Page images
PDF
EPUB

procès, il existe contre eux un aveu judiciaire qu'ils ont effectivement reçu les dits 104 louis; que Derivaz et Bovet ne dénient pas d'avoir reçu 104 louis de Servoz, mais qu'ils déclarent en même temps que c'est en cinq paiemens.... qui ne sont point portés sur le premier compte fourni par Derivaz et Bovet, ce qui peut faire présumer que les Servoz font un double emploi en les débitant de 104 louis, et en outre des cinq paiemens susdits; que si, conformément à l'art. 1356 C. Civ., l'aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l'a fait, il ne peut être divisé contre lui; que si les Juges ne peuvent scinder les aveux des parties, ce même article leur impose d'en fixer le sens véritable en les coordonnant avec les antres élémens, faits et circonstances de la cause; que dans l'état actuel de la cause, le serment d'office peut seul conduire à la solution de la question de fait qui divise les parties; en droit, que le serment d'office ne peut être déféré, soit au demandeur, soit au défendeur, que lorsque la demande ou l'exception ne sont pas totalement dénuées de preuves, c'està-dire lorsque la demande ou l'exception sont environnées de présomptions graves, précises et concordantes: (suit l'énumération des faits) qu'il résulte de ces faits des présomptions graves en faveur de Derivaz et Bovet;-le tribunal achemine préparatoirement Derivaz à affirmer par serment qu'il n'a pas reçu de Servoz fils les 104 louis que celui-ci dit lui avoir comptés à son domicile, en personne et sans intermédiaire..... En conséquence le serment est prêté, et jugement définitif est rendu -Appel des Servoz, qui demandent une nouvelle comparution personnelle, et offrent une preuve testimoniale.

ARRÊT du 10 Mai 1830.- Considérant que, pour démontrer que le serment déféré d'office n'est pas autorisé par la loi, et doit être déclaré sans effet, les sieurs Servoz ont employé deux moyens, le premier tiré de l'absence de toute preuve de la part des intimés, et de l'indivisibilité de leur aveu, conformément à l'art. 1356 C. Civ., et l'autre tiré du défaut de présomptions graves, précises et concordantes, telles qu'elles sont exigées par l'art. 1353; adoptant sous ce double rapport les motifs donnés par les premiers Juges;

Considérant que le serment ayant été déféré légalement, d'après la solution de la précédente question, et de plus ayant été prété lors du jugement définitif du 11 Février dernier, on ne peut, en cet état et dans l'espèce, ordonner la comparution et la preuve requises par les appelans, mais on doit décider que le serment produira tout son effet;

La Cour, sans s'arrêter aux fins et conclusions des sieurs Servoz, desquelles ils sont déboutés, confirme l'Ordonnance préparatoire du 28 Janv. dernier, ainsi que le jugement définitif du 11 Févr. suivant. (1) (Plaid. MM. Forget et Trembley, Avoc.)

[merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]

On ne peut s'arrêter à un aveu judiciaire prétendu dont il n'a point été donné acte sur la feuille d'audience, ou dressé procès-verbal, mais qui serait seulement énon

(1) Voyez encore les Arrêts en matière de serment, rapportés sur les art. 172 et 307.

cé dans les considérans d'un jugement. Si la partie à laquelle on l'attribue, régu¬ lièrement interrogée en appel, fait une déclaration contraire, c'est à cette dernière seulement que l'on doit avoir égard. (L. Proc. 108, 157.)

Dizerens contre Turel.

ARRÊT du 26 Septembre 1831.-Attendu en fait que l'aveu judiciaire que l'intimé prétend avoir été fait par l'appelant devant les Juges de première instance, relativement aux trois objets qui auraient été omis en l'inventaire, n'est constaté d'aucune des manières exigées par les art. 108 et 157 L. Proc.; en droit, que l'énoncé d'un fait, compris dans un des considérans posés par les premiers Juges, ne saurait remplacer les actes exigés par la loi, pour constater l'existence de ce fait; attendu encore que dans les réponses personnelles faites à cette audience par l'appelant, il a soutenu que les trois objets dont s'agit, n'ont pas été compris dans l'inventaire, par le motif qu'ils ont été abandonnés par l'intimé, en compensation des défauts et tares qui auraient dû faire diminuer la valeur donnée à d'autres objets déjà inventoriés; que Turel n'a point d'autre preuve de l'omission de ces objets, que l'aveu même de Dizerens, et qu'à forme de l'art. 1356 C. Civ. l'aveu judiciaire ne saurait être divisé contre celui qui l'a fait; d'où il résulte que sur ce chef Turel n'a nullement prouvé l'extrême de son action;....

La Cour réforme le jugement de première instance, en ce qu'il a porté au crédit de Turel 123 fl. 6 s. pour valeur de trois articles par lui réclamés comme ayant été omis en l'inventaire, confirme pour le surplus, etc.

(Plaid. MM. Cougnard et Chaulmontet, Avoc.)

EXPOSÉ des motifs du tiTRE XII.

Jusqu'à présent nous avons supposé que les pièces, les écritures, les plaidoiries des parties mettraient le tribunal à même de juger de suite le fond de la cause, et de terminer la contestation par une décision définitive.

Dans l'état actuel de la législation, c'est le cas le plus ordinaire, la plupart des causes ayant pour objet le paiement de dettes justifiées par écrit, l'interprétation d'actes, l'exécution de contrats, des questions de droit.

[ocr errors]

Mais si toute la cause repose sur un fait soutenu par une partie et dénié par l'autre, sans aucun écrit à l'appui de l'une des deux assertions contraires, le premier besoin, le premier devoir du Juge sera de constater la réalité ou la fausseté de ce fait, fondement de l'action, par l'un des moyens de preuve que la loi et les circons tances lui permettront. Ce sera en recourant tantôt à l'in

terrogatoire des parties, à leur serment, tantôt à l'audition des témoins, tantôt à l'avis d'experts, qu'il cherchera à obtenir la vérité et à percer les nuages qui la dérobent à ses yeux.

Nous réservons l'expression de jugement pour la décision qui termine le procès. Nous appelons ordonnance préparatoire, celle par laquelle le Juge prépare cette décision, et détermine l'espèce de preuve qui sera employée. Nous appelons procédure probatoire la marche à suivre pour faire cette preuve.

Il est certain que si tout procès eût exigé ce genre d'ordonnance et de procédure, nous aurions dû en traiter avant le jugement, et qu'il y aurait ici un vice sensible de méthode. Mais ce n'est point ce qu'offre la pratique judiciaire.

Le nombre des procès où ces ordonnances, ces procédures sont nécessaires, est très-faible comparativement à celui des procès qui n'en ont aucun besoin; il ne s'élève pas au dixième de la totalité des jugemens.

Du 15 Avril au 31 Décembre 1816, le tribunal civil a prononcé 254 jugemens, dont 20 pour procédures probatoires. En 1817, sa juridiction s'étant étendue sur le nouveau territoire, ce tribunal a rendu 891 jugemens, dont 83 pour procédures probatoires.

[[ Les tableaux détaillés des opérations des tribunaux pour les sept années 1829-1835, nous donnent des résultats bien différens: il en résulte que, sous la loi de procédure, le nombre des procédures probatoires ordonnées est considérable.

Au tribunal civil, il y a eu pendant ce temps 480 comparutions personnelles ordonnées, 265 sermens, 311 enquêtes, 493 expertises, 97 transports sur les lieux; total, 1,646 procédures probatoires (sans compter les vérifications d'écritures, dont la non-indication forme une fâcheuse lacune dans les tableaux); ce qui, sur 3,617 causes jugées contradictoirement, fait 1 procédure probatoire ordonnée sur 2 affaires.

Au tribunal de commerce il y a eu, pendant le même temps, 418 comparutions personnelles ordonnées, 105 sermens, 260 enquêtes, 108 expertises, 32 représentations de livres de commerce; total, 923 procédures probatoires (sans compter les vérifications d'écritures); ce qui, sur 2,144 causes jugées contradictoirement, fait 1 procédure probatoire ordonnée sur 2 affaires.

En appel, il y a eu 35 procédures probatoires ordonnées sur 165 causes jugées contradictoirement, soit 1 sur 4 affaires, proportion moitié plus faible que celle des causes de première instance; mais il ne faut pas perdre de vue que beaucoup de causes d'appel ont déjà été en première instance l'objet de quelque procédure probatoire.

Quelquefois diverses procédures probatoires sont employées simultanément dans une cause qui présente plusieurs chefs distincts, ou successivement quand la première à laquelle on a eu recours n'a pas produit le résultat qu'on en attendait.

Dans les calculs ci-dessus, et dans ceux des titres suivans, je n'ai comparé le nombre des procédures probatoires qu'à celui des causes jugées contradictoirement, parce que celui des causes jugées par défaut où il y a une procédure probatoire, est extrêmement faible. ]]

La méthode voulait ainsi qu'en prenant pour règle ce qui suffisait aux cas les plus ordinaires, nous en traitassions d'abord, pour passer ensuite au mode d'exeption que requéraient des cas moins fréquens.

Ce titre contient les règles communes à toutes les procédures probatoires, et les six titres suivans celles qui s'appliquent plus particulièrement à chacune d'elles.

Les règles communes tendent toutes à la simplification des formes et à l'économie des frais. Ces règles s'expliquent d'elles-mêmes. Une seule, celle qui établit la publicité comme mesure générale, mérite une attention particulière; mais c'est en abordant chaque procédure probatoire que nous en ferons ressortir l'importance et l'ef– ficacité.

TITRE XIII.

DE L'INTERROGATOIRE DES PARTIES.

SECTION I.

DU MODE ORDINAIRE De procéder.

ART. 160. Les faits, sur lesquels les parties devront être interrogées, ne seront point circonstanciés dans l'ordonnance qui admettra l'interrogatoire.

ART. 161. Chaque partie, avant l'interrogatoire de l'autre et hors de sa présence, pourra expliquer au tribunal les faits sur lesquels elle désire que celle-ci soit entendue.

ART. 162. Les parties seront interrogées par le Président sur chaque fait séparément et sur toutes les circonstances propres à la manifestation de la vérité.

Elles répondront sans se servir d'aucun projet écrit. [ Voyez Arrêts, n° 48 à 51.]

ART. 163. Les parties pourront être entendues en l'absence l'une de l'autre ; au dit cas, elles seront ensuite confrontées.

ART. 164. Les Juges, en demandant la parole au Président, pourront adresser aux parties les questions qu'ils estimeront convenables.

Le ministère public aura la même faculté.

ART. 165. Les parties pourront s'adresser réciproquement des questions et des observations par l'organe du Président et sans s'interrompre.

ART. 166. Le Greffier lira à chaque partie sa déclaration, s'il en est dressé un procès-verbal circonstancié (Art. 157), sinon le Président lui en rappellera la teneur.

Il lui sera demandé si elle y persiste, ou si elle a quelque changement ou addition à faire (1).

ART. 167. Si la partie refuse de répondre, ou si, sans justifier d'aucun empêchement légitime, elle ne comparaît pas en personne, les Juges pourront tenir contre elle les faits pour avérés. [Voyez Arrêts, no 52.]

(1) Voyez l'Arrêt du 27 Septembre 1821, rapporté sur l'art. 233.

« PreviousContinue »