l'esclave racheté par ceux qui avaient assuré sa liberté, est repris par les Barbaresques. Il s'agit maintenant de l'esclave racheté, dont on fait assurer l'heureux retour.

« Pourront, dit l'art. 11, ceux qui racheteront les captifs, faire assurer sur › les personnes qu'ils tireront d'esclavage le prix du rachat, que les assureurs » seront tenus de payer, si le racheté, faisant son retour, est repris, tué, › noyé, ou s'il périt par autre voie que par la mort naturelle. »

$1. Assurance de l'heu reux retour de l'esclave racheté.

$ 2.

Dans le cas de cet article, comme dans celui de l'art. 9, l'assurance concerne moins la personne tirée de l'esclavage, que le prix du rachat. Pothier, n°. 29.

Si le racheté, faisant son retour, est repris, la somme assurée servira à le racheter de nouveau; s'il est tué ou noyé, la somme assurée indemnisera les rédempteurs de la dépense déja faite; s'il décède de mort naturelle, c'est un événement commun à tous les hommes. La prime, dans ce dernier cas, est acquise aux assureurs, parce qu'ils avaient couru le risque de la reprise, ou de la mort funeste.

Les femmes peuvent valablement s'obliger, et aliéner leurs biens dotaux, s'obliger pour tirer pour tirer leur mari d'esclavage. » Art. 12, ibid., des assurances.

La femme peut

son mari d'escla

vage.

Privilége de celui qui, au refus de la femme, rachète le mari.

Le droit romain permettait à la femme d'aliéner sa dot pour racheter son père, ses enfans, ou ses frères pris par les ennemis. L. 73, § 1, ff de jur. dot. LL. 20 et 21, ff solut. matrim.

Il était permis à la femme d'aliéner sa dot pour alimenter son mari : Ut egentem virum sustineat. D. leg. 73, ff de jur. dot. Mais on ne trouve aucun texte qui permît l'aliénation de la dot pour racheter le mari fait esclave, parce que la captivité rompait le mariage : Dirimitur matrimonium captivitate. L. 1, ff de divort. LL. 10 et 52, ff solut. matrim. L. 12, § 4, ff de captiv. La femme entrait dès lors en viduité : elle pouvait donc disposer de ses biens dotaux, et rien ne l'empêchait de s'en servir pour racheter l'esclave qui avait été son mari, afin de réintégrer leur mariage: Uxorem maritus jure postliminii non recipit, sed consensu redintegratur matrimonium. LL. 8 et 14, ff de captivis (1).

Justinien, par la Novelle 22, cap. 7; par la Novelle 117, cap. 12, et par l'interpollation faite au texte de la loi uxores 6, ff de divort., mitigea cet ancien droit. Or, puisqu'aujourd'hui le mariage n'est point dissous par la captivité de l'un des conjoints, il est naturel que la femme puisse aliéner sa dot pour racheter son mari esclave.

« Celui qui, au refus de la femme, et par autorité de justice, aura prêté » deniers pour le rachat de l'esclave, sera préféré à la femmé sur les biens du • mari, sauf pour la répétition de la dot. » Art. 13, ibid., des assurances.

1o. La préférence dont parle cet article n'a lieu, au préjudice de la femme, que dans le cas où, interpellée en justice de racheter son mari, elle n'a pas

(1) Le soldat romain devait vaincre ou périr. S'il se laissait conduire en captivité, il perdait sa qualité de mari et de citoyen; il était privé de ses biens et de son état.

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