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sa construction dans le beau style de la renaissance, la rendaient digne de recevoir le prince qui venait de restaurer si magnifiquement les palais de Fontainebleau et de Versailles.

En sortant de ce banquet splendide, où le roi but, en rappelant le 30 juillet 1830, à la prospérité de Paris, sa ville natale, on entendit une cantate de M. Scribe, musique de M. Auber; et le bal commença dans cette salle immense, élevée dans la cour, comme en d'autres circonstances analogues. Dans les appartemens particuliers était une magnifique Psyché en malachite que la ville de Paris offrait à la princesse royale, à qui l'on ménageait une émotion plus vive, en offant tout à coup à ses regards un délicieux diorama qui lui représentait le palais, les jardins et les environs de Ludwigslust, la demeure de sa famille et le séjour de sa jeunesse.

Quinze cents dames avaient été invitées pour le bal qui s'ouvrit presque en même temps dans la salle de la cour et dans la salle de Henri II. La famille royale se retira vers onze heures; mais le bal se prolongea jusqu'au jour. Dans une seule des galeries, au-dessous de la salle de la Cour, décorées de fleurs, étaient dressées des tables; on y servit successivement deux soupers, où plus de quatorze cents personnes prirent place à la fois.

La garde nationale aussi voulut témoigner l'intérêt qu'elle attachait au bonheur du prince qu'elle avait vu grandir sous ses yeux ; et le bal qu'elle donna dans la vaste salle de l'Opéra termina dignement la série des fêtes données à l'occasion du mariage. (Voyez la Chron., art. du 22 juin.)

CHAPITRE IX.

Budget de 1858.

Rapport général. Discussion générale.

particuliers.

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Discussion des budgets de la guerre, des affaires étrangères et de la marine. — Question de l'émancipation des esclaves et des colonies. Budget de l'instruction publique.

Après cinq à six mois de débats parlementaires, entre les nombreux projets de lois qui restaient encore à délibérer ou à voter, on sentait que les deux Chambres n'avaient plus d'attention sérieuse à donner qu'à des questions d'intérêt matériel bien pressant, ou dont la solution était indispensable, comme celle du budget, et encore l'importance des questions financières s'était-elle bien amoindrie depuis quelques années... Autrefois, sous la Restauration, alors que l'adresse était délibérée à huis clos, et que le droit d'interpeller les ministres sur une question déterminée était méconnu ou facilement éludé, la discussion générale du budget était à peu près le seul terrain réservé aux batailles politiques; mais maintenant que la discussion de l'adresse ouvre aux orateurs un champ sans limites, aujourd'hui que chaque projet de loi, que le moindre incident ramène encore la politique générale, sous toutes les formes, le lecteur arrive à la discussion du budget presque aussi fatigué, presque aussi indifférent aux débats purement politiques que les Chambres ellesmêmes on peut en abréger le récit et se contenter d'en offrir les principaux incidens et les résultats.

L'exposé des motifs du budget de 1838, présenté dès le 4 janvier, par le ministre des finances d'alors (M. Duchâtel)', offrait le tableau d'une prospérité financière toujours crois

sante. Malgré les désordres et les crises de l'intérieur qui avaient mis l'Etat en péril pendant quatre ans, malgré des attentats qui se succédaient avec une infernale persévérance, le bien public se développait à vue d'œil, l'aisance descendait dans toutes les classes et y faisait sentir la nécessité de l'ordre et le prix de la liberté. Les consommations, et par suite le produit de l'impôt, suivaient une marche ascendante dont la rapidité, déconcertant les ennemis de la révolution de juillet, surpassait ceux qui croyaient le plus à sa fécondité. Telle avait été l'extension de la richesse publique et l'accroissement des consommations, que les taxes indirectes, dont le produit n'était que de 322 millions en 1850, avaient donné 612 millions en 1836, c'est-à-dire une augmentation de 90 millions.

Le ministre, avant d'établir le budget de 1838, abordait deux questions qui pouvaient s'y rattacher: l'une la conversion des rentes 5 pour 100, opération qui lui semblait fondée en légalité et en justice, mais qu'il lui paraîtrait imprudent de tenter au milieu des graves embarras que la crise américaine avait jetés dans les relations du commerce et du mouvement général de baisse, qui s'était manifesté sur tous les effets publics de l'Europe. Quoique le crédit public de la France en eût été moins affecté que celui de toute autre puissance, la prévoyance défendait de s'engager dans une entreprise importante avant d'être assuré de la stabilité des affaires dans tous les grands pays commerçans.

La seconde question, traitée par le ministre, était celle de l'impôt sur les sucres. On a vu (chap. VII) qu'il l'avait résolue par le dégrévement des droits sur les sucres coloniaux ou étrangers, mais que la Chambre, d'accord avec le nouveau ministère, était revenu au système annoncé l'année dernière, ce qui semblait devoir augmenter les ressources du Trésor.

Passant à l'examen des services ou dépenses de 1838, M. Duchâtel observait que la dette consolidée offrait une augmentation de 6,724,000 fr., tant pour réduire la masse de

la dette flottante et la ramener aux proportions désirées que pour subvenir à des travaux publics, au moyen d'un fonds extraordinaire et pour assurer le service des pensions, d'après le système nouveau (qui n'a pas été discuté); mais il ajoutait que, d'après des compensations opérées par des réductions sur diverses dépenses, l'accroissement réel de la dette ne s'élevait qu'à 2,724,000 fr.

Quelques augmentations de crédit étaient demandées aux budgets des divers ministères; on les rappellera lors de leur discussion particulière.

D'après ces changemens, la dépense totale était portée pour 1858 à 1,037,288,050 fr., somme plus forte, en apparence, de 10,229,000 qu'en 1857, mais dont il fallait déduire environ 6,096,000 fr. pour diverses dépenses qui ne devaient pas être considérées comme un véritable accroissement des charges pour l'Etat.

Relativement à l'établissement des recettes, le ministre faisait observer que les contributions directes offraient chaque année de légers accroissemens; il s'excusait de n'avoir pas encore proposé un travail dont les bases étaient pourtant déjà préparées pour une nouvelle répartition de la contribution personnelle ou mobilière, mais dont les documens n'étaient pas encore tous réunis. M. Duchâtel, en exposant que la contribution directe, cette précieuse ressource des temps difficiles, doit être soigneusement ménagée, appelait l'attention de la Chambre sur le rapide accroissement des contributions perçues pour le compte des departemens et des communes, qui s'étaient élevées, de 1829 à 1836, les impositions départementales, de 47 millions à 63, et les impositions communales, de 18 millions à 29; et, tout en reconnaissant l'utilité des dépenses auxquelles des lois importantes ont voulu pourvoir, il croyait devoir éveiller la sollicitude du législateur sur les conséquences financières d'un emploi trop fréquent de l'impôt direct.

Quant à l'évaluation des produits indirects de 1838, on avait

pris pour base les produits combinés du dernier mois de 1855 et des onze premiers mois de 1836; ils donnaient tous des revenus plus abondans. On espérait compenser par cet accroissement, et par une légère augmentation de droit sur les alcools et eaux-de-vie, la perte des 5 millions 500 mille francs que produisait la ferme des jeux, la diminution projetée d'un décime par kilogramme de sel provenant des salines de l'Est, et le dégrèvement de droits sur les sucres coloniaux et étrangers. En résultat, dans le projet présenté par le ministère du 6 septembre, appuyé de ceux qui s'y rattachaient,

Les revenus de l'Etat étaient évalués pour

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1838 à la somme

1,053,540,078 fr. 1,037,288,030

Ce qui devait laisser un excédant de . 16,032,028 fr.

De l'époque où ce budget avait été présenté, jusqu'à celle où il fut soumis à la discussion, la situation politique et financière était changée. Quelques-uns des projets qui s'y rattachaient avaient été ou devaient être gravement altérés. L'impôt sur les sucres indigènes était adopté, le dégrèvement sur les sucres coloniaux et sur les sels de l'Est était ajourné; le nouveau système des pensions était renvoyé à une autre session; la discussion du budget allait s'établir devant un ministère nouveau et dans des conditions nouvelles.

D'après le rapport général, présenté le 24 avril à la Chambre élective par M. J. Lefebvre, la commission n'adoptait pas sans réserve les idées du ministre du 6 septembre sur une nouvelle création de rentes, ni sur l'augmentation de la dette publique, ni sur le système des pensions de retraite. Cependant elle approuvait la création d'un fonds extraordinaire pour des travaux publics; elle reconnaissait qu'en présence des difficultés financières qui s'étaient manifestées en Amérique et en Europe, le moment n'était pas venu de tenter la conversion des rentes 5 pour 100.

« Le Gouvernement seul, disait l'honorable rapporteur, est

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