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<< aux arrestations et investigations néces<< saires. >>

Le lendemain 8, une scène poignante se passa dans cette ville, maintenant plongée dans une sécurité absolue. Un vieillard porteur d'un sabre d'infanterie, fut saisi par un gendarme aux abords de la cité. Amené devant le procureur de la République, il fut soumis par lui à un court interrogatoire que la ce n'étaient pourtant pas des républiinterrompit en demandant l'application de la loi martiale. On plaça ce malheureux, abêti par la peur, contre le mur de l'Esplanade; et il allait être fusillé, lorsque le substitut Niepce, songeant aux otages encore au pouvoir des insurgés, demanda un sursis.

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foule cains!

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M. de Romand, qui n'avait eu aucune objection à faire contre cette exécution aussi terrible qu'inutile, comprit la sagesse des paroles du prudent substitut. Il fit conduire en prison le vieillard, dont on reconnut peu de jours après la complète innocence et que l'on mit en liberté.

Le 9 décembre, M. Pastoureau (1), et le

(1) M. Pastoureau avait été nommé préfet du Var le 2 décembre. Retenu par les troubles de Draguignan, M. de Romand, auquel il succédait, dut attendre son arrivée au chef-lieu avant de se rendre au nouveau poste qui lui était assigné.

colonel Trauers, avec onze compagnies du 50me, et plusieurs chevaux, arrivèrent enfin au cheflieu. La marche de M. Pastoureau avait été foudroyante. Les soldats étaient harassés!

Arrivé à Cuers dans la nuit du 5 au 6, il était retourné le 6 à Toulon, pour proclamer l'état de siége dans le département. Dans la nuit du 6 au 7, il était reparti de Toulon, emmenant avec lui cinq compagnies de renfort, quinze gendarmes, neuf sous-officiers et soldats du train d'artillerie; ce qui, réuni au huit compagnies laissées à Cuers, formait un effectif de quinze compagnies. Le 7, la troupe s'était mise en marche vers le Luc, pendant qu'une compagnie allait occuper Hyères. Le préfet avait traversé d'abord le Puget, et fait dans ce village plusieurs prisonniers, parmi lesquels Dolonne Auguste, Dolonne Ferdinand, Gasquet Pierre, Pierre Porte, Agarrat dit Baptiston, etc... Je cherche en vain les griefs de l'autorité contre le Puget. Un citoyen, Dolonne l'aîné, y ébaucha seulement plusieurs projets de réorganisation municipale, projet qu'il alla mûrir à Lambessa (1), et pourtant le nombre des

(1) M. Pessoneaux, maire du Puget, fut dit-on, en grande partie l'auteur de ces arrestations. Les journaux du temps ont prétendu que M. Pessoneaux avait été chassé du Puget, et d'aucuns ont ajouté... à coups de fusil. Cette allégation est absolument inexacte.

captifs s'éleva à trente-six. Il en fut de même à Carnoules, à Pignans, à Gonfaron... Les prisonniers suivaient à pied les troupes.

De Gonfaron, le préfet était entré au Luc, sans rencontrer aucune résistance. Un séjour de cinq heures dans ce village lui permit d'augmenter le chiffre des arrestations. Les soldats commençaient à être exaspérés contre les républicains. A leur arrivée au Luc, ils avaient arrêté un malheureux estropié du nom de Viort. Conduit devant un officier, Viort, malgré les instances de ce dernier, ne voulut fournir aucun renseignement sur les faits insurrectionnels. Pour le contraindre à parler, on lui lia les deux pouces par une corde, serrée de plus en plus à mesure que Viort s'obstinait à se taire. Sous le coup de cette douleur sans nom, Viort déclara avoir fait partie de la commission révolutionnaire, avoir concouru à l'arrestation des otages... Viort était absolument étranger à l'insurrection!

M. Pessoneaux ne courut aucun danger. A la nouvelle du coup d'État, les républicains se contentèrent de lui demander la clef de la mairie; et M. Pessoneaux la livra très-gracieusement... Il fallut plus tard légitimer les mesures arbitraires prises contre des citoyens inoffensifs, et on inventa la fable du maire expulsé brutalement de sa municipalité.

Avec Dolonne, les citoyens Agarrat Auguste, Rostan Louis, Pierre Alexis, furent aussi déportés en Afrique.

C'est du Luc que le préfet avait gagné Draguignan. Il était temps! Ses soldats éclopés, réclamaient à grands cris un jour de repos.

IX

J'ai quitté la colonne à Vidauban, au moment où Duteil venait la rejoindre. Dans sa brochure intitulée « Trois jours de généralat » il dit que de Brignoles, d'où il était parti avec dix-sept volontaires dont un revêtu du costume de spahis, il arriva à Flassan où tout le monde était sous les armes. Il y soupa et se dirigea vers le Luc, que les insurgés venaient de quitter. Au Luc, on lui fournit deux chevaux. Il en prit un, et donna l'autre au spahis, le seul patriote brignolais resté fidèle à sa fortune. Dans le trajet de Brignoles à Flassans, les idées politiques et stratégiques de Duteil avaient paru si singulières à ses compagnons, que ces derniers jugèrent sage de l'abandonner

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