Page images
PDF
EPUB

des dispositions nouvelles, il y proposait quelques modifications; il s'associait au vœu de M. Salverte pour voir le service des officiers et des sous-officiers de la garde nationale encouragé par quelque participation aux droits politiques, aux droits électoraux; mais il appuyait particulièrement l'obligation de l'uniforme, en laissant au conseil de recensement la faculté d'en dispenser ceux pour qui cette dépense

serait onéreuse.

« Il est désirable, dit-il, que nous cessions de voir des fonctionnaires de diverses administrations et d'autres individus qui croient peut-être faire acte de courage politique, se présenter dans les rangs de la garde nationale avec les accoutremens les plus bizarres et les plus choquans.....

« Certains inconvéniens légers, que la pratique et la sagesse du conseil de recensement effaceront, seront largement compensés par l'avantage de ne pas laisser tomber en discrédit cet uniforme véritablement noble parce qu'il est utile, que nous avons vu pendant plusieurs années porté avec orgueil dans toutes les classes de la société. »

En résultat, M. Lacrosse approuvait et recommandait les dispositions du projet présenté pour la garde nationale, mais il en demandait l'application aux villes les plus importantes, à 675 communes qui comptaient ensemble plus de 400,000 citoyens armés.

Telle et plus large encore était, à cet égard, l'opinion de M. Auguis, qui ne voudrait qu'une loi pour toutes les gardes nationales de France; mais ce n'était pas la question qu'il s'était proposé d'examiner.

D'abord il appuyait le vœu de M. Salverte sur les droits qu'il était juste d'accorder à la garde nationale, en compensation des devoirs qu'on lui imposait; et, avant d'entrer dans l'examen des conditions nouvelles qui allaient être imposées à celle de Paris, observant qu'elle allait avoir à remplir dans cette ville les mêmes devoirs que la troupe de ligne, il en concluait qu'on pourrait porter sur d'autres points la garnison militaire de Paris, et même réduire l'effectif de l'armée d'un nombre égal à celui des hommes qui composent la garde nationale de Paris et de la banlieue : réduction qu'il estimait à 52,000 hommes, et dont il résulterait une économie consi

dérable; et comme cette proposition soulevait quelques murmures, l'honorable député citait le système militaire d de la Prusse, où la landwehr et le landsturm faisait le service de l'armée, il n'y avait jamais sous les armes que 100,000 -hommes qui ne coûtaient que 85,000,000 fr.

Venant à l'examen du projet, il regrettait d'y voir des omissions graves, des catégories d'officiers, non soumis à l'élection, une pénalité sévère, des amendes exorbitantes et un mode de recrutement qui dégénérait en véritable inquisition, et des dispositions dont il était nécessaire d'adoucir la rigueur.

En résultat, au milieu des clameurs que la presse hostile au Gouvernement cherchait à soulever contre le projet, l'opposition elle-même n'y voulait que des modifications et n'en désapprouvait pas le système général aussi la discussion des articles offrit-elle peu de mouvement.

Il nous suffit d'en donner une esquisse..

Aux termes de la loi du 22 mars 1831, on ne d devait le service de la garde nationale que dans la commune où l'on avait son domicile réel. Il en résultait que beaucoup, de perla plupart fort aisées, qui résidaient habituellement à Paris, établissaient, suivant la lettre de la loi, leur domicile réel dans un autre département que celui de la Seine et dans des communes où l'on ne faisait pas de service. Ces personnes avaient donc ainsi résidence habituelle à Paris ou dans le département de la Seine sans obligation de service, et domicile réel dans un autre département sans obligation de service non plus, parce qu'on y en faisait pas, double abus que l'art. 1er 1 du nouveau projet de loi avait pour objet de corriger, mais dont la rédaction encore vague fut changée sur la proposition de M. Dufaure, comme on le trouve dans la loi. Pop brode is L'art. 2, portant (Ster) obligation pour tous les France appelés au service de la garde nationale de se faire inscrire au registre-matricule de leur mairie, sous peine d'être renvoyés devant le conseil de discipline, et passible d'un emprisonnement

d'an jour au moins et de cinq jours au plus, souleva la plus vive opposition de la part de M. Salverte, qui reproduisit les objections qu'il y avait déjà faites; mais cette obligation, justifiée par le ministre de l'intérieur, par M. Ganneron et par le rapporteur de la commission (le général Jacqueminot), a été maintenue dans la loi, si ce n'est quant aux citoyens exceptés ou dispensés du service par divers articles de la loi du 29 mars 1851 (6 paragraphe).

24 février. Des difficultés faites sur la composition et la compétence des conseils de recensement ou jurys de révision, sur l'institution des recenseurs salariés, sur les élections des officiers, en firent modifier quelques dispositions, mais seulement dans les termes, car les principes posés par le minisfère ont été conservés dans la loi.

27 février. La discussion, interrompue par le rapport du projet de disjonction et par le rapport des pétitions, reprise le 27, souleva une question plus importante que celles qui venaient d'être agitées.

L'art. 18 (le 17o de la loi) portait que le réglement relatif au service ordinaire, aux revues, aux exercices et aux prises d'armes serait arrêté par ordonnance royale, sur la proposition du commandant supérieur de la garde nationale et du préfet.

M. Moreau (de la Seine) combattit cette disposition, comme portant une modification dangereuse à la loi de 1851, qui dislinguait soigneusement les prises d'armes proprement dites du service ordinaire; comme dépouillant les maires d'une de leurs plus importantes attributions et réglant par une ordonnance ce qui était du domaine de la loi.

A ces objections, M. le ministre de l'intérieur répondait d'abord qu'il y avait un motif politique pour que des mouvemens aussi graves que les prises d'armes fussent réglés par ordonnance royale, et que l'autorité supérieure à Paris, siége du Gouvernement, ne pourrait sans péril abandonner cette direction à l'autorité municipale; que, d'ailleurs, les fonctions Ann. hist. pour 1837.

8

de cette autorité y étant exercées par le préfet, l'ordonnance ou le réglement qui déterminerait le mode de réquisition de la garde nationale était une affaire à régler entre le chef de cette garde, le préfet et le ministre.

Barrot, je déclare qu'ainsi expliqué, cet article

«Eh bien disait Matteinte profonde à l'autorité municipale, à ce qui

n'est pas seulement une

reste de l'autorité municipale à Paris, mais c'est l'abrogation formelle d'une disposition de la loi spéciale que vous avez votée depuis la révolution, en 1832. La même question qui s'agite aujourd'hui, celle de savoir si l'autorité municipale à Paris, représentée par les maires, avait le droit de réquisition de la garde nationale, a déjà été agitée dans cette enceinte, et résolué dans l'intérêt de l'autorité municipale, et surtout de l'ordre public. Nous étions alors sous l'impression de souvenirs encore récens; nous savions quels immenses services avaient rendus à l'ordre public l'action, l'intervention de l'autorisé municipale; et, bien loin de la dépouiller d'un droit qui lui donne un vote si efficace dans les jours de désordres et de troubles civils, on le consacra par une disposition formelle de la loi. La loi est positive; je vais en mettre le texte sous les yeux de la Chambre; elle verra alors si elle veut l'abroger. C'est la loi des attroupemens, loi de sûreté, de salut public; elle dit :

«Si l'attroupement ne se disperse pas, les sommations sont renouvelées trois fois, etc. Les maires et adjoints de la ville de Paris ont le droit de requérir la force publique et de faire les sommations.

Si M. le ministre de l'intérieur veut bien laisser à l'autorité municipale à Paris ce droit indépendant de requérir la garde nationale..... s'il veut bien ne pas porter cette dernière atteinte à cette autorité, alors je n'insisterai pas dans mon observation, mais il importe que cela soit bien explicitement déclaré. »

L'explication que j'aurai à donner, répondit le ministre dé l'intérieur, sera bien simple. Qu'on veuille bien se reporter à l'article qui est en discussion on vetra qu'il s'agit d'un réglement relatif au service ordinaire, aux revues, aux exercices et aux prises d'armes. Il ne s'agit nullement de porter atteinte au droit de réquisition, au droit journalier de l'autorité municipale, dont l'exercice sera nécessaire pour l'exécution même du réglement. Il ne s'agit que de terminer le réglement.

« Une fois le réglement arrêté, les maires et adjoints de Paris restent dans le droit qui leur est conféré par la loi de 1832, »

Cette déclaration ne satisfit pas encore l'opposition; mais, après quelques autres explications, l'article en question fut adopté sans amendement.

La discussion arrivée à celui qui rend l'uniforme et l'armement obligatoires pour tout garde national qui n'en est pas dispensé par le conseil de recensement, M. Salverte renouvelant les objections qu'il y avait faites, insista particulièrement sur ce que c'était un impôt qui pèserait inégalement sur les gardes nationaux en raison de leur fortune. M. Auguis le combattit sous d'autres rapports.

Selon M. Agier, ancien colonel de la 12o légion, qui répondit à MM. Salverte et Auguis, la question de l'uniforme, si importante aux yeux de la commission, ne pouvait manquer d'être résolue conformément à la proposition. Toute l'importance de la loi était dans l'article relatif à l'inscription et dans celui-ci : quiconque avait observé la garde nationale dans des crises graves, dans les momens de troubles et d'émeutes, avait reconnu l'heureuse influence de l'uniforme.

Jusqu'ici la discussion avait été calme, exempte de toute irritation. M. Garnier Pagès, qui prit alors la parole, lui donna pour un moment un autre caractère.

<< Si nous n'étions pas fortement préoccupés des diverses lois qui doivent être discutées dans cette session, disait-il, si nous ne songions pas plutôt à ce qui n'est pas en discussion qu'à ce qui se discute, nous comprendrions l'importance d'une question semblable, nous songerions qu'il ne s'agit pas d'organiser, mais de désorganiser la garde nationale.

« La loi de 1831 vous le dit, le bon sens vous le dit comme cette loi : il n'y a, il ne saurait y avoir de garde nationale, si la nation tout entière n'est pas armée. Si, au contraire, par des dispositions de loi, vous vous arrangez de telle sorte qu'une partie seulement des citoyens soit armée et fasse partie de la garde nationale, vous créez une garde exceptionnelle, d'une nature à part; mais vous n'avez plus de nation armée, c'est-à-dire la garde nationale. Et, prenez-y garde, le moyen qu'on indique est injuste, inique, il est, de plus, odieus, par suite des moyens qu'il force à employer; enfin, ses conséquences sont doublement funestes. Il établit une espèce d'inquisition sur les fortunes. Celui qui n'aura pas eu moyen d'acheter un uniforme sera au carcan de la misère, il montera la garde sans vêtement..... ce sera un sansculotte.....

« Si vous voulez que la garde nationale change de nature, si vous voulez que ce ne soit plus la nation armée, si vous voulez faire entrer, en vertu de l'art. 2, 15 ou 20,000 hommes de plus dans la garde nationale, pour en retirer les 15 ou 20,000 autres, en vertu de l'article 20; si vous voulez mettre forcément au carcan ou à la réserve ceux qui ne vous présenteront pas les avantages que vous cherchez dans un garde national, parce qu'ils n'ont pas fargent nécessaire pour acheter un habit, dans les temps calmes, ordinaires, alors que la garde nationale perd de son importance, elle ne servira plus que de jouet entre les mains des officiers d'état-major..... >>

Cette sortie n'était pas propre à ramener les esprits au système de M. Salverte; aussi l'obligation de l'uniforme fut décidée à une immense majorité. Venait, en dernier lieu, l'amendement, annoncé dès l'ouverture de la discussion générale, qui tendait à faire l'application de la loi aux communes ayant 5,000 habitans; mais, soit qu'on voulût en

« PreviousContinue »