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A BLOIS,

OU

LES DERNIERS MOMENS

DU

GOUVERNEMENT IMPÉRIAL,

RECUEILLIS

PAR UN HABITANT DE PARIS,

RÉFUGIÉ A BLOIS.

SECONDE ÉDITION.

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PARIS,

LE NORMANT, Libraire, rue de Seine, no. 8.
FANTIN, Libraire, quai des Augustins, no. 55.

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SODLEIAN

15MAP 1949

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A BLOIS,

OU LES DERNIERS MOMENS

DU

GOUVERNEMENT IMPÉRIAL.

DURANT cette crise, à jamais mémorable, qui a fini par une délivrance si miraculeuse, la ville de Blois, quoique voisine du théâtre de la guerre et fort exposée à en éprouver les plus funestes effets, a joui d'un repos quelquefois incertain, mais qui ne lui a jamais été ravi. Aussi l'a-t-elle constamment partagé avec différens hôtes qu'elle a successivement recueillis.

Après avoir possédé quelque temps des officiers suédois retenus prisonniers en France, contre le droit des gens, Blois devint la résidence de ces Anglais, qui étoient également, depuis dix ans, les otages de la tyrannie. On les transféroit alors de ville en ville, en suivant les mouvemens des armées, qui les poussoient des extrémités au centre de l'empire. Ils ne firent pas un long

I.

séjour à Blois il y avoit à peine un mois qu'ils y étoient arrivés, qu'ils furent obligés d'en partir, cédant la place à des prisonniers de guerre allemands et russes, et à des blessés français. Ceux-ci furent éloignés à leur tour; et, par une substitution plus étonnante que toutes les autres, ils furent remplacés par la cour d'une souveraine fugitive, et par les ministres de Napoléon, qui se sauvoient de sa capitale, dont les puissances. alliées venoient de s'emparer.

Témoins de cette retraite, nous allons en retracer les principales circonstances.

Après le départ des Suédois et des Anglais, qui avoient successivement résidé à Blois, et en avoient fait un séjour très-vivant, cette ville devint comme un tombeau, qui se remplissoit chaque jour des victimes infortunées de la guerre. Son château, jadis la demeure des rois, fut rempli de prisonniers; des bateaux de blessés, qui couvroient la Loire, vinrent encombrer ses hôpitaux, comme ceux de tant de villès bien plus éloignées du théâtre de la guerre : on ne rencontroit pas d'autres voyageurs. Les routes, naguère couvertes de fugitifs qui se sauvoient de Paris, de troupes de l'armée d'Espagne qui s'y rendoient, de gardes nationales et de conscrits nouvellement levés, étoient alors désertes. La

prise de Bordeaux vint encore augmenter cette solitude. Il y avoit trois semaines qu'elle se faisoit sentir, lorsque, vers la fin de mars, une seconde émigration des habitans de Paris vint avertir ceux de Blois que la capitale étoit une seconde fois menacée.

Le lundi, 28 mars, on apprit que Napoléon, qui ne donnoit pas des nouvelles de l'armée depuis plusieurs jours, s'étoit éloigné de Paris, et qu'il en étoit à plus de cinquante lienes (1). Les voyageurs et les lettres particulières s'accordoient à dire qu'il songcoit à manoeuvrer sur les derrières des alliés, sans craindre de voir ceux-ci s'avancer sur la capitale qu'il croyoit avoir mise à l'abri d'une invasion.

On disoit, qu'avant d'entreprendre cette manoeuvre, Napoléon avoit demandé si Paris pourroit tenir cinq jours, et qu'il étoit parti sur la réponse affirmative qu'on lui avoit donnée.

Le mardi 29 mars, le nombre des fugitifs, devenu plus considérable, nous donnoit la mésurre de la consternation des Parisiens, qui paroissoit portée à son comble. On nous disoit que le moment du dénouement étoit arrivé; mais personne n'osoit dire que c'étoit celui de la chute

(1) A Saint-Dizier.

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