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dre, mais de donner des notions suffisantes. Cette invitation n'est pas plus un ordre, que l'invitation que feroit, en pareil cas, un ministre lui-même à un de ses collègues. On a dit que vous pouviez vous adresser au Roi. Devez-vous recourir incessamment à S. M. pour de tels objets. Je vote pour qu'on ne passe pas à l'ordre du jour, et pour qu'il soit demandé des renseignemens. M. Ravez, dans un discours improvisé, conime le précédent, répond à M. Bénoist. Les faits sont assez connus, dit-il; les sieurs Robert sont accusés d'avoir imprimé les Conséquences immédiates de la conduite du ministère. Les auteurs de la loi de 1815, qui ont armé les ministres d'un pouvoir discrétionnaire, ne sauroient invoquer aujourd'hui de responsabilité. Les lois doivent être exécutées partout où elles ont prononcé. Le ministre a fait tout ce qu'il pouvoit faire. Il a livré à la commission le dossier des pièces. Il est donc inutile de demander de nouveaux renseignemens. Quant à la suppression du journal, le mi nistre a pu statuer à cet égard. La loi lui en donne le droit, et vous n'avez aucun compte à lui demander. M. de Villèle trouve que le préopinant a fondé ses raisonnemens sur un fait inexact. La commission n'a rendu aucun compte des pièces, si elle les a vues; elle n'a donné aucune lumière à la chambre. On n'a point motivé non plus la suppression du journal, qui n'étoit imprimé qu'après avoir été soumis à la censure, et auquel on n'avoit par conséquent aucun reproche à faire. L'orateur a d'autant plus de droits de réclamer contre l'arbitraire, que l'année dernière il combattit plusieurs dispositions de la loi d'octobre. Il conclut à ce qu'il soit demandé des renseignemens ultérieurs. M. de Serre appuie au contraire l'ordre du jour, attendu qu'il faut exécuter la loi du 29 octobre; que l'état des choses rendoit cette loi indispensable, et que ses motifs sont connus. M. de Salaberry se plaint de ce que l'on a avancé que les députés qui ont voté la loi de 1814 auroient dû en prévoir les conséquences, et ne sont pas recevables aujourd'hui à réclamer contre son exécution. Ils sont justifiés, a-t-il dit, par les propres paroles du ministre, qui, lorsqu'il provoqua la loi, déclara qu'elle étoit dirigée uniquement contre les incorrigibles partisans de l'auteur de nos maux. Le sieur Robert est-il un de ces factieux? L'on voit aujourd'hui avec étonnement les premiers jouir de leur droits, tandis que les plus fidèles amis

du Roi ont été écartés des élections. M. de Salaberry est d'avis qu'on demande des renseignemens. M. Bellart croit qu'on s'est trop accoutumé, pendant la révolution, à voir les assemblées s'emparer du gouvernement, et qu'elles tendent, comme malgré elles, à accroître leurs pouvoirs. Il engage la chambre à se défier de cet esprit. M. de Maccarthy parle en, faveur des députés qui ont voté la loi de 1815, et sur lesquels quelques-uns des préopinans ont lancé des sarcasmes I justifie leurs intentions. M. Piet voit dans l'affaire du sieur Robert, non-seulement une arrestation illégale, non-seulement la suppression arbitraire d'un journal, mais des rigueurs arbitraires dans la mise au secret et dans les perquisitions faites. Il est étonnant, selon lui, que l'on conteste à la chambre la mince faculté de demander à un ministre des renseignemens. Il conclut en demandant des renseignemens. Le président de la chambre invite le président de la commission à expliquer les faits. M. de Sainte-Aldégonde rappelle ce qui avoit déjà été dit la veille sur les communications de la commission avec les ministres. Cinq de ses membres étoient d'avis de passer à l'ordre du jour, quatre vouloient avoir de nouveaux ren eignemens. La discussion est fermée. Le président résume les diverses propositions faites. Celles de M. de Villèle et de M. de la Bourdonnaye tendant à ce que le président fût chargé d'écrire au ministre, sont écartées par la question préalable, et l'ordre du jour, proposé par la commission, est adopté. A quatre heures, la chambre se forme, en comité secret, dont l'objet étoit, dit-on, de délibérer si l'on admettroit dorénavant des discours écrits.

Le 30, les députés se sont réunis dans les bureaux pour l'examen des divers projets de lois présentés par les ministres.

Le 2 décembre, il y a eu un comité secret, dans lequel M. de Castelbajac a proposé une adresse au Roi pour obtenir, une loi qui règle l'usage de la liberté de la presse accordée expressément par la Charte. Cette proposition a été appuyée par MM. de Maccarthy et de Villele. M. Royer-Collard ne voit aucun intérêt dans cette proposition. M. de la Boulaye croit inutile de s'en occuper, puisque M. le ministre de la police a annoncé qu'il présenteroit, jeudi prochain, un projet de loi sur la liberté individuelle et la liberté de la presse. M. Laîné est d'avis, non pas de rejeter la proposition, mais de l'ajourner jusqu'à la communication, qui doit se faire jeudi. Il dé

sireroit que M. de Castelbajac voulut bien adoucir un endroit de son discours, où il présente une considération au moins intempestive. M. de Castelbajac consent en effet à retirer de sa proposition l'article qui a paru susceptible de quelques inconvéniens. L'ajournement de la proposition est mis aux voix et adopté à une très-grande majorité.

A la suite de ce comité, la séance a été rendue publique. M. Chabrol de Tournoël, député du Puy-de-Dôme, a prêté serment. On a renvoyé à la commission des pétitions, celles de l'abbé Vinson et de l'abbé Fleury, qui réclament contre les jugemens qui les condamnent.

Mardi et mercredi on continue les conférences dans les bu

reaux.

Les commissaires nommés pour l'examen du projet de loi relatif à la cour des pairs, comme cour judiciaire, sont: MM. Sirand, Bellart, de Serre, Ravez, Albert, BlanquartBailleul, de Pommerol, Jacquinot et Préveraud de la Bou

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Notice historique sur saint Piat, apótre de Tournay et martyr; par M. Hérisson (1).

L'église cathédrale de Chartres, dont l'origine et l'établissement remontent aux premiers siècles de l'ère chrétienne, possédoit un grand nombre de reliques et des restes précieux. des martyrs de la foi, et entr'autres le corps entier de saint Piat, martyr sous Maximien. Piat, né à Bénévent, avoit été ordonné prêtre à Rome, et envoyé pour prêcher l'Evangile dans le pays des Nerviens, dont Tournay étoit la capitale. Il prit sa route par les Gaules, et passa par Chartres, où il prêcha aussi la foi. Son zele se développa surtout à Tournay, et par ses soins, le culte des idoles diminuoit de jour en jour, et le nombre des chrétiens augmentoit dans la même proportion. Le préfet Rictiovarus fit arrêter le généreux prétre, et lui fit trancher la tête vers les dernières années du 3o. siècle, ou dans les premières du siècle suivant. Le corps du martyr resta caché à Siclin, près Tournay, jusqu'au 7°. siècle, que saint Eloi, évêque de Noyon, l'ayant découvert,

(1) Brochure in-8°.; prix, 1 fr. 25 cent. frane de port. A Chartres, chez Hervé; et à Paris, chez Picard-Dubois.

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le déposa dans une châsse précieuse. A la fin du g. siècle, lors des irruptions des Normands, la châsse fut apportée à Chartres, et déposée dans l'église cathédrale. C'est depuis cette époque que ce saint martyr est particulierement révéré dans ce diocèse. Il existe à trois lieues de Chartres un village de son nom, et dont l'église lui est dédiée. On bâtit dans la suite une chapelle en son honneur dans la cathédrale, et on y fonda un chapitre, Saint Pial étoit particulièrement invoqué contre les pluies et les intempéries des saisons. On ordonnoit alors les prières publiques, et on exposoit les reliques du saint. On trouve dans les annales de l'église de Chartres plusieurs ouvertures de sa châsse, en 1243, en 1310, en 1521, en 1591, en 1609, en 1708 et en 1750. Chaque fois on trouva son corps sain et entier, et il se conserva ainsi jusqu'en 1793, A cette époque de délire et de fureur, où on poursuivoit jusque dans leurs tombeaux tout ce que la France avoit compté de plus respectable et de plus auguste, on enleva les châsses, on profana les corps, on brûla ce qui en garantissoit l'au thenticité. Le corps de saint Piat fut tiré de sa châsse, et jeté dans une fosse, sans cercueil, et entouré seulement des linges et étoffes qui l'enveloppoient depuis long-temps. Il fut enseveli dans un coin du cimetière Saint-Jérôme, lieu ordinaire de la sépulture des chanoines de la cathédrale. Mais il étoit encore plusieurs témoins de cet acte d'impiété. L'été dernier, M. de Breteuil, préfet d'Eure et Loir, magistrat re commandable par son attachement à la religion, fit prendre des informations sur ce qui s'étoit passé en cette occasion. Une commission fut nominée, et on entendit des ouvriers qui avoient travaillé à la fosse et à la translation des corps.› Le conseil épiscopal, séant à Chartres, nomma, sur l'autorisation de M. l'évêque de Versailles, des commissaires pour la même recherche. Après avoir fait venir plusieurs témoins, et recueilli tous les renseignemens, on creusa dans l'endroit indiqué, et on découvrit, le 22 août dernier, à la profondeur de cinq pieds, le corps de saint Piat, qui fut jugé, à des signes non équivoques, le même qui étoit autrefois déposé dans une châsse. Il étoit encore en son entier, enveloppé d'étoffes, et reconnoissable, quoiqu'un peu endommagé par l'action de la chaux, qui avoit été jetée à l'entour. On l'a dé-, posé avec respect dans une caisse, qui a été scellée en présence d'un grand nombre de fidèles. Les autres ossemens.

reliques, fragmens d'étoffes, trouvés dans la même fosse, ont été aussi recueillis précieusement, dans cinq caisses, comme faisant partie des reliques conservées autrefois dans le trésor de la cathédrale. On instruisit M. l'évêque de Versales de ces découvertes, et on le pria d'autoriser le rétament du culte de saint Piat. Il rendit, le 4 septembre, un ordonnance portant que le corps du saint seroit transporté dans l'église cathédrale, et qu'on y feroit des prières pour obtenir la cessation des pluies. Le 7 septembre, le clergé de Notre-Dame, qui est l'ancienne cathédrale, et celui de Saint-Pierre, se sont rendus à la chapelle de la préfecture où le corps étoit provisoirement déposé. M. Verguin, grand vicaire, a dit les prières d'usage, et le corps a été porté par quatre séminaristes, placé dans la chapelle dite des Chevaliers, et exposé sur l'autel. Depuis, les fidèles n'ont guère cessé d'y venir prier, et la confiance des habitans du pays pour saint Piat s'est renouvelée avec plus d'ardeur. Plus de quarante paroisses sont venues processionnellement à la cathédrale. Les autres reliques déposées dans cinq caisses sont restées à la chapelle de la Préfecture, jusqu'à ce que M. l'é-' vêque en ait autrement ordonné.

La Notice historique de M. Hérisson rapporte tous ces fails. Elle est dédiée à M. le comte de Breteuil, dont l'amour et le respect pour la religion ont tant contribué à découvrir les précieuses reliques. Elle contient, outre les notions que fournit l'histoire sur saint Piat, les procès-verbaux qui ont élé dressés cet été pour les enquêtes et fouilles nécessaires. Elle contient de plus un catalogue des reliques et objets précieux qui existoient autrefois dans l'église de Chartres. On sait que cette église étoit en singulière vénération. Des princes et des particuliers, des rois et même des nations entières y envoyoient des présens, et y offroient des hommages à la sainte Vierge, patronne de la cathédrale. On est étonné des richesses que renfermoit en ce genre Notre-Dame de Chartres, et ces monumens de la piété de nos pères contrastent d'une manière bien affligeante avec le dénuement actuel de nos églises.

Cette Notice, en attestant les soins religieux des habitans de Chartres pour recouvrer des reliques précieuses, montre aussi dans M. Hérisson des connoissances sur les antiquités de cette ville, et la rédaction de cet écrit ne fait pas moins d'honneur à son savou qu'à son zèle.

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