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gétal et animal), les êtres soient émanés du degré | fuyant dans des cavernes; mais l'habitation géo-
le plus imparfait pour s'élever au rang le plus graphique des peuples a montré qu'ils n'étaient
perfectionné, le nègre, comme inférieur, doit nullement colorés en raison de la chaleur et de
avoir précédé l'homme blanc. De même, la plu- | l'éclat des diverses contrées du globe. Il y a au
part des races noires ou brunes d'animaux sont contraire des hommes de race blanche, même
plus brutes, grossières ou sauvages que les dans le milieu de l'Afrique, décrits par Léon
blanches, plus molles et civilisées (comme on l'Africain, par Marmol, Shaw, Bruce, Adanson
l'observe dans les genres des cochons, des et des tribus nègres plus ou moins noires, soit à
chiens, etc.). Ainsi, l'homme blanc, affaibli sans la terre de Diémen, à la Nouvelle-Zélande, sou-
doute par la culture intellectuelle et cette éduca- mis à des froids rigoureux; et enfin, sous les
tion sociale qui le garantit de la rudesse des élé- plus horribles climats polaires habitent des ra-
ments, en revanche y gagne un plus grand déve- ces à cheveux et yeux noirs, à peau très-brune,
loppement de sensibilité et d'intelligence que n'en comme les Esquimaux, les Lapons, les Kamts-
peut obtenir le sauvage et le nègre endurci sous chadales, à côté des blancs et blonds Islandais
le soleil brûlant de l'Afrique. Il est donc facile et Finnois. Nous avons exposé ces faits détaillés
de prouver, par l'organisation anatomique, que dans notre Histoire naturelle du genre hu-
le nègre se rapproche plus des singes que notre main (2e édition). Cette couleur âtre, hui-
race blanche; que son cerveau est comparative-leuse, salissante d'ailleurs, pénètre toutes les
ment plus étroit que le nôtre, tandis que les humeurs du nègre, ses chairs, son sang, son
nerfs qui en émanent avec la moelle épinière | cerveau; sa bile est plus foncée que chez les
sont plus volumineux; aussi, est-il moins destiné blancs. Peut-être l'odeur forte des nègres en
à la pensée qu'aux actes de l'animalité. En effet, sueur émane de la même cause. Toutefois, les
ses hémisphères cérébraux, plus petits, offrent os, les dents, conservent leur blancheur, ainsi
moins de circonvolutions, tandis que de grands que le liquide reproducteur, contre l'opinion de
tubercules quadrijumeaux, un cervelet considé- quelques anciens. Les négrillons ne naissent
rable avec une grosse moelle allongée annoncent pas noirs à la vérité, mais déjà plus colorés que
une propension plus marquée vers les fonctions les blancs, surtout à leurs parties génitales, et
corporelles sensitives que pour les facultés in- ils brunissent sans être exposés au soleil. Il est
tellectuelles. De même, Camper a montré, par la bien vrai que l'action de cet astre hâle et noircit
comparaison de l'angle facial, que le blanc, dans plus ou moins la peau des blancs, mais elle ne
les races les plus perfectionnées, approchait de produit pas ces effets sur les poils des quadru-
l'ouverture droite de 90°, tandis que le museau pèdes ou les plumes des oiseaux, car il y a des
du nègre descendait même au-dessous de 80, et espèces blanches sous les cieux les plus ardents,
que le singe orang s'abaisse à 65, pour se con- et les Européens, les Asiatiques, de race blan-
fondre avec l'ignoble mufle des brutes s'avançant che originaire, ne deviennent réellement noirs
vers la pâture, tandis que le cerveau et le front qu'à la suite d'alliances avec les nègres. Les
se recule, comme si la pensée cédait à la glou-anatomistes admettent pour cause le pigment
tonnerie. Aussi l'animal est-il plutôt fait pour
manger que pour réfléchir. Les organes du goût
et de l'odorat, plus développés chez le nègre que
dans le blanc, prennent, comme ceux des sexes,
un plus puissant ascendant sur son moral qu'ils
n'en ont sur le nôtre; le blanc est donc plus
destiné à la vie intellectuelle et civilisée que le
nègre.

§ II. De la coloration des diverses lignées
nègres et de ses causes. Des castes ou mé-
langes avec d'autres races, mulâtres, métis,
petits-blancs, etc.

On a cru généralement que la couleur des nè-
gres résultait de l'action continuée des rayons
solaires sur ces habitants de l'Afrique; l'on a re-
gardé les Éthiopiens comme à demi-rôtis, détes-
tant le soleil ainsi qu'on le disait des Troglodytes,

noir qui se dépose en couche dans le tissu mu-
queux, dit de Malpighi, sous l'épiderme, et pé-
nètre dans les poils ou cheveux pour les teindre
de sa nuance (différente selon les races humai-
nes). Ce pigment, selon Lecat, P. Barrère et
d'autres auteurs, émane de la bile ou des cap-
sules atrabilaires gonflées d'un suc noir. On
trouve chez quelques animaux atteints de méla-
nose, ou maladie noire, des dépôts ou poches

tuberculeuses de matière noire analogue à celle
d'un sang veineux très-foncé, comme l'a fait
voir M. Breschet; c'est une sorte d'excrétion de
carbone surabondant, d'après le sentiment de
Blumenbach, et dont manquent au contraire les
albinos (voy.). Meckel père faisait émaner de la
partie corticale brune du cerveau du nègre cette
coloration qui imprègne tout l'organisme; mais
il faut reconnaître, selon nous, une disposition

native, comme entre le lapin à chair blanche et le lièvre à chair noire, à moins de recourir, avec Ovide, à la chute de Phaéton:

Inde etiam Æthiopes nigrum traxisse colorem Creditu.

Il est certain que des peuples à peau blanche ne | supporteraient point l'action vive des rayons d'Afrique sans être frappés de ces inflammations appelées coups de soleil. Aussi, ce réseau muqueux noir du nègre garantit le derme, et H. Davy observe que la chaleur rayonnante est absorbée, comme la lumière, par les surfaces noires, qui la convertissent en chaleur sensible. Il s'ensuivrait que cette couleur noire augmenterait encore la chaleur dans le nègre (comme le font pour nous les habits noirs en été). En effet, M. Douville, en son voyage dans l'Afrique centrale, a expérimenté que les nègres ressentent plus de chaleur corporelle que les blancs de même âge et de même sexe, et que le travail | rend cette chaleur encore plus insupportable aux nègres. De là suit une autre considération : l'ardeur du tempérament doit en être augmentée; aussi, la puberté est précoce chez les nègres et les négresses surtout; dès l'âge de dix à douze ans, elles arrivent à la nubilité, et la liberté dont elles jouissent les fait bientôt devenir mères. Par la même cause, et par la lubricité naturelle à cette race, les nègres des deux sexes vieillissent plus promptement et s'usent plus que les blancs. Ces peuplades seraient excessivement nombreuses si tous leurs enfants vivaient; mais l'incurie et la paresse, qui les laissent périr parfois dans l'indigence au milieu d'un sol fertile, faute de soins et de culture, les petites guerres qu'ils se livrent dans leur barbare anarchie, la traite dans laquelle les pères vendent leurs enfants pour du rhum ou des colliers de verroterie, diminuent notablement cette population. Il faut dire aussi que la corruption et la férocité sont poussées parfois à leur comble chez diverses tribus nègres, et qu'elles ne prennent de notre civilisation trop souvent que les vices, comme le disait Mollien des habitants du Foula-Toro, et d'autres voyageurs, des Gallas, des Anzicos, etc. Les Ashanties, les Fantées, emploient des barbaries atroces, soit par vengeance contre leurs ennemis, soit par les plus affreux sacrifices humains à leurs fétiches, gris-gris divinisés, avec l'ivresse et tous les débordements. Comme ils sont peu sensibles eux-mêmes, ils ont des supplices cruels, et l'anthopophagie ne leur est pas inconnue encore aujourd'hui, S'il existe des nè

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suite de cette inertie morale que les nègres esclaves, rendus à la liberté, périssent en plus grand nombre que les blancs, faute de travailler et de s'assurer une existence à venir. Cette mortalité, plus considérable parmi les affranchis que chez les esclaves, a été surtout constatée aux États-Unis. De 1820 à 1831, il est mort à Philadelphie 1 blanc sur 42, tandis qu'il succombe 1 nègre libre sur 22 nègres affranchis. Les nègres esclaves trouvant des secours, ne fût-ce que par intérêt de la part de leurs propriétaires, périssent en bien moindre quantité. — Les préventions sur la noblesse de la peau blanche, dans les colonies, sur celle des noirs, tiennent à plusieurs causes qui ne sont pas uniquement des préjugés. On comprend déjà la supériorité morale incontestable de la race blanche; elle est telle que, nulle part sur le globe, les nègres n'ont pu réduire des hommes blancs en servitude tandis que ceux-ci, en moindre nombre et moins robustes de corps, vont saisir, au fond de l'Afrique, les nègres pour les enchaîner, les dompter dans les colonies. Les sauvages mêmes du nord de l'Amérique ont assujetti des nègres et les font travailler; les barbares de la NouvelleZélande et autres peuplades polynésiennes réduisent partout en servitude les tribus nègres de leurs îles, jusqu'à les sacrifier dans leurs festins.

Dès les anciens âges, on qualifiait de blancs les hommes libres et de noirs les esclaves; de là viennent les noms de Russie Blanche, Valachie Blanche, etc. Les Huns furent jadis distingués en blancs, ou libres, et en noirs (quoique de couleur blanche), comme serfs. On n'a pas même, aux États-Unis d'Amérique, obtenu l'égalité démocratique entre le descendant d'un nègre et le blanc, quoique le mélange réitéré avec cette dernière race, par des générations successives, ait effacé la tache originelle. Un édit de Louis XIV, en 1704, avait fait déchoir de la noblesse quiconque s'alliait aux négresses, et même aux mulâtresses. Ce préjugé règne encore dans les républiques espagnoles d'Amérique. Il serait heureux, sous quelques rapports, que cette opinion arrêtât le débordement immoral de cette foule de petits-blancs, hommes de couleur, bâtards, la plupart sans moyens de vivre, privés d'éducation, qui encombrent les colonies des Européens et en menacent l'existence, par suite

de la promiscuité des races. On a dit de plus que | courage en effet paraît, ainsi que le génie, l'al'homme blanc était franc, candide, loyal, tan- panage des races blanches, dominatrices et cividis que le noir était faux, rusé ou fourbe, comme lisatrices du globe, tandis que les souches noila plupart des serviles menteurs et fripons. Le res n'ont donné que des esclaves.

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| vant, les nègres ont été achetés, réduits en esclavage et chargés des travaux les plus pénibles: les anciens Égyptiens avaient des eunuques noirs à leur service, comme les Assyriens et les Perses; Tyr et Sidon trafiquaient de ces esclaves; les Carthaginois les employaient dans le com

Le mot saltatras (saut en arrière) désigne un retour vers la race noire. Les mélanges du sang noir avec d'autres tiges, comme celle des Américains naturels, ou Caraïbes, ou avec les Indiens de l'Asie orientale, engendrent des individus de nuances variées qui portent des dénominations différentes selon les contrées, comme nous l'a-merce, à l'exploitation des mines. Hannon, navons exposé dans notre ouvrage sur le genre vigateur carthaginois, nous apprend dans son humain. Ce sont ces hommes de couleur qui Périple que les nègres étaient, dans ces époques dominent Haïti et qui menacent l'avenir des éta- reculées, ce qu'ils sont encore aujourd'hui, de blissements européens. N'ayant ni l'intelligence | misérables peuplades végétant sous leurs cabaperfectionnée des blancs, ni la soumission labo- nes, trouvant difficilement leur nourriture avec rieuse des nègres, dédaignés des premiers, haïs quelques bestiaux, cultivant à peine quelques des seconds, comme voulant usurper sur ceux-ci | champs de mil, et soumises à de petits despotes. les droits des blancs sans en posséder des titres Les conquêtes des Grecs, celles des Romains, légitimes, ils forment une caste ambigue sans en Afrique, rapportèrent des esclaves en Euétat fixe, et plus prompte à la révolte que dispo- rope. Les Éthiopiens, ou nègres, furent frésée au travail. On sait que cette teinte foncée quents à Rome et à Constantinople au temps du du nègre réside dans le tissu réticulaire placé Bas-Empire. Les invasions des Mores et des sous l'épiderme: celui-ci est une concrétion de | Arabes, les irruptions des Sarrasins, disséminè. la mucosité (dite de Malpighi) laquelle transsude rent en tous les lieux de la domination musulcontinuellement par les petits vaisseaux du cho- mane les peuples noirs de l'Éthiopie. Dès la fin rion, et forme le pigment noir. Cette couleur du XIVe siècle, les navires portugais rapportèn'est encore, dans le négrillon naissant, qu'une rent aux îles Canaries des esclaves nègres pour nuance jaunâtre qui, brunissant peu à peu, de- la culture des terres. En 1481, les Portugais bâvient d'un beau noir luisant dans l'âge de la tirent un fort sur la côte d'Afrique, et vers 1520, force, et qui se ternit enfin ou pâlit dans la vieil- Alonzo - Gonzalès fit l'un des premiers ce comlesse, et lorsque les cheveux grisonnent. De merce de sang humain, qui a subsisté jusqu'à même, dans ses maladies, le nègre se décolore, nos jours. Dès 1508, les premiers esclaves nègres il devient livide. Les nègres sont d'autant plus furent transportés à Saint-Domingue par les Esforts, actifs et vigoureux qu'ils sont d'un beau pagnols; en 1510, le roi d'Espagne, Ferdinand noir dans leur race. Leurs cicatrices restent le Catholique, envoya le premier, pour son grises. compte, des nègres au Pérou, peu après sa conquête. On attribue à Barthélemi de las Casas,

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§ III. De l'esclavage et de la traite des nègres. illustre défenseur des Américains, le conseil

Des négriers, etc.

Dès le temps des Phéniciens, et même aupara

d'employer les nègres à leur place pour des travaux pénibles. L'évêque Grégoire a tenté de

laver de ce reproche l'évêque de Chiapa. Quoi | et que celui-ci rendît service à celui-là. Dites si qu'il en soit, la traite fut légalement autorisée jamais aucun peuple produirait les grands moen Espagne d'abord, sous Charles-Quint en 1517, numents de la civilisation sans cette hiérarchie et approuvée par le pontificat de Léon X, puis et ce concours nécessaire des travaux par le comsous le règne d'Élisabeth en Angleterre, et sous mandement des uns et l'obéissance des autres? Louis XIII en France. Tous ces princes l'adop- Les armées sont des hiérarchies nécessaires pour tèrent sous le prétexte que les noirs n'étant pas la défense des États. Mais s'il y a des inégachrétiens, ils ne pouvaient pas prétendre à la lités naturelles entre les races d'hommes, et s'il liberté d'homme. Les Génois, entre autres, se en faut d'artificielles dans la société, elles doilivrèrent aussi avec ardeur à ce commerce pour vent se compenser par des bienfaits réciproques. les autres nations par un trafic interlope. — Les | Le christianisme, à cet égard, d'accord avec la partisans de l'esclavage soutiennent, avec Aris- philosophie, présente la Divinité comme égale tote, qu'il y a des esclaves par nature, c'est-à- pour tous les humains; et, comme dit Sénèque, dire des êtres inférieurs en intelligence, ou in- ne sommes-nous pas tous plus ou moins cosercapables de se gouverner, comme les enfants, viteurs les uns des autres sur la terre? Ce n'est et par cette raison, condamnés à la subordina- que par une absurde concession que des juriscontion. A quel titre, ajoutent des publicistes, pos- sultes ont osé dire : servi nascuntur. Quelle conséderions-nous l'empire sur d'autres êtres, ou trée barbare que celle où le sein maternel est les animaux, si ce n'était par cette supériorité frappé de servitude! Rien au monde peut-il justid'industrie et d'habileté que nous accorda la fier l'attentat de donner des fers à cet innocent nature pour les gouverner? Si l'ordre éternel a qui en sort? — Quoi qu'il en soit, les Européens voulu que le bœuf et le cheval, malgré leur force, | firent la traite en Afrique, au nord et au sud de se courbassent sous le joug de l'homme; si les la ligne équatoriale, à la côte d'Angole, Cabinde, faibles, les incapables, cèdent aux plus forts en Loango, Malimbe, Saint-Paul de Loando et Saintintelligence, leurs protecteurs-nés, la femme à Philippe de Benguela. On remarquait que les l'homme, le plus jeune au plus âgé, de même le Mandingues étaient les meilleurs, c'est-à-dire les nègre doit obéir au blanc. N'est-ce pas la nature plus dociles. Les Éboës, ou Ibos, sont les plus qui a rétréci son cerveau et lui a distribué avec stupides et timides; au contraire, les Koromanplus de parcimonie les plus hautes facultés? Jus- tyns du royaume de Juida sont fiers, sauvages que parmi les races inférieures, des insectes et rebelles. La Côte-d'Or fournissait les plus même, et les républiques des fourmis, des ter- forts esclaves, et en plus grande quantité. Dans mites, des abeilles, n'y trouve-t-on pas des exem- le canal de Mozambique, on a fait aussi la traite ples d'ilotes, de parias, de nègres esclaves, ré- des Macquois, des Monjavas, des Sofalas, et duits par la nature à des travaux pour élever autres tribus. Enfin, on obtient encore beaules édifices, amasser des provisions, prendre soin coup d'esclaves du nord de l'Afrique par le de la progéniture dans l'intérêt général de l'État? Fezzan et le Bournou, mais ils arrivent exténués La nature établit l'inégalité et la subordination de longs voyages en caravanes à travers les dédes races herbivores sous les carnivores; le serts. Les Wangaréens ne sont pas estimés autant monde est une république immense dans la que les esclaves de Haouassa, plus industrieux quelle les rangs de chaque espèce sont assignés; et moins stupides. Plusieurs autres contrées chacune doit s'y classer ou coordonner d'après donnaient des nègres de qualités diverses, et sa valeur relative, sa puissance réciproque, sans distingués par un tatouage ou des déformations qu'on ait droit d'en murmurer. Que prétendent et modes imprimées sur leur peau selon les donc, ajoutent ces philosophes, les défenseurs pays. On achète ces esclaves par des échand'une égalité chimérique? Si elle existait, leges, avec du fer en barres, de l'eau-de-vie, du monde même ne pourrait plus subsister. Otez tout empire sur les animaux, et l'agriculture périt, et, sans elle, l'homme retourne sauvage dans les bois. Otez toute hiérarchie dans l'État, partagez également les biens, et personne ne voudra travailler ni obéir; tout mobile d'action | sociale est anéanti, et la cité se dissout, la famille même tombe dans l'anarchie par l'égalité. La nature, plus sage, a donc établi une inégalité pour l'ordre, afin que le fort protégeât le faible, | donner des présents, et les courtiers d'esclaves.

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tabac, de la poudre à canon et des armes, des quincailleries, surtout des étoffes de laine ou de coton bariolées de couleurs vives, rouges, etc. Au Congo, des pères ont vendu leurs enfants; ailleurs, des nègres reçoivent comme monnaie le petit coquillage dit cauriou pucelage (cypræa moneta), pêché aux îles Maldives; sur d'autres côtes, on préfère les pagnes; outre ces objets, les rois, les chefs de chaque contrée, se font

échauffés dans l'air méphitique et empesté des soutes de ces navires, surtout pendant la nuit, et lorsqu'on ferme les écoutilles. Aussi ces infortunés hurlent de toutes parts qu'ils étouffent; les femmes tombent en défaillance, et il périt beaucoup d'individus faute d'air, outre le chagrin, la terreur et la nourriture grossière de fèves, de mil ou d'ignames, qu'on leur distribue, ainsi que l'eau, avec parcimonie. - Bientôt, la plupart sont saisis d'une dyssenterie pernicieuse, le seringot, parce que ces malheureux lâchent leurs excréments liquides tout à coup, et, pour comble de misère, chaque fois qu'ils éprouvent ce besoin, il faut que toute la chaîne de leurs compagnons d'infortune se lève, en sorte que nuit et jour ils n'ont point de repos. L'appareil lugubre de leurs fers, et ces marches de galériens, la nuit dans leurs étroites demeures, empêche tout sommeil. Joignez-y les cris effrayants des souffrances, et qu'on pense aux résultats des besoins pressants de ces misérables, dont les déjections fétides salissent et leurs voisins et ceux placés au-dessous d'eux! Au milieu de ce croupissement de malpropreté, de cette dégoû

les comptoirs européens, exigent des droits ou rétributions qui augmentent le prix des nègres: un bel esclave de cinq pieds cinq pouces revenait, sur la côte de Guinée, à 600 francs. Les jeunes femmes coûtaient 400 francs. Chaque année, la traite enlevait à l'Afrique environ 100,000 individus. Saint-Domingue en recevait 25,000, car il est certain que les colonies dévorent les nègres, soit que la servitude, les peines et les travaux dont ils sont accablés les minent insensiblement, soit qu'ils manquent d'assez de femmes pour assurer leur reproduction, ou que ces nouveaux climats et leur genre de vie ne la favorisent pas.—Que l'on se représente des compagnies de négriers débarquant avec des armes, des ferrements ou des chaînes, et quelques marchandises pour la traite, sur les côtes de la Gambie, à Gorée, à Sierra-Leone, et autres stations. L'on avance par caravanes chez des peuples simples, qui ouvrent leurs cabanes hos- | pitalières à ces étrangers. Ceux-ci ont excité les petits rois ou chefs de tribus à des guerres pour faire des prisonniers et les livrer à la traite. | C'est dans la nuit que se font à l'improviste les expéditions contre les nègres. On enivre les mal-tante putridité, née de l'encombrement, la fièvre heureux captifs; on les enchaîne; on surprend des enfants, on séduit des négresses, on attire les individus écartés et sans défiance par des présents légers de verroterie; on pille de petits hameaux trop faibles pour résister; on enlève tantôt une mère pour attirer son fils, et tantôt le fils pour avoir sa mère. On pénètre ainsi jusqu'à 1,200 milles dans les terres. On attache les captifs à une chaîne; on leur saisit le cou dans une fourche, dont la queue longue et pesante les empêche de fuir. Ces bandes, semblables à celles des galériens, sont ramenées de 200 à 300 lieues de l'intérieur, à travers d'affreux déserts, en portant l'eau, la farine, les graines ou racines nécessaires pour subsister. Si quelques femmes ou enfants ne peuvent suivre, on les abandonne au désert, et ceux qui parcourent les mêmes lieux y ont trouvé leurs cadavres desséchés, que rongent les bêtes sauvages. — Arrivés sur la côte, ces malheureux y sont entassés par bandes ou chaînes dans les vaisseaux négriers, jetés à fond de cale, chacun sur des cadres si étroits qu'il leur est impossible de se retourner avec leurs ferrements; ils n'occupent que le même espace qu'ils auraient dans leur tombeau, et ne respirent d'air qu'autant qu'il le faut pour prolonger leur douloureuse vie, car on en a accumulé jusqu'à 1,500 sur un seul bâtiment. Qu'on juge de la vapeur épaisse de transpiration et d'odeur infecte qui s'exhale de tant de corps

s'allume, une contagion dévorante moissonne comme la peste, en peu de jours, une multitude de negres. Un pauvre moribond, gisant à côté d'un compagnon de sa misère, demande en vain quelques gouttes d'eau pour se rafraîchir; il faut qu'il se lève avec la chaîne; on le frappe s'il ne peut marcher; il périt sur la place, ou de maladie ou de mauvais traitements. - Telle est l'effrayante mortalité causée par l'entassement de tant de corps exhalant une sueur fétide, par des déjections empestées, par l'aspect des mourants, à fond de cale, respirant leur pourriture, que les médecins n'ont pas hésité à reconnaître dans ces causes l'origine du typhus nautique et de la fièvre jaune, dont la malignité dévaste les populations, et fait si chèrement payer aux blancs leur atrocité. -En effet, tel vaisseau négrier qui a chargé 1200 à 1500 esclaves sur la côte d'Afrique perd, en moins de deux mois de traversée pour le trajet aux colonies d'Amérique, plus des deux tiers de sa cargaison: aussi est-il plus avantageux de charger moins d'esclaves à la fois, et de les bien traiter, parce qu'on en perd beaucoup moins. On cherche à les distraire par une mauvaise musique, et en les faisant danser sur le pont. Mais lorsque le désespoir saisit ces nègres, ils se précipitent dans la mer si l'on n'y prend garde. Pour prévenir les révoltes, on les tient enchaînés; à la moindre résistance, on les attache à des barres de fer. La

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