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VI. L'article 453 aggrave ou modifie la peine suivant le lieu où le délit a été commis, et les distinctions qu'il établit étaient dictées par la nature même des choses.

VII. Si les animaux de la qualité de ceux mentionnés en l'article 452 avaient été tués par suite de violation de clóture, ce serait le maximum de la peine qui devrait être infligé au coupable; mais il ne suffirait pas que l'animal eût été tué dans un enclos; car il pourrait l'avoir été dans un terrain clos, sans qu'il y eût eu violation de clôture; et c'est la violation de clôture, que l'article 453 a considérée comme étant circonstance aggravante du délit, sans s'occuper du cas où ç'aurait été dans un enclos qu'il aurait été commis.

VIII. S'il n'y avait eu que blessures, ce qui ferait sortir le délit de l'article 453, pour le faire rentrer dans Ja disposition de l'article 3o, tit. 2 du Code rural, il y aurait eu violation de clôture, que le tribunal saisi ne serait pas dans l'obligation d'appliquer à son auteur le maximum de la peine, l'article cité du Code rural n'ayant pas prévu le cas ; il en aurait la simple faculté : d'où suit, que soit qu'il l'appliquât ou non au maximum ou au minimum, il n'y aurait pas motif suffisant de prononcer l'annulation de son jugement.

ARTICLE CCCCLIV.

Quiconque aura, sans nécessité, tué un animal domestique dans un lieu dont celui à qui cet animal appartient est propriétaire, locataire, colon ou fermier, sera puni d'un emprisonnement de six jours au moins et de six mois au plus.

S'il y a eu violation de clôture, le maximum de la peine sera prononcé.

OBSERVATIONS.

I. La peine prononcée par cet article, comme celle qui l'a été par le précédent, n'est applicable qu'au cas où l'ani

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mal a été tué sans nécessité, et c'est au tribunal qui se trouve saisi, d'apprécier les circonstances dont le prévenu prétend faire résulter cette nécessité, le Code n'ayant précisé aucune de celles qui doivent la constituer.

Lorsque la nécessité dans laquelle le prévenu peut s'être trouvé n'est pas justifiée, et qu'il demeure constant que l'animal a été tué sur un terrain dont le maître de l'animal était propriétaire, locataire, colon ou fermier, il doit être condamné à six jours au moins d'emprisonnement et à l'amende, aux termes de l'article 455; bien entendu toutefois qu'il ne s'élève pas en sa faveur de circonstances atténuantes, car alors, et si le dommage causé n'excédait pas 25 fr., le tribunal pourrait n'appliquer que des peines de simple police, aux termes de l'article 465.

II. Quant à ces mots de l'article 454: s'il y a eu violation de clôture, ils doivent être entendus dans le sens que nous avons dit dans nos observations sur l'article précédent.

III. S'il n'y avait eu que blessures, il n'y aurait pas délit aux yeux de la loi, mais une simple action en dommagesintérêts pour la réparation du dommage causé, hors le cas où ce seraient des chiens de garde qui auraient été blessés, qui rentre dans l'application de l'article 30, tit. II du Code rural.

IV. Pour rentrer dans les dispositions de l'article 454, il faut que l'animal ait été tué, dans un lieu dont le maître de l'animal était propriétaire, locataire, colon ou fermier: sic jud., le 1er août 1822 : la condition est impérative, et elle a été sagement établie; car les maîtres des animaux domestiques ne doivent pas les laisser divaguer; et lorsqu'ils se le permettent, c'est à eux que la première faute est imputable.

V. Par animaux domestiques, l'on ne doit pas entendre les volailles que l'on élève dans les basses-cours; le Code rural, tit. 2, article 12, autorise même tout propriétaire, détenteur ou fermier à les tuer lorsqu'elles divaguent sur sa propriété, et au moment qu'elles y causent du dommage.

Le Code rural ne dit pas si celui qui a tué la volaille sur son héritage, au moment du dégât, doit la laisser sur

place ou s'il peut l'emporter et en faire son profit; mais il ne pourrait être blâmé de l'avoir emportée, sauf à la rendre au cas où elle serait réclamée, si la réclamation en était faite en temps opportun; mais alors toute action lui serait déniée, en réparation du dommage causé; il se serait payé par ses mains: si la volaille tuée avait été laissée sur place, le propriétaire de l'héritage aurait l'exercice légal de son action pour demander en justice la réparation du dommage qu'elle aurait pu lui causer.

VI. Ce que nous venons de dire de la volaille reçoit une application nécessaire aux lapins, lorsqu'ils n'ont pas été attirés par fraude et artifice sur la propriété d'autrui : le propriétaire qui les aurait tués sur son fonds, ne pourrait même être tenu de les rendre à leurs anciens maîtres: c'est la disposition de l'article 564 du Code civil, car les lapins ne sont plus que du gibier, aussitôt qu'ils quittent la garenne où ils sont établis, ponr divaguer dans la campagne.

pas

VII. L'article cité du Code civil, renferme les mêmes dispositions, à l'égard des pigeons et des poissons qui passent dans un autre colombier ou dans un autre étang, sans y avoir été attirés également par fraude et artifice; d'où suit, que le législateur ne considère pas les pigeons comme des animaux domestiques, ce qui doit être entendu dans ce sens que les pigeons dont il est ici question sont de la nature de ceux que l'on nomme vulgairement fuyards ou de colombier; car les pigeons dits de volière, sont bien évidemment dans un état de domesticité, en ce que l'on ne leur voit pas quitter les lieux où ils ont été élevés pour aller s'établir dans les volières d'autrui, lorsqu'ils n'y sont pas attirés par artifice. Cependant, l'auteur du Recueil général de jurisprudence française, range tous les pigeons, sans distinction, dans la catégorie de la volaille; mais un arrêt rendu le 30 octobre 1815, a sagement distingué les espèces, en déclarant que l'on ne peut considérer comme animaux domestiques, que ceux qui vivent réellement en état de domesticité; et que les pigeons de colombiers qui sont réputés gibier, par l'article 2 de la loi du 4 août 1789,

aux époques fixées par les communautés pour les tenir enfermés, éloigne toute idée de leur supposer ce caractère.

VIII. Mais les pigeons n'étant réputés gibier qu'aux époques où ils ont dû être tenus renfermés, et la loi n'ayant autorisé de les tuer que sur son propre terrain, en résulte-t-il que s'ils étaient tués en tout autre temps, et sur le terrain d'autrui, il y eût délit punissable? Le dommage qu'ils pourraient avoir causé donnerait-il lieu à des poursuites en justice, pour en obtenir la réparation?

Que le maître des pigeons soit tenu de réparer le dommage qu'ils peuvent causer à autrui, nous n'en doutons pas cependant, nous ne connaissons encore qu'un seul jugement émané d'un tribunal de paix qui l'ait ainsi jugé. La question s'agita bien devant la section civile de la Cour de cassation, au mois de janvier 1824; mais elle ne fut pas jugée on argumentait de plusieurs arrêts rendus contre des propriétaires de garennes, dont les lapins avaient causé du dommage sur les terres voisines, et l'on soutenait qu'il y avait même raison de décider.

Quant au point de savoir si le fait de laisser divaguer ses pigeons dans le temps des récoltes constitue une contravention punissable, la cour de cassation y statua, par l'arrêt déjà cité, du 30 octobre 1813, en prononçant l'annulation d'un jugement, qui avait condamné le maître du colombier à l'amende de police; l'arrêt de cassation motivé: << sur ce que les tribunaux de police ne peuvent connaître » que des faits auxquels la loi attribue le caractère de con» travention et dont elle soumet les auteurs à des peines; Que l'article 2 de la loi du 4 août 1789, qui veut » que les pigeons soient enfermés aux époques fixées par » les communautés ; que, durant ce temps, ils soient >> regardés comme gibier, et que chacun ait le droit de » les tuer sur son terrain, est restreint à cette mesure » répressive; qu'il ne qualifie pas de délit ou de contra»vention le fait du propriétaire qui laisserait sortir et >> vaguer ses pigeons dans le temps prohibé, et qu'il n'at» tache à ce fait aucune sorte de peine; Que si, de la

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» combinaison des art. 3 et 12, tit. 11 de la loi du 28 sep»tembre 1791, il résulte que les dégâts causés par les >> bestiaux de toute espèce laissés à l'abandon, sont classés » parmi les délits ruraux, il est évident que, sous la dé>> nomination de bestiaux, ne sont compris que des qua. »drupèdes domestiques; que ces expressions, bestiaux » laissés à l'abandon, ne peuvent s'appliquer à des oiseaux » tels que les pigeons, qui, voués en quelque sorte par » leur nature et leur instinct à la divagation, ne sont pas >> susceptibles d'être gardés à vue, et ne sauraient, consé» quemment, jamais être considérés comme laissés à l'a>> bandon; que si les pigeons ne peuvent être rangés dans » la classe des bestiaux dont parle l'article 12 de la loi de » 1791, il n'est pas plus permis de les supposer compris » dans le même article sous la dénomination de volailles, » dénomination qui ne s'applique à d'autres animaux qu'aux >> oiseaux qu'on tient en état de domesticité, à des oiseaux >> "de l'espèce de ceux qu'on élève et qu'on nourrit dans les >> basses-cours; Qu'il s'ensuit de ces observations, que, » dans l'espèce, P... était sans motifs légitimes pour tra» duire D... à la police, à raison du dommage qu'il a » pu éprouver par un fait auquel la loi n'attache pas le >> caractère de contravention..... etc. »

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IX. Nous saisissons l'occasion qui se présente pour dire encore quelques mots sur la chasse et sur le port d'armes de chasse sans permis, dont nous nous sommes déjà occupés au premier volume, page 207 et suivantes. La Cour de cassation a jugé par plusieurs arrêts, que le port d'armes de chasse et la chasse considérée en elle-même, doivent être punis chacun de la peine qui leur est propre, de sorte qu'en pareille matière, les peines doivent être cumulées et que les dispositions de l'article 365 du Code d'instruction criminelle, ne reçoivent pas d'application à l'espèce : que la dérogation à cet article pour le cas particulier, résultait de la combinaison du décret du 4 mai 1812 et de la loi du 30 avril 1790; mais la Cour a pareillement et constamment jugé, que la dérogation à cet article, n'était que pour ce seul cas; de sorte qu'il y aurait fausse application de la

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