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port de M. Pazery de Thorame, qui réforma cette sentence, et qui ( ainsi que je l'ai appris de l'un des juges), décida en thèse que quand il n'y a pas lesion dans la vente forcée des effets arrêtés par un prince ami, il ne peut y avoir lieu au délaissement, ni à aucune autre action contre les assureurs.

Il reste à examiner ce qu'on doit entendre en pareil cas par lésion.

Je crois, 1°. que l'assuré doit être très-satisfait, si ou lui paie la valeur de sa marchandise sur le pied de ce qu'elle aurait été vendue dans le lieu de la destination;

2o. Que si on lui en a compté un moindre prix, il suffit qu'il recouvre la valeur primitive de sa chose, déduction faite de la prime, des nolis et autres frais, sans qu'on ait égard au profit espéré de la marchandise. Art. 15, titre des assurances. Telle est la doctrine de Targa, cap. 66, pag. 284. Perche, dit-il, in materia d'assicuratione, si hà risguardo al puro danno, non all' utile che si perde;

3o. Malgré la clause franc d'avarie, les assureurs sont tenus de la lésion (entendue dans le sens que je viens de déterminer), parce qu'il s'agit ici d'un destourbier, dont la nature est différente de l'avarie proprement dite.

CONFÉRENCE.

CXXXVIII. Si les marchandises arrêtées le sont sans indemnité, l'assuré pourra les délaisser à l'assureur et se faire payer le montant de l'assurance (art. 369 du Code de commerce); mais si la puissance qui arrête les marchandises en paie la valeur, l'assuré ne pourra rien réclamer de l'assureur, si ce n'est un supplément de prix, dans le cas où les objets assurés auraient été payés au-dessous de leur juste valeur. Le prix ne sera pas censé lésif, s'il égale celui que l'assuré aurait eu de sa marchandise, au lieu de sa destination, ou du moins s'il équivaut le prix de la marchandise au lieu du chargement, y compris tous les droits payés et les frais faits jusqu'à bord (art. 339 du Code de commerce), sans aucun égard au profit espéré de la marchandise.

Le dépérissement des marchandises pendant l'arrêt n'est pas à la charge des assureurs (art. 352 du Code de commerce ); mais l'art. 587 du même Code, correspondant à l'art. 50de l'Ordonnance, a pourvu à l'intérêt des assurés, en leur permettant un prompt délaissement des objets périssables. Les délais à cet égard sont justement abrégés.

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§ 1.

Arrêt par la crainte des ennemis.

SECTION XXXIV.

Navire arrêté par la crainte des Ennemis, par tempête ou autres

causes.

LORSQUE, pour éviter l'ennemi, un navire, qui est en voyage, s'arrête dans un port ou sous le canon d'une citadelle, les dépenses faites pendant ce séjour forcé sont avaries grosses: Tribunalia malis communiter admiserunt, ut nempè si navis fataliter incideret in hostes, eosque evitandi causá fugam arriperet, et portum aliquem adiret, et ibi sub præsidio amica tormentariæ arcis permaneret, quousquè recederent hostiles naves, totum staliæ damnum per contributionem communem reparatur. Casaregis, disc. 19, no. 42; disc. 46, n°. 58. Targa, cap. 60, pag. 256 et 259. Valin, art. 8, titre des chartes-parties, et sur l'art. 7, titre des avaries. Pothier, Traité des avaries, no. 151, tom. 2, pag. 425.

La barque la Marthe-Madelaine, capitaine Jacques Sellon, séjourna pendant quelque tems à Smyrne, et ensuite à Malte, pour éviter les Anglais qui croisaient tout auprès. Je fus nommé arbitre avec M. Brès. Par sentence du 22 août 1758, nous décidâmes, 1°. que les salaires de l'équipage engagé au mois, devaient être réduits à la demie pendant ce séjour forcé; 2°. que cette demie de salaires, et l'entière nourriture pendant ledit tems, devaient entrer en avarie grosse. Notre sentence fut confirmée à cet égard par arrêt du 30 juin 1760, au rapport de M. d'Orsin. Car peu importe que l'arrêt arrive par ordre du souverain ou par toute autre force majeure. Art. 8, titre des chartesparties. Art. 7, titre de l'engagement.

Si les assureurs n'eussent pas été francs d'avaries, ils auraient été condamnés à supporter ce dommage, relativement au risque par eux pris.

Roccus, resp. 30, rapporte un jugement rendu par le consul anglais à Naples, et dont voici les circonstances:

Robert Suanslei, anglais, capitaine du navire Erric Bonnaventure, prit à Smyrne un chargement de marchandises destinées pour Livourne. Dans le cours de son voyage, il apprit qu'une escadre hollandaise se trouvait aux parages de Livourne, où il ne pouvait se présenter sans risquer d'être pris. (La guerre était alors déclarée entre l'Angleterre et la Hollande). Il relâcha à Naples, et par une requête présentée au consul de sa nation, il demanda

qu'il lui fût permis de faire son déchargement à Naples ; il requit, de plus, le paiement de l'entier nolis. Un curateur fut nommé pour veiller à l'intérêt des absens et défendre leur cause.

Le consul, assemblé en rote avec un jurisconsulte et cinq négocians anglais, après avoir entendu l'avocat du capitaine, les commissionnaires de quelquesuns des chargeurs, et le curateur des absens, rendit sentence, par laquelle, attendu les circonstances du fuit et le péril manifeste où le capitaine se trouvait, s'il continuait le voyage, il permit au capitaine de décharger les marchandises à Naples, et lui adjugea l'entier nolis, etc.

Si un pareil cas se présentait parmi nous, le nolis ne serait accordé qu'à proportion du voyage avancé; mais la prime resterait acquise en entier aux

assureurs.

$ 2. Arrêt à cause de

On ne fait pas attention aux retardemens causés par les vents contraires ou par le calme. S'il en était autrement, il n'est point de voyage qui ne fit naître la tempête. mille contestations à ce sujet. Valin, art. 16, titre du fret.

Suivant la déclaration du 27 août 1779, art. 3, lorsque le navire sera prêt

§ 5.

Arrêt pour radou.

» à recevoir son chargement de retour, il sera procédé à une visite à l'effet de ber le navire.. » constater les avaries qui pourront être survenues dans le cours du voyage,

› par fortune de mer ou par le vice propre du navire. »

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Si le capitaine voulait remettre à la voile avant que les avaries survenues au vaisseau eussent été réparées, le magistrat français pourrait l'en empêcher, et même faire procéder de son autorité au radoub nécessaire : le tout aux frais du navire.

Dans le cas où cette avarie procède de fortune de mer, le chargeur est obligė. d'attendre ou de payer le fret entier. Art. 11, titre du fret. Ibig. Valin.

Dans ce même cas, les salaires des matelots engagés au mois ne souffrent ni suspension ni diminution, attendu que les mariniers sont obligés de travailler au radoub.

La réparation de ce dommage, causé par fortune de mer, est à la charge des assureurs, à moins qu'ils n'aient stipulé la clause franc d'avarie.

$4. Arrêt par la faute l'assuré.

Si le navire est arrêté pendant sa route ou au lieu de sa décharge, par le fait du marchand affréteur, l'intérêt du retardement et le fret entier seront du capitaine ou de » dus au maître. » Art. 9, titre du fret.

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a

Le maître sera tenu des dommages et intérêts de l'affréteur, si par son

» fait le vaisseau est retardé ou arrêté au lieu de sa décharge ou pendant sa » route. Art. 10, titre du fret.

Pour cause de contrebande.

$ 5.

Réglement de 1781.

Les assureurs ne répondent pas de cet accident. Guidon de la mer, ch. 9, art. 8. Valin, art. 49, titre des assurances.

Si le vaisseau est arrêté pour cause de contrebande, ou parce qu'il porte des marchandises hostiles, vid. les sect. 22, 47 et 51 du présent chapitre.

Suivant l'ordonnance concernant les consulats, du 3 mars 1781, tit. 3, art. 46, lorsque les bâtimens seront détenus dans les Echelles par ordre des » puissances du pays, de l'ambassadeur du roi et des consuls ou vice-consuls, • par la crainte des corsaires ou pirates, ou à l'occasion d'accidens de peste survenus dans lesdits bâtimens, il ne sera payé que demi-salaires aux équipages pendant tout le tems de la détention, lequel sera constaté par l'am»bassadeur du roi à Constantinople, et par les consuls ou vice-consuls des » autres Echelles..

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Cette demie de salaires, pendant le tems de la détention, doit entrer en avarie grosse à la charge des assureurs, à moins qu'ils n'aient stipulé le pacte franc d'avarie.

CONFÉRENCE.

CXXXIX. En général, porte l'art. 400 du Code de commerce, les dommages soufferts volontairement et les dépenses faites d'après délibérations motivées, pour le bien ou salut commun du navire et des marchandises, depuis leur chargement et départ jusqu'à leur retour et déchargement, sont avaries grosses ou communes. Par conséquent, sont de cette nature les dépenses faites par arrêt du navire, dans la crainte de l'ennemi, parce que c'est ici un événement extraordinaire procédant de force majeure, qui n'a rien de commun avec les risques et périls de la mer.

Mais il n'en est pas de même du retardement du voyage causé par les vents contraires, le calme, la tempête, parce que ce sont des accidens ordinaires à la navigation, auxquels chacun a dû s'attendre. On est censé s'être soumis de plein droit à courir ces risques. — (Voyez au surplus les art. 293, 294, 295 et 296 du Code de commerce; Pothier, chartes-parties, no. 68, 100, 101 et 102).

SECTION XXXV.

Déclaration de guerre.

L'ART. 26, titre des assurances, met aux risques des assureurs les pertes

Les assureurs ré, qui arrivent sur mer par déclaration de guerre.

pondent des pertes

et dommages occa

sionnés par la de

Cette disposition, qui est de droit, se trouve répétée dans toutes les for

claration de guerre. mules, d'après lesquelles les assureurs répondent du cas de guerre, d'ennemis

connus ou inconnus. Marseille, Bordeaux, Nantes, Rouen, Anvers, Hambourg, Ancône.

La survenance de guerre n'est pas une raison d'augmenter la prime, à moins qu'on ne l'ait stipulé. Suprà, ch. 3, sect. 3 et 4.

$ 2.

On a vu dans le même endroit combien de procès s'élevèrent au sujet de la clause d'augmentation de prime en cas de guerre, hostilités ou réprésailles. L'usage des nations policées a toujours été de ne commencer la guerre qu'après avoir fait signifier aux ennemis les griefs qu'on avait contre eux, et peuples dans leur les avoir exhortés à réparer les torts qu'on prétendait en avoir reçus.

Avant que d'assiéger une ville ennemie, est-il dit dans le Deuteronome cap. 20, 10, vous lui offrirez la paix. Si elle l'accepte, et qu'elle vous ouvre ses portes, vous ne ferez aucun mal aux habitans; ils deviendront vos tributaires. S'ils refusent de se soumettre, vous les attaquerez: Si quando accesseris ad expugnandam civitatem, offeres ei primùm pacem. Si receperit, et apparuerit tibi portas, cunctus populus, qui in eâ est, salvabitur, et serviet tibi sub tributo. Sin autem fœdus inire noluerit, et cæperit contra te bellum, oppugnabis eam.

Usage des anciens déclaration de guer

rc.

Histoire sainte.

Lorsque les tribus d'Israël furent assemblées à Silo, pour tirer vengeance de l'outrage que les habitans de Gaba, ville de la tribu de Benjamin, avaient fait à la femme d'un lévite, les anciens du peuple représentèrent qu'il ne fallait pas si légèrement déclarer la guerre à ceux de leur nation, sans avoir auparavant été plus particulièrement informés du crime, puisque la loi défendait d'en user d'une autre sorte, même envers les étrangers, et qu'elle voulait qu'on leur envoyât des ambassadeurs pour leur demander satisfaction; qu'ainsi, il était juste de députer vers les Gabéens, pour les obliger de punir les coupables; que s'ils le refusaient, on pourrait employer contre eux la force des armes. Cet avis fut suivi. Josephe, Histoire des Juifs, liv. 5, ch. 2. Polynice, avant que de former le siége de Thèbes, envoya Tidée vers Usage des Grecs. Ethéocle, pour tenter des voies d'accommodement. Les Grecs députèrent Ulysse et Ménélas vers les Troyens, pour les sommer de rendre Hélène, avant

que d'avoir fait contre eux aucun acte d'hostilité.

Les Romains n'étaient pas moins exacts que les Grecs à observer cette Usage des Romains. forme de déclarer la guerre; elle se faisait par le ministère d'un officier public, appelé Fécial. Il se transportait sur les frontières du peuple de qui on prétendait avoir reçu quelque tort. Il exposait les griefs de la république, et requérait la satisfaction convenable. En cas de refus, la guerre était déclarée.

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