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Du

Journalisme

son Histoire,

son rôle politique et religieux

PARIS A

H. OUDIN, éditeur

10, rue de Mézièreş

1902

HENRY MURSE STOPHENS

UNIV. OF

INTRODUCTION

I

Lecture du journal, première occupation de la vie civilisée.

L'oisif, dans son lit; le bourgeois, dans sa salle à manger; l'ouvrier et l'ouvrière, dans la rue, allant au travail, déplient la feuille imprimée qui leur apporte des nouvelles envoyées de tous les endroits de la terre.

Traçant le Tableau de Paris sous Louis XVI, Mercier nous montre les «liseurs de gazettes, assis sur » un banc, aux Tuileries, au Palais-Royal, à l'Arse»nal, sur le quai des Augustins et ailleurs, trois fois » la semaine assidus à cette lecture ». Nous sourions de ces curieux qui ne possédaient que tous les deux jours des informations et des chroniques: cependant ils étaient bien plus favorisés que les contemporains de Renaudot (1631), qui ne connaissaient que la Gazette hebdomadaire, petit recueil où les événements se suivaient sans ordre, dépourvus d'explications.

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Il nous semble que nous ne pouvons pas concevoir une existence dont l'horizon ordinaire fut très longtemps restreint à celui de la cité, du village, du quartier... Au fond, le contraste entre les deux époques est-il si complet?

Du temps de Louis XIV, nous voyons à Paris une institution qui a excita la verve des écrivains satiriques ou comiques et la mauvaise humeur des auteurs sérieux. Il y avait alors, et d'ancienne date, des gens qui faisaient métier de distribuer des nouvelles. Sur divers points de Paris existaient des centres d'information, non seulement pour les affaires de France, mais aussi pour les choses extérieures : c'étaient le jardin du Luxembourg, le jardin du Palais-Royal, le jardin des Tuileries, la grande salle du Palais de Justice, l'Arsenal, le cloître des Célestins, le cloître des Augustins et un grand nombre de cafés. Le fondateur du Mercure galant, Donneau de Visé, a décrit l'aspect de ces réunions en 1672, pendant la guerre de Hollande.

<< Les uns, disait-il, apportent des lettres de leurs amis, les autres de leurs parents. Les autres ont commerce avec quelques commis des ministres et les autres avec des gens attachés au service des princes, et qui sont même quelquefois dans leur confidence. Il s'en trouve aussi qui ont des parents auprès des ambassadeurs que le Roi a dans les pays étrangers; et il y en a même qui connaissent ceux des autres souverains qui sont auprès de Sa Majesté, et ceux-là apprennent souvent d'eux beaucoup de choses qu'il serait difficile de savoir par d'autres voies. J'ai vu, pendant cette campagne, des nouvellistes qui avaient, toutes les semaines, deux fois, des lettres de banquiers de Hollande, qui apprenaient des choses fort curieuses et qui ne pouvaient venir de l'armée que long

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