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cès-verbal une contravention punissable, attendu que la saisie n'avait pas été faite dans un magasin, atelier, boutique, halle, foire ou marché; mais la boutique des marchands colporteurs est partout où ils portent leurs marchandises; ils ne peuvent avoir plus de privilége que le marchand stationnaire: il serait déraisonnable, en effet, d'admettre que les marchands colporteurs pussent être impunément porteurs de faux poids ou de fausses mesures; ce serait favoriser et encourager la fraude..

XXVIII. On demande si l'acheteur comme le vendeur se rendent également coupables de la contravention, en ce sens que l'un et l'autre deviennent passibles des peines prononcées par le présent article; la question est délicate : les articles 424 et 479 laissent planer, en effet, beaucoup d'incertitude sur ce point, attendu qu'en même temps que l'article 424 renvoie à l'art. 479 par sa dernière disposition, au cas d'emploi de poids et mesures prohibés, il a déclaré dans la première que, si le vendeur et l'acheteur se sont servis, dans leurs marchés d'autres poids et mesures que ceux qui ont été établis par une loi de l'État, l'acheteur sera privé de toute action contre le vendeur qui l'aura trompé par l'usage de poids ou de mesures prohibés, sans le déclarer passible d'aucune autre peine; mais l'article 479 parle en général de ceux qui emploieront des poids et mesures différens de ceux qui sont établis par les lois en vigueur, et l'on peut dire que celui qui achète, comme celui qui vend, en font réellement emploi. Il nous semble, toutefois, que ce serait aller trop.loin que d'étendre la disposition de l'article 479 à l'acheteur comme au vendeur; car, c'est bien évidemment le vendeur qui fait emploi des poids et mesures : l'acheteur ne fait

que consentir à ce qu'ils soient employés, lorsque c'est le vendeur qui les fournit si c'était l'acheteur, la contravention lui deviendrait commune, et c'est dans ce sens que les articles cités du Code doivent être entendus.

XXIX. La loi sur l'établissement des nouveaux poids et mesures a ordonné que les marchands en auraient dans leurs boutiques et magasins, ce qui a donné lieu à une

foule de contestations : ainsi, par exemple, on a voulu y assujétir les pâtissiers qui s'y sont refusés; attendu qu'ils ne vendent ni au poids ni à la mesure, et leur refus a été autorisé par deux arrêts de la Cour de cassation du 4 juin 1813; de sorte que l'on doit tenir en principe, que la loi ne s'applique qu'aux boutiquiers qui vendent au poids ou à la mesure.

XXX. Faire le métier de deviner, pronostiquer ou d'expliquer les songes, c'est se rendre coupable de la contravention prévue au no 7 de l'article 479, qui peut emporter la peine de l'emprisonnement aux termes de l'article 480, et qui doit toujours être réprimée par cette peine au cas de récidive (Art. 482): les instrumens, ustensiles et costumes servant à en favoriser l'exercice doivent de plus être saisis et confisqués: (Art. 481.)

Mais il faut avoir fait le métier; d'où suit, que cette circonstance constitutive du délit doit être déclarée à la charge du prévenu, au jugement de condamnation.

XXXI. Faire métier d'une chose, c'est exercer une profession à dessein d'en retirer un bénéfice quelconque, telle en est la définition exacte; et comme la loi est toujours présumée avoir parlé le langage vulgaire, l'on doit en conclure que c'est dans ce sens que doit être entendu le no 7 de l'article 479, qui deviendrait dès lors sans application, au cas où l'on n'en aurait fait qu'un simple amusement: on dit bien, dans un sens figuré, que tel individu fait tel métier, pour dire qu'il est dans l'habitude de faire telle ou telle chose; mais il y aurait trop de danger de prêter aux lois un pareil sens; cependant, l'on pourrait s'en trouver fort mal de ne pouvoir invoquer pour sa défense que l'histoire de Joseph ou celle de ce prince, si fameux dans les fastes du 19e siècle, dont le prétendu savoir en ce genre sert d'alimens à toutes les gazettes.

XXXII. Il ne faudrait pas remonter à des temps bien reculés pour voir honorer, de la plus haute protection, les devins et ceux qui pronostiquaient et interprétaient les songes, ni remonter bien loin non plus, pour les voir brûler comme sorciers; mais d'autres temps, d'autres moeurs :

aujourd'hui, si ceux qui font le métier de deviner ne sont plus protégés, au moins ne les fait-on plus brûler; l'on se contente de les condamner à des peines de simple police.

Que l'on favorise l'instruction du peuple, et bientôt les prétendus sorciers auront perdu tout leur expire; ce ne seront plus que des jongleurs sans conséquence: mais ce n'est pas sous ce seul rapport que l'instruction du peuple doit être favorisée; si l'on veut qu'il exécute les lois, il faut lui donner les moyens de connaître ce qu'elles permettent et ce qu'elles défendent; et comment le pourra-t-il s'il n'a pas même les premiers élémens de l'instruction? Lorsque le législateur a supposé que personne ne doit être présumé avoir ignoré la loi à laquelle il a contrevenu, il a supposé, par suite et nécessairement, que la connaissance aura pu lui en parvenir, et cette supposition doit s'évanouir devant la preuve que le prévenu ne pouvait même la connaître. Il y a, sans doute, des actions criminelles par elles-mêmes, et que la loi doit punir; mais il en est aussi qui ne deviennent crime ou délit que parce que la loi y attache ce caractère, et c'est de celles-là seulement que nous entendons parler. Les législateurs de tous les temps ont été tellement convaincus de la vérité que la loi n'est obligatoire, pour les citoyens, qu'autant qu'elle leur est con, qu'ils ont toujours exigé qu'il y ait eu volonté de commettre le crime pour le rendre punissable; et peut-il y avoir volonté de commettre un délit, lorsque l'on ignore même que l'acte auquel on se livre est qualifié délit par la loi, et lorsqu'il ne devient tel que par une disposition formelle de la loi? Et n'est-ce pas une supposition gratuite que d'en faire résulter la connaissance d'une promulgation tellement secrète qu'elle est ignorée de toutes autres personnes que des adeptes? Il n'y a d'autre remède à ce grave inconvénient, que la publication et l'affiche dans toutes les communes, des lois qui sont rendues, au lieu de se borner à en ordonner la simple insertion dans les registres des corps administratifs et judiciaires.

nue

XXXIII. Les bruits ou tapages injurieux ou nocturnes

n'auraient été le fait que d'une seule personne, que la contravention rentrerait dans la disposition du n° 8 de l'article 479.

Il suffirait de même qu'ils eussent été injurieux, lors même qu'ils auraient eu lieu pendant le jour, pour les faire rentrer dans sa disposition; et pareillement qu'ils eussent eu lieu pendant la nuit, lors même qu'il n'auraient pas été injurieux, s'il y avait eu trouble apporté à la tran-* quillité publique; ce qui est la condition de la loi : d'où suit, que cette circonstance doit être mentionnée, en termes formels, au jugement de condamnation.

XXXIV. L'âge, le sexe, la qualité des personnes, nj leur bonne conduite antérieure ne peuvent servir d'excuses va→ lables aux prévenus de contraventions de cette nature; sauf aux juges saisis de modifier ou d'aggraver la peine suivant les circonstances, en se rènfermant dans le maximum et le minimum établis par le présent article du Code: sic jud. le 21 novembre 1811; cependant le tribunal pourrait ne faire application aux prévenus que de peines de simple police, aux termes de l'article 463; mais il doit alors dé-clarer qu'il entend faire application dudit article, et ne pas fonder la condamnation qu'il prononce sur les dispositions de l'article 479 : sic jud. par arrêt du 31 octobre 1822, qui annula un jugement, qui n'avait prononcé contre les prévenus qu'une amende de 6 francs, en déclarant faire application dudit article 479. L'arrêt motivé « sur ce que le ju»gement attaqué avait appliqué l'article 479,et que néan>> moins il n'avait prononcé que la condamnation à l'amende » de six francs, en quoi il avait violé la disposition dudit >> article. >>

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XXXV. S'il y avait eu des coups portés, l'affaire sortirait des dispositions de l'article 479, pour rentrer dans celle de l'article 311: sic jud. le 30 octobre 1813.

XXXVI. Les complices des bruits ou tapages injurieux ou nocturnes, tendant à troubler la tranquillité publique doivent être punis des mêmes peines que leur auteur, ce qui est particulier à ce genre de contravention, les articles 59 et 60 n'ayant déclaré punissable que la complicité des cri

mes et délits; c'est ce qui résulte des dispositions finales de l'article 480, et comme la loi ne détermine, pour ce cas, aucune des circonstances constitutives de la complicité, c'est aux dispositions de l'article 60 qu'il faut recourir pour savoir s'il y a eu réellement complicité punissable; c'est-àdire, si les faits qui se trouvent déclarés à la charge des prévenus de complicité constituent bien réellement une complicité légale; de sorte qu'il ne suffirait pas de déclarer le prévenu coupable de complicité, les faits dont on prétend la faire résulter doivent être précisés au jugement de condamnation; mais il fut jugé, le 5 juillet 1822, par voie de cassation, qu'il y a complicité suffisamment établie, dans le seul fait d'avoir été du rassemblement, qu'il n'est pas nécessaire d'y avoir été porteur des instrumens sourds ou discordans qui avaient produit le tapage: il s'agissait dans l'espèce, d'un charivari.

XXXVII. L'article 479 n'ayant précisé ni pu préciser les circonstances constitutives des bruits ou tapages injurieux ou nocturnes qui peuvent tendre à troubler la tranquillité publique, a laissé au pouvoir discrétionnaire des tribunaux d'en apprécier le véritable caractère, d'après l'instruction et les débats.

XXXVIII. Le 12 septembre 1822, la Cour de cassation eut à juger la question de savoir, si un menuisier qui s'était mis à l'ouvrage, le 22 août, à 4 heures du matin, avait commis la contravention énoncée au no 8 de l'article 479, en troublant le repos de ses voisins; le tribunal de police s'était décidé pour l'affirmative, et il avait, en conséquence, condamné le prévenu à un franc d'amende et aux dépens pour tenir lieu de dommages-intérêts à la partie plaignante, mais sans avoir motivé son jugement sur aucun article du Code pénal, ce qui était une contravention formelle aux dispositions de l'article 163 du Code d'instruction criminelle aussi la cassation du jugement, sous ce rapport, ne présentait-elle aucune difficulté ; mais elle ne fut pas prononcée sur cet unique motif, la Cour examina la question principale, et elle la résolut en ces termes : « Attendu » qu'aucune loi n'a déterminé l'heure avant laquelle il

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