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3. Dans les pays où les assurances par forme de gageure sont permises, on peut faire assurer deux fois la même chose, et pour le même risque, pourvu que les seconds assureurs sachent qu'il s'agit d'une gageurc: Non est prohibita duplicatio assecurationis, quandò secundi assecuratores scirent aliam fuisse factam assecurationem super eodem valore, vel eisdem mercibus. Ratio est, quia secunda assecuratio valeret, non uti assecuratio, sed uti vadimonium, seu scommessa. Casaregis, disc. 1, no. 93.

CONFÉRENCE.

VIII. Si l'assureur peut bien faire réassurer par un second assureur les effets qu'il a assurés, il ne s'ensuit pas que l'assuré puisse faire assurer une seconde fois la même chose. Il ne lui est pas permis de faire assurer de nouveau les effets qu'il a déjà fait assurer, puisqu'il n'encourt plus de risques : cette seconde assurance serait illégitime et nulle.

Mais il n'y a aucun doute que l'assuré ne puisse faire assurer la prime qu'il a payée ou promis de payer à l'assureur. Cette faculté lui est permise par l'art. 542 du Code de commerce, qui dit que l'assuré peut faire assurer le coût de l'assurance. Or, la prime est bien le coût de l'assurance. (Voyez notre Cours de droit commercial maritime, tom. 3,. pag. 434, 435, etc.; voyez aussi l'art. 20, tit. des assurances de l'Ordonnance de 1681, et Valin sur cet article).

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Par cet art. 20 de l'Ordonnance, pris de l'art. 20 du chap. 12 du Guidon de la mer, l'assuré était autorisé à faire assurer la solvabilité de ses assureurs. Mais le nouveau Code de commerce n'en parle point. Faut-il en conclure qu'il a voulu le défendre? Non sans doute. Rien ne s'oppose à ce que l'assuré demande une caution à ses assureurs; à plus forte raison, doit-il lui être permis de se donner lui-même un garant d'une autre espèce.. L'art. 346 du Code de commerce dit seulement que si l'assureur ou l'assuré tombe en faillite, il y a lieu à demander la résiliation du contrat, ou caution, lorsque le risque n'est pas encore fini. (Voyez Cours de droit commercial, ibidem, pag. 439 et suivantes).

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JURISPRUDENCE.

Par ces mots, lorsque le risque n'est pas encore fini, il ne faut pas entendre l'événement même, mais plutôt la connaissance du sinistre. Jugé par arrêt du 28 juin 1813, de la Cour royale d'Aix, que l'assureur qui a connaissance du sinistre est non recevable à demander contre l'assuré caution de la résiliation du contrat; peu importe que l'assureur n'ait pas stipulé sur bonne ou mauvaise nouvelle. (Voyez ci-après chap. 8, sect. XVI, où nous parlons de cet arrêt)..

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STYPMANNUS, part. 4, cap. 7, n°. 305 et 385, dit que la forme de l'assurance est ou essentielle ou accidentelle; que la soumission aux risques maritimes et la stipulation de la prime, constituent la forme essentielle de ce contrat, et que la forme accidentelle consiste en la police qui en est dressée

Deux sories de

forme.

Kuricke, diatr. de assecur., pag. 833, distingue la forme de l'assurance en externe et en interne. Il dit que la première donne l'existence au contrat, et que la seconde lui défère l'essence et la légitimité: Illa ad existentium, hæc ad essentiam pertinet; que la police constitue la forme externe de l'assurance, et que la forme interne dérive des obligations respectives des parties.

Pour que l'assurance soit valable, il faut que la police en soit dressée, et que, dans cette police, il n'y ait aucun pacte qui soit contraire à l'essence du contrat.

Au reste, l'assurance est toujours présumée faite en la manière qu'elle a dû l'être : Præsumendum est quòd assecuratio facta fuerit eo modo quo fieri debuit. Casaregis, disc. 7, n°. 12. Car il faut entendre et expliquer l'acte dans le sens capable de le faire valoir, plutôt que dans le sens contraire : Ut potiùs valeat, quàm pereat, dit la loi 12, ff de rebus dubiis. Vide suprà, ch. 1, sect. 5.

CONFÉRENCE.

IX. La forme du contrat d'assurance est un objet des plus essentiels à ce contrat, un de ceux qui ont le plus besoin de développement.

Les lois et les réglemens anciens ont quelques dispositions relatives à la forme du contrat d'assurance. ·(Voyez le Réglement de Barcelonne, les Assurances d'Amsterdam, le Guidon

de la mer, etc.)

On a rassemblé et refondu, dans l'Ordonnance de 1681, toutes les règles qu'on a trouvées dans les us et coutumes de la mer, avec quelques additions et modifications. (Voyez titre des assurances, art. 2, 3, 8, 68).

Les rédacteurs du Code de commerce ont de leur côté recueilli les dispositions des lois précédentes, en en retranchant ce qui ne s'accommodait plus à notre nouvelle législation, et en y ajoutant ce qui leur a paru nécessaire dans le nouveau systême qu'ils ont suivi. (Voyez tit. 10 du Code de commerce ).

SECTION I.

Le Contrat d'assurance doit-il être rédigé par écrit?

M. VALIN, art 2, des assurances, et M. Pothier, n°. 99, se réunissent à dire que, dans l'assurance, l'écriture n'est requise que pour la preuve du contrat : d'où ils concluent qu'en cas de dénégation, on peut avoir recours au serment decisoire.

Le premier va plus loin. Il dit qu'il n'y a nul doute que la preuve d'une convention d'assurance ne soit recevable par témoins, s'il s'agit d'une somme de 100 liv. et au-dessous.

Mais cet auteur n'a pas fait attention que si, dans ce cas, la preuve testimoniale était admissible, elle devrait l'être indéfiniment, attendu que l'article 54 de l'ordonnance de Moulins n'a pas lieu dans les affaires mercantiles. Édit de 1573, art. 5. Ordonnance de 1667, tit. 20, art. 2.

La question mérite donc d'être examinée.

1o. Je conviens qu'en règle générale, l'écriture est étrangère à la substance des conventions. On ne les rédige par écrit que pour en constater plus aisément la preuve : Fiunt scripturæ, ut quod actum est, per eas faciliùs probari possit. L. 4, ff de fide instrum.

Mais cette règle du droit commun cesse dans tous les cas où l'écriture est expressément requise par la loi : Scriptura necessaria non est, nisi lex eam expressè requirat. Corvinus, C. de fide instr., pag. 193.

«

2°. Le Guidon de la mer, ch. 1, art. 2, nous apprend qu'on faisait an›ciennement les assurances sans écrit. Elles étaient dites en confiance, parce » que celui qui stipulait l'assurance, ne faisait pas ses pactions par écrit, mais se confiait à la bonne foi et prud'hommie de son assureur. »

Cette manière de procéder fut ensuite prohibée en toutes les places de commerce, à cause des abus et des différens qui en survenaient. On alla même jùsqu'à exclure l'écriture privée. Des greffiers d'assurance furent établis, et il fut déterminé que les polices seraient dressées par le greffier, ou par un notaire, à peine de nullité. Guidon de la mer, d. loco. Réglement de Barcelonne (à la suite du Consulat), ch. 349.

Le Réglement d'Amsterdam, art. 18, permit ensuite d'employer l'écriture privée.

5°. L'Ordonnance de la marine, art. 2, des assurances, renferme à ce sujet deux dispositions.

« Le contrat appelé police d'assurance sera, dit-elle, rédigé par écrit, et » pourra être fait sous signature privée. »

D

Les parties ont donc le choix ou d'écrire elles-mêmes leurs accords, d'employer le ministère d'un courtier ou d'un notaire; mais le contrat sera rédigé par écrit; l'Ordonnance le veut ainsi. Cette dernière disposition est absolue; elle établit un point de forme qui est de rigueur. Jusqu'à ce que la police soit signée (par l'assureur), le contrat n'est point parfait. Il est permis aux parties de revenir sur leurs pas. L'écriture seule fixe et caractérise 4

T. I.

leur volonté : Requiritur ad existentiam, instrumentum assecurationis, dit Kuricke en l'endroit cité.

Je crois donc, d'après notre Ordonnance, qu'on ne peut ni déférer le serment décisoire à celui qui dénie l'assurance verbale, ni le faire répondre catégoriquement, ni moins encore admettre la preuve testimoniale, sous pré texte, soit de la modicité de la somme, soit d'un commencement de preuve par écrit.

CONFÉRENCE.

X. Par son art. 2 du titre des assurances, l'Ordonnance disait : Le contrat d'assurance sera rédigé par écrit. L'art. 332 du Code de commerce contient la même disposition. (Voyez à cet égard la conférence sur la section suivante ).

Si nous ne connaissons plus aujourd'hui, les assurances dites en confiance; si les abus et les différens qui résultaient de cet usage les ont fait proscrire; si le Code de commerce, art. 332, exige comme l'Ordonnance, art. 2, que le contrat d'assurance soit rédigé par écrit, cependant il existe encore des assurances qu'on a l'impudeur d'appeler assurances d'honneur pour la traite des noirs. Je le dis à la honte de quelques places maritimes et å la honte de certains agens du Gouvernement, qui ont eu la lâcheté de fermer les yeux sur ces sortes d'armemens. Heureusement que nous ne voyons que de cupides spéculateurs, des mercantileurs déhontés, mais aucune honorable maison de commerce, se livrer sans frein à ce trafic infâme et inhumain. Déplorable effet de l'esprit d'agiotage que l'immoralité a érigé en système !

Au reste, ces assurances sont prohibées par les lois, et on ne serait point admis à en prouver l'existence devant les tribunaux, puisque la traite qui en est l'objet est elle-même défendue sous de fortes peines. -(Voyez l'ordonnance du roi du 8 janvier 1817; la loi du 15 avril 1818, et l'ordonnance du 24 juin 1818 ).

Par une loi du 16 pluviôse an 2, la Convention avait déjà déclaré que l'esclavage des » nègres dans toutes les colonies est aboli. »

Mais dès 1789, l'Assemblée constituante avait proclamé solennellement le principe de cette abolition.

Quoi de plus cruel que l'infâme trafic des noirs! De tous les excès de la violence, de tous les abus de la force, celui-là est le plus odieux et le plus révoltant. Un noir n'est-il pas un homme ?.....(Voyez ci-après chap. 8, sect. 4, conférence ).

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