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que toutes ses clauses concourent à expliquer; que l'expression pour jouir des revenus, sa vie durant, indique manifesteinent l'objet de la disposition, et explique ce que le testateur a voulu dire quand il a parlé d'institution d'héritier; que ces mots héritier et institution, surtout sous la législation actuelle, n'emportent pas nécessairement avec eux l'idée du transport de propriété; que leur sens peut être restreint par des expressions postérieures, et qui énoncent directement et explicitement la volonté du testateur; et que celles employées ici par le testateur annoncent assez que ce n'est qu'en l'usufruit de ses biens qu'il a institué son frère, puisque l'usufruit n'est autre chose que le droit de jouir, pendant un temps limité, des revenus ou produits d'un bien dont la propriété appartient à

un autre ;

«< Attendu que cette interprétation n'est contrariee par aucune clause du testament; que, si le testateur y parle des bieus qu'il a laissés à son frère, cette expression se rapporte naturellement au mode dans lequel il les lui a laissés, c'est-à-dire, pour jouir de leurs revenus sa vie durant; que, s'il le prie, et ceux qui viendront après lui, de les conserver, ce n'est, de sa part, qu'une prière qui n'a rien de commun avec la charge dont parle la loi, une prière qui s'adresse aussi bien au dernier de ceux de ses parens qu'il nomme dans son testament, qu'à son frère lui-même, et qui, inspirée par l'affection qu'il portait à ses biens, s'applique autant à leur bonne administration qu'à leur conservation dans sa famille ;

་་

que

« Attendu que, lors même que la clause qui institue André pour jouir des revenus sa vie durant, pourrait être susceptible d'une autre interprétation que celle qui la restreint à un legs d'usufruit, celle-ci n'en devrait pas moins prévaloir sur l'autre, parce que, comme le dit l'arrêt de la Cour de cassation, du 24 mars 1829: « l'obligation de conserver et de rendre n'étant « pas littéralement exprimée, la disposition ne peut être an<< nulée dans le cas où, contenant évidemment une substi<«<tution, il ne serait pas possible de lui donner un autre sens,» parce que, lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui qui maintient l'acte que dans celui qui le détruit, parce que, sans des preuves démonstratives, un testateur ne doit pas être supposé avoir voulu disposer contrairement à la loi; parce qu'aussi il est interdit, aujourd'hui plus que jamais, de fonder sur des conjectures l'existence d'une substitution; que, s'il en était autrement sous la législation romaine, c'était afin de donner effet à la

volonté du testateur, et que le même motif doit faire admettre un principe opposé dans une législation où la substitution tend au contraire à faire anéantir cette volonté ;

« Attendu qu'il n'y a non plus aucune substitution ni en faveur des enfans de Henri Quetton-Saint-Georges, ni en faveur de ceux d'Elizabeth et Henriette Quetton. >>

Pourvoi en cassation pour violation de l'art. 896 C. civ., et fausse application de l'art. 899 du même Code.

Mais, le 25 juil. 1832, arrêt par lequel,

« La Cour... ; - Attendu que l'arrêt attaqué décide que la disposition testamentaire dont il s'agit ne contient aucune substitution prohibée par la loi, mais seulement un legs de l'usufruit des biens en faveur d'André Quet, dit Queiton, et des legs conditionnels et directs de la propriété au profit de Henri Quetton Saint-Georges et de ses enfans; et à leur défaut, en faveur des enfans des deux nièces Elisabeth et Henriette Quetton; qu'en le jugeant ainsi, l'arrêt n'a fait qu'une juste appréciation des clauses du testament, et que par une suite nécessaire, en déclarant valable cet acte, il n'a expressément violé aucune loi; - Rejette. »

Au mot Substitution, n° 18 du DICTIONNAIRE DU NOTARIAT (15e édit.), no 21 (2 édit. ),et n° 105 (3o edit.), annotez: V. art. 7847 du J. N

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Le mari qui, lors du partage de la communauté prétend prélever, à titre de reprise ou remploi, le prix d'un immeuble à lui propre, vendu pendant le mariage, est obligé de prouver que ce prix lui a été effectivement payé pendant le mariage, et est, par conséquent, entré dans la

communauté.

Le sieur Lecamus, marié sous le régime de la communaute, était propriétaire d'une portion du domaine dit du Boisl'Abbé. Pendant son mariage, il vendit cette part d'immeuble au sieur Dumont: peu après, décès de la danie Lecamus.

Cependant la fille du sieur Lecamus avait épousé le sieur Douket-Pradat.

Vers 1825, le sieur Lecamus et les époux Douket-Pradat procédèrent à la liquidation de la communauté d'entre le sieur Lecamus et sa femme, ayant pour héritière la dame DouketPradat.

Le sieur Lecamus prétendit exercer sur la masse le prélèvement du prix de la portion de domaine vendue au sieur Dumont. Les époux Pradat s'y opposèrent, à moins qu'il ne fût prouvé que ce prix avait été effectivement versé au sieur Lecamus pendant son mariage, et non depuis, et qu'il était entré dans la communauté,

29 août 1826, jugement du tribunal civil de la Châtre, ainsi

conçu :

« Considérant que la communauté ne doit tenir compte au sieur Lecamus que des sommes dont elle a profité;

« Considérant que, s'il est bien établi que le sieur Lecamus s'est constitué en dot, lors de son contrat de mariage, le tiers du domaine du Bois-l'Abbé, et que ce domaine ait été vendu pendant son mariage, il n'est pas démontré que le prix provenant de cette vente ait été versé dans la caisse de la communauté; que c'est au sieur Lecamus qui réclame cette somme contre la communauté qui, suivant lui, en avait bénéficié, à faire cette preuve, et que tant qu'elle ne sera pas faite, sa demande doit être repoussée;

« Considérant, au contraire, qu'il s'élève de fortes présomptions pour établir que cette somme n'a pas été payée pendant la communauté; que ces présomptions résultent de ce qu'aux termes de l'acte dudit jour, 7 mess. an xi, le sieur Lecamus avait droit d'exiger le paiement de la somme à lui due au 12 nov. 1867, et que c'est le 12 fév. 1808, c'est-à-dire trois mois après l'époque de l'exigibilité, que la femme Lecamus est décédée; que le court intervalle qui s'est écoulé depuis l'échéance de la créance du sieur Lecamus jusqu'au décès de sa femme, autorise à penser que cette somme ne fut pas acquittée par le sieur Dumont, surtout quand on sait qu'à cette même époque le sieur Dumont avait peu de ressources en argent, puisqu'il résulte d'un jugement rendu le 24 mars 1813 par le tribunal de Saint-Amand, qu'il fut condamné à payer un billet de 2,330 fr. qu'il avait souserit lui-même en 1806, et exigible depuis le mois de sept. 1807; que cette présomption se confirme aussi par le vu de la grosse exécutoire du titre du sieur Lecamus; qu'en effet, on y remarque que la formule royale y a été apposée en 1816, d'où l'on est porté à conclure que c'est à cette époque qu'il en a poursuivi l'exécution contre son débiteur; que, par conséquent, la prétention du sieur Lecamus doit être rejetée faute de justification. »

Appel par Lecamus. Et, le 27 avr. 1829, arrêt de la Cour royale de Bourges qui infirme en ces termes :

« Considérant que l'appelant a vendu, pendant la communauté, sa part dans le bien du Bois-l'Abbé qu'il s'était constitué en dot; que le contrat de vente prouve que le prix était exigible avant le décès de la dame Lecamus; que c'est vainement que l'intimé allégue plusieurs faits comme faisant présumer que le prix n'a pas été payé aux échéances stipulées ; qu' qu'il faudrait de sa part la preuve complète de l'inexécution du contrat, ce qui n'existe pas dans ce moment; qu'ainsi Lecamus doit être admis à prélever sur la communauté la valeur de sa part dans le bien, sauf à l'intimé à prouver, de telle manière qu'il avisera, que le prix ou partie du prix n'a pas été versé dans la caisse de la communauté. »

Pourvoi en cassation pour violation de l'art. 1315 C. civ., qui pose en principe que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver, et de l'art. 1433 du même Code. Mais le 14 août 1832, arrêt par lequel,

La Cour... « Vu les art. 1315 et 1433 du Code civil: Attendu que d'après l'art. 1315, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation à la prouver; que d'après l'art. 1433, il n'y a lieu au prélèvement sur la communauté du prix de la vente d'un immeuble appartenant à l'un des époux qu'autant que ce prix a été versé dans la communauté; que ce versement a été dénié par la dame Lecamus et le sieur Douket-Pradat, son mari; que dès lors la preuve du versement était à la charge du sieur Lecamus, qui s'en prévalait pour demander le prélèvement; que c'est en effet au demandeur à prouver sa demande, et, qu'à défaut de preuve, la demande doit être rejetée; que la dame Douket-Pradat et son mari n'ont opposé aucune exception dont la preuve fût à leur charge, puisqu'ils se sont bornés à opposer que le sieur Lecamus Rochette ne justifiait pas sa demande; que, par conséquent, en accueillant cette demande, quoiqu'elle ne fût pas établie, et malgré la dénégation de la dame. Douket-Pradat et de son mari, la Cour royale de Bourges, est contrevenue aux art. 1315 et 1433 C. civ.; Casse.»

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Aux mots Communautë, no 31 du Dictionnaire du Notariat ( 13a édit.), n° 30 (2 édit. ); et Communaute de biens, n° 204 ( 3a edit.); Remploi 1o 8 (1o édit.) no 14 ( 2o edit.), et no 82 ( 3° édit.), annotez. V. art. 7848 du J. N.

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Le notaire qui a commis une erreur dans une expédition peut, selon les circonstances, étre déchargé de l'action en responsabilité dirigée contre lui.

Ce point de jurisprudence résultait déjà d'un arrêt de la Cour suprême du 30 nov. 1830 (V. Art. 7322 J. N., et Dictionnaire du Notariat, 3e édit., vo Responsabilité des notaires, no 60). Il a été de nouveau admis dans l'espèce sui

vante :

Le cahier des charges d'une adjudication portait que l'adjudicataire serait tenu de bâtir un mur à la hauteur de six pieds, non compris fondation.

Dans l'expédition se sont trouvés ces mots : y compris chaperon et fondation.

Cette différence donna lieu à une contestation entre les sieurs Lautour et Lhuillier. Elle se termina par une transaction, et tous deux intentèrent une action en responsabilité contre le

notaire.

Sur cette action, jugement du tribunal civil de la Seine du 28 avr. 1829 qui les déclare non recevables.

Ce jugement fut, sur l'appel, maintenu par un arrêt de la Cour de Paris du 16 mars 1830, en ces termes :

« Considérant que l'erreur d'énonciation insérée dans l'expétion du contrat n'est pas le résultat de la mauvaise foi, et que ladite erreur, en rapprochant la valeur de la surélévation du mur de clôture de celle du fonds de l'immeuble, n'a pu influer sur les conventions d'entre Lautour et Lhuillier; — A mis et met l'appellation au néant; émendant, et prononçant par jugement nouveau, déboute les sieur Lautour et Lhuillier de leur demande contre le sieur C...., etc. »>

Pourvoi en cassation pour violation des art. 1383 et 1134 C. civ., 1 et 21 de la loi du 25 vent. an XI.

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Mais, le 19 janv. 1832, arrêt par lequel,

« La Cour...;- Attendu qu'en décidant que l'erreur contenue dans l'expédition de l'acte de vente délivrée par le notaire C........., n'a exercé aucune influence sur le traité ou transaction passé entre les parties, l'arrêt attaqué s'est livré à une appréciation de faits qui rentrait dans les attributions ex

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