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non sur l'affection qu'un particulier peut avoir pour elles, ni sur l'utilité qu'il peut en retirer, mais sur l'estimation commune: Prætia rerum, non ex affectu, nec utilitate singulorum, sed communiter funguntur; c'est-à-dire sur ce que tout le monde les estimerait : Quanti omnibus valerent. L. 33, ff ad leg. aquiliam.

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Pothier, Traité des ventes, n°. 242, dit que le juste prix des choses est » le prix auquel les choses de pareille nature et bonté ont coutume de se » vendre dans les lieux où elles sont situées, si ce sont des héritages, ou » dans le lieu où elles sont exposées en vente, si ce sont des choses mobi> lières. »

Grotius, liv. 2, ch. 12, § 14, prétend que la mesure la plus naturelle de la valeur de chaque chose, c'est le besoin qu'on en a. Vid. Puffendorf, liv. 5, ch. 1. Raynal, liv 5, ch. 119, tom. 1, pag. 621, dit que la concurrence des ven› deurs et des acheteurs réduit les marchandises à leur juste valeur. »

Le prix de la vente à crédit est toujours plus haut que celui de la vente au comptant: Minùs solvit qui tardiùs solvit, nam et tempore minùs solvitur. L. 12, S1, ff de verb. signif. Pothier, Traité des ventes, no. 247 et 300. Dumoulin, Coutume de Paris, $ 78, gl. 1, v°. acheté à prix d'argent, no. 42. Scaccia, § 1, quest. 7, n°. 75, pag. 148. Montesquieu, liv. 22, ch. 22.

Le prix coûtant n'est pas toujours une règle sûre pour connaître la juste valeur de la chose. On peut l'avoir achetée ou trop cher, ou à bon marché. Les circonstances des tems et des lieux en font sans cesse varier le prix. Voilà pourquoi, en matière d'avarie grosse, les choses sauvées contribuent à la perte commune, non sur le pied de ce qu'elles ont coûté, mais sur le pied de ce qu'elles peuvent être vendues: Non quanti emptæ sunt, sed quanti venire possunt. L. 2, S 4, ff de leg. rhod.

Dans la plupart des places de commerce, on imprime toutes les semaines un mémorial du prix, jour par jour, des marchandises et du change. Ce prix est accompagné des variations qui procèdent, soit du terme plus ou moins long accordé aux acheteurs, soit de mille autres causes. Le prix courant baisse ou hausse quelquefois tout d'un coup, selon que quelque cas particulier augmente ou diminue le nombre des acheteurs, ou la quantité d'argent ou de marchandises. Puffendorf, liv. 5, ch. 1, § 10.

On distingue le prix courant au tems et lieu du chargement, et le prix courant au tems et lieu de la décharge.

Juste prix.

Prix des ventes à crédit.

Prix coûtant.

Prix courant.

$ 5. Dans l'estimation des effets qu'on fait

Dans l'estimation des effets qu'on fait assurer, on s'arrêtait autrefois, tantôt au prix coûtant, tantôt au prix courant au tems de la perte, tantôt au assurer, quel prix

doit-on avoir en vue?

Si la chose a diminué de prix.

Si elle a augmenté de prix.

Marchandises assemblees de longue

de la manufacture

de l'assuré.

prix courant au tems et au lieu du chargement, et tantôt au prix courant au tems et au lieu de la décharge. Vid. Guidon de la mer, ch. 2, art. 12. Santerna, part. 3, no. 40. Roccus, not. 31. Casaregis, disc. 1, no. 134. Scaccia, $1, quest. 1, no. 168. Straccha, gl. 6.

Voici quelles sont nos règles.

Il est permis de faire assurer au prix coûtant les marchandises qui, sans avoir souffert aucune avarie, se trouvent, par les occurrences, valoir moins que ce qu'elles ont coûté; car si l'on eût continué de les garder en magasin, elles auraient pu recouvrer, ou même excéder leur valeur primitive.

Si, au contraire, elles ont augmenté de valeur, on peut les faire assurer suivant le prix courant au tems et lieu du chargement. Art. 64, titre des ussurances, de l'Ordonnance. On s'écarte alors de la décision du Guidon de la mer, ch. 2, art. 9, 12 et 13, qui veut qu'on s'en tienne au prix que la chose a coûté lors de l'achat, soit à tems, soit argent comptant.

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Le Guidon de la mer, ch. 2, art. 14, parle des marchandises assemblées de main, ou procédant longue-main, ou procédant de la manufacture de celui qui les envoie. Il dit que le prix est alors douteux et disputable; car si elles ne sont estimées par la police, les derniers assureurs n'en voudront tenir compte qu'au prix qu'elles coûtent; et ce faisant, celui qui fait l'envoi perdrait le tems de l'amas ou › le profit qu'il espère sur la manufacture. Pour éviter tout débat, il sera plus certain les estimer par la police, et les taxer à prix raisonnable au prix » courant, afin que l'assureur qui, par sa signature, aura ratifié le prix, par après ne puisse disputer.

L'assuré a le choix

du prix coûtant, ou du prix courant au tems et lieu du chargement.

Prix courant an tems et lieu de la décharge.

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Si l'assuré a omis d'insérer dans la police l'estimation des marchandises qui procèdent de son crû ou de sa manufacture, les assureurs seront fondés, en cas de sinistre, à requérir qu'elles soient estimées suivant le prix courant au tems et au lieu du chargement.

S'il s'agit de marchandises achetées par l'assuré et non estimées dans la police, l'assuré aura le choix d'en justifier la valeur par livres ou factures, ou d'en laisser faire l'estimation suivant le prix courant au tems et lieu du chargement. Art. 64, titre des assurances.

On a vu ci-dessus, ch. 1, sect. 4, que l'assurance n'est pas un moyen d'acquérir; il suffit que l'assuré soit indemnisé du dommage réel qu'il souffre, sans jamais pouvoir prétendre aucun bénéfice aux dépens de ses assureurs. Voilà pourquoi il n'est permis de faire assurer ni le profit espéré des marchandises, ni le fret à faire, ni le salaire à gagner. On n'a égard qu'à la perte,

et non au gain: Detrimenti, non lucri fit præstatio, pour me servir des paroles de la loi 2, § 4, ff de leg, rhod.

Par conséquent, si, dans l'estimation des effets assurés, on veut s'écarter du prix d'achat, on doit s'arrêter à la valeur au teins et lieu du chargement. Tels sont l'esprit et la lettre de l'Ordonnance en l'art. 64, titre des assurances. Dès que l'assuré est indemnisé de cette valeur, cela suffit pour que son intérêt légitime soit rempli.

Dans les pays où l'assurance par forme de gageure est autorisée, on peut se régler par le prix au tems et lieu de la destination, pourvu que l'assureur se soit rendu garant que la chose parviendrait saine et sauve dans le lieu destine. (Santerna, et autres auteurs déjà cités). Mais nous avons d'autres principes, desquels les parties n'ont pas la liberté de s'écarter.

En fait de prêt à la grosse et d'assurance, on ne fait point attention à la › valeur des effets au tems de leur perte, mais seulement à ce qu'ils valaient au tems de leur chargement, parce que ce n'est que jusqu'à concurrence de › cette valeur, que le prêteur à la grosse aventure et l'assureur ont voulu › courir les risques. Aussi le profit maritime et la prime d'assurance n'ont-ils lieu que sur le même pied. Valin, art. 6, titre du jet.

Le même auteur, sur l'art. 47, titre des assurances, dit « que le réglement › des avaries entre les assureurs et l'assuré, se fait en prenant pour base l'estimation ou la valeur des marchandises au tems de leur chargement, sans

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⚫ considérer si ces marchandises auraient valu plus ou moins à leur arrivée à bon port. »

Si, en matière d'avarie grosse, on suit une règle différente, c'est parce qu'on se trouve alors vis-à-vis du navire et de l'universalité des chargeurs. Infrà, ch. 12, sect. 44.

Ce qui vient d'être dit au sujet de l'estimation des marchandises, s'applique au navire. Il n'est pas permis de le faire assurer pour une somme qui excède sa valeur au tems du départ, sauf de faire assurer les nouvelles impenses faites pendant le cours de la navigation.

CONFÉRENCE,

LXXXII. D'après le nouveau Code de commerce, art. 33g, si la valeur des marchandises n'est point fixée par le contrat d'assurance, elle peut être justifiée par les factures ou par les livres. A défaut, l'estimation en est faite suivant le prix courant au tems et au lieu du chargement, y compris tous les droits payés, droits de douane, frais de transport, et généralement tous les frais faits jusqu'à bord, parce que ce n'est que jusqu'à concurrence de cette valeur que l'assureur peut être présumé avoir voulu en courir les risques.

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Les mêmes règles doivent être suivies, s'il s'agit d'une nouvelle estimation des effets assurés, pour l'exécution des art. 357 et 358 du Code de commerce.

Dans l'un et l'autre cas, l'estimation peut être réglée de gré à gré, ou bien les parties peuvent amiablement convenir d'experts pour y procéder. Si, au contraire, elles ne sont pas d'accord, il faudra s'adresser au tribunal de commerce, en suivant les dispositions de l'art. 429 du Code de procédure.

Mais la justification de la valeur des effets assurés par les livres et les factures, doit être faite en la manière et dans les limites indiquées par les art. 12, 13 et 109 du Code de commerce. Ce mode d'estimation n'exclut pas le mode suivant le prix courant et par experts, c'est-à-dire le prix courant au moment de l'assurance.

Maintenant, s'il s'agit de faire estimer le navire, la valeur d'un navire comprend non seulement la valeur réelle du corps au départ, mais encore celle des agrès et apparaux, les dépenses de radoub, les munitions de bouche et de guerre, les avances payées à l'équipage, et généralement tous les frais faits pour la mise hors. (Argument de l'art. 5 du chap. 15 du Guidon de la mer; Valin sur l'art. 15, titre des assurances, et sur l'art. 8 du même titre).

§ 1.

SECTION 11.

Effets assurés au-delà de leur valeur.

DÉFENDONS, dit l'art. 22, titre des assurances, de l'Ordonnance, de faire » assurer ou réassurer des effets au-delà de leur valeur, par une ou plusieurs polices, à peine de nullité de l'assurance, et de confiscation de la marchandise.

» Si l'assuré a recélé des assurances ou des contrats à la grosse, et qu'avec » celles qu'il aura déclarées elles excèdent la valeur des effets assurés, il se

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privé de l'effet des assurances, et tenu de payer les sommes empruntées,

› nonobstant la perte ou prise du vaisseau. » Art. 54, titre des assurances.
Et s'il poursuit le paiement des sommes assurées au-delà de la valeur de
ses effets, il sera en outre puni exemplairement. Art. 55, titre des assu-

rances

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Ces articles sont conformes au Réglement d'Anvers, art. 14.

Le mot recèlé se prend toujours en mauvaise part; c'est lorsqu'on cache Preuve de la fraude. quelque chose par dol et fraude.

L'excès des assurances est présumé frauduleux, si l'assuré a omis de dé

clarer toutes les assurances qu'il a fait faire (art. 53), et qu'il poursuive le paiement des sommes au-delà la valeur de ses effets. Art. 55, titre des assurances. C'est à lui à se justifier sur ce point, et à faire voir que l'excès procède de quelque erreur, soit de sa part, soit de celle de ses commissionnaires. Valin, art. 54, titre des assurances.

S'il s'agit d'une expédition faite par correspondance en pays éloignés, on sera aisément porté à croire qu'il n'y a point eu de fraude. La justification serait beaucoup plus difficile, si le tout était opéré par l'assuré lui-même.

Mais tout cela dépend des circonstances; les juges aiment mieux imputer à erreur qu'à malice les opérations équivoques du négociant. La justifica- · tion est aisément adoptée, lorsque la fraude n'est pas prouvée d'une manière évidente. Vid. Valin, art. 23, titre des assurances.

Et voici comme parle Pothier, n°. 78: Celui qui a fait assurer ses effets › pour une somme au-delà de leur valeur, est, dans le doute, présumé l'avoir fait de bonne foi et par ignorance. C'est aux assureurs, lorsqu'ils allèguent › la fraude, à la justifier. »

§ 2.

Celui qui se rend coupable d'un pareil délit, est privé de l'effet des assurances, suivant l'art. 54; il encourt la peine de nullité de l'assurance, suivant Peine de la fraude. l'art. 22 c'est-à-dire que si le navire périt, l'assuré ne pourra pas demander le paiement de la perte, et soit que le navire périsse, ou qu'il arrive à bon port, l'assuré ne pourra pas demander à ses assureurs la restitution de la prime. Cela résulte des art. 23 et 24, titre des assurances; car personne n'est recevable à se faire un titre de sa propre turpitude. Valin, art. 54, titre des assurances. Kuricke, diatr., no. 4, pag. 834. Roccus, not. 11 et 40. Infrà, ch. 16, sect. 1.

Outre les peines dont on vient de parler, le procureur du roi peut requérir la confiscation de la marchandise, au cas d'heureux retour du navire, et une punition exemplaire, si, en cas de sinistre, l'assuré poursuivait le paiement des sommes assurées.

Valin, sur l'art. 22, titre des assurances, dit que « celui qui se fait assurer › en fraude, ne subira la peine de son crime, qu'autant que toutes les assu› rances auront été faites par une seule et même police. Mais, ajoute-t-il, si les > assurances sont faites par plusieurs polices, la confiscation n'aura pour objet que les marchandises qu'on avait encore droit de faire assurer, et dont l'as⚫surance se trouvera nulle, comme étant faite dans une seconde ou troisième police, où la valeur restante des effets aura été plus qu'absorbée. Pothier, no. 76, est du même avis.

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