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SECTION II.

Du Greffier des assurances et de ses fonctions.

$1. Du greffier des as

AUTREFOIS la communauté des marchands, sous le bon plaisir du roi, nommait un greffier pour recevoir les polices d'assurance. Guidon de la mer, ch. 1, surances.

art. 2.

Valin, art. 2, des assurances, rapporte le dispositif d'un édit du mois de décembre 1657, qui créa des offices de notaires-greffiers des assurances, en chacun des sièges d'amirauté du royaume, avec privilége exclusif en faveur de ces greffiers, de recevoir et passer tous actes maritimes, polices d'as>surance et de chargement, charte-partie, affrétemens, obligations de grosse aventure, et de tenir registre et contrôle des connaissemens sous signature. privée.

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Les notaires et les courtiers de Marseille achetèrent en commun un de ces offices. Ils en faisaient pourvoir un prête-nom, dont ils se disaient les commis.

Par arrêt du Conseil, du 4 août 1759, revêtu de lettres-patentes, il fut ordonné que l'office de greffier des assurances de la ville de Marseille et côtes de Provence, dont est décédé pourvu Joseph Villet, et dont les courtiers

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› royaux de change, banque et commerce, et les notaires de ladite ville sont propriétaires, sera et demeurera réuni et incorporé, sans qu'il puisse en » être désuni, aux deux dits corps et communautés, pour par eux en jouir, » et les fonctions en être exercées concurremment par chaque membre d'iceux, » sans qu'à l'avenir lesdits corps et communautés soient tenus d'y faire pour» voir, de fournir un homme vivant et mourant, ni de payer à l'avenir pour › raison d'icelui aucun droit de prêt et d'annuel et autres, dont voulons et › entendons qu'ils demeurent dispensés.

L'édit du mois de janvier 1777, qui supprime les offices de courtiers de Marseille, et qui défère à la chambre du commerce le choix et l'élection de soixante nouveaux courtiers, fáit, en l'art. 9, « très-expresses inhibitions et défenses à toutes personnes autres que celles pourvues de commission, de > faire directement ou indirectement les fonctions de courtier, pour raison des → assurances, etc. »

Le Parlement d'Aix, en enregistrant cet édit, arrêta, sous le bon plaisir

$ 2.

Enregistrement des polices.

$ 3.

Émolument des courtiers.

» du roi, que dudit enregistrement il ne pourra rien être inféré contre le » droit et l'usage des notaires de la ville de Marseille, de recevoir en concours › avec les courtiers, les polices d'assurance, à la charge par lesdits notaires » de se conformer aux ordonnances. »

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Cette explication a été authentiquée par l'art. 16 du réglement en forme de lettres-patentes, du 26 mai 1778. N'entendons néanmoins, est-il dit, préjudicier au droit dont jouissent les notaires de la ville de Marseille, de › recevoir des contrats d'assurance, concurremment avec les courtiers. »

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L'art. 69, des assurances, «enjoint aux notaires et courtiers d'avoir un registre paraphé en chaque feuillet par le lieutenant de l'amirauté, et d'y enregistrer » toutes les polices qu'ils dresseront, à peine de tous dommages et intérêts, et de 500 liv. d'amende pour la première fois, et de destitution en cas de récidive, sans que lesdites peines puissent être modérées. »

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Cette disposition de l'Ordonnance a été renouvelée par des lettres-patentes du 29 mai 1778, portant réglement sur la police qui doit être observée par les nouveaux courtiers de Marseille. Enjoignons, est-il dit en l'art. 3, à chaque courtier de tenir un livre dûment paraphé, dans lequel il inscrira toutes les négociations et autres affaires traitées par son entremise, à l'exception des polices d'assurance, qu'il sera tenu d'enregistrer dans un re>gistre particulier, également paraphé conformément à l'art. 69, tit. 6, liv. 3 » de l'Ordonnance de la marine, de 1881. »

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Voici, sur ce point de discipline, un exemple de négligence de la part d'un notaire:

M*. ***, notaire de Marseille, avait omis d'enregistrer deux polices d'assurance, qui intéressaient le sieur Honoré Francoul. Celui-ci présenta requête contre le notaire. Sentence rendue en juin 1768, qui « condamne Mc.

aux

› dommages et intérêts soufferts et à souffrir par Francoul, par le défaut de
» représentation des deux polices d'assurance dont il s'agit, que ledit Mo.
› a déclaré n'avoir point enregistrées dans son registre. Et faisant droit à la ré-
» quisition du procureur du roi, condamne ledit Mo. *** à 500 liv. d'amende

» envers M. l'amiral, pour ne s'être pas conformé à la disposition de l'art. 69
du tit. 6, des assurances, de l'Ordonnance de 1681, avec dépens et con-
» trainte par corps. »

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Les salaires et émolumens que les notaires et les courtiers de Marseille peuvent exiger au sujet des polices d'assurance, ont été déterminés par des lettres-patentes du 7 novembre 1778, et du 6 février 1779.

J'ai souvent vu disputer si le courtier est obligé d'exhiber ses carnets et livres à un tiers, qui prétend avoir intérêt en la chose.

$4. Exhibition des livres et carnets du

Par la loi 10, ff de edendo, il était enjoint aux banquiers d'exhiber leurs courtier. registres à ceux qui demandaient de les voir, soit que l'objet de la contestation concernât les banquiers eux-mêmes, soit qu'elle fût élevée contre un ticrs: Argentarius rationes edere jubetur. Nec interest cum ipso argentario controversia sit, an cum alio; parce que les banquiers, ajoute cette loi, exercent un ministère public: Quia officium eorum atque ministerium publicum habet

causam.

La loi 2, C. eod., décide que le juge est en droit d'ordonner l'exhibition des documens publics, afin que la vérité soit manifestée : Acta publica exhiberi inspicienda, ad investigandam veritatis fidem jubebit.

Voici sur cette matière les dispositions des ordonnances du royaume :

Dorénavant, tous notaires et tabellions feront bons et suffisans registres ⚫ et protocoles des contrats et autres actes par eux reçus et passés, et iceux › mettront par ordre selon la priorité et postériorité desdits contrats et autres » actes, afin que si dorénavant en était question, on puisse avoir recours audit protocole ou registre; fors et exceptés les notaires de notre Châtelet de › Paris. Ordonnance de Louis XII, en juin 1510, art. 63. Ordonnance de François r., faite en octobre 1535, pour la Provence, ch. 19, art. 6.

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Défendons à tous notaires et tabellions de montrer et communiquer lesdits registres, livres et protocoles, fors aux contractans, leurs héritiers et » successeurs, ou à autres auxquels le droit desdits contrats appartiendrait no■ toirement, ou qu'il fût ordonné par justice. Ordonnance de 1539, art. 177. En vertu du décret que le juge rend à ce sujet, le notaire est compulsé et contraint de représenter l'acte qu'on lui demande, et d'en donner extrait. Ordonnance de 1667, tit. 12; ibiq. Bornier et autres commentateurs.

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Les agens de change et de banque tiendront un livre-journal, dans lequel seront insérées toutes les parties par eux négociées, pour y avoir re

» cours en cas de contestation. » Ordonnance de 1673, tit. 3, art. 2.

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Les agens de change seront tenus, lorsqu'ils en seront requis, d'exhiber » au juge l'article de leur registre qui fera le sujet de la contestation.» Arrêt du Conseil du 24 septembre 1724, art. 27.

1o. Suivant l'Ordonnance de 1539, les notaires sont en droit de refuser l'exhibition de leurs registres aux personnes auxquelles ils croient que le droit des contrats n'appartient pas notoirement. Vide les commentateurs de cette ordonnance. Papon, liv. 4, tit. 14, n°. 9. Bouchel, v°. notaire. Lacombe, Ju

risprudence civile, tom. 2, pag. 33. Dénisart, tom. 1, pag. 581, et tom. 3, pag. 440.

Mais, ainsi que l'observe Ferrière sur le Digeste, tit. de edendo, tom. 1, pag. 105, cet article de l'Ordonnance ne s'observe pas. Les notaires ne peu>> vent connaître les droits qu'ont ceux qui se présentent pour la délivrance » de quelque acte. C'est pourquoi ils en donnent copie indifféremment à tous › ceux qui le requièrent. »

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Tel est notre usage. Et je n'ai jamais vu à Marseille aucun notaire qui ait refusé les extraits qu'on lui demande.

Il leur est seulement prohibé d'exhiber les testamens des personnes encore vivantes. Actes de notoriété, pag. 114. M. de Montvalon, Traité des successions, tom. 1, pag. 362.

2o. Les courtiers ne sont pas si faciles à manifester leurs livres et carnets, attendu le secret qu'ils doivent aux parties.

Le sieur Durand, directeur d'une compagnie d'assurance à Barcelonne, demanda par une requête présentée à l'amirauté de Marseille, qu'il fût enjoint au sieur Moreau, courtier de commerce, de lui expédier l'extrait d'un traité de vente. Sur cette requête il y eut décret qui ordonna l'injonction requise. La chambre du commerce demanda la révocation du décret, sur le fondement du secret auquel les courtiers sont soumis. Elle ajoutait que requête de Durand aurait dû être décrétée d'un soit-montré aux parties contractantes. Le sieur Durand soutenait qu'il avait intérêt d'être muni de l'extrait en question, pour se mettre à couvert d'une perte d'assurance, etc.

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Sentence rendue dans le mois de mars 1781, qui débouta la chambre de sa requête d'intervention avec dépens; ordonna que le sieur Moreau délivrerait l'extrait demandé, et le condamna aux dépens de la contestation.

Cette sentence, qui fut acquiescée, me paraît en règle; car s'il fallait en pareille matière appeler les parties contractantes, on risquerait d'avoir un procès à soutenir pour chaque pièce dont on demanderait extrait. Il suffit d'avoir intérêt de voir le contrat, et l'employer en quelque endroit, pour que l'extrait ne puisse en être refusé. (Guenois, sur l'ordonnance de 1539). Et si la partie affirme au notaire avec serment l'intérêt qu'il dit y avoir, cette preuve est suffisante pour avoir communication de l'acte. (Néron sur ladite ordonnance).

Domat, tom. 1, pag. 255, no. 10, dit que les notaires, greffiers et autres » personnes publiques, sont tenus de représenter les actes qui ont été déposés

en leurs mains aux personnes qui y sont intéressées, quand ce serait contre eux-mêmes, et ils y sont contraints par le juge lorsqu'ils le refusent. »

CONFÉRENCE.

XI. Pour empêcher les abus qui peuvent avoir lieu dans la rédaction des contrats d'assurances, on avait été jusqu'à exclure l'écriture privée, et à exiger que les polices fussent passées pardevant notaire, ou par le ministère d'un greffier, à peine de nullité. C'est pourquoi l'édit de 1657 créa deux offices de notaires - greffiers des assurances en chacun des siéges d'amirauté du royaume. Mais cet édit, comme nous l'apprend Valin, ne fut point exécuté, et il y fut dérogé par l'Ordonnance de 1681, titre des assurances, (Voyez Valin sur cet article).

art. 2.

Le nouveau Code de commerce porte, art. 79, que les courtiers d'assurances rédigent les contrats d'assurances, concurremment avec les notaires;

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Et par l'art. 332, il ajoute que ces contrats peuvent être faits sous signature privée. Ainsi, le contrat d'assurance est fait par écrit par un courtier ou un notaire, cu sous signature privée. On ne peut prouver autrement son existence, 1°. à moins qu'il ne s'agisse d'une somme au-dessous de 150 francs; 2°. à moins qu'il n'y ait, pour une somme plus forte, un commencement de preuve par écrit; 3°. à moins que dans l'un et l'autre cas la convention ne soit reconnue par les parties ou avouée judiciairement, ou par serment décisoire.(Art. 1341 du Code civil, sect. 4 et 5 du chap. 6, liv. 3 du même Code).

Cette doctrine, qui regarde tout à la fols et le contrat à la grosse, et le contrat d'assurance, plus àmplement établie dans notre Cours de droit maritime, est fondée sur l'opinion de Valin, de MM. Pardessus et Locré, et sur-tout sur ce que, toutes les fois que le législateur, en cette matière, a voulu impérativement ordonner ou défendre quelque chose, il a eu soin d'attacher expressément à ses dispositions une sanction pénale, comme dans les art. 347, 348, 365, 367. Or, l'art. 332 ne dit point que l'assurance sera faite par écrit sous peine de nullité; de sorte donc que cette disposition est soumise, dans son application, aux règles du droit commun. - (Voyez notre Cours de droit commercial maritime, tom. 3, pag. 38 et 247).

Mais, il est vrai, cette doctrine est repoussée par Emérigon, comme on l'a vu à la section précédente, in fine, qui va même jusqu'à dire que le serment décisoire ne saurait être déféré à la partie qui dénie l'existence du contrat d'assurance.

D'un autre côté, elle semblerait avoir été attaquée dans la Jurisprudence générale du royaume, par M. Dalloz, au mot assurance. Néanmoins, dans les raisons que l'on donne, il ne nous paraît pas qu'on ait répondu aux motifs qui fondent notre opinion. Il ne faut pas perdre de vue qu'il est des contrats pour lesquels il est expressément défendu de recevoir la preuve par témoins. (Art. 36 et 37 du Code de commerce). Il en est d'autres où il est expressément permis de l'admettre. (Art. 109 du même Code). Enfin, il y en a sur lesquels le Code de commerce ne s'est pas formellement expliqué. ( Art. 311 et 332). Ceux-ci retombent incontestablement sous le droit commun civil, comme l'observe M. Locré, parce que les lois du commerce étant une dérogation au droit commun, il est hors de doute qu'en tout ce

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