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Les atteintes portées à la religion et à la morale ébranloient chaque jour le trône, qui perdoit insensiblement dans l'esprit du peuple cette puissance d'opinion que Louis XIV avoit su si habilement entretenir. Les autorités qui en émanoient déclinoient aussi en considération autant qu'en force, et essayoient en vain de se réhabiliter en faisant des sacrifices aux idées nouvelles. Les yeux étoient ouverts sur la cour, et aucune faute n'échappoit à l'attention de la mali gnité. Les dissipations étoient révélées, les désordres exagérés, le bien même malignement interprété. Chaque classe étoit jalouse de la classe supérieure; chacun censuroit ceux qui étoient élevés au-dessus de lui. Il y avoit partout malaise et mécontentement, La noblesse, dépouillée de son ancien lustre, avoit perdu, en se rapprochant des autres conditions, le prestige attaché à ce qui paroît dans l'éloignement. Elle cherchoit des alliances qui réparoient sa fortune, et diminuoient l'éclat et le respect dont elle étoit autrefois entourée. La finance, la bourgeoisie aspiroient à s'élever sur les ruines de la noblesse, et cette inquiétude s'étoit répandue jusque dans le peuple, qui appeloit un changement dans lequel il croyoit avoir tout à gagner. Ainsi tout étoit en fermentation, et la société étoit dans cet état d'agitation qui annonce et prépare les orages. Les factieux n'eurent plus qu'à mettre à profit ces élémens de discorde, et qu'à exploiter cette matière première dont l'abondance leur promettoit un plein succès.

Tel est à peu près le résumé de la première partie de l'Introduction de l'abbé Papon. Nous nous réservons de faire connoître plus amplement son histoire, qui se distingue du moins des autres histoires de la ré

volution par des réflexions justes et morales sur l'es prit de cette époque et sur les crimes qui l'ont souillée.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. L'ordination qui a eu lieu le samedi des QuatreTemps, à Saint-Sulpice, a été une des plus nombreuses que l'on eût vues depuis long-temps dans la capitale. On y comptoit plus de cent vingt ordinaus, parmi lesquels il y avoit vingt-quatre prêtres, autant de diacres et autaut de sous-diacres. Le reste étoit des minorés et des tonsurés. Il y en avoit dans ce nombre très-peu de Paris. La plupart étoient de diocèses étrangers. M. l'évêque d'Amyclée, premier aumônier de S. A. R. MONSIEUR, a fait la cérémonie, qui avoit attiré un assez grand nombre de spectateurs. En voyant réunis là de jeunes ecclésiastiques de plusieurs diocèses, on ne pouvoit s'empêcher de remarquer combien de siéges sont privés d'évêques. On peut aller de Paris à Poitiers sans trouver de siéges remplis; et la vacance d'Orléans, de Nantes, diocèses

Bourges, de Tours, de Poitiers et de 'Orléans, de

contigus, laisse, au centre du royaume, une étendue immense de pays sans évêques. Il en est de même à Pest, et depuis Strasbourg jusqu'à Valence, en passant par Besançon et Lyon, vous retrouvez la même lacune. Dans le midi, de vastes diocèses, Aix, Saint-Flour, Toulouse sont aussi sans pasteurs; ce qui, outre le défaut de surveillance épiscopale, et les autres inconvé niens attachés aux vacances, gêne beaucoup pour les ordinations, et oblige à des retards ou à des déplacemens également préjudiciables. Puisse l'église de France sortir promptement d'un état dont la prolongation seroit pour elle une calamité!

M. l'abbé Gallois de la Taur, nommé à l'é- . vêché de Moulins, qui avoit été chargé par sa Ma✨

jesté, en 1814, d'aller chercher à Trieste les dépouilles mortelles de Mmes. Adélaïde et Victoire de France, et qui les avoit fait transporter à Toulon, est parti pour achever cette triste, mais honorable mission. Il accompagnera les restes des deux Princesses jusqu'à SaintDenis, où elles seront rendues à la sépulture de leurs ancêtres. Cette cérémonie doit avoir lieu le 21 janvier prochain. On doit aussi retirer alors les ossemens qui avoient été entassés, en 1793, dans une fosse voisine de l'église de Saint-Denis, et les replacer avec honneur dans les caveaux de l'église. Cette dernière réparation des outrages faits à la cendre de nos Rois, coïncidera avec le service anniversaire pour Louis XVI (1).

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Il y a en, dimanche, grande réception chez le Ror, chez MADAME et chez les Princes. Les officiers des gardes Suisses, arrivés la veille, ont été présentés.

MONSIEUR, Comte d'Artois, accompagné des Princes ses fils, a passé, le 20 décembre, dans la plaine des Sablons, une revue de tous les eorps de la garde royale, infanterie, cavalerie et artillerie. Les généraux de division d'Ambrujeac et d'Orsay commandoient les manoeuvres sous les ordres de M. le maréchal duo de Raguse.

Les deux régimens suisses de la garde royale sont arrivés, le 21 décembre, venant de Corbeil. MONSIEUR, colonelgénéral des Suisses, est allé au-devant d'eux jusqu'à la barriere. S. A. R. étoit accompagnée d'un nombreux état-major. Elle a passé les deux régimens en revue, et s'est montrée satisfaite de leur bonne tenue.

(1) On vient de mettre sous presse, chez Ad. Le Clere, l'Oraison funèbre de Louis XVI, Roi de France et de Navarre, prononcée à Saint-Denis, le 21 janvier 1815, par M. de Boulogne, évêque de Troyes, prédicateur du Roi, en présence de LL. AA. RR. MONSIEUR, les Princes ses fils, etc. etc., et d'un très-grand concours de personnes d'un rang distingué. Ce discours sera mis en vente du 15 au 20 janvier prochain.

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-Mer, le duc d'Angoulême a reçu le conseil d'instruction et les professeurs de l'Ecole Polytechnique. S. A. R. leur a dit: « J'ai la confiance, Messieurs, qu'en apprenant aux élèves les sciences qui pourront les rendre les plus utiles à notre patrie, vous leur inculquerez les sentimens de religion sans lesquels il n'y point de morale dans un Etat, et ceux d'amour et de fidélité qu'ils doivent à un Roi, qui seul peut faire le bonheur de la France, et qui y travaille saus relâche. Pour moi, Messieurs, je suis heureux du choix qu'il a plu à S. M. de faire de moi pour protecteur de l'Ecole, et j'es père que vous me donnerez toujours lieu de m'en honorer » La députation a été aussi présentée aux Princes et à MADAME.

-S. A. R. M. le duc de Berry, passant dernièrement par Sarcelles et par Luzarche, a fait remettre une somme pour les pauvres de chacune de ces deux paroisses.

Mme, la duchesse d'Orléans a fait remettre 500 fr. pour les pauvres d'Ivry, près Paris.

-M. Artaud, secrétaire de légation à Rome, et qui doit passer à Vienne en la même qualité, est arrivé à Paris. Rien n'a transpiré des dépêches qu'il peut avoir apportées.

M. le ministre de la marine a ordonné de procéder au recrutement du corps royal d'artillerie de la marine,

Les Juifs de France ont fait publier un Mémoire, dans lequel ils demandent d'être réintégrés dans les droits de citoyen, dont ils furent dépouillés, sous Buonaparte,* par an décret rendu sur le plaintes qui s'élevoient contre eux en Alsace, où on les accusoit d'acquérir chaque jour plus de pouvoir et de richesses.

Le général Turreau de Linières est mort, le 15 décembre, dans sa terre de Conches, en Normandie. Il avoit commandé dans plusieurs armées depuis 1793, et fait la guerre en Espagne, en Suisse et en Italie. Il fut quelque temps ambassadeur aux Etats-Unis, et publia quelques écrits, dont un sur la guerre de la Vendée.

Jean-Philippe Garran de Coulon, avocat avant la révolution, député de Paris à l'assemblée législative, grand procurateur de la haute coúr séante à Orléans, membre de la convention et du conseil des cinq cents, sénateur, est mort

à l'âge de 68 ans. Un journal dit qu'il refusa de prononcer comme juge dans le procès de Louis XVI. Le fait n'est pas exact. Dans les différens appels nominaux de ce procès monstrueux, Garran de Coulon déclara le Roi coupable, admit la ratification du peuple et le sursis, et vota pour la réclusion comme mesure de sûreté générale. Il étoit, on ne sait à quel titre, membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, Un nommé Germain, qui s'étoit permis, dans une voiture publique, les propos les plus indécens et les plus séditieux, a été condamné à neuf mois de prison et 50 fr. d'amende.

-La cour d'assises de Dijon a, dans sa dernière session condamné aux travaux forcés à perpétuité, au carcan el à la marque, le colonel Chambure, chef du corps franc de la Côte-d'Or, accusé d'avoir volé sur la grande route, à la tête de son parti. L'avocat Marinet a été condamné à mort comme coupable d'avoir été un des agens les plus actifs de Buonaparte, et d'avoir distribué ses proclamations. L'un et l'autre

sont contumaces.

-Mme. Savary, duchesse de Rovigo, a fait distribuer un Mémoire, où l'on s'efforce de justifier son mari.

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L'armée russe ayant causé quelques dégâts dans l'arron→ dissement d'Avesnes, lors de ses dernières manœuvres, M. dė Worònzoff a fait estimer les dommages, qui ont été appréciés à la somme de 2775 fr., et cette somme a été remise aux parties intéressées.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Le 21 décembre, il y a eu un long comité secret dans lequel M. le lieutenant-général Ernouf a développé une proposition qu'il avoit faite précédemment relativement à l'état et à la législation de nos colonies. MM. les ministres de l'intérieur et de la marine étoient présens. La séance ayant été ensuite rendue publique, MM. d'Hautefeuille et Poy féré de Cere ont fait deux rapports sur différentes pétitions. Les héritiers de M. Gourand, de la Vendée, exposent qu'il paya, en 1793, le prix d'un domaine national qu'il avoit acheté; mais que les registres de la caisse furent brûlés à Montaigu, au

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