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(Voyez Pothier, assu

de l'art. 26 de l'Ordonnance, en disant changemens forcés de route, de voyage ou de vaisseau, ainsi que nous l'avons fait observer par la note précédente. rances, no. 51 ).

Si, par quelque accident ou par la propre volonté de l'assuré, la marchandise n'est pas embarquée, ou si le navire ne part point, ou s'il y a changement de navire sans le consentement des assureurs, le contrat d'assurance est résolu et l'assureur est tenu de restituer la prime, s'il l'a reçue; il lui est seulement alloué le demi pour cent de la somme assurée, par forme d'indemnité. — (Code de commerce, art. 349; Ordonnance de 1681, art. 37, et Assurances d'Amsterdam, art. 22; voyez d'ailleurs Pothier, no. 179 ).

Mais Pothier observe, n°. 181, que ce demi pour cent étant dû pour les dommages et intérêts de l'inexécution du contrat d'assurance par le fait de l'assuré, il s'ensuit que lorsque ce n'est pas par le fait de l'assuré que le contrat d'assurance n'a pas eu son exécution, l'assuré ne doit pas le demi pour cent. Par exemple, si c'est l'incendie du vaisseau par le feu du ciel avant son départ, les assureurs ne peuvent prétendre à ce demi pour cent, car l'inexécution du contrat ne provient pas en ce cas du fait de l'assuré, mais d'une force majeure, dont l'assuré ne peut être tenu, suivant le principe, nemo præstat casus fortuitos, etc. La Cour d'appel d'Ajaccio voulait qu'on fît cette distinction. Le Code de commerce ne l'a pas admise. Il a établi une règle générale; et, comme le dit M. Estrangin, la jurisprudence, conforme à la loi, soumet les assurés à payer le demi pour cent toutes les fois que le contrat d'assurance est ristourné, soit par le fait de l'assuré, soit par toute autre (Voyez M. Estrangin sur Pothier, n°. 181, et M. Locré, sur l'art. 349 du Code

cause.

de commerce).

Mais si le changement de vaisseau, provenant du fait de l'assuré sans le coucours de l'as◄ sureur, a eu lieu depuis les risques commencés, la prime est acquise à l'assureur, et s'il il n'est pas tenu de la restituer. (Art. 351 du Code de commerce; Pothier, as71).

l'a reçue, surances,

n°.

Dans tous les cas, on ne peut, sans le consentement des assureurs et sans nécessité prouvée, changer de navire et faire courir les risques d'un autre vaisseau, quoique aussi bon, ou même plus gros et meilleur. Telle était la jurisprudence, fondée sur l'art. 3, titre des assurances, de l'Ordonnance; telle est encore notre jurisprudence, fondée sur l'art. 332 du Code de commerce, qui veut que la police contienne le nom et la désignation du navire, et cela quand bien même les deux navires eussent péri, parce que, comme le dit Pothier, assurances, no. 69, le contrat d'assurance est résolu de plein droit aussitôt qu'on s'est écarté de la loi du contrat.

Dans le cas de l'application de l'art. 296 du Code, où le navire n'est pas susceptible de subir un radoub, le capitaine doit chercher un autre navire pour conduire les marchandises au lieu de leur destination, comme l'auraient fait eux-mêmes les chargeurs, dont il est le mandataire salarié, parce que d'ailleurs le surcroît de fret sera pour le compte de la marchandise et des assureurs. Il faut ici, avec Emérigon, rejeter l'opinion de Valin et de Pothier. ·(Voyez les art. 296, 297 et 303 du Code de commerce, et la sect. 8 du tit. 8, tom. 2, pag. 398 du Droit commercial maritime).

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§ 1.

Cet accident est-il

présumé fatal?

Feu arrivé par cas ortuit.

Feu arrivé par la faute du maître ou

des mariniers.

SECTION XVII.

Feu.

L'ART. 26, titre des assurances, met aux risques des assureurs toutes pertes et dommages qui arrivent sur mer par le feu.

Targa, ch. 65, dit que le feu pris au navire n'est pas un accident présumé fatal, et qu'on doit l'attribuer à la faute de quelqu'un, toutes les fois qu'on ignore d'où il procède : Quandò non consti dell'origine, si attribuisce a qualche colpa.

Telle est la disposition du droit commun: Incendium sine culpâ fieri non potest. L. 11, ff de pericul. et commod. rei vend. Plerumque incendia culpâ fiunt inhabitantium. L. 3, § 1, de offic. præf. vigil.

Cependant l'Ordonnance paraît placer l'accident du feu au rang des cas fatals.

Si les gens ou partie des gens du navire brûlé se sauvent, ils doivent faire leur consulat et exposer la cause de l'incendie.

Mais si personne ne survit, l'accident sera présumé ou fatal, ou du moins n'être pas arrivé par la faute du maître ou des mariniers. Il peut avoir été causé par le feu du ciel, ou par la faute d'un passager; ce qui suffit pour que les assureurs en répondent.

Il n'est pas douteux que l'accident arrivé par le feu du ciel ou des ennemis ne soit à la charge des assureurs. Straccha, gl. 18. Targa, ch. 56. Scaccia, quest. 1, no. 135.

Straccha, gl. 18, décide que les assureurs répondent du feu arrivé par la faute des mariniers; mais il parle d'après la formule d'Ancône, suivant laquelle les assureurs sont garans de la baraterie du patron.

Targa, ch. 65, tient le même langage; mais il parle d'après le Satut de Gênes, suivant lequel les assureurs sont déchargés de la seule baraterie proprement dite, et répondent de la faute des mariniers.

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Il en serait de même à Hambourg, à Rouen, à Nantes et à Bordeaux.

Mais il n'en est pas de même à Marseille. Les assureurs sont tenus du feu, » lorsque c'est par un cas fortuit, comme par le feu du ciel, ou dans un com› bat, que le feu a pris au vaisseau; mais si c'était par la négligence ou la faute

› des mariniers, les assureurs n'en seraient pas tenus, à moins que, par une › clause particulière, ils ne fussent chargés de la baraterie du patron. » Pothier, n°. 53.

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Dans la sect. 14, j'ai parlé du vaisseau hollandais l'Adam, que les Espagnols refusèrent de recevoir à Majorque, et auquel ils mirent feu par la crainte de la peste. Les assureurs payèrent la perte, sans élever aucune difficulté, parce que le capitaine ni son équipage n'étaient point en faute; car la suspicion de la peste est mise au rang des cas fatals. Targa, ch. 56. Casaregis, disc. 121,

n°. 12.

Il en est autrement, si la faute du capitaine y a donné lieu. En voici un exemple qu'on ne peut se rappeler sans douleur: Meminisse horret!

En 1719, le capitaine Jean-Baptiste Chataud, commandant le vaisseau le Grand Saint-Antoine, était parti de Marseille pour le Levant. Il arriva à Smyrne; de là, il fut aux Iles de l'Archipel, ensuite en Chypre, puis à Seyde. Il toucha à Tripoli de Syrie, où il reçut divers passagers turcs. Un de ces turcs mourut. Le chirurgien et trois matelots moururent aussi. Il retourna en Chypre, où il prit une patente de santé. Il toucha à Livourne, où il déclara que divers de ses gens étaient morts de fièvres pestilentielles. Le 25 mai 1720, arrivé dans la rade de Marseille, au lieu de s'arrêter à l'île de Jarre, endroit destiné à la purge des navires contaminés, il vint mouiller à l'île de Pommègue, d'où, par chaloupe, il se rendit au bureau de la santé. Il déclara que divers de ses gens étaient morts de mauvais alimens. Partie des marchandises furent débarquées aux infirmeries. Le garde mis à bord et les portefaix moururent. Alors les intendans de la santé firent passer le navire à l'île de Jarre; mais la peste s'était déjà répandue dans la ville. Il y eut ordre du ministre de brûler le navire; ce qui fut exécuté le 20 septembre d'après.

Le mal contagieux enleva la moitié des habitans de Marseille, et fit dans la province les plus tristes ravages.

Les assureurs furent attaqués. Parmi leurs moyens de défense, ils s'arrêtèrent principalement à celui tiré de l'inconduite du, capitaine. Ce moyen était le seul décisif. Cependant le tribunal de l'amirauté de Marseille, par sentence du 18 décembre 1723, condamna les assureurs à payer les sommes assurées. Mais cette sentence fut réformée par arrêt rendu le 23 février 1725, au rapport de M. de Jouques.

Augeard, tom. 2, pag. 788, rapporte ce même arrêt d'une manière trèspeu satisfaisante. On ne lui avait pas fourni les éclaircissemens convenables; je les ai puisés dans les défenses respectives des parties,

§27 Feu arrivé pour cause de peste,

$ 3.

Vaisseau incendié

dans un port ou rade.

$4.

L'Ordonnance de la marine, art. 8, 9 et 14, titre des ports, et art. 4 et 5, titre du maître du quai, prescrit les précautions les plus sages pour prévenir l'incendie des vaisseaux qui sont dans les ports.

A la suite de notre Statut du port, pag. 90, on trouve à ce sujet un réglement fait par les consuls de Marseille, le 23 avril 1654.

Mais les lois ne sont pas toujours observées. Si un navire qui relâche dans un port ou rade, est incendié sans la faute du maître ou des mariniers, les

assureurs en seront tenus.

Si le feu avait été occasionné par la faute du capitaine ou des mariniers, les assureurs n'en seraient pas responsables, à moins qu'ils ne se fussent rendus garans de la baraterie du patron. Tel est le cas de l'arrêt du 26 mars 1673, rapporté dans le Journal des audiences, tom. 2, pag. 860. Le navire le Saint-Jean, de Bayonne, était à la pêche des baleines. Le feu prit à la chaudière qui servait à faire l'huile. Le vaisseau, avec toute sa cargaison, fut entièrement consumé. Cet incendie était arrivé sans aucun accident du feu du ciel ni des ennemis ; mais les assureurs avaient pris à leurs risques toute perte de mer, feu, vents, amis ou ennemis, baraterie du patron, et tous autres inconvéniens pensés et non pensés. Voilà pourquoi ils furent condamnés à payer la perte.

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Dans la cause du capitaine Jacques Sellon, commandant la barque la Fen pris aux laines. Marthe-Madelaine, qu'on fut forcé à Malte de faire échouer pour éteindre le feu pris aux laines dont elle était chargée, il fut décidé, par arrêt du 30 juin 1760, au rapport de M. d'Orcin, que les frais de séjour à Malte, soit pour les salaires et nourriture de l'équipage, soit pour le débarquement et rem› barquement des marchandises, agrès et victuailles, et généralement pour toutes les opérations faites pendant ledit séjour, pour éteindre ou arrêter » le progrès du feu des laines, ensemble les dommages soufferts à cette occa» sion par la marchandise et le bâtiment, tant par l'action du feu même pen> dant le tems qu'on a débarqué les marchandises fines, que pour l'échoue> ment dudit bâtiment, étaient avaries simples et particulières; au moyen de › ce, exempta les chargeurs de toute contribution à icelles. »

Le feu provenait du vice propre de la marchandise: d'où il suit que quand même les assureurs n'eussent pas été francs d'avaries, on n'aurait pas été fondé à leur demander le paiement de ce dommage, à moins qu'ils ne s'y fussent soumis par un pacte exprès, et c'est sous cette modification qu'on doit entendre la doctrine de Casaregis, disc. 1, n°. 186: Si assecuravit zaffranos qui

posteà, vel ex eorum naturá, vel quia humidi onerati essent, excitato interno calore, et igne accensi sunt, assecurator, pro tali casu accensionis tenetur.

Kuricke, quest. 29, et Loccenius, liv. 3, cap. 9, traitent la question, s'il est permis de mettre le feu aux poudres, et de périr pour ne pas tomber entre les mains de l'ennemi. Ils décident que le droit divin, le droit naturel, et la droite raison, s'opposent à un pareil délire, que les anciens avaient la faiblesse de considérer comme le comble de l'héroïsme. Vid. Valin, art. 36, titre du capitaine, tom. 1, et Puffendorf, liv. 8, ch. 2, § 4.

Mais si, en mettant le feu au navire, on peut se sauver à terre, Il est permis de se servir de ce moyen, pour priver l'ennemi d'une proie dont il est sur le point de s'emparer.

Telle est la décision de l'Ordonnance concernant la marine royale, du 25 mars 1765, tit. 99, art. 1177. Aucun capitaine, est-il dit, n'amenera son > pavillon, et ne se rendra tant qu'il y aura la moindre possibilité de con› server le vaisseau dont Sa Majesté lui a confié le commandement, voulant qu'il le défende jusqu'à l'extrémité. Mais lorsqu'il n'y aura plus aucune possibilité de résister davantage, ni de moyens de sauver son équipage, › en coulant bas ou brûlant son vaisseau, s'il est forcé de se rendre, il pas› sera au conseil de guerre pour être loué sur sa défense, et condamné à » mort s'il n'a pas combattu avec la plus grande bravoure..

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Cette Ordonnance a corrigé l'âpreté de celle de 1689, qui, au liv. 4, tit. 2, art. 36, faisait défenses à tous capitaines et autres officiers de marine com, mandant un vaisseau de guerre, de le rendre jamais aux ennemis, pour quelque raison que ce puisse être, voulant qu'il se défende jusqu'à l'ex› trémité, et qu'il se laisse forcer l'épée à la main, même brûler. Celui qui ⚫ fera le contraire sera jugé au conseil de guerre, et puni de mort, selon ⚫ les circonstances de l'action..

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Nos capitaines marchands donnent et ont donné en tout tems des marques de bravoure. Mais lorsqu'ils sont dans l'impossibilité de résister à l'ennemi, et d'éviter d'être pris, ils sont très-louables de mettre le feu au navire, et de s'enfuir à terre avec l'équipage. Les assureurs répondent de la perte arrivée en pareille occurrence. Ainsi jugé par deux arrêts, dont voici les circonstances :

Le 5 juillet 1745, le capitaine Artaud, commandant le navire le SaintJean-Baptiste, et le capitaine Jean-Raphaël de Belis, commandant le vaisseau le Modeste, partirent de Cadix pour Marseille. Le lendemain, se trouvant dans le détroit de Gibraltar, ils furent poursuivis par cinq corsaires anglais,

$ 5. Feu mis au navire par le capitaine.

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