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que chaleur, il n'y avait jamais qu'un jugement existant à la fois; il ne pouvait plus y avoir lieu au scandale de deux jugemens opposés.

Mais on objecta, qu'en faisant profiter de l'opposition d'un tiers une partie condamnée contradictoirement et définitivement, ce système ébranlait l'autorité de la chose jugée, base essentielle de toute législation civile. On craignit que les gens d'affaires ne s'en emparassent pour multiplier, contre l'intention du législateur, les oppositions, les plaidoiries, et prolonger l'issue des procès; que plusieurs défendeurs cités ne s'entendissent, les uns pour comparaître et les autres pour faire défaut, afin de se préparer deux défenses, de tenter deux fois le même tribunal.

Entre ces expédiens divers, il nous a paru que le parti le plus sage était d'éviter toute règle absolue, et que la route la plus sûre serait celle qui s'éloignerait également des points extrêmes.

Nous avons fondu ensemble les deux derniers systèmes, nous les avons modifiés l'un par l'autre, nous les avons dégagés ainsi de leurs principaux inconvéniens. Le jugement rendu contre des comparans et des défaillans restera, ce qu'il est réellement, contradictoire à l'égard des uns, par défaut à l'égard des autres. L'opposition ne sera ouverte qu'à ceux-ci, mais elle profitera aux premiers dans deux cas (Art. 148):

1o. Si le jugement qui l'admet, repose sur des moyens communs, inconnus aux comparans, ou dont la dépendait des défaillans;

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2o. Si l'objet de la condamnation est indivisible. Toute objection a dû céder, dans le premier cas, à l'évidence de la justice; dans le second, à la force de la nécessité.

TITRE XII.

DES ORDONNANCES PRÉPARATOIRES ET DES PROCÉDURES PROBATOIRES EN GÉNÉRAL.

ART. 150. Dans les causes où le fond ne sera pas en état d'être jugé de suite (Art. 101), les Juges pourront ordonner préparatoirement l'interrogatoire des parties, ou de l'une d'elles (Tit. XIII), leur serment (Tit. XIV), l'audition de témoins (Tit. xv), l'avis d'experts (Tit. xvi), la vue des lieux (Tit. xvII), la vérification d'écritures (Tit. XVIII), ou toute autre opération préliminaire, si ces diverses procédures probatoires sont utiles à la découverte de la vérité, et autorisées par la loi. [ Voyez Arrêts, no 42 et 43.]

ART. 151. Les Juges ne seront point liés par les ordonnances préparatoires, ni leurs suites, sauf le cas du serment judiciaire déféré à l'une des parties (Tit. xiv).—[Voy. Arrêts, no 44 à 46.]

ART. 152. Les ordonnances préparatoires seront délibérées, prononcées, rédigées et expédiées comme les jugemens. (Tit. Ix.) Toutefois, s'il ne s'est élevé aucun débat sur l'opération ordonnée, la rédaction pourra être réduite à la désignation des parties, et au dispositif. (Art. 107, n° 4 et 6.)

ART. 153. Toute ordonnance préparatoire fixera l'audience où l'opération ordonnée devra se faire devant le tribunal, ou lui être rapportée.

ART. 154. Les ordonnances préparatoires ne seront point signi fiées si elles ne sont rendues par défaut. (Tit. XI, Sect. 1.)

ART. 155. Si l'ordonnance préparatoire est rendue par défaut, le défaillant pourra former opposition dans la forme et les délais fixés en la Section seconde du Titre précédent.

ART. 156. Les diverses procédures probatoires se feront en audience publique, à l'exception des cas où la plaidoirie à huis-clos aura été ordonnée, et des actes que la loi autorisera de faire hors de l'audience.

ART. 157. Il sera dressé un procès-verbal circonstancie,

De tous les actes de la procédure probatoire qui se feront hors de l'audience;

De ceux qui auront lieu à l'audience dans les causes en premier ressort (1).

(1) Titre V de la Loi judiciaire du 15 Février 1816, modifiée te 5 Décembre

Il ne sera dressé qu'un procès-verbal sommaire dans les autres cas. [Voy. Arrêts, no 47.]

ART. 158. Les parties pourront prendre au greffe communication des procès-verbaux, sans être tenues de les faire expédier, sauf en cas d'appel. (Tit. xxi.)

ART. 159. La procédure probatoire terminée, il sera passé à la plaidoirie et au jugement, à la même ou à une prochaine audience, sans nouvelle écriture.

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4. La preuve judiciaire peut être faite par tous moyens légaux. Dans les transactions commerciates faites à distance, on n'exige pas autant de sévérité dans la preuve, qu'en matière ordinaire. (L. Proc. 150.)

2. Celui qui reçoit du vin qui lui est expédié, et paie la voiture et les droits, est présumé avoir goûté et agréé le vin. (C. Civ. 1587.)

3. Le tiré qui, ayant provision à l'échéance, ne paie pas et laisse protester, doit, outre le principal de la lettre de change, les frais de protet et compte de retour. (C. Com. 116, 182.),

Héritiers Chapon contre Michet.

ARRÊT du 3 Juin 1830.—Attendu en droit, que si le demandeur doit faire la preuve de l'obligation dont il réclame l'exécution, il est de principe qu'il peut faire cette preuve par tous les moyens permis par la loi, c'est-à-dire par la preuve littérale, par la preuve testimoniale, par les présomptions dans les cas où la preuve testimoniale est admissible, et par les autres moyens prévus par l'art. 1316 C. Civ.; que le commerce est basé sur la bonne foi, et que l'on ne peut exiger, dans des conventions qui se font à distance, et quelquefois même tacitement, la même sévérité dans les preuves que celle qui est exigée en matière ordinaire;

Attendu qu'il est établi dans la cause, par l'enquête à laquelle il a été procédé devant les premiers Juges, que Chapon a reçu en Février 1828 la quantité de trois pièces de vin étranger, qu'il a payé le prix de la voiture et acquitté les droits d'octroi, et par conséquent est présumé avoir goûté et agréé le vin ; — qu'il ne résulte pas de la déposition du témoin Duperrut, que Chapon ait goûté et agréé les deux pièces de vin d'envoi de Michet, qui étaient restées déposées dans les magasins du dit Duperrut, faute par Chapon d'avoir voulu les retirer au moment de leur arrivée; qu'il n'est pas même allégué que le dit Chapon ait payé le prix de la voiture de ces deux pièces de vin;

Attendu, en ce qui concerne les frais de protêt et de compte de retour, que d'après les considérans ci-dessus, il est constant qu'à l'époque du 10 Août 1828, date de l'échéance de la traite, Chapon était débiteur d'une somme supérieure à celle portée en la dite traite, savoir du prix de l'une des pièces de vin, formant l'envoi de Juillet 1827, et des trois pièces formant celui de Janvier 1828; qu'ainsi, en droit, il avait provision;

La Cour, faisant droit sur les appels principal et incident, dit et prononce qu'il a été bien jugé par le jugement dont est appel, rendu par le tribunal de commerce, le 1° Octobre 1829, sauf dans le chef par lequel Michet a été débouté de ses conclusions en paiement des frais de protêt et compte de retour; réforme sur ce dernier point seulement, le jugement dont est appel, et le confirme dans toutes ses autres dispositions. (Plaid, MM. Trembley et Chaulmontet, Avoc.-Concl. conf. M. Martin, P. G.)

[N° 45.]

PRÉSOMPTIONS.

MATIÈRES COMMERCIALES.

En matière commerciale, les présomptions, comme la preuve testimoniale, sont admissibles en toute cause pour établir la preuve des obligations. (C. Civ. 1353; L. Proc. 150.)

Cabrit et Mercier contre Gruffaz.

ARRÊT du 1er Février 1830.-Considérant en droit que les Juges peuvent, dans tous les cas où la loi admet les preuves testimoniales, recourir à des présomptions graves, précises et concordantes; que dans l'espèce la preuve testimoniale peut être accueillie, s'agissant d'une affaire commerciale; que, des faits constans dans la cause, il résulte des présomptions telles qu'elles viennent d'être caractérisées, lesquelles par leur ensemble établissent que les appelans ont réellement acheté 280 coupes de blé, à prendre dans le tas, déposé chez Avansinoz....

La Cour confirme le jugement dont est appel, rendu par le tribunal de commerce, le 10 Décembre 1829. (1)

[N° 44.]

(Plaid. MM. Cougnard et Trembley, Avoc.)

Article 151.

ORDONNANCE PRÉPARATOIRE.

PREUVE.

De ce que les ordonnances préparatoires ne lient pas les Juges, il s'ensuit que si elles ne produisent pas tout le résultat que les Juges s'en promettaient pour l'éclaircissement de l'affaire, ils peuvent néanmoins aller puiser dans les autres circonstances de la cause, les élémens de leur décision. (L. Proc. 150, 151.)

Mariés Granger-Delisle contre Olivier-Warnery et Boch.

ARRÊT du 3 Mars 1823. Question: Peut-on, pour établir la simulation et la fraude des actes de vente et de quittance, passés entre Boch et les mariés Granger-Delisle, recourir à des présomptions tirées d'autres faits que de celui admis en preuve par l'Ordonnance du 17 Octobre dernier ?

Considérant que suivant l'art. 151 L. Proc. les Juges ne sont pas liés par les ordonnances préparatoires ni leurs suites; qu'ainsi les Juges de première instance, après avoir admis, par l'Ordonnance du 17 Octobre, la preuve du fait particulier, « que Boch avait été aidé par Granger, à St-Genis, à détourner les pièces de vin en question, » ont pu recourir à d'autres faits établis, pour en tirer telles présomptions que de droit ;

La Cour maintient, tant l'Ordonnance préparatoire du 17 Octobre, que le jugement du 12 Décembre, dont est appel.

(Plaid. MM. Cougnard et Lafontaine, Avoc. - Concl. M. Rigaud, Subst.)

(1) Voyez encore l'Arrêt du 12 Septembre 1825, rapporté sur l'art. 307.

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1. On ne peut appeler d'un préparatoire qui défère un serment supplétif, qu'en même temps qu'on appelle du jugement au fond, à moins qu'il n'ait été déféré dans un cas où la loi ne le permettait pas. (L. Proc. 307.)

2. Quand le serment déléré légalement à été prété, il lie le Juge et doit sortir son effet; il n'y a plus lieu à procédure probatoire ultérieure tendant à fin contraire du dit serment. (L. Proc. 151.)

Biord contre Poncet.

Fait. Dans un procès pour prix de marchandises que Poncet dit avoir vendues à Biord, Poncet fait une preuve testimoniale qui est jugée insuffisante, et le tribunal de commerce, pour la compléter, lui défère le serment d'office: il le prête et gagne sa cause. Biord appelle, et demande une contr'enquête pour prouver qu'il n'a point acheté les marchandises de Poncet: celui-ci lui oppose une fin de non-recevoir, tirée de ce qu'il a laissé prêter le serment sans réserve ni protestation.

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ARRET du 8 Mars 1830. 1° Question: L'appel du jugement du 19 Novembre dernier est-il recevable?—2me Question: Le serment d'office a-t-il pu être déféré à l'intimé ?—3me Question : Dans ce cas, y a-t-il lieu d'ordonner la contr'enquête demandée par l'appelant, ou bien de confirmer immédiatement le jugement du 3 Décembre dernier ?

Sur la 1 Question, Considérant qu'il résulte des art. 150 et 151 L. Proc., que la disposition par laquelle les Juges défèrent le serment à l'une des parties, est une ordonnance préparatoire; qu'aux termes de l'art. 307, l'exécution d'une ordonnance préparatoire sans protestation, ne peut être considérée comme un acquiescement; que, dès lors, la fin de non-recevoir contre l'appel n'est pas fondée;

Sur la 2me Question, Adoptant les motifs des premiers Juges;

Sur la 3me Question, Considérant en fait que l'intimé a prêté, le 3 Décembre dernier, le serment qui lui avait été déféré par les premiers Juges;-Considérant en droit que d'après l'art. 151 L. Proc., les Juges sont liés par l'ordonnance préparatoire qui ordonne le serment judiciaire, et par ses suites; que, dans cet état, la demande se trouve pleinement justifiée, et qu'il ne peut plus s'agir de procédures probatoires ultérieures; La Cour déboute l'intimé de la fin de non-recevoir par lui opposée; admet l'appel; et au fond, sans s'arrêter à la demande faite par l'appelant qu'il soit procédé à une contr'enquête, confirme les jugemens dont est appel.

[N° 46.]

(Plaid. MM. Cherbuliez et Chaulmontet, Avoc.)

SERMENT SUPPLÉTIF. PROCÉDURE PROBATOIRE.

1. Le Juge doit fixer le véritable sens de l'aveu judiciaire: en cas de doute, il peut d'office déférer le serment à la partie qui a en sa faveur des présomptions graves, précises et concordantes. (C. Civ. 1356, 1367, 1353.)

2. Comme dans l'Arrêt ci-dessus.

Servoz père et fils contre Derivaz et Bovet.

Jugement du tribunal de commerce du 28 Janvier 1830.-Attendu que Derivaz et Bovet demandent aux Servoz une somme de L. S. 776; que les Servoz soutiennent que, loin d'être débiteurs, ils sont créanciers de Derivaz et Bovet, d'une somme de L. S. 1103.... attendu quant aux 104 louis, que les Servoz soutiennent que Derivaz et Bovet ayant reconnu cette livraison dans le compte qu'ils ont fourni lors de l'intentat dų

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