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et sans avoir fait de testament; le jury ayant reconnu la vérité de ce fait, a declaré la fortune du défunt acquise à S. M. C'est une somme de prés d'un million de francs dont hérite cette jeune fille de dix-huit ans, comme tutrice d'un homme qui en avait près de cinquante.

Le bu

12. Procès grammatical. reau de police de Brow Street, à Londres, a été saisi d'une question grammaticale, fondée sur un idiotisme de la langue anglaise. Sa Majesté, en parlant du roi, se dit His Majesty (Son Majesté); mais en parlant de la reine, on doit dire Her Majesty (Sa Majesté). Or, un fourgon de la maison royale, conservant encore l'inscription qui signifiait fourgon de Son Majesté le roi, le fermier du droit de passage, à la porte de Kingston, a exigé le paiement du droit; il prétendait que Guillaume IV n'existant plus, la franchise n'appartenait qu'à Sa Majesté la reine, et qu'il aurait fallu faire substituer sur les voitures le pronom her au pronom his.

Le grand-maître des écuries royales a poursuivi le fermier N. Ramsdale, pour fait de perception illicite. M. Ramsdale a allégué pour sa défense, qu'il devait s'en tenir à la lettre de l'inscription.

Sir Frédéric Roe, magistrat, a opposé à cette subtilité un statut publié sous le règne de Guillaume III et de la reine Marie, et qui a prévu expressément la difficulté. Cette loi dit que l'on peut, en parlant de la personne du roi ou de celle de la reine, se servir indifféremment avec le mot Majesté, des pronoms his ou her. En conséquence, il a condamné le fermier à une amende de 10 shellings et aux frais.

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15. Constantinople. Maurs de la Turquie. Les cris au feu! au feu! se firent entendre dernièrement dans le quartier d'Odown Kapoussy, au milieu de la nuit. Ces cris alarmants forent bientôt répétés par toute la ville, et quoiqu'on n'aperçût ni feu ni fumée du haut des tours ou des minarets, la foule ne courait pas moins de tous côtés pour arrêter les progrès de l'incendie. Après qu'on se fut convaincu qu'il n'y avait aucun danger à redouter, on apprit que le cri d'alarme avait été poussé par Ali-Aga, négociant, Le cadi l'ayant in

terrogé sur ce fait, Ali-Aga lui montra une paire de souliers, non pas de ces jolies babouches qui renferment les petits pieds de femmes, mais des souliers d'homme, et des souliers de chretien qu'il avait trouvés dans sa maison. «Voyez, dit-il au cadi, le pied d'un infidèle a souillé mon harem. Je les ai trouvés, ces souliers, en entrant dans mes appartements. Celui à qui ils appartiennent et sa coupable complice sont chez moi ; amenez vos gardes, qu'on les saisisse tous deux, qu'ils soient conduits devant le séraskier et qu'on venge les droits d'un mari outrage.» Malheu reusement pour les parties accusées, le fait était vrai, et l'épouse coupable fat trouvée en conversation criminelle avec un jeune Grec d'une grande beauté, Le flagrant délit était si évident qu'il n'admettait point d'excuse. « Nous savions bien, dit la dame turque, que notre amour devait nous conduire à la mort. Nous en avons couru la chance; que la justice suive son cours. La sentence de mort fut prononcée sans plus ample informé par le séraskier, et le lendemain matin les corps des deux coupe. bles étaient pendus, l'un à la porte de Parmak-Kapou, l'autre à celle de Balikbazar. On avait attaché à chacun un écriteau, l'un portant ces mots : « telle est la punition infligée à tout infidèle qui viole le seuil du harem; l'autre, ceuxci : « tel est le sort qui attend celles qui suivraient l'exemple de l'infidèle éponse Hatidjah. Les honneurs de la sépulture étant refusés aux corps des criminels en Turquie, ceux des deux coupa bles amants furent jetés les jours suivants dans le Bosphore.

D

Mais les supplices en Turquie, de même qu'à Venise, semblent ne pas être un motif infaillible pour préserver les maris du sort qu'ils redoutent. Le jour même où les corps des deux amants deyaient jeter l'épouvante et l'effroi dans tous les cœurs, deux autres couples de délinquants, coupables du même délit, furent surpris par la police. L'un des deux couples était dans le même costume que portaient Mars et Vénus lorsqu'ils parurent devant les dieux de l'Olympe, avec cette différence immatérielle qu'au lieu d'être à l'abri des regards indiscrets sous l'invisible réseau de Vulcain, le jeune Grec (car c'était encore un Gree, les Lovelaces du pays) et sa complice ne

furent préservés des regards curienx que par les persiennes de la voiture dans laquelle ils furent conduits devant le cadi. Comme la dame se trouva être l'épouse d'un personnage de distinction, le magistrat ordonna que son exécution et celle de son complice seraient secrètes. Quant au jeune Grec, il appartenait à des parents riches et il n'avait pas trouvé d'autre moyen pour satisfaire la passion dont il était dévoré pour sa coupable amante, que d'entrer au service du mari en qualité de cocher. Je n'ai rien su touchant l'histoire de l'antre couple. Je crois inutile d'ajouter que, par suite de ces découvertes, la jalousie des musulmans s'est accrue à un degré extrême et que les eunuques sont hors de prix; dans moins d'une semaine leur valeur a triplé dans les marchés aux esclaves.

Il vient de paraître un firman qui ordonne que toutes les femmes devront être rentrées chez elles à la dixième heure, ce qui veut dire deux heures avant le cou cher du soleil; et, comme depuis quelque temps les dames turques avaient excité de grands soupçons par le goût soudain qu'elles avaient pris pour aller faire des emplettes dans les riches et élégantes boutiques de Para et de Galata, les propriétaires de ces magasins ne pourront en laisser franchir les portes à aucune femme turque, quels que soient son âge et sa condition, sous peine, en cas de contravention à cet ordre, d'être cloués par l'oreille à la porte de leur établissement. La fréquente répétition de ces abominations dans le sanctuaire sacré du harem, de même que de nombreux exemples arrivés depuis peu tant dans la capitale que dans les provinces du crime si rare et presque inouï chez le musulman, le suicide, sont, aux yeux des vrais croyants orthodoxes, un signe certain que la fin des temps n'est pas éloignée. Dans les quinze derniers jours, il y a eu dans la capitale trois cas de suicide de la part des Turcs. La manière dont un de ces malheureux s'est donné la mort est assez originale pour être connue des excentricités européennes. MehmetEffendi se promenait sur le Bosphore dans une barque et était en proie à une rêverie profonde qui absorbait toutes ses facultés. Pendant qu'il se plaignait au batelier de la chaleur qui était accablante, il défaisait l'une après l'autre

toutes les parties de ses vêtements, jusqu'à ce qu'enfin il ne lui restât plus que sa chemise et ses caleçons. Après avoir pris le temps pour remplir et fumer une pipe et s'ètre plaint de nouveau de la chaleur, il se débarrassa des derniers vêtements qui lui restaient; et, sourd à toutes les remontrances du pudique batelier, il remplit de nouveau sa pipe et se mit à fumer in naturalibus. Se levant tout-à-coup du banc où il était assis, il s'écria: « Je ne puis supporter plus long-temps cette chaleur, les eaux du Bosphore peuvent seules me rafraichir.» Cela dit, il s'élance dans la mer, et est emporté par le courant rapide.

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17. Paris. Election académique. L'Académie des sciences a procédé aujourd'hui au remplacement de M. Girard dans la section de physique. Deux voix de plus en sus de la majorité voulue, se sont portées sur M. Pouillet au premier tour de scrutin, et il a été proclamé membre de l'Académie. Il y avait 50 votans, qui ont été réduits à 49 par un billet blanc. La majorité absolue était 25. M. Pouillet a obenu 27 suffrages, M. Cagnard-Latour, 42; M. Desprez, 5; M. Babinet, 3, et M. Peltier, 2.

:

24. Cour d'assises. Affaire de la Quotidienne et du général Donnadieu. Au commencement de 1837, M. le général Donnadieu publia'un ouvrage ayant pour titre De la vieille Europe, des rois et des peuples de notre époque. Cet ouvrage avait fait peu de sensation, lorsque la Quotidienne, à propos des événements d'Alger, publia, dans son numéro du 26 juin, un article, contenant divers passages de ce livre, suivis de quelques réflexions. Cet article attira l'attention du ministère public sur l'œu vre du général; il crut y reconnaître les délits d'offense à la personne du roi, d'attaque aux droits que le roi tient du veu de la nation, et d'excitation à la haine et au mépris du gouvernement. Des poursuites furent en conséquence dirigées tant contre le général, les sieurs Allardin, éditeur, et Malteste, imprimeur, que contre M. de Lostanges, gérant de la Quotidenne.

M.l'avocat général Plougoulm, chargé de soutenir la prévention, commence par donner une analyse sommaire du livre incriminé, dont il résulte que,

pour le général Donnadieu, le beau idéal des gouvernements est en Russie, et il continue en ces termes :

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Il nous suffit d'avoir signalé les idées générales de l'auteur, pour vous faire comprendre son système. Il eut été à souhaiter qu'il se fut renfermé dans des généralités, il ne serait pas devant vous; mais il est descendu des hauteurs de la philosophie; il a voulu faire l'application à son pays de ses théories sociales; oubliant són rang élevé, le caractère dont il est revêtu, il a osé attaquer ce que les lois protégent et recommandent au respect de tous; il a offensé la personne sacrée du Roi; if a attaqué les droits que le roi tient de la nation; enfin il a excité à la haine et au mépris du gouvernement.

D

La cause a dù paraître devant vous entourée de quelque solennité. Vous comprenez, Messieurs, que si tous les citoyens sont égaux devant la loi, il est néanmoins des positions qui, par cela même qu'elles sont plus éminentes, obligent ceux qui les occupent à plus de respect et de circonspection, et appellent sur eux une répression plus solennelle.»

Ici M. l'avocat général annonce qu'il va entrer dans l'examen des différents chefs d'accusation. Il cite, en les accompagnant de réflexions, tous les passages incriminés.

Les lectures terminées, M. Plougoulm s'attache à démontrer par une très-courte discussion que ces passages contiennent le triple délit qui leur est Imputė.

M. l'avocal-général, passant ensuite à ce qui regarde le sieur Allardin, éditeur de l'ouvrage, et l'imprimeur, s'en rapporte à la sagesse des jurés, tout en soutenant l'accusation. Arrivant enfin aux faits reprochés à la Quotidienne, M. Plougoulm soutient que le journal qui a reproduit un écrit blâmable est aussi blâmable que l'auteur de cet écrit ; et il donne lecture des réflexions ajoutées par la Quotidienne aux passages qu'elle avait empruntés à l'ouvrage du général Dounadieu.

Le général Donnadieu lit un discours dans lequel il expose que, dans les loisirs que sa position lui a laissés, il a médité sur la liberté de la société dans ses conditions absolues et conservatrices, et que, croyant user de son droit, il a consigné ses méditations dans plusieurs ou

vrages, notamment dans celui qu'on ac

cuse.

Me Hennequin examine les articles incriminés, et, dans l'intérêt de son client, dit qu'il n'y voit qu'une these de philosophie sociale, et non l'expression d'un parti ennemi de l'ordre de choses actuel.

Mes Chaix-d'Est-Ange et Delangle prennent la parole en faveur de MM. Allardin et Malteste.

Me Berryer, avocat de la Quoti dienne, rappelle l'époque où ce journal publia son article sur Alger.

« On venait, dit-il, de publier dans le journal officiel le compte rendu de la plus étrange conférence que l'on puisse, trouver dans les annales historiques, l'entrevue du général Bugeaud avec l'émir Adb-el-Kader, entrevue dans la quelle un général français s'était mis devant le chef arabe, comme jamais chef arabe ne s'est trouvé devant le GrandSeigneur lui-même. Les journaux en ont rendu compte; de fâcheux pressentiments se sont emparés du public. C'est au milieu de cette préoccupation des esprits que l'éditeur du journal s'est rappelé que depuis quarante jours il a paru un livre où l'on prédisait précisé ment le résultat que le journal officiel annonçait, c'est-à-dire un abandon, une concession faite à un chef de tribu, en un mot, une renonciation à la colonisation d'Alger.

» L'éditeur du journal n'a rien de plus pressé, pour satisfaire à la préoc cupation du public sur un fait aussi grave, que de citer les pages de l'écrivain qui a pressenti l'événement, et en conséquence il rend compte à ses lecteurs d'un livre qui, sans être poursuivi par le ministère public, circule depuis quarante jours dans Paris. Dans la feuille du 26 juin, paraît un article ainsi intitulé : Du livre de M. le général Donnadieu, à propos d'Alger.

La Quotidienne a dit que le traité de la Tafna était un étrange oubli de la dignité publique.

» Si l'on ne peut parler d'un traité sans crime, alors de quoi est il permis de parler en France? Quoi! voilà un traité fait entre un général français et un bandit arabe, car l'émir est un bandit, et il y a une lettre du ministre de la guerre Bernard, qui dit : « Ce serait l'ignominie de la France qu'un traile

CHRONIQUE.-AOUT.

avec cet homme... » On lui rend, à ce bandit, ce qu'il n'a jamais possédé : Tlemcen, Mascara, 40 lieues de côtes; on trafique de la gloire passée, et parce qu'un écrivain a le courage de le dire, on l'accuse d'exciter à la haine et au mépris du gouvernement du roi!

» On sera condamné en la cour d'assises pour avoir dit ce que chacun a senti à propos d'un acte aussi honteux pour le pays. (Sensation.) Voilà tout ce qu'il y a dans l'article. »

Après des répliques successives et le résumé de M. le président, le jury entre en délibération à quatre heures moins un quart, et en sort à six heures moins un quart. Il déclare, à la simple majorité, que l'ouvrage publié par M. le général Donnadieu contient les délits d'offense à la personne du roi et d'attaque aux droits que le roi tient du væu de la nation; il déclare également que M. le général Donnadieu est coupable d'avoir publié ledit ouvrage.

Sur toutes les autres questions, il répond négativement. En conséquence, M. le président prononce l'ordonnance qui acquitte MM. de Lostanges, Malteste et Allardin.

M. l'avocat-général requiert l'appli cation des lois de 1819 et 1830.

La cour se retire en la chambre du conseil pour en délibérer. Après un quart d'heure, elle rentre en séance et prononce un arrêt qui condamne M. le général Donnadicu à deux ans de prison, 5,000 fr. d'amende et deux ans d'interdiction des droits mentionnés dans les trois premiers paragraphes de l'art. 42 du code pénal.

24. Académic des sciences. Hydrocéphalie. Les amateurs de monstruosítés ont pu jouir d'un spectacle hideux aujourd'hui à l'Académie; dans l'une des salles de la bibliothèque était exposé aux regards du public un malheureux enfant mulâtre, de neuf à dix ans, affecté de la maladie appelée hydrocéphalie ou hydropisie du cerveau. L'eau répandue dans l'intérieur du crâne, dilatant énormément cette cavité, lui fait acquérir des dimensions quelquefois prodigieuses. Ainsi, dans le cas actuel, la tête de l'enfant dont nous parlons a au moins le volume d'une citrouille, et l'on conçoit tout ce qu'un pareil développement de cette partie a de repous

sant pour les yeux; c'est l'original en
chair et en os, et vivant, de ces fi-
gures bizarres connues sous le nom
de grotesques. Nous ne pouvons pas
mieux donner une idée de l'aspect de
ce malheureux enfant, et nous deman-
dons pardon de la comparaison, qu'en
rappelant aux personnes qui ont vu le
ballet de Gustare un certain petit Turc
dont la tête monstrueuse est suppor-
tée par un corps grêle et chétif. Joi-
gnez à cela l'idiotisme accompagnant
toujours cette maladie, l'impossibilité
de se tenir debout et de supporter le
poids de cette tête quatre fois grosse
comme le reste du corps,
l'idée de cette affreuse créature vi-
vante, étendue à terre sans donner
d'autre signe d'intelligence que quel-
ques cris plaintifs Jorsqu'on vient à dé
ranger son repos.

AOUT.

et vous aurez

4. Paris. Séance publique annuelle de l'Académie des inscriptions et belles-lettres. Le sujet du prix que l'Académie devait adjuger dans cette séance, avait pour but de déterminer quels ont été, à partir du règne de l'empereur Constantin jusqu'à la fin du seizième siècle, les caractères et les vicissitudes du droit de propriété fonciere dans toutes les régions qui ont fait partie de l'empire romain en Europe. Deux Mémoires lui ont été adressés; mais ni l'un ni l'autre des concurrents n'ayant traité la question dans toute son étendue, l'Académie a pensé qu'il convenait de leur accorder un nouveau délai pour compléter leur travail ; elle a prorogé le concours jusqu'en 1838.

Elle devait adjuger aussi, dans cette séance, un autre prix sur la question suivante, remise au concours en 1836 : Rechercher quelles furent les impositions publiques dans la Gaule, depuis l'origine de la monarchie des Francs jusqu'à la mort de Louis-le-Débonnaire; comment elles furent établies et perçues, et quelles personnes y étaient soumises. Elle a reçu trois Mémoires sur cette question, et elle a partagé le prix entre le Mémoire dont l'auteur est M. Guadet, et le Mémoire qui a pour auteur M. le chevalier Baudi di Vesme, de Turin. M. le ministre de l'instruction publique ayant, d'après

le désir de l'Académie, ajouté 500 fr. à la somme ordinaire de 1500 fr., chacun des auteurs des deux Mémoires couronnés recevra une médaille d'or de 1000 fr. Une mention très-honorable a été accordée au Mémoire qui a pour auteur M. Just Pacquet.

Le prix de numismatique, fondé par feu M. Allier de Hauteroche, a été décerné à M. de Saulcy, capitaine d'artillerie et professeur adjoint à l'école d'application de l'artillerie et du génie à Metz, pour l'ouvrage intitulé: Essai de classification des suites monétaires byzantines.

Autorisée à disposer chaque année de trois médailles d'or de la valeur de 500 francs chacune, en faveur des trois auteurs qui, à son jugement, auront envoyé les meilleurs ouvrages sur les antiquités nationales, l'Académie a décerné ces trois médailles à M. Géraud, pour l'ouvrage intitulé Paris sous Philippe-le-Bel; à M. Jal, pour son Memoire sur les vaisseaux ronds de saint Louis, et l'état de la marine an treizième siècle ; à M. Berbrugger, pour sa Description de diverses inscriptions antiques découvertes á Ghelma et antres lieux de l'ancienne régence d'Alger. Des mentions honorables ont été accordées à M. Rey, auteur d'un ouvrage sur les enseignes, drapeaux et couleurs de la France; à M. de la Fontenelle de Vaudoré, auteur de plusieurs Mémoires sur les antiquités du Poitou; à M. Dusevel, qui a adressé à l'Académie plusieurs Memoires sur les antiquités du département de la Somme, et en particulier sur l'arrondissement de Montdidier.

Après avoir entendu un rapport spirituel de M. Alexandre Delaborde, sur les Mémoires dont nous venons de nommer les auteurs, on a écouté avec l'attention et le respect dus au vénérable M. de Sacy, son auteur, une bonne notice sur M. Pongens. Ensuite M. Victor Leclerc est venu lire un fragment, trop court à notre gré, sur les actes ou procès-verbaux du sénat romain. L'ingénieuse et piquante érudition de M. Leclerc se retrouve tout entière dans ce morceau, dont nous regrettons de ne pouvoir citer ici que le passage sui

vant :

• Les séances du sénat étaient donc sécrétes, et les actes de ses délibéra、

tions, lorsqu'ils ne prenaient point la forme de sénatus-consultes obligatoires, furent également secrets jusqu'au premier consulat de César, Ordinairement rédigés par des secrétaires, ils l'étaient, dans quelques affaires importantes, par des sénateurs mêmes. Quoique l'on compte un prêteur parmi ceux qui recueillirent ainsi les dépositions des lémoins contre Catilina, il paraît, si l'on juge de l'usage des temps consulaires par celui de l'empire, que cette fonetion était réservée de préférence aux sénateurs les plus jeunes, qui, entres comme questeurs au senat, s'acquit taient de ce devoir avant de parvenir à l'édilité, ou, du temps des Cesars, au tribunat du peuple. Telle fat la marche que suivirent dans leur carrière publique les nombreux sénateurs dont Marini a rassemblé les noms et les titres d'après les historiens et les inscriptions, en faisant voir que le même ordre était adopté par le sénat de Tibur. Depuis Auguste, le secrétaire du sénat romain dut être presque toujours un confident du prince: Tacite le dit de Junius Rusticus, qui remplit cette charge sous Tibère. Adrien là remplit sous Trajan.

» Tous ces registres du sénat de Rome, comme ceux où les sénateurs des villes municipales et les décurions des colonies gardaient l'histoire secréte de leurs séances, s'appelaient indisseremment actes ou commentaires. Ciceron nomme tables publiques les procésverbaux des interrogatoires que, pour plus de garantic, il fit rédiger par des sénateurs pendant l'affaire des conjarés, et qu'il fit aussitôt répandre en Italic et dans les provinces : nouvelle preuve que, même avant César, on publiait quelquefois les actes du sénat,

» Mais ce n'était là qu'une excep tion. Dans la marche habituelle de l'an cien gouvernement romain, malgré la liberté apparente et les clamcurs du Forum; malgré les rostres où un sé nateur daignait venir, en quelques grandes circonstances, racouter au people les décisions du patriciat; malgré les tribuns, qui n'obtinrent que tard d'assister, avec leur droit d'opposition, aux délibérations du conseil suprême, le sénat, héritier des rois, soulevait rarement le voile du lieu sacré où méditait sa prudence, où s'agitaient ses pas

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