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M. Haze se réunit peu après à eux. Mais un nouvel orage alloit fondre sur le diocèse. Le 23 avril 1815, on apprit que M. l'abbé de Saint-Médard, grand vicaire de La Ro-. chelle, venoit d'être nommé à l'évêché de Tournay, le 16 du même mois, et que le gouvernement s'attendoit que le chapitre lui donneroit des pouvoirs. Le chapitre effrayé députa MM. Gallouin et Haze à Paris, pour faire des représentations motivées sur le canon du concile de Lyon, et sur la crainte des troubles qu'il étoit aisé de prévoir. Le ministre des cultes n'eut pas même l'air de comprendre ce qu'on lui disoit. On se flatta d'être plus heureux en s'adressant à M. de Saint-Médard lui-même, et on lui envoya un homme de confiance pour l'engager à se désister de ses prétentions. Il parut d'abord sensible au tableau des derniers troubles et à la perspective de nouvelles divisions; mais l'influence ministérielle se fit bientôt sentir, et il laissa peu d'espérance au négociateur. Le ministre se flattoit de forcer tous les obstacles par une nouvelle déclaration de M. Hirn, qui confirmeroit celle du mois de novembre. On lira en effet de lui, le 1er. juillet 1813, un acte portant que tous les pouvoirs accordés précédemment par lui étoient nuls, et que rien ne devoit empêcher, de son côté, que son successeur, en attendant l'institution canonique, n'administrât le diocèse de Tournay, conformément aux règles établies pour la vacance des siéges. Cette pièce, dont on se promettoit un grand effet, fut envoyée au chapitre, dont elle augmenta les anxiétés. Deux chanoines allèrent à Mons représenter au préfet les inconvéniens de la marche qu'on paroissoit vouloir suivre. Ce voyage fut aussi inutile que celui de M. Gosse, à Gand, pour se concerter avec les grands vicaires de ce diocèse. Le 9 juillet, le chapitre reçut une lettre de M. de Saint-Médard, qui annonçoit son prochain départ de Paris, et qui arriva en effet le 16, et descendit à l'évêché. Le lendemain, lo chapitre en fut informé, et fut invité à se rendre, le 18, à l'évêché. M. de Saint-Médard dit qu'il apportois

la paix dans son coeur, et il demanda pourtant à concourir au gouvernement du diocèse en attendant ses bulles. M. Haze lui fit observer l'embarras du chapitre. La dé mission de M. Hirn étoit-elle bien libre? Elle n'étoit pas d'ailleurs acceptée par le saint Siége. Cet entretien, qui fut long, et qui se passa en présence du préfet, aboutit par demander un délai auquel l'évêque-nommé consentit.

Le 19, M, Haze proposa, dans le chapitre, de s'adresser aux curés et recteurs du diocèse, et de prendre leurs avis sur ces deux questions : D'après l'acte du er. juillet, doit-on établir des vicaires généraux pour administrer le diocèse? M. de Saint-Médard peut-il leur étre associé? Celui-ci agréa ce moyen, d'où on lui représenta qu'il devoit résulter plus d'uniformité et d'ensemble dans les sentimens et la conduité du clergé. Le 20, les lettres furent expédiées. Le 25, le chapitre enfendit le rapport d'un agent qu'on avoit envoyé à Fontainebleau pour tâcher d'en obtenir quelques règles de conduite. Il ne rapportoit aucune réponse. Les communications avec les cardinaux étoient difficiles, et ceux-ci étoient trop rigoureusement surveillés pour qu'on pût attendre d'eux des instructions bien précises.

Le 31, on reçut une lettre du ministre des cultes, qui se plaignoit des délais apportés par le chapitre, et qui les qualifioit de révolte. L'abbé de Saint-Médard, de son côté, pressoit vivement, et assigna le jeudi 5 pour tout délai. Le chapitre s'assembla tous les jours pour délibérer. Le 3, on convint de nommer grands vicaires MM. Gosse et Maton. Le premier proposa de donner å l'évêque-nommé le titre de grand vicaire ad honores, et sans pouvoir entrer dans l'administration spirituelle. Ce mezzo termine fut approuvé des chanoines; mais M. de Saint-Médard déclara ne pouvoir' s'en contenter, et parut peu touché de la crainte des troubles qu'on lui fit entrevoir. Cette réponse étant rapportée au chapitre, on ne nomma pour grands vicaires que MM. Gosse et

Maton, en se réservant de leur en adjoindre d'autres si le besoin l'exigeoit. On instruisit de cette délibération le ministre des cultes, le préfet et l'évêque-nommé; et aussitôt après, les chanoines, et particulièrement les grands vicaires, songèrent à leur sûreté. Les séminaristes se dispersèrent aussi. On s'attendoit à un orage; il éclata bientôt.

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Le 5 août, le préfet arriva à Tournay, et manda l'abbé Gosse, qui lui répondit, le lendemain, par écrit, et próposoit encore que M. de Saint-Médard se coutenlât du titre de grand vicaire, ou du moins se bornât à la correspondance avec le ministre, et aux objets civils et politiques. Le préfet manda également les autres chanoines; ils avoient disparu, à l'exception de MM. Hardenpont et Dedam. Le préfet irrité, prit coup sur coup, le 6 août, plusieurs arrêtés fort singuliers. Par le premier, il ordonnoit au maire de Tournay de prendre possession du temporel de la cathédrale, et J'apposer les scellés sur tout ce qui appartenoit à la fabrique. Par le second, il prescrivoit la même opération sur le séminaire, et mettoit en surveillance les supérieurs et les jeunes gens, qui ne pouvoient s'absenter sans permission. Par le troisième arrêté, il annulloit la délibération du 3 août, comme suspecte et irrégulière, défendoit à MM. Gosse et Maton de s'en prévaloir, et à qui que ce soit de les reconnoître comme grands vicaires. Suivant ces arrêtés, le diocèse de Tournay n'auroit eu aucune espèce de gouvernement, puisqu'on ne vou loit reconnoître ni les grands vicaires de l'evêque, ni ceux du chapitre, et que l'abbé de Saint-Médard n'avoit évidemment aucuns pouvoirs. On mit les scellés à toutes les portes du choeur de la cathédrale et à celles de la sacristie. Cependant celle mesure parut si ridicule, que, le lendemain, on leva les scellés, qui restèrent seulement apposés sur la caisse de la fabrique.

Le 22 août, le préfet revint à Tournay, manda M. Gosse, et lui fit de vifs reproches d'avoir pris part

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à la délibération du 3 acût. 1 lui présenta ensuite sept questions, auxquelles le grand vicaire devoit répondre par écrit: comment il avoit été nommé président du chapitre; s'il avoit accepté ce titre; où étoient les registres de la délibération; s'il déclaroit renoncer aux pouvoirs qu'il avoit reçus; s'il les avoit transmis à d'au tres, etc. M. Gosse répondit, le même jour, qu'il avoit d'abord refusé la présidence, en alléguant qu'il n'étoit point chauoine, et qu'il ne l'avoit acceptée que pour ramener le chapitre à des voies de conciliation; qu'il ne savoit où étoient les registres; que d'ailleurs il ne feroit usage de ses pouvoirs qu'avec l'agrément de M. de Saint-Médard, et qu'il ne les avoit transmis à personne. Cette excessive condescendance ne garantit pas l'abbé Gosse de toute traverse, comme nous le verrons bientôt. Cependant la police employoit tous ses soins à découvrir Ja retraite de M. Maton, l'autre grand vicaire, nommé le 5 août. On recherchoit tous ceux qui étoient soupconnés d'avoir des liaisons avec lui. MM. Ducobu et Duquesne, curés de Tournay, furent inquiétés, et disparurent. M. Lefèvre, curé d'Ath, et M. Lefranc, rec leur de Gaurain, accusés d'avoir donné asile à M. Maton, furent arrêtés et conduits dans les prisons de Mons, où ils moururent. Sur la fin du mois, on reçut un décret impérial, du 14 août, qui supprimait le séminaire, et ordonnoit que les élèves continueroient leurs études à Cambrai, à Arras et à Saint-Omer, et que les bourses et demi-bourses de Tournay seroient transportées à ces trois séminaires; ce qui fut exécuté. On vendit les pro'visions du séminaire de Tournay, et le produit en fut versé dans les caisses du gouvernement. Dans les premiers jours de septembre, le maire de Tournay vint trouver M. Gosse, et lui annonça qu'il étoit chargé de lui demander une déclaration signée, portant qu'il n'avoit aucun droit de présider et de voter à l'assemblée du 3 août; que son opinion étoit que les pouvoirs de vicaire capitulaire devoient être accordés à Tabbé de Saint

Médard, et que si celui-ci étoit nommé, il donneroit à tous les autres l'exemple d'une pleine et franche soumission. C'étoit le conseiller d'Etat, Réal, chargé de la police des départemens du Nord, qui avoit donné de lui-même cette commission au maire. Il ajoutoit dans ses dépêches que c'étoit le seul moyen de préserver M. Gosse d'être mis en prison; mais il ordonnoit que ce grand vicaire fût exilé à Arras ou à Cambrai, et y restât en surveillance jusqu'à ce que le chapitre eût donné des pouvoirs à l'abbé de Saint-Médard. M. Gosse, intimidé, signa la déclaration, excepté qu'il énonça que les pouvoirs réclamés par M. de Saint-Médard, pouvoient lui être accordés, au lieu de devoient. Il n'en fut pas mieux. On le priva de son traitement, et ou lui donna le choix de se retirer à Cambrai ou à Arras. Quelques-uns prétendirent que cet exil n'étoit qu'un jeu concerté entre la police et M. Gosse pour cacher leur concert. Une telle collusion est-elle vraisemblable? M. Gosse choisit Cambrai, et s'y rendit le 8 septembre; et l'évêque, sous la surveillance duquel il étoit mis, lui recommanda de s'abstenir de tout commerce par lettres.

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NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

ROME. Le 25 novembre, S. S. quitta le palais Quirinal, et vint habiter le Vatican. Le premier dimanche de l'Avent, elle y tint chapelle papale, et après la messe solennelle, elle porta le Saint-Sacrement dans la chapelle Pauline, où commencèrent les prières de quarante heures.

-Le college de Saint-Bonaventure, fondé par SixteQuint dans le couvent des XII Apôtres occupé par les Mineurs Conventuels, a toujours été une pépinière d'hommes qui se sont distingués par leur doctrine, et qui se sont élevés aux plus grands emplois. On y vit entr'autres pour régent et pour recteur, dans les derniers temps, le vénérable serviteur de Dieu, Antoine

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