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Mais le droit de contribution dont je parlerai bientôt, rend cette question oiseuse. Kuricke', pag. 777. Casaregis, disc. 45, n°. 29. Valin, sur l'art. 15, titre du jet. (Voyez la section suivante, § 1).

L'art. 26, titre du capitaine, porte que dans le cas où le capitaine et son équipage sont forcés par la crainte du naufrage d'abandonner le navire, ils « seront tenus de sauver avec eux l'argent et ce qu'ils pourront des marchandises plus précieuses de leur chargement, à peine d'en répondre en leur » nom, et de punition corporelle. »

Il serait donc fort difficile d'excuser un capitaine qui aurait fait jet de l'argent et autres marchandises précieuses, à moins qu'il ne se fût trouvé dans une position pareille à celle dont Juvénal parle. (Vid. Cleirac aux Jugemens d'Oléron, art. 8, no. 24, pag. 45).

De ce que les nègres sont considérés comme des choses ( ainsi qu'on l'a vu ci-dessus, ch. 8, sect. 4), on n'a jamais poussé le déraisonnement jusqu'à dire qu'on peut les jeter à la mer pour décharger le navire, tout comme on jette les autres marchandises.

Si par rapport au droit civil les esclaves sont nuls, il n'en est pas de même par rapport au droit naturel, suivant lequel tous les hommes sont égaux. L. 32, ff de reg. jur.

On doit plutôt jeter tous les effets du navire, même les plus précieux, que de jeter le moindre des esclaves. Cicéron, de officiis, lib. 3, cap. 23. Kuricke, quest. 30. Devicq, S 21.

S'il fallait supposer qu'on fût dans la nécessité absolue de jeter partie des hommes, Kuricke et Devicq disent qu'on devrait recourir au sort.

Mais une pareille théorie ne serait jamais adoptée en justice. Ceux qui, sous prétexte de sauver le navire, auraient jeté des hommes à la mer, libres ou esclaves, par le sort ou sans le sort, seraient coupables d'homicide; car pour sauver ma vie, il ne m'est jamais permis de donner la mort à des hommes qui ne m'attaquent point. (Vid. Puffendorf, liv. 2, ch. 6, § 3).

Argent et choses précieuses.

Nègres.

$6.

Devoirs de l'écris

L'écrivain ou celui qui en fera la fonction, écrira sur son registre, le plus tôt qu'il lui sera possible, la délibération, la fera signer à ceux qui au- vain. › ront opiné, sinon fera mention de la raison pour laquelle ils n'auront pas

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signé, et tiendra mémoire, autant que faire se pourra, des choses jetées et endommagées. » Art. 4, titre du jet. (Vid. le Consulat de la mer, ch. 93,97 et 109. Targa, cap. 58. Cleirac, pag. 41, no. 12).

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. Au premier port où le navire abordera, le maître déclarera pardevant le juge de l'amirauté, s'il y en a, sinon devant le juge ordinaire, la cause pour

Du capitaine.

$ 7.

Chose jetée ne cesse point d'appar

tenir à son maître.

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laquelle il aura fait le jet, coupé ou forcé ses mâts, ou abandonné ses ancres; et si c'est en pays étranger qu'il aborde, il fera sa déclaration devant › le consul de la nation française. » Art. 5, titre du jet. Ibiq. Valin. Cleirac, Jugemens d'Oléron, art. 9, no. 6.

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Les choses jetées dans la mer pour le salut commun, ne cessent point d'appartenir à leurs anciens maîtres, à qui elles doivent être rendues, si elles sont recouvrées, sauf les frais de sauvetage : Res jacta domini manet, nec fit adprehendentis; quia pro derelicto non habetur. L. 2, § 8, et L. 8, ff de leg. rhod., de jact. L. 9, S8, ff de adquir. rer. domin. L. 7, ff pro derelicto, § 48, inst. de rer. vis. Cujas, Peckius et Vinnius, ad dict. leg. 2. Loccenius, lib. 2, cap. 7, no. 5. Stypmannus, part. 4, cap. 17, no. 26, pag. 566. Devicq, no. 5o. Lubeck, cap. 2, no. 15. Cleirac, pag. 117 et 266. Grotius, lib. 2, cap. 4, § 4. Wolf, § 221. Marquardus, lib. 3, cap. 4, no. 43.

CONFÉRENCE.

CXLV. Le jet est l'action de jeter à la mer des objets chargés sur le navire. Il est des circonstances où le navire, en danger d'être pris ou de périr, ne saurait être sauvé que par le jet des marchandises qui le surchargent. Les principes établis par Emérigon à cet égard n'ont reçu aucune modification par le nouveau Code de commerce, qui reconnait toujours le jet régulier et le jet irrégulier.

L'art. 410 de la loi nouvelle, tiré de l'art. 1, titre du jet, de l'Ordonnance, porte. Si, » par tempête ou par la chasse de l'ennemi, le capitaine se croit obligé, pour le salut du »> navire, de jeter en mer une partie de son chargement, de couper ses mâts, ou d'aban>> donner ses ancres, il prend l'avis des intéressés au chargement qui se trouvent dans le » vaisseau, et des principaux de l'équipage. S'il y a diversité d'avis, celui du capitaine et » des principaux de l'équipage est suivi. »

Tel est le jet régulier. Il est juste, s'il se trouve à bord des personnes intéressées au chargement, de les consulter avant d'opérer le jet. Mais comme il peut arriver qu'aveuglées par le désir de conserver leurs marchandises, elles refusent de consentir au jet, la loi a donné la prépondérance au capitaine et à l'équipage, comme meilleurs juges, et juges désintéressés. S'il y avait diversité d'avis parmi l'équipage, l'avis du capitaine aurait également la prépondérance dans cette occasion. (Voyez Valin sur l'art. 2, titre du jet, de l'Ordonnance ).

D'un autre côté, il est des circonstances, comme dans un combat, dans une tempête, à la suite du heurt du navire sur des rescifs, des rochers, où les lenteurs d'une délibération nuiraient à la promptitude avec laquelle il faut agir pour le salut commun; dans ces cas, le capitaine pourra faire jeter les marchandises, sans entendre l'avis des intéressés, ni même de l'équipage. Le danger est urgent; il y a force majeure; il s'agit de se sauver, Tel est le jet irrégulier.

D'après l'art. 411 du Code de commerce, les choses les moins nécessaires, les plus pe

santes et de moindre prix, sont jetées les premières, et ensuite les marchandises du premier port, au choix du capitaine, et par l'avis des principaux de l'équipage.

Il paraît juste qu'on jette avant toutes autres les marchandises dont il n'y a ni connaissement ou pièce équivalente, ni déclaration du capitaine, parce que la perte de ces objets, d'après l'art. 420, ne donne lieu à aucune contribution. Il en doit être de même des effets chargés sur le tillac, qui n'entrent pas en contribution également.

Le premier pont est le pont supérieur qui se trouve immédiatement au-dessous du tillac. Le législateur a pensé avec raison que l'on devait jeter de préférence ces marchandises, parce que ce sont celles qui nuisent le plus à la manœuvre.

Cependant, si, contre l'avis des chargeurs intéressés et de l'équipage, le capitaine prenait sur lui de faire jet, il pourrait s'exposer, suivant les circonstances, à être poursuivi en dommages-intérêts.

La loi nouvelle, comme l'ancienne, ordonne au capitaine de sauver avec lui l'argent et les marchandises les plus précieuses (Art. 241 du Code de commerce). Il serait difficile, comme l'observe Emérigon, d'excuser un capitaine qui aurait fait jet de l'argent et autres marchandises précieuses.

D'après notre nouvelle législation et nos mœurs, nous ne pouvons pas nous occuper des esclaves. Nous ne devons plus connaître d'esclavage.

Dans le cas où, pressé par un danger imminent, on s'est vu forcé de faire le jet avant toute délibération, ou même avant qu'on ait pu rédiger la délibération que l'on vient de prendre, le capitaine est tenu de procéder à cette rédaction aussitôt qu'il en a les moyens. Il doit, dans tous les cas, rapporter un procès-verbal qui constate les motifs qui ont déterminé le jet et les objets jetés ou endommagés. Ce procès-verbal présente la signature des délibérans, ou les motifs de refus de signer, et il est transcrit sur le registre de bord, conformément à l'art. 224 du Code de commerce. (Voyez l'art. 412 du même Code), Outre ces formalités, le capitaine est tenu, dans le premier port de son arrivée, d'affirmer dans les vingt-quatre heures les faits contenus dans la délibération transcrite sur le registre. (Art. 413). Cette affirmation est faite au greffe du tribunal de commerce; s'il n'y a point de tribunal de commerce, devant le juge de paix de l'arrondissement; et si l'on se trouve en pays étranger, devant le consul français, à son défaut, devant le magistrat dú lieu. Argument des art. 243, 245 et 414).

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On ne saurait exiger, selon nous, des précautions de cette nature de la part d'un capitaine au petit cabotage, qui souvent est très-peu lettré. Nous pensons qu'il est suffisant, dans le cas de jet, de l'astreindre à faire sa déclaration dans le premier port, et à l'affirmer devant les officiers désignés, conformément à l'art. 413.

Les marchandises jetées à la mer, si elles viennent à être retrouvées, ne laissent pas d'appartenir à leurs premiers propriétaires; elles doivent leur être rendues sous remboursement des frais de sauvetage. Si le recouvrement ne s'en fait qu'après que la perte a été réglée, les propriétaires doivent rapporter à ceux qui ont contribué, les sommes qui en ont été reçues, sous déduction d'une nouvelle contribution pour le dommage occasionné par le jet, et pour les frais du recouvrement. Si le jet est recouvré avant 'la distribution de la perte, le propriétaire n'a recours en avaries communes que pour le dommage qu'éprouve

sa marchandise et pour les frais. (Argument de l'art. 429 du Code de commerce, de l'article 13 du tit. 22 de l'Ordonnance de Hambourg, et de l'art. 4, § 4, de celle de Suède ). Au reste, le jet des marchandises à la mer pour le salut de tous est une des principales espèces d'avarie commune, aussi bien que le dommage causé par le jet à d'autres marchandises.-(Voyez notre Cours de droit commercial maritime, tit. 15, sect. 1, tom. 4, pag. 534, 535 et suivantes).

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SECTION XLI.

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Enumération des Avaries grosses et des Avaries simples.

« LES dommages arrivés aux marchandises par naufrage, sont avaries simples pour le compte des propriétaires. Art. 5, titre des avaries.

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Le propriétaire du navire naufragé, et les propriétaires des marchandises perdues dans le naufrage, ne peuvent demander aucune contribution à ceux qui ont eu le bonheur de sauver leurs effets, parce que la perte que les uns et les autres ont soufferte, n'a pas procuré le salut commun: Amissæ navis damnum, collationis consortio non sarcitur per eos, qui merces suas naufragio liberaverunt; nam hujus æquitatem tunc admitti placuit, cum jactûs remedio, cœteris in communi periculo, salvâ navi, consultum est. L. 5, ff de leg. rhod.

Il en est de ce cas comme d'un incendie : celui qui sauve le sien, le sauve pour lui seul Cùm depressa navis, aut dejecta esset, quod quisque ex eâ suum servasset, sibi servare respondit, tanquàm ex incendio. L. 7, ff eod.

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Après le naufrage, il n'y a pas de contribution à faire entre les marchan› dises recouvrées et pêchées avec les perdues; mais sauve qui peut. » Cleirac, pag. 51, no. 9.

Chi salva, salva; chi perde, perde. Casaregis, disc. 121, n°. 17. Kuricke, pag. 780 et 788. Lubeck, cap. 3, no. 1. Infrà, § 4.

Les docteurs traitent la question si, en pareil cas, je dois sauver la chose à moi déposée, plutôt que la mienne propre. (Vid. Valin, art. 15, titre du jet, et la section précédente, § 4). Il semble qu'on n'est pas blâmable de penser premièrement à soi : Prima charitas sibi.

Rien n'empêche de convenir dans le principe qu'en cas de naufrage, tout ce qui sera sauvé restera commun au navire et à la cargaison. Consulat de la mer, ch. 192, 193 et 194. Jus. ans., tit. 8, art. 4. C'est le cas du germinamento, dont j'ai parlé suprà, sect. 39, § 4.

En cas de perte des marchandises mises dans des barques pour alléger le

Si la chaloupe chargée périt et que

› vaisseau entrant en quelque port ou rivière, la répartition s'en fera sur le le navire soit sauvé. navire et son chargement entier. Art. 19, titre du jet.

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On considère alors les marchandises mises dans la chaloupe comme si elles eussent été jetées à la mer pour sauver le navire et le reste de la cargaison : Proindè tanquam si jactura facta esset. L. 4, ff de leg. rhod.

La même décision se trouve dans le Guidon de la mer, ch. 5, art. 28. Elle est répétée par tous les auteurs. Peckius et Vinnius, ad dictam legem, pag. 242. Straccha, de navib., part. 2, no. 19. Kuricke, pag. 781. Loccenius, lib. 2, cap. 8, no. 6. Lubeck, cap. 2, n°. 11. Weytsen et glos., § 17. Roccus, de navibus, not. 21. Casaregis, disc. 46, n°. 29.

Il en est de même si partie des marchandises avait été mise dans la chaloupe pour soulager et relever le vaisseau qui était en danger de faire naufrage. Levanda navis gratiâ, dit Paulus, lib. 2, senten., tit. 7. Kuricke, ad Jus ans., tit. 8, art. 4, no. 15, pag. 787. Cleirac, sur l'Ordonnance de Wisbuy, art. 56, pag. 181. Vid. infrà, § 16.

Il n'y a pas lieu à la contribution, si des marchandises avaient été mises dans la chaloupe, non pour alléger le vaisseau, mais bien pour être transportées à leurs consignataires. Voici comme parle le Guidon de la mer, ch. 5, art. 30: « Les marchandises déchargées en barques pour transporter par la rivière : » si les barques se perdent, il n'y a quoi contribuer avec celles qui restent au grand navire, d'autant que ce n'est pas pour soulager le navire, mais seu>lement pour les transporter en la puissance du propriétaire. » Vid. Kuricke, pag. 782 et 811. Valin, art. 6, des avaries.

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Les textes ci-dessus cités ne parlent que des marchandises mises dans des barques pour alléger le vaisseau. D'où il semble que la contribution n'a pas lieu pour les barques mêmes qui ont péri en pareille occasion. Telle est la doctrine de Vinnius, sur la loi 4, ff de leg. rhod., pag. 245; de Weytsen, § 17, et de Casaregis, disc. 46, no. 31.

Ces auteurs ont raison, si les barques employées à alléger le navire appartenaient à un tiers qui les eût fournies moyennant un nolis. La perte des barques ou alléges regarderait ce tiers, parce qu'il avait stipulé le prix du péril auquel il les avait exposées : Quia dominus barca pro hoc periculo, mercedem stipulatus est. (Casaregis, en l'endroit cité). Mais si l'on s'était servi de la chaloupe même du navire, la perte de cette chaloupe entrerait en avarie grosse. «Si le vaisseau périt avec le reste de son chargement, il n'en sera fait au- que le navire pé

Si la chaloupe chargée se sauve et

risse.

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