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res contrefaits, de quinze cens livres d'amende contre chacun des contreve nans, dont un tiers à Nous, un tiers à l'Hoftel - Dieu de Paris, l'aurre tiers audit Expofant, & de tous depens, dommages & interêts à la charge que ces prefentes feront enregistrées tout au long fur le Registre de la Communauté des Imprimeurs & Libraires de Paris, & ce dans trois mois de la datte d'icelles: Que l'impreffion de ce Livre fera faite dans notre Royaume & non ailleurs ; en bon papier & en beaux caracteres, conformément aux Reglemens de la Librairie; & qu'avant que de l'expofer en vente,le manufcrit ou imprimé qui aura fervi de copie à l'impreffion dudit Livre fesa remis dans le même état où l'appro bation y aura été donnée ès mains de notre trés-cher & feal Chevalier, Garde des Sceaux de France le Sr Fleuriau Darmenonville Commandeur de nos Ordres; & qu'il en fera enfuite remis deux Exemplaires dans notre Bibliotheque publique, un dans celle de notre Château du Louvre, & un dans celle de notredit très cher & feal Chevalier, Garde des Sceaux de France le Sr Fleuriau Dar. menonville Commandeur de nos Ordres ; le tout à peine de nullité des prefentes. Du contenu defquelles vous mandons & enjoignons de faire jouir ledit Expofant ou les ayans caufe pleinement & paisiblement, fans fouffrir qu'il leur foit fait aucun trouble ou empêchement. Voulons que la copie defdites presenqui fera imprimée tout au long au commencement ou à la fin dud.livre,foit tenue pour dûement fignifiée;& qu'aux copies collationnées par l'un de nos amez&feaur Confeillers & Secretaires, foy foit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huiffier ou Sergent de faire pour l'execution d'icelles tous Actes requis & neceffaires, fans demander autre permiffion, & nonobftant Clameur de Haro, Charte Normande, & Lettres à ce contraires : Car tel eft notre plaifir, Donné à Paris le trentiéme jour du mois de Juin, l'an de grace mil fept cens vingt quatre, & de notre Regne le neuvième. Par le Roy en fon Confeil.

CARPOT.

Regiftré fur le Registre VI de la Chambre Royale des Libraires & Imprimeurs de Parts N 22 f17 conformément aux anciens Reglemens, confirmez par celui du 28 Fevrier 1723, 4 Paris le 4 Juillet 1724. BRUNET, Sindic.

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SECOND

VOYAGE

LITTERAIRE

'ENGAGEMENT où nous nous fommes trouvez de travailler à un Ouvrage auffi intereffant, que le deffein en eft grand & étendu, ayant porté nos fu. perieurs assemblez à la diette annuelle, à nous faire entreprendre un voyage dans les Pays, Bas & dans l'Allemagne, pour y chercher dans les bibliotheques tous les memoires qui pouvoient contribuer à fa perfection. Ils nous declarerent leur refolution à la fin du mois de May 1718. Nous la reçûmes avec tout le respect & la foumiffion que nous devions, mais en même temps avec crainte. Car quoyque Dieu nous ait donné beaucoup d'amour pour le travail, & un zele assez grand pour tout entreprendre lorfqu'il s'agit de rendre fervice à l'eglife & à l'etat, & de contribuer de notre part à l'utilité publique; le fuccès de ce voyage nous paroiffoit fort incertain & douteux, puifqu'il étoit question

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d'aller dans un pays où nous étions inconnus, dans un pays dont nous n'entendions pas la langue, dans un pays où tant d'hommes habiles avoient déja moiffonné avant nous, & même glanné après les moiffonneurs.

Il étoit donc fort à craindre que nous ne nous donnaffions bien de la peine inutilement, & que nous ne rapportaffions de tous nos travaux que la bonne volonté de fervir le Public avec laquelle nous aurions entrepris le voyage. Mais l'experience que nous faifons tous les jours de la protection de Dieu fur nous, & la benediction vifible qu'il donne à nos entreprises, nous ayant relevé le courage, nous crûmes qu'il regarderoit auffi d'un œil favorable les pieufes intentions de ceux qui nous envoyoient, fi nous mettions notre confiance en lui. Ainfi après avoir demandé le fecours des prieres de nos confreres, nous nous mîmes en chemin le 30. May 1718.

Nous allâmes d'abord à l'abbaye de Chelle, fituée dans une belle plaine, fur le bord de la Marne, à quatre lieües de Paris. Elle eft fi connuë & fi illuftre, qu'il n'est pas neceffaire de nous étendre beaucoup pour en donner une jufte idée. Tout le monde fçait que c'est un glorieux monument de la pieté de fainte Batilde reine de France. L'auteur de fa vie nous apprend néanmoins que fainte Clotilde y avoit déja affemblé une communauté de vierges, qui s'étoient confacrées à Dieu par les vœux monaftiques. Mais foit que le premier monaftere eut été detruit, foit que les grands biens dont fainte Batilde enrichit l'abbaye, lui ayent acquis le titre de Fondatrice, on le lui donne encore aujourd'hui, comme on a fait dans les fiecles précedens. Non contente d'avoir rétabli le monaftere & de lui avoir fait des donations confiderables, elle compta tout cela pour rien, fi elle ne s'y donnoit elle-même: c'eft pourquoi après avoir été les delices de la France fous le regne de Clovis II. fon mari, après avoir fait admirer fa prudence dans la Regence du Royaume pendant la minorité de fes trois fils, changeant fa couronne en un voile, elle apprit à la pofterité, qu'elle fçavoit auffi bien obéir que commander, & que le joug de JESUS.

VOYAGE LITTERAIRE.

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CHRIST eft infiniment plus doux, que tout ce que le monde peut avoir d'agréable. Son exemple attira à Chelle un grand nombre de princeffes & de filles de diftinction, non feulement du royaume, mais encore des pays étrangers, qui paffoient les mers pour fe confacrer au fervice de celui qui eft l'époux des vierges. Je ne doute point que Bertilende qui contribua à la fondation du monaftere d'Epternac, par une donation confiderable qu'elle fit à S. VVillebrod apôtre des Frifons, ne fut de ce nombre. Gifele fœur de l'empereur Charlemagne, que ce grand prince honoroit comme fa propre mere, choifit Chelle pour fe mettre à l'abri de la corruption du fiecle. Hegilvide mere de l'imperatrice Judith prefera la qualité d'abbeffe de Chelle à tous les titres d'honneur qu'elle pouvoit poffeder dans le monde, & fans remonter à ces fiecles éloignez, Chelle renferme aujourd'hui dans fon fein une des plus grandes Princeffes de l'Europe, puifqu'el le a l'honneur d'être du Sang Royal de la Couronne de France, & d'être la fille du Prince qui gouverne aujourd'hui le royaume. Tout le monde fçait & admire avec quelle conftance elle a quitté les plaifirs qui pouvoient arrêter une jeune princeffe à la fleur de fon âge, & le mepris qu'elle a fait des couronnes que fa naiffance royale lui pouvoit faire efperer. Perfuadée que fon royaume n'étoit pas de ce monde, & que l'époux des vierges en refervoit un autre plus durable à celles qui fe confacrent à

fon fervice.

Convaincue que ce Royaume ne s'emporte que par la force & qu'en fe faifant violence, que le moyen le plus court de vaincre le monde eft de le fuir; elle n'hefita pas à fe derober d'une cour floriffante: la retraite du cloître ne lui fit pas d'horreur, les exercices les plus humbles de la religion ne lui parurent pas trop bas : les aufteritez les plus rudes ne l'ébranlerent point. Elle fit un facrifice parfait & des plaifirs & des honneurs, & embraffa genereufement la croix pour ne s'en separer qu'à la mort. Lorfque nous arrivâmes à Chelle elle fortoit d'une retraitte qu'on lui avoit fait interompre pour quelques indifpofi

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Zions, & étoit occupée à faire des ornemens pour l'eglife. Nous eûmes l'honneur de lui prefenter nos refpects. Nous faluâmes auffi madame de Vilars qui en étoit alors abbeffe. Elle nous fit auffi-tôt entrer dans l'interieur pour voir les archives. Nous y vîmes quatre beaux cartulaires, dont nous fîmes quelques extraits par rapport à nos def feins. Nous trouvâmes dans l'un de ces cartulaires des reglemens faits il y a cinq cens ans ou environ pour la nourriture des Religieufes. Il paroît par ces reglemens qu'el les affaifonnoient leurs legumes avec de la graiffe trois fois la semaine feulement, les Dimanches, les Mardis, & les Jeudis, en quoy elles étoient plus religieufes que les religieux de Cluni, qui en mangeoient autrefois tous les jours, enforte que Pierre le Venerable fe crut obligé de leur en ôter l'ufage les Vendredis, à cause du scandale des feculiers qui n'en mangeoient pas eux-mêmes ce jourlà. Les grandes fêtes on leur accordoit la viande, mais elles n'en avoient que d'une forte, excepté le jour de fainte Bertille premiere abbeffe de Chelle, auquel on leur fervoit deux mets, & le jour de S. Baltide auquel on leur en fervoit trois.

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On nous fit voir auffi le calice de faint Eloy, dont coupe eft d'or émaillé. Elle a près d'un demi, pied de profondeur & prefqu'autant de diametre, le pied eft beaucoup plus petit. Je n'aurois pas de peine à croire que ce calice a été autrefois donné au monaftere par fainte Batilde, qu'il fervoit pour les jours de Communion fous les deux efpeces, & qu'on l'appella le calice de S. Eloy, parce que ce faint qui étoit un des directeurs de la Sainte, s'en fervoit ordinairement. Quoyqu'il en foit, on confervoit encore autrefois la patene d'or du même calice, mais il y a plus de trois cens ans qu'on la fondit pour faire

la chaffe de S. Baltilde.

Ainfi la devotion de ces dames pour leur fainte patrone, nous a privé de ce precieux monument, qu'on ne peut affez regretter. Outre le calice de faint Eloy, on montre encore dans le threfor de Chelle deux beaux buftes d'argent, dans lefquels font renfermez les chefs de

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