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tion ne leur céde en rien, ni pour l'aptitude au travail, ni pour les facultés de l'efprit, ni pour les dons du génie, & que la France eft plus riche en population; ils favent que notre terre eft plus féconde, que nos productions font plus variées, que notre fol offre de lui-même la plupart des matières premières que leur commerce va chercher au-delà des mers; ils favent que chez nous une étendue plus vaste, une pofition plus heureufe fe prêteroit à prefque toutes les cultures, & que notre climat est à la zône tempérée, ce que cette zône elle-même eft aux autres climats.

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Ainfi donc, les deux peuples ont chacun leurs avan tages; mais ceux des Anglois, nous pouvons les acquérir, & les nôtres ne feront jamais qu'à nous. La nature nous a plus favorifés que nos rivaux; joignonsy, comme eux, la liberté & la loi. Donnons auffi à la vivacité françoise un libre effor, dans une jufte direction; appelons auffi le génie de l'invention à notre aide, ou feulement ne le repouffons point; il eft indigène en France, il habite parmi nous qu'il foit libre enfin; qu'il rentre dans fes droits, & bientôt nous le reconnoîtrons à fes bienfaits (1); bientôt, il faura découvrir à mille citoyens des tréfors cachés au fond de leur pensée; bientôt, n'en doutons point, il viendra dans nos ateliers feconder nos efforts, faciliter nos travaux (2), perfectionner nos ouvrages, infpirer, (de (1) Voyez la note 6. (2) Voyez la note 7.

préférence peut-être) nos plus modeftes artisans, & les faire paffer foudain, d'un longue obfcurité à tout l'éclat de la fortune & de la renommée. Cet efpoir n'eft point une illusion; un mot peut le réaliser, & les Anglois alors n'auront plus qu'à fe glorifier de nous avoir montré la route du bonheur.

Mais, dira-t-on, pour les égaler faut-il donc les imiter? Il le faut, pour les furpaffer. S'il n'étoit qu'un chemin pour arriver au bien, nous en écarterions-nous, parce que d'autres y feroient entrés? Ils n'ont point eu ce vain fcrupule, ces fiers & fages Américains, ces dignes amis de toute liberté, qui, dans leur nouvelle conftitution, ont adopté la légiflation de l'induftrie angloife, comme le plus fûr moyen d'affurer auffi l'affranchiffement & la profpérité de leur industrie! Eh! quoi cette manie d'imitation, dont nous avons été trop fouvent & trop juftement accufés, ne portera-t-elle jamais que fur des objets frivoles ? & s'arrêtera-t-elle au moment où l'imitation devient raifonnable? Tout adopter eft d'un enfant, tout rejeter eft d'un infenfé. La fageffe ennoblit l'imitation même : celui qui n'imite qu'après avoir examiné, fe rend indépendant de fes modèles, & ne les fuivroit point dans leurs erreurs; il ne fuit perfonne, il marche à la perfection ; &, comme difoit un ancien, s'il eft ami de Platon, il l'eft encore plus de la vérité.

1

SUR les inventions & découvertes en tout genre d'induftrie,

Rendu le jeudi foir 30 décembre 1790.

Et fanctionné par le roi le 7 janvier 179'.

L'ASSEMBLÉE

'ASSEMBLÉE NATIONALE, Confidérant que toute idée nouvelle, dont la manifestation ou le développement peut devenir utile à la fociété, appartient primitivement à celui qui l'a conçue; & que ce feroit attaquer les droits de l'homme dans leur effence, que de ne pas regarder une découverte industrielle comme la propriété de fon auteur; considérant en même temps combien le défaut d'une déclaration pofitive & authentique de cette vérité, peut avoir contribué jufqu'à préfent, à décourager l'industrie françoise, en occafionnant l'émigration de plufieurs artistes distingués, & en faisant paffer à l'étranger un grand nombre d'inventions nouvelles, dont cet empire anroit dû tirer les premiers avantages; considérant enfin que tous les principes de juftice, d'ordre public & d'intérêt national, lui commandent impérieufement de fixer déformais l'opinion des citoyens françois fur ce genre de propriété, par une loi qui la confacre & qui la protège, décrète ce qui fuit :

ARTICLE PREMIER.

Toute découverte ou nouvelle invention, dans tous les genres d'industrie, eft la propriété de fon auteur; en conféquence, la loi lui en garantit la pleine & entière jouiffance, fuivant le mode & pour le temps qui feront ci-après déterminés.

I I.

Tout moyen d'ajouter à quelque fabrication que ce puiffe être, un nouveau genre de perfection (1), fera regardé comme une invention.

I I I..

Quiconque apportera le premier en France une découverte étrangère, jouira des mêmes avantages s'il en étoit l'inventeur.

que

I V.

Celui qui voudra conferver ou s'affurer une propriété induftrielle, du genre de celles énoncées aux précédens articles, fera tenu,

1o. De s'adreffer au fecrétariat du directoire de fon département, & d'y déclarer par écrit, fi l'objet qu'il préfente eft d'invention, de perfection ou feulement d'importation.

2o. De dépofer fous cachet une defcription exace des principes, moyens & procédés qui conftituent la

(1) Voyez la note 8.

découverte, ainfi que les plans, coupes, deffins & modèles qui pourroient y être relatifs, pour ledit paquet être ouvert au moment où l'inventeur re cevra fon titre de propriété.

V.

Quant aux objets d'une utilité générale, mais d'une exécution trop fimple, & d'une imitation trop facile, pour établir aucune fpéculation commerciale, & dans tous les cas, lorfque l'inventeur aimera mieux traiter directement avec le gouvernement, il lui fera libre de s'adreffer, foit aux affemblées administratives, foit au corps législatif, s'il y a lieu, pour confier fa découverte, en démontrer les avantages, & folliciter une récompenfe.

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V I.

Lorfqu'un inventeur aura préféré, aux avantages perfonnels affurés par la loi, l'honneur de faire jouir fur le champ la nation des fruits de fa découverte & invention, & lorfqu'il prouvera, par la notoriété publique, & par des atteftations légales, que cette découverte ou invention eft d'une véritable utilité, il pourra lui être accordé une récompenfe fur les fonds destinés aux encouragemens de l'industrie.

VII.

Afin d'affurer à tout inventeur (1) la propriété &

(1) Voyez la note 9.

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