Page images
PDF
EPUB

tique, est celui qui sera le mieux exécuté ; et celui qui sera le mieux exécuté par le Gouvernement est, sans contredit, celui qu'il a présenté.

« Je pense aussi que, dans une semblable affaire, il ne faut pas diminuer la responsabilité des agents du pouvoir. Les déclarations de M. le Ministre de la marine à la Commission ont été si précises, si absolues, si conformes au but que votre Commission veut atteindre, qu'il ne nous est pas permis de douter de son zèle dans l'exécution de la loi.

<< Messieurs, le meilleur moyen à employer vis-vis de celui à qui l'on veut faire remplir ses obligations, c'est de lui laisser sa responsabilité tout entière, c'est de prendre son projet tel qu'il l'a présenté, afin d'avoir le droit de lui rappeler un jour : Vous nous aviez dit que cette mesure serait efficace, elle ne l'a pas été; rendez-la efficace. Il s'est présenté une difficulté? attaquez-la, triomphez-en. Il ne faut pas permettre au Gouvernement de venir vous dire : vous avez adopté telle mesure, cette mesure était impraticable; les conseils coloniaux ne l'ont pas approuvée; c'est votre faute, si la loi ne s'exécute pas.

« Il faut n'alléger en rien la responsabilité du Gouvernement. Nous sommes d'accord avec lui sur le but, nous devons accepter les moyens qu'il nous propose, parce qu'ils lui conviennent ; nous devons lui laisser tout entière la responsabilité de l'avenir, nous devons l'enserrer dans cette responsabilité.

<< Au fond, voilà la différence qui sépare votre Commission et plusieurs orateurs abolitionistes qui ont combattu la loi ; la pensée de ceux-ci est que ce qu'il y a de plus important, c'est la loi.

« Nous pensons, nous, que ce qu'il y a de plus important, c'est l'exécution de la loi.Nous sommes plus inquiets de cette exécution que de la loi elle-même.

<< Il ne faut pas oublier, et c'est par là que je termine, quel est l'état vrai, réel, de nos colonies; quel est l'état du Gouvernement dans ces mêmes colonies; il ne faut pas

oublier que, malgré le désir de M. le Ministre de la marine, les ordonnances sur le patronage et sur les différentes branches d'administration rencontrent une opposition extrême, qu'elles ne sont exécutées qu'à demi, parce que, comme l'a dit un des gouverneurs des colonies, il y a des magistrats dont la sagesse saura toujours démontrer que les es. claves sont parfaitement heureux.

« Nous n'oublions pas qu'un esclave qui s'était plaint, quand il est allé demander à un maire de lui faire rendre justice, il est arrivé que celui-ci lui a fait donner un quatre piquets pour lui apprendre à se plaindre.

« Savez-vous qu'il y a un président de cour royale qui, en ce moment-ci même, vient de publier une brochure en faveur de la traite et contre les lois du royaume, et des conseils coloniaux qui déclarent que la résistance aux vues de la métropole est leur devoir, et qu'ils ne failliront pas à leur devoir; en même temps ils adressent des compliments aux gouverneurs et se trouvent en sympathie avec eux.

[ocr errors]

«Voilà quel est l'état des choses dans les colonies; cet état de choses, je le reconnais, ne tient pas à M. le Ministre de la marine ni à l'Administration actuelle, mais à un vice ancien et invétéré.

<< Dans cette situation la Commission devait-elle amender la loi, devait-elle dire? Il y a là telle chose qui n'est pas conforme à nos idées et à nos opinions, et s'exposer à un rejet. Non, elle a pensé que ce qu'il fallait, c'était de songer avant à l'exécution de la loi présente telle qu'elle était, et à l'exécution de toutes les lois anciennes qui ne sont pas exécutées; elle a pensé qu'il fallait prendre le projet du Gouvernement et lui laisser la responsabilité tout entière de l'application de la loi ; qu'il fallait le soutenir avec ardeur, lui donner les moyens de vaincre des difficultés très-grandes. Les difficultés multipliées qu'il doit rencontrer, il ne devra pas, il ne pourra pas s'arrêter devant elles; le bien de l'humanité et l'honneur de la France le lui commandent. »

-La discussion générale est close.

La Chambre, consultée par M. le Président, décide qu'elle passe à la discussion des articles.

La discussion est renvoyée à lundi.

[ocr errors][merged small]

Signé SAUZET, President;

LACROSSE, DE L'ESPÉE, BOISSY-D'ANGLAS,
DE LAS-CASES, Secrétaires.

Collationné :

Le Secrétaire-Redacteur,
Signe CERCLET.

PRÉSIDENCE DE M. BIGNON,

Vice-Président.

Séance du Lundi 2 Juin 1845.

Le procès-verbal de la séance du 31 mai est lu et adopté.

MM. Ballot et Gigon La Bertrie sollicitent et obtiennent des congés.

M. le Ministre DES TRAVAUX PUBLICS fait, au nom du Roi, les communications suivantes :

1° Projet de loi relatif à la concession du chemin de fer de Dijon à Mulhouse, et de l'embranchement de Gray sur Besançon;

2o Projet de loi relatif aux embranchements de Dieppe et de Fécamp sur le chemin de fer de Rouen au Hâvre, et d'Aix sur le chemin de fer de Marseille à Avignon.

La Chambre donne acte à M. le Ministre des présentes communications; elle en ordonne l'impression, la distribution et le renvoi à l'examen des bureaux.

(Voir les annexes imprimées noo 174 et 175.)

L'ordre du jour appelle la délibération sur le projet de loi relatif au régime des colonies françaises.

M. LE PRÉSIDENT donne lecture de l'article 1" du projet de loi, qui est ainsi conçu :

« Il sera statué par ordonnance du Roi:

« 1° Sur la nourriture et l'entretien dus par les maîtres à leurs esclaves, tant en santé qu'en maladie, et sur le remplacement de la nourriture par la concession d'un jour par semaine aux esclaves qui en feront la demande ;

«<2° Sur le régime disciplinaire des ateliers;

« 3° Sur l'instruction religieuse et élémentaire des escla

ves;

4° Sur le mariage des personnes non libres; sur ses conditions, ses formes et ses effets, relativement aux époux entre eux, et aux enfants en provenant.

« Pour les cas de mariage entre les personnes non libres et appartenant à des maîtres différents, un décret du conseil colonial, rendu dans les formes des articles 4 et 8 de la loi du 24 avril 1833, réglera les moyens de réunir soit le mari à la femme, soit la femme au mari. »

M. LE PRÉSIDENT annonce qu'il a été proposé plusieurs amendements sur le premier paragraphe.

L'un de ces amendements a pour objet de substituer au mot esclaves le mot ouvriers.

L'AUTEUR DE L'AMENDEMENT voudrait qu'après avoir fait disparaître la qualification d'esclaves du titre de la loi, on l'effaçât dans le texte même. Il a peine à comprendre qu'au xix siècle, dans une législature française, on discute encore les dispositions de l'esclavage. Il convient, selon lui, de mettre Ix. Procès-verbaux.

8

« PreviousContinue »