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$ 3. Divers exemples

La manière d'énoncer le pour compte, soit dans les assurances, soit dans les connaissemens, dépend de la volonté des parties, qui se dirigent suivant du pour compte. les occurrences.

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L'assurance pour compte de qui il appartient s'applique à toute personne dénommée dans le connaissement. Vous avez fait assurer sur les facultés du navire une somme pour compte de qui il appartient, Vous remettez cette police à Jacques, qui a chargé sous son propre nom, dans le même navire, des marchandises de valeur relative à la somme assurée. Le vaisseau périt. Jacques, porteur de la police dans laquelle il n'est pas nommé, sera recevable à demander aux assureurs le paiement de la perte, et à leur dire ; C'est à moi qu'il appartient d'exiger l'assurance; c'est pour mon compte qu'elle avait été faite.

Quandò stipulatum fuit per conto di chi spetta, omnes interesse habentes, licèt non exclarati, possunt actionem intentare contrà assecuratores, uti in contractu nominati, eo ipso quòd ostenderint spectantiam risici, seu interesse in mercibus assecuratis. Casaregis, disc. 5, no. 2.

Si le navire arrive à bon port, on n'écoute pas celui qui, s'étant fait assurer pour compte de qui il appartient, allègue que rien n'a été chargé pour son compte, car si le navire eût péri, il aurait eu le droit d'appliquer l'assurance à toute marchandise dont il eût montré le connaissement. D'ailleurs, on n'admet l'assuré au ristourne qu'autant qu'il justifie sa réclamation. Il opposerait vainement qu'il s'agit d'une négative, car la négative doit être prouvée lorsqu'elle forme le titre du demandeur: Negativa est probanda. per eum qui se fundat in eâ. Cœpola, de servit. rust., cap. 1, aux additions. On surcharge quelquefois d'une nouvelle clause celle dont je viens de parler. On se fait assurer pour compte de qui il appartiendra, où tout autre pour compte énoncé dans le connaissement.

Il suffit que le porteur de l'assurance, en cas de sinistre, représente un connaissement de marchandises d'une valeur relative à la somme assurée, pour qu'il ait action d'exiger la perte, parce qu'il y a relation implicite entre les deux pièces. Peu importe que les effets eussent été chargés nommément pour compte d'une personne déterminée.

Il en est de même de l'assurance faite pour quel compte que ce puisse être, pourvu que le porteur de la police exhibe un connaissement de marchandises d'une valeur relative, quoique chargées pour compte de Jean ou de Jacques. Straccha, gl. 7. Casaregis, disc. 4, no. 8.

Clause pour comple de qui il appartient.

Pour compte de qui il appartiendra, ou de tout autre pour

compte énonce dans le connaissement.

Pour quel comple que ce puisse être.

Pour compte de Ti

Il en est encore de même de l'assurance faite pour compte de Titius, et de tius, et de tout autre

qu'il appartiendra.

Pour compte factice.

Pour compte de telle marque insérée dans le connaissement.

Suis-je compris dans l'assurance que

je fais faire pour Tiqu'il appartiendra?

tius, et tout autre

Clause que le connaissement sera pour

neutre.

tout autre qu'il appartiendra. Elle est valable, quoique dans le connaissement il ne soit pas parlé de Titius. Roccus, not. 94.

Peu importe que le pour compte soit énoncé sous un nom factice, pourvu qu'il y ait relation, du moins implicite, entre l'assurance et le connaissement, et qu'il n'y ait aucune fraude: Quòd si nomen fictitium sit, nihilominùs valet instrumentum. Stypmannus, part. 4, cap. 7, n°. 390, pag. 462. Straccha, gl. 5. Roccus, not. 46.

J'ai vu des assurances faites pour compte d'une telle marque insérée dans le connaissement. Elles désignent un chargement masqué. Elles sont valables, à moins qu'il n'y ait fraude.

J'ai fait faire une assurance sur facultés pour compte de Titius ou de tout autre qu'il appartiendra. Le navire se perd. Je présente un connaissement de marchandises chargées pour mon compte seul, et dont la valeur est relative à la somme assurée. Les assureurs seront obligés à me payer la perte, sans pouvoir prétendre que l'assurance me soit étrangère, car je suis présumé avoir pourvu à mon intérêt plutôt qu'à celui de tout autre : In favorabilibus, persona loquentis comprehenditur in generali sermone, cùm prima charitas à se ipso incipiat. Straccha, gl. 10, n°. 8. Casaregis, disc. 1, no. 146.

En tems de guerre, les énonciations vagues et génériques dont je viens de compte simulé d'un parler ont ordinairement pour objet de cacher aux ennemis la propriété des effets hostiles chargés sur un navire neutre; mais afin de prévenir toute difficulté vis-à-vis des assureurs, on est en usage de déclarer dans les polices d'assurance que les marchandises appartiennent à un Français, quoique chargées pour compte simulé d'un négociant de nation neutre. Infrà, ch. 12, sect. 20. Si l'assurance est faite pour le compte de moi ou de Titius, il suffit que le connaissement soit dressé pour moi seul, ou pour le seul Titius: Ubi verba conjuncta non sunt, sufficit alterutrum esse factum. L. 110, § 3, ff de regul. jur.

Pour compte de moi ou de Titius.

Pour compte des intéressés.

Pour compte de Pierre et compagnie.

L'assurance faite pour compte des intéressés au navire, est valable vis-à-vis de ceux dont l'intérêt au navire est justifié. Il en est de même de l'assurance faite pour compte des intéressés à la cargaison ou à une pacotille. Infrà, sect. 7. Suprà, ch. 5, sect. 3, ch. 10, sect. 2.

L'assurance pour compte de Pierre est étrangère aux marchandises de Pierre et compagnie, et vice versâ; car autre chose est la société, autre chose sont les membres qui la composent : Aliud est corpus unius societatis, et aliud est quilibet socius ipsius societatis. Scaccia, quest. 1, no. 450. La société est une personne civile qui a ses droits et ses attributs particuliers: Hæreditas

persona vice

fungitur, sicut mancipium, et decuria et societas. L. 22, ff de fidejuss. Les créanciers de l'associé ne sont pas créanciers de la société.

Ainsi, nul doute que la marchandise chargée sous le nom social, ne soit pas comprise dans l'assurance faite pour le compte particulier de l'un des associés; on ne trouve alors aucune relation ni expresse, ni implicite entre la police d'assurance et le connaissement, et je n'adopte pas la sentence de notre amirauté, du 9 août 1754, dont parle Valin, art. 3, titre des assu

rances.

En Italie, il y a quatre manières différentes d'énoncer le pour compte :

1o. On se fait assurer pour soi ou autre à qui il appartient; 2°. on se fait assurer purement et simplement pour la personne qu'on nommera; 3°. pour soi ou pour la personne qu'on nommera; 4°. tant pour soi que pour la personne qu'on

nommera.

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L'assurance faite per se, o per conto di chi spetta, est très-bonne, pourvu que l'aliment du risque se trouve dans le navire. Les assureurs sont non recevables à opposer le défaut de propriété à celui qui s'est fait assurer, lequel n'est présumé avoir agi qu'en qualité de commissionnaire. Casaregis, disc. 4, n°. 2 et 10; disc. 173, n°. 22. Straccha, de assecur., gl. 10, no. 17.

Casaregis, disc. 5, no. 5, dit que, suivant les principes du, droit, l'assurance faite purement et simplement pour la personne qu'on nommera, simpliciter pro personâ nominandâ, est valable; mais, au no. 25, il observe qu'elle ne serait pas admise à Gênes, parce que le Statut de cette ville exige que le nom de l'assuré soit spécialement énoncé dans la police.

Parmi nous, celui qui se fait assurer est considéré comme assuré véritable, quoiqu'il déclare agir pour compte d'autrui. Suprà, ch. 5, sect. 1 et 2.

$4. Usage d'Italie

Pour soi ou autre à qui il appartient.

Pour une personne à nommer.

Pour soi ou pour la personne qu'on nom

L'assurance faite pour soi ou pour la personne qu'on nommera, pro se, aut personâ nominandâ, est bonne. Le stipulateur ne sort pas du contrat par mera. la nomination de la personne : Non admittimus, dit Casaregis, disc. 5, n°. 26, quod, facta nominatione, stipulator seu contrahens exeat à contractu, qui erat in eo radicatus ab initio. Vid. Roccus, not. 45.

Tant pour soi que pour la personne

Il en est de même de l'assurance faite tant pour soi que pour la personne ́qu'on nommera: Spectante risico, tàm dicto nominato, quàm personæ per ipsum qu'on nommera. quandocumque exclarandæ. Quoique la personne soit ensuite déclarée, le contrat n'en reşte pas moins propre à la partie stipulante : Non est dubium quòd contractus in solâ personâ stipulatoris radicatus dicatur, licèt commodum vel utilitas ad alium spectet. Casaregis, disc. 5, n°. 27. Cette forme d'assurance est la

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plus usitée à Gênes: In Genuensi emporio frequentior, dit le même docteur,

n°. 1.

J'eus occasion de traiter cette matière dans l'espèce suivante :

Les sieurs Sébastien Delestrade et Jean George, négocians à Marseille, avaient en société une maison de commerce à Tetuan, et ils étaient convenus que tous les envois, tant d'entrée que de sortie, se feraient sous le nom et pour compte du sieur Delestrade, qui aurait soin de pourvoir aux assu

rances.

En 1744, ils envoyèrent à Tetuan le navire Saint-Jean-Baptiste, capitaine François Degoua, pour y prendre un chargement.

Le sieur Delestrade fit assurer à Marseille, en son nom et pour son compte, la somme de 31,700 liv. Un grand découvert restait encore à remplir.

Le taux des primes ayant augmenté à cause des bruits de guerre, le sieur Delestrade écrivit aux sieurs Boissier, Bourguet et compagnie, de Gènes : Faites assurer pour mon compte 10,000 piastres sur les facultés du navire » Saint-Jean-Baptiste, capitaine Degoua, de Tetuan jusqu'à Marseille. »

Les sieurs Boissier, Bourguet et compagnie, se conformant à l'usage de Gênes, firent assurer 10,000 piastres sur les facultés de ce navire, tant pour compte d'eux-mêmes, que pour celui d'autres personnes à nommer: Spectante risico, tàm dictis Guiglielmo Boissier, Bourguet et sociis, quàm aliis quibuscumque personis per eos in quocumque tempore, et pro quibuscumque causis declarandis. Il ne fut pas dit le mot du sieur Delestrade.

« Nous n'avons fait aucune mention de votre nom, lui disaient-ils dans » leur lettre du 1o. août 1744; cette précaution est inutile ici. Il suffit, en

› cas de malheur, d'exhiber la police pour être payé par les assureurs, sans

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qu'il soit besoin d'expliquer le pour compte dans l'assurance. »

Le navire arriva heureusement à Marseille. Le sieur George mourut. Un procès s'éleva entre sa veuve et le sieur Delestrade. La décision en fut déférée, par arrêt du conseil, à deux négocians. Un des points contentieux concernait la prime des assurances faites à Gênes. La veuve George refusait de l'admettre dans le compte social, attendu, disait-elle, que ces assurances étaient étrangères à la société.

Le sieur Delestrade communiqua un acte de notoriété souscrit par les principaux négocians de Gênes, qui attestèrent que parmi eux, les commission»naires qui ont ordre de faire des assurances maritimes pour quelque ami étranger, font dresser lesdites assurances tant en leur nom, que pour une ou • plusieurs personnes à déclarer. Ils n'insèrent point le nom du commettant,

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parce qu'en cas de perte, ils ont par ce moyen le pouvoir d'exiger eux» mêmes les sommes assurées, sans procuration de la part du propriétaire ; » au lieu que si l'assurance était faite au nom du commettant, il faudrait » que celui-ci leur envoyât sa procuration en due forme. »

Le sieur Delestrade, pour qui j'écrivais, obtint gain de cause par jugement rendu en dernier ressort le 15 mars 1752.

Il est aisé de comprendre que les usages de Gênes ne diffèrent pas beaucoup des nôtres. L'esprit en est le même. La clause se fait assurer pour comple de........... est une façon de parler, qui, parmi nous, signifie que le commissionnaire s'oblige personnellement à l'exécution du contrat; elle a autant de force que s'il était dit qu'on se fait assurer tant pour soi que pour autrui. Suprà, ch. 5, sect. 3, § 4.

Ces diverses clauses, suggérées par la nécessité des circonstances, qui varienț à l'infini, ont pour objet de prévenir les exceptions des assureurs, et d'empêcher qu'en cas de perte, ils n'opposent à l'assuré qu'il n'avait aucun intérêt à la chose. Casaregis, disc. 4, no. 2.

Je conviens que cette pratique est sujette à des abus. Il serait à souhaiter que la relation entre le connaissement et l'assurance ne fût jamais équivoque, et qu'il ne fût au pouvoir d'aucune des parties de se jouer du contrat; mais l'avantage du commerce veut qu'en pareil cas on se contente d'une relation implicite, et qu'on se repose sur la bonne foi des assurés, sauf de rejeter leur demande, si elle n'est pas en règle, ou de réprimer la fraude, lorsqu'elle est prouvée.

CONFÉRENCE.

XCVIII. L'assurance n'est légitime qu'autant que l'assuré ou l'intéressé à l'assurance a un objet réel en risque.

La chose assurée peut être la propriété d'un ennemi, qui n'est pas susceptible d'être assurée, ou celle d'un national, qui est exposée à être capturée par les ennemis, ou celle d'un neutre, qui court de moindres risques. Sous tous ces rapports, on voit qu'il importe aux assureurs de connaître quel est l'intéressé à l'assurance.

L'indication se fait en ces termes, comme l'observe Emérigon: Un tel se fait assurer pour son compte propre, pour compte de Pierre, pour compte de la personne qui sera nommée au connaissement, pour compte des intéressés, pour compte de qui il appartiendra, etc.

De telles assurances sont applicables, quel que soit le propriétaire de l'objet. L'assuré qui les a souscrites est tenu de payer la prime, dès qu'il y a dans le navire un aliment suffisant à l'assurance. Il ne saurait s'en défendre en disant qu'il n'est ni le propriétaire, ni le commissionnaire des propriétaires du navire ou des marchandises chargées; qu'il n'avait de ces propriétaires aucun ordre de faire assurer; que les marchandises chargées ne sont point

$5.

Motif de ces di

verses clauses.

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