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aujourd'hui, n'ont fait que suivre les indications et les inspirations de la Chambre des Députés.

« Le premier orateur entendu nous a engagés, avec unc grande inexactitude de souvenirs, à nous reporter à ce qui s'est passé, lorsque les bâtiments que nous occupons ont été achetés par la Chambre. Il a dit qu'à cette époque les raisons qu'on avait données à la Chambre, c'était qu'il convenait à la dignité de la Chambre d'être isolée, de vivre seule, d'avoir son palais, son jardin exactement comme la Chambre des Pairs. C'est précisément le contraire qui a été dit.

<< Le préopinant a cru devoir reproduire l'argument; l'argument, pour avoir été présenté deux fois, n'en est pas moins contraire à la vérité des faits.

<< Lorsqu'en 1843, si je ne me trompe, M. le Ministre de l'intérieur proposa à la Chambre des Députés d'acheter les bâtiments appartenant à M. le duc d'Aumale, voici ce qu'il disait :

<< Devenu propriétaire de la totalité des terrains, l'État, << s'il le juge convenable, pourra disposer d'une partie de <«< cette vaste surface pour quelque objet d'utilité publique, <«< mais toujours en consultant les convenances de la Cham<< bre, ce que des particuliers ne seraient pas tenus de faire et « ne feraient certainement pas. >>

« Il appartenait au Gouvernement de n'en pas dire davantage. Il appartenait au contraire à la Chambre de s'expliquer plus clairement et d'indiquer si elle entendait conserver la totalité des terrains, comme dépendances de la Chambre, ou si elle croyait que ces terrains pouvaient être superflus, du moins en partie, et s'il convenait de leur donner une destination d'utilité publique.

<< Voici comme s'exprimait le rapporteur de votre Commission

:

« L'architecte, qui a agi dans l'intérêt de l'État, pense qu'il serait possible de détacher, sur l'ensemble de l'acqui«sition, une superficie d'environ 12,000 mètres, dont on « pourrait disposer, soit pour y établir les constructions né«< cessaires à l'exposition quinquennale des produits de l'in

«<dustrie, soit pour y placer la bibliothèque Royale, soit pour «y fonder les édifices du Ministère des affaires étrangères; que « d'ailleurs ces projets, quels qu'ils fussent, ne seraient mis à <«<exécution qu'après avoir reçu la sanction des Chambres. » << C'est sur ce rapport que le projet de loi fut discuté et que l'acquisition fut ordonnée.

« Savez-vous quelles furent les objections qui s'élevèrent pendant la discussion? Un orateur vint à la tribune. et dit :

« C'est une vaine espérance dont on flatte Chambre; <«< quand on aura le terrain, on le gardera, quelque cher « qu'il coûte, non dans l'intérêt de la Chambre des Dépu<«<tés, mais parce que ces Ministères que vous voulez y cons<< truire ne voudront pas accepter cet emplacement.

« On a parlé d'un hôtel pour le Ministère des affaires « étrangères; mais on a répondu que le quartier n'était pas «assez central. Que ferait-on donc du surplus ? Ni le Mi«nistère, ni la Commission, ni personne n'en sait rien << n'en dit rien du moins. Je crois pouvoir le deviner. Une << fois qu'on aurait acheté pour vous les 34,000 mètres de << terrain, on vous les laisserait. »

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« C'est-à-dire qu'on présentait alors comme objection, et le préopinant n'y répondait pas, ce que cet orateur présente aujourd'hui comme argument.

«J'avais donc raison de dire que lorsque la Commission, l'année dernière, a pris l'initiative du projet que nous présentons aujourd'hui, la Commission et le Gouvernement avaient agi d'après les indications et sous les inspirations de la Chambre.

« J'examine maintenant les arguments.

« Le préopinant disait tout-à-l'heure : «Que feriez-vous << si, sous prétexte d'économie, on vous proposait de re<< trancher la moitié du Champ-de-Mars ou du jardin du << Luxembourg? »

« Je dirai d'abord que ce serait un vandalisme intolérable; et puis, que l'orateur me permette de lui demander s'il peut bien comparer le jardin de la Chambre des Députés au jar

din du Luxembourg. En vérité, comparer un jardin dessiné avec tant d'harmonie par Lenôtre, comparer ses vastes proportions avec le quinconce que nous avons à la porte de ce palais, c'est, ce me semble, une véritable profanation.

« J'arrive maintenant à la question d'utilité et de convenance pour la Chambre des Députés.

« Le préopinant nous a dit que le Ministère des affaires étrangères, mauvais voisin, empiéterait tous les jours sur la Chambre des Députés, lui prendrait aujourd'hui 1 mètre de terrain, demain 2, et viendrait successivement s'emparer de tout le terrain.

« Messieurs, si la guerre avait lieu, la Chambre me permettra de dire que ce n'est pas du côté des affaires étrangères que le danger serait plus capital, car les Ministres demandent, et la Chambre donne; la Chambre n'aurait qu'à refuser. Mais la guerre n'est pas possible. Je regrette que les opposants n'aient pas pris la peine de consulter les plans qui ont été déposés, ils auraient vu que cela n'était pas possible, et que l'insuffisance des locaux n'existe pour personne je ne dis pas seulement pour le présent, mais pour l'avenir; car, dans ce partage du terrain, les exigences du présent et de l'avenir ont été prévues.

« Regardez le plan du terrain des affaires étrangères, vous verrez qu'il y a un local considérable pour cet hôtel, et pour celui des archives contigu à la Chambre des Députés. On vous dit que les bureaux ne sont pas aujourd'hui convenablement établis ; et on a raison. Mais on oublie que, en vertu d'une loi que vous avez votée, vous disposez de tout le rez-de-chaussée pour y établir convenablement vos travaux, et que vous aurez pour l'agrandissement de vos archives et de votre bibliothèque, le second de tous les bâtiments qui appartiennent maintenant à la Chambre.

<«< Ainsi, ni l'hôtel des affaires étrangères, ni la Chambre elle-même n'ont, d'ici à un avenir indéfini, des agrandissements à demander, et quand elles auraient des agrandissements à demander, il y a été pourvu d'avance.

« Un mot maintenant sur la question d'économie. La

question d'économie, c'est la Commission elle-même qui l'a indiquée, et je crois qu'il m'est permis de dire que c'était surtout dans son sein que cette question devait prendre naissance. La question d'économie ne peut pas être contestée. Si vous voulez construire ailleurs l'hôtel des affaires étrangères, vous devez vous attendre à dépenser 3 millions, même en le transportant sur l'emplacement de l'hôtel de La Reynière, et comme l'hôtel de La Reynière a une valeur de 1,500,000 à 1,800,000 fr., ce sera encore pareille somme de 1,500,000 à 1,800,000 fr. que vous aurez à dépenser pour l'acquisition.

Quant à la nécessité de nouveaux crédits supplémentaires, je n'admets point, avec un des préopinants, cette nécessité; en a-t-il effectivement été demandé pour les bâtiments publics?

« Je pourrais affirmer que pour l'école normale, que pour l'achèvement de la bibliothèque Sainte-Geneviève, il n'y aura aucun crédit supplémentaire à demander à la Chambre. Mais j'admets, si l'on veut, cette nécessité; est-ce que cette nécessité dépend de l'emplacement qui sera préféré? Est-ce que vous ne l'aurez pas pour les bâtiments construits aux Champs-Elysées, comme pour les bâtiments construits sur les terrains de la Chambre?

« Ce qu'il est possible de prévoir en ce moment, c'est qu'on ne trouvera pas les terrains nécessaires pour bâtir un hôtel du Ministère des affaires étrangères pour moins de 5 millions. Et comme un orateur a annoncé que, s'il lui était démontré qu'il y a une économie de plus de deux millions par le projet, il voterait pour le projet, je compte sur son suffrage. »

UN MEMBRE reconnaît qu'il peut y avoir avantage à utiliser le terrain dont il s'agit, pour le Ministère des affaires étrangères, ou pour tout autre usage: il a professé cette opinion dès l'origine; mais c'est d'un autre côté qu'il attaque le projet de loi en délibération, Selon lui, les archives du Ministère des affaires étrangères devraient être

transportées au dépôt général des archives du royaume, aux termes de la loi de septembre 1790. D'autres Ministères exécutent cette loi: celui-là s'y refuse.

On cherche aujourd'hui à tirer parti d'un terrain que l'on a acquis en 1843, pour en débarrasser le propriétaire. Il n'y a pas plus de fondement aux motifs allégués en faveur du projet de loi en discussion, qu'il n'y en avait aux considérations de dignité et de convenance, pour faire adopter, il y a deux ans, le projet d'acquisition.

UN DEUXIÈME MEMBRE répond qu'il est, au contraire, de toute nécessité que le Ministère des affaires étrangères conserve ses archives ; il faut qu'il puisse à chaque instant consulter tous les actes qui se rattachent aux relations de la France avec l'Europe. Tous ces documents, d'ailleurs, ne sont pas de nature à être livrés à la publicité, et on ne peut pas les abandonner aux investigations des curieux et des

amateurs.

UN TROISIÈME MEMBRE repousse le projet de loi; il voit du danger à placer le Ministère des affaires étrangères à côté de la Chambre des Députés; le secret est souvent un devoir impérieux pour ce Ministère, et il pourrait y avoir, à un jour donné, inconvénient au rapprochement que l'on pro

pose.

La Chambre

passe

à la discussion des articles.

L'article premier, amendé par la Commission, est ainsi

conçu :

« Il est ouvert au Ministre des travaux publics un crédit extraordinaire de sept millions quatre cent soixante- un mille francs (7,461,000 fr.), qui sera appliqué aux travaux à entreprendre, et aux acquisitions à faire au nom de l'Etat :

« 1° Pour l'établissement du Ministère des affaires étrangères sur les terrains dépendant du domaine de l'Etat, situés entre la rue de l'Université, la rue d'Austerlitz et le

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