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DU COMITÉ D'IMPOSITION,

Sur l'établissement du droit d'enregistre

ment.

IMPRIMÉ PAR ORDRE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALF.

MESSIEURS,

Votre comité de l'impofition vous a expofé l'ordre & le plan de fon travail dans un premier rapport fait par M. de la Rochefoucauld le 18 août dernier.

Vous avez enfuite entendu les rapports qui vous ont été présentés, relativement à la contribution foncière, à la contribution mobiliaire, & à la partie du 14 Décembre 1790.

A

revenu public établie fur la confommation du tabac. Nous vous entretiendrons aujourd'hui des détails relatifs aux impôts appelés fi improprement droits domaniaux.

Je ne m'étendrai point fur la nature de l'impôt en général. Ses principes & fes élémens vous font parfaitement connus; & vous avez eu occafion de les développer dans la difcuffion fur la contribution foncière.

Je vous rappelerai feulement que tous les impôts fe réduifent à quatre claffes: ils portent, ou fur la perfonne, ou für les biens-fonds, ou fur les marchandifes & denrées, ou fur les actes de la fociété civile.

Ces quatres branches du revenu public ne devroient avoir rien de contradictoire entre elles, quoique la contribution foit directe dans quelques parties, indirecte dans d'autres.

Lorfque vous vous êtes occupés de la contribubution foncière, vous avez reconnu, Meffieurs, que pour être établie dans toute fon étendue, il falloit avant tout, qu'elle fût analyfée dans fes rapports avec les autres parties de la richeffe individuelle qui doivent néceffairement concourir à cet impôt; que le cultivateur, malgré l'eftimation qui réduiroit un certain nombre d'années à une année commune, ne fe verroit cependant pas fans quelques alarmes dans la dépendance immédiate & périodique des faifons; que l'étude & la réflexion lui apprendroient trop lentement pour le fuccès d'une opération preffante & déja retardée, qu'en effet le riche donne à la fociété une quantité de fubfiftances égale à l'excédant de fes befoins phyfiques; qu'il rend au fifc, fous d'autres formes, la même fomme de contributions qu'il auroit directement acquittées ; & qu'ainfi il paye dans une proporiton relative, quoiqu'il ne paroiffe pas participer auffi

immédiatement à l'impôt, fous la dénomination gé nérique.

Ces idées, il faut en convenir, fuppofoient une foule de réflexions intermédiaires, de connoiffances approfondies; & l'on ne peut élever une nation toute entière, à cette hauteur, qu'avec les précautions du doute qui conduifent le plus furement à la vérité.

Vous avez auffi penfe, Meffieurs, que l'existence des corporations donnoit aux claffes induftrieufes les moyens de maintenir, par un accord très-facile entre elles, le taux des profits, & le prix des confommations, à un point trop élevé pour que les propriétaires de terres, s'ils étoient chargés feuls du poids de l'impôt, fuffent affurés de recevoir quelque indemnité fur leurs jouiffances & leurs confommations. Enfin vous avez voulu éviter que, dans un temps où l'intérêt de l'argent étoit très-élevé, où une foule de capitalistes mirent fur des placemens très-lucratifs l'impôt les épargnât absolument pour aggraver le fort du propriétaire.

C'eft d'après des vues auffi fages, Meffieurs, que vous avez cru devoir établir la fomme de l'impôt territorial dans des proportions modérées, & appeler l'impôt indirect à fon appui, pour compofer les revenus de l'état.

L'impôt indirect offre d'ailleurs des idées confolantes. Etant prefque toujours volontaire, il n'est jamais exagéré. Le pauvre voit, dans les confommations du riche, un fupplément de contribution perfonnelle; & cette confidération morale n'eft peut-être pas indifférente aujourd'hui.

C'est d'après ces réflexions que nous avons rédigé le projet de décret que nous vous foumettons fur les droits appelés fi improprement domaniaux.

Nous avons pensé que tous les actes, qui constatent

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des difpofitions entre les membres d'une fociété, intéreffoient la fociété toute entière, puifque la fureté de tous eft le résultat de la fureté de chacun.

Que les précautions contre la mauvaise foi étoient un des premiers devoirs du pouvoir législatif; que ces précautions exigeant des formalités qui entraîneroient néceffairement des frais, ils devoient être fupportés par ceux qui avoient recours à cet établiffe

ment.

Que cette conciliation entre le but moral & l'intérêt du fifc étoit une conception très-raifonnable, qui n'éprouveroit jamais de contradiction, lorfque l'arbitraire & la vexation n'en fouilleroient point la pureté.

Qu'une partie des actes civils étoit fufceptible d'un droit fixe & invariable, & qu'une autre partie devoit fupporter un droit proportionnel aux valeurs qu'ils énonçoient.

Que faire payer par le riche une maffe de contribution plus forte, non-feulement parce qu'il répéteroit plus fouvent les actes relatifs aux difpofitions de fa fortune, mais auffi parce que les valeurs qui feroient l'objet de ces actes, feroient plus confidérables, c'étoit adopter un fyflême conforme aux vrais principes de l'impôt, puifque diminuer le droit en raifon de l'évaluation des fommes, ainfi qu'il étoit établi par les lois burfales, c'étoit précisément favorifer le riche & pefer fur le pauvre.

Qu'enfin les grandes villes où les relations font plus multipliées, & les richeffes plus communes, acquitteroient la plus forte partie de cet impôt, & que c'étoit par de femblables moyens qu'elles pouvoient concourir au foulagement des campagnes.

Que ces principes, Meffieurs, font différens des motifs qui ont fucceffivement introduit des droits abfurdes, inventés par le génie malfaiteur de la finance

& exigés fous les formes les plus vexatoires de la tyrannie féodale !

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Ici le fifc ne permettoit d'échanger un bien-fonds contre un autre, qu'en exigeant un droit des deux contractans & par là nuifoit à la liberté des échanges. Là, fous le nom de droits réservés, on percevoit des droits dus jadis à des officiers fupprimés, droits dont le motif chimérique devenoit infultant. Tantôt on confondoit la chofe & la perfonne ; tantôt au contraire un roturier, propriétaire d'un bien noble, payoit comme noble les actes perfonnels, & les droits de franc-fief comme roturier. Des abonnemens accordés à la faveur altéroient les produits légitimes. Une feule fentence donnoit lieu à cinq ou fix perceptions différentes. Des enfans qui avoient le malheur de renoncer à la fucceffion de leur père payoient, fous prétexte d'une publicité idéale, des droits infiniment plus forts que fi la fucceffion eût été utile & qu'ils l'euffent acceptée. Les communautés des campagnes ne pouvoient, après les formalités les plus ferviles, parvenir à couper leurs bois qu'en payant vingt deniers de taxation. C'étoit un larcin qui tomboit fur la misère. Enfin, Meffieurs, il falloit toute la patience des peuples & toute l'induftrie de leurs tyrans pour foutenir les produits d'une légiflation tarifiée dans trois cents articles, & que dix mille arrêts ont vainement interprétée.

Le nouvel ordre ne peut fe concilier avec un régime fi défaftreux; mais en même temps le befoin abfolu des finances, en fupprimant jufqu'à la trace des abus, vous force d'en conferver les produits.

C'est pour opérer ces effets que votre comité vous propofe de décréter l'abolition, à compter du premier janvier prochain, des droits du contrôle des actes & des exploits, infinuations, centième denier des im

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